Pourquoi veut-on nous faire croire que la déflation est le mal absolu ? (Ph. Herlin)
de Simone Wapler, qui souligne avec raison que l’inflation fait le bonheur des banques et de l’industrie financière en général. Politiciens, banquiers, financiers – toujours cette même connivence de l’oligarchie au pouvoir. Ne cherchez pas plus loin l’origine de ce battage médiatique "pro-inflation". Pourquoi la majorité des économistes soutiennent-ils qu’une “petite inflation” est bonne pour l’économie et par conséquent pour nous alors que c’est l’inverse ? Nous avons régulièrement droit à des apologies de l’inflation et des pamphlets contre la déflation.
Olivier Blanchard, chef économiste du Fonds monétaire international sur la déflation au Portugal et en Espagne, le 10 mars 2014 :
“D’un côté, cela améliorerait sans doute leur compétitivité et soutiendrait les exportations, de l’autre, cela augmenterait le taux d’intérêt réel et la valeur réelle de la dette et réduirait ainsi la demande intérieure“.
Le capitalisme honnête conduit à la déflation. Il a pour but de produire plus et mieux avec moins d’effort. En 1880, il fallait 1 800 heures de travail à un être humain pour produire sa ration annuelle de nourriture. Aujourd’hui 270 heures suffisent. Avant 1900, une automobile était un luxe extraordinaire, le privilège de très grands bourgeois et d’aristocrates fortunés. Aujourd’hui, un étudiant peut s’acheter un véhicule d’occasion en bon état grâce à ses petits boulots.
Ces extraordinaires avancées ont pu se produire en investissant dans des “biens de capitaux” : des moissonneuses-batteuses, des chaînes de production. Il s’agit d’une lente accumulation au fil du temps d’investissements toujours plus lourds, toujours plus complexes. Le capitalisme conduit à une baisse des prix. La déflation n’est pas un malheur, c’est un progrès.
"Au fait, pourquoi la déflation serait-elle une horreur intégrale ? Les journalistes, les économistes, les politiques, les présidents de banque centrale nous mettent tous en garde contre une baisse généralisée et durable des prix, ce serait l’apocalypse expliquent-ils. Cette unanimité est troublante, méfions-nous. Pourtant quand les prix baissent c’est sympa, on peut acheter plus ! Le prix des écrans plats baisse, ainsi que celui du matériel électronique en général, par moment le prix de l’essence reflue, et le ralentissement des pays émergents devrait calmer les cours des matières premières, faut-il s’en plaindre ? Pourquoi le consommateur devrait-il craindre une baisse des prix ?
Si, tout de même, il y a bien quelqu’un qui est angoissé par la baisse généralisée des prix : celui qui est très endetté. Sa dette, en effet, voit son poids relatif augmenter au fur et à mesure que les prix baissent, sa valeur nominale ne bouge pas mais elle devient proportionnellement plus lourde quand partout autour les prix refluent. Pour un surendetté, un recul prolongé des prix signe son arrêt de mort. Et qui est concerné ? Les pays industrialisés, les Etats-Unis, l’Europe et le Japon. Voici la véritable raison, les Etats surendettés. Ensuite ils "vendent" cette peur à tout le monde pour masquer le fait qu’ils en sont les seuls à en payer le prix.
On voit ensuite courir sur les plateaux de télévision des économistes qui nous expliquent que la baisse des prix entraîne automatiquement une récession, une chute du PIB. Pourquoi ? Parce que les consommateurs reportent leurs achats en attendant que les prix baissent encore… La bonne blague. Ces économistes possèdent donc la capacité de se retenir de s’alimenter, de s’éclairer, de se chauffer, de se déplacer pendant plusieurs mois de façon à bénéficier de la baisse des prix ? On applaudit la performance mais elle ne nous semble pas à la portée du commun des mortels.
Et pour les biens non nécessaires, comme les écrans plats par exemple ? Les premiers étaient effectivement très chers, mais les consommateurs s’en sont-ils détournés dans l’attente de prix plus raisonnables ? Nullement, au départ ceux qui bénéficiaient de revenus élevés s’en sont achetés, puis les prix ont baissés, élargissant ensuite le public potentiel, et ainsi de suite jusqu’à aujourd’hui où ils sont à la portée d’à peu près tout le monde. Ce que l’on décrit là n’est rien d’autre que le processus de toutes les innovations technologiques, chères lors de leur lancement puis bon marché ensuite. Cette histoire de report des achats est une fable.
La monnaie-papier nous a habitués à l’inflation, mais comme Ron Paul le fait remarquer, durant l’étalon-or, aux Etats-Unis, les prix de gros ont chuté de 47% de 1879 à 1900 alors que la croissance économique moyenne atteignait près de 4% par an, preuve qu’il n’y a rien d’antinomique entre les deux. Mais, c’est vrai, à l’époque les gains de productivité n’étaient pas annulés par l’inflation provenant d’une création monétaire ex nihilo.
Ce n’est pas la déflation qui provoque la récession, c’est le contraire. Nos pays, en Europe, au Japon, et dans une moindre mesure aux Etats-Unis, ont perdu les clés de la croissance et la thrombose de nos économies se manifeste, entre autres, par une désinflation, puis une possible déflation. Les causes en sont multiples mais la principale est le poids démesuré du secteur public qui étouffe les entreprises. Et que comptent faire les Etats pour lutter contre la déflation ? Encore plus de planche à billets et de taux zéro, c’est-à-dire toujours plus de facilité pour financer leurs déficits et leur dette, et donc s’épargner toute remise en question. Ne tombons pas dans ce piège grossier".
Philippe Herlin, Goldbroker.com, http://olivierdemeulenaere.wordpress.com/2014/04/05/pourquoi-veut-on-nous-faire-croire-que-la-deflation-est-le-mal-absolu-ph-herlin/