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L’inuline pour prévenir l’athérosclérose

  • Pourrait-on prévenir l’athérosclérose en consommant davantage de fibres ?
  • C’est en tout cas ce que suggère une étude menée par les chercheurs de l’INRA de Clermont-Ferrand.
  • Explication avec les auteurs de l’étude, Marie-Hélène Rault-Nania et Andrzej Mazur.

    L’étude

    Les chercheurs ont voulu connaître les effets de certaines fibres particulières sur le développement de l’athérosclérose. Ils ont donc étudié des souris qui ont la particularité de développer de l’athérosclérose et leur ont donné un régime alimentaire enrichi en différents types de fibres. Un groupe a reçu de l’inuline provenant de la chicorée (chaînes longues de fructanes), un autre groupe a reçu de l’oligofructose (chaînes courtes) et enfin le dernier groupe a reçu un mélange de ces deux composés. Les chercheurs ont ensuite comparé l’évolution de l’athérosclérose chez ces souris avec un groupe de souris témoin n’ayant pas reçu de suppléments de ces glucides complexes dans leur régime alimentaire.


    Les résultats

    Chez les souris qui ont reçu de l’inuline, les lésions de l’athérosclérose sont de 35% moins importantes que chez les souris témoins. Pour le groupe qui a reçu un mélange d’inuline et d’oligofructose ces lésions sont de 25 % moins importantes. Ces résultats suggèrent que l’inuline pourrait contribuer à inhiber la formation des plaques d’athérome et contribuer ainsi à prévenir l’apparition de cette maladie cardiovasculaire.


    L’entretien


    Comment avez-vous eu l’idée de tester l’efficacité de ces fibres pour la prévention de l’athérosclérose ?

    Marie-Hélène Rault-Nania et Andrzej Mazur : On sait que notre régime alimentaire moderne riche en calories, en lipides et en sucres simples favorise l’apparition de nombreuses maladies métaboliques et de l’athérosclérose. On savait également que les fibres alimentaires pouvaient jouer un rôle protecteur contre le stress métabolique. Nous avons donc voulu savoir d’une part si ces fibres pouvaient être utiles dans la prévention de l’athérosclérose en particulier, d’autre part si l’efficacité de cette prévention pouvait être fonction de la longueur de la chaîne de ces glucides complexes.

    Que sont ces fibres exactement ?

    Ce sont des chaînes de fructose. En fonction du nombre de molécules de fructoses présentes et donc de la longueur de la chaîne, on distingue plusieurs types de ces glucides complexes. L’inuline est un polymère de fructose à longue chaîne, c’est-à-dire qu’elle contient en moyenne 25 molécules de fructose alors que l’oligofructose en contient en moyenne 4 ..

    Comment avez-vous procédé pour déterminer l’efficacité de ces différents types de fibres dans la prévention de l’athérosclérose ?

    Nous avons utilisé des souris déficientes en apolipoprotéine E, une protéine de transport du cholestérol. Comme ces souris ne possèdent pas cette protéine, le cholestérol reste dans la circulation sanguine et finit par se déposer dans les parois des artères, et notamment de l’aorte, formant ainsi les plaques d’athérome caractéristiques de l’athérosclérose. Nous avons nourri ces animaux avec un régime témoin ou des régimes enrichis en inuline, en oligofructose ou un mélange des deux pendant 16 semaines, puis nous avons prélevé l’aorte des animaux afin d’examiner l’étendu des lésions de l’athérosclérose (dépôt de lipides dans l’aorte). En parallèle nous avons mesuré chez ces souris les taux de cholestérol et de triglycérides dans le plasma.

    Avez-vous montré une efficacité des fibres dans la prévention de l’athérosclérose ?

    Oui, si on regarde l’étendue des lésions on remarque que les souris qui ont reçu de l’inuline présentent 35% de lésions en moins que le groupe qui n’a pas reçu de fibres du tout. Pour les animaux qui ont reçu un mélange d’inuline et d’oligofructose c’est 25% de lésions en moins. Par ailleurs les taux de cholestérol étaient inférieurs chez les souris qui ont reçu de l’inuline.

    Cela signifie que ces fibres peuvent prévenir l’athérosclérose. Ce sont surtout celles à longue chaîne, comme l’inuline, qui sont les plus efficaces.

    Avez-vous une idée du mode d’action de ces fibres pour prévenir l’athérosclérose ?

    On suppose que les effets de ces fibres sont liés à leur action sur le métabolisme des lipides. L’inuline modifie le métabolisme du cholestérol et préviendrait ainsi son dépôt dans les artères et donc la survenue de l’athérosclérose. Mais ce n’est peut-être pas le seul mécanisme mis en jeu…

    Sur la base de cette étude peut-on recommander aux gens de consommer de l’inuline ?

    C’est trop tôt pour prôner ce genre d’application concrète. En revanche les bienfaits sur la santé d’un régime riche en fibre ne sont plus à démontrer et il est surtout recommandé de consommer davantage de fruits et légumes. On trouve surtout l’inuline dans la chicorée mais aussi dans les bananes, les oignons, les poireaux, les betteraves….

    En ce qui concerne ces glucides complexes de type fructanes ils sont de plus en plus utilisés comme additifs par les industriels. L’oligofructose est ajouté à certains produits pour son pouvoir sucrant principalement, et l’inuline essentiellement pour améliorer la texture des aliments ou afin de remplacer les graisses. Si l’on considère que les bénéfices santé de ces glucides complexes à chaînes longues sont plus importants que les chaînes courtes, cela pourrait encourager les industriels à les utiliser en priorité.


    Modifier la flore intestinale pour réduire les allergies alimentaires

    Il paraît possible de réduire des allergies alimentaires en modifiant la flore intestinale grâce aux prébiotiques et probiotiques.


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    Les allergies représentent un mal moderne et croissant dans nos sociétés, mais comment les prévenir ? D’après des chercheurs de l’INRA de Nantes qui publient leurs résultats dans la revue Allergy, l’ingestion de prébiotiques pendant la grossesse et l’allaitement pourrait aider à prévenir les allergies alimentaires des jeunes enfants.

    Les prébiotiques sont des sucres impossibles à digérer qui favorisent la croissance des bactéries de l’intestin ; ils peuvent donc modifier la composition de la flore intestinale, qui fait partie du microbiote et joue un rôle important dans l’immunité et le contrôle des allergies. D’où l’idée de modifier la flore intestinale pour prévenir les allergies. Une première solution pourrait être de consommer des probiotiques, qui contiennent des souches vivantes de bactéries, une hypothèse testée par ailleurs.

     

    Mais ici, les chercheurs ont testé une autre stratégie : l'utilisation de prébiotiques pour prévenir des allergies alimentaires. Pour cela, ils ont administré à des souris en gestation un complément en sucres contenant des galacto-oligosaccharides et de l’inuline. Ils ont poursuivi cette complémentation pendant l’allaitement. Trois semaines après le sevrage, les petits ont été exposés à des protéines de blé allergisantes, par voie intrapéritonéale et orale.

     

    Résultats : le mélange de prébiotiques a modifié la flore intestinale des mères et des souriceaux. Les souriceaux dont les mères avaient eu des prébiotiques réagissaient moins que les autres aux allergènes, comme l’explique Antoine Magnan, auteur de ces travaux : « L’ajout de prébiotiques a donc considérablement réduit la sévérité des allergies. »

    Ces souriceaux avaient moins d’IgE et d’histamine que les autres. La complémentation en prébiotiques a également diminué la perméabilité intestinale des petits. L’équilibre entre lymphocytes Th1 et Th2 était modifié.

    Pour Antoine Magnan, « L’évolution de nos modes de vie a modifié en profondeur notre rapport global aux microbes -alimentation pasteurisée, hygiène importante, enfants très protégés...- de sorte que notre microbiote, c’est-à-dire l’ensemble des bactéries qui colonisent notre corps (nos intestins, notre peau...) a également évolué. Et cette évolution s’est accompagnée d’une recrudescence des cas d’allergies depuis la fin du 20e siècle. Aujourd’hui, 8 % des enfants et 2 % des adultes présentent des allergies alimentaires. Cette progression s’explique par une baisse de la capacité du système immunitaire à tolérer des aliments théoriquement inoffensifs. En intervenant sur la composition du microbiote, nous aimerions corriger cela. »

    L’exposition maternelle à un mélange de prébiotiques préviendrait donc des allergies alimentaires chez la souris. Les chercheurs envisagent de renouveler l’expérience chez l’homme, mais cette fois pour prévenir la dermatite atopique. Ils ont déposé une demande de projet hospitalier de recherche clinique en ce sens. Ce nouveau projet  qui démarrerait en 2016 concernerait 500 à 1.000 femmes qui présentent un risque de transmettre une allergie à leur enfant.

    A lire aussi : Paléobiotique, de Marion Kaplan, sur les moyens de favoriser le microbiote, et Allergies, les solutions naturelles, de Brigitte Karleskind
    http://www.lanutrition.fr/bien-comprendre/les-nutriments/fibres-et-prebiotiques/modifier-la-flore-intestinale-pour-reduire-les-allergies-alimentaires.html

    Source

    Bouchaud G, Castan L, Chesné J, Braza F, Aubert P, Neunlist M, Magnan A, Bodinier M. Maternal exposure to GOS/inulin mixture prevents food allergies and promotes tolerance in offspring in mice. Allergy. 2015 Oct 1. doi: 10.1111/all.12777.