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rusty james news
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  • Dans la tradition secrète, le corps humain est considéré comme le symbole ultime de l'univers. Chaque partie du corps correspond à un idéal spirituel, une constellation étoilée ou un élément alchimique. De cette manière, les anciens philosophes se connectaient directement à toutes les choses, et par cette connexion, ils pouvaient influencer le monde qui les entourait, rusty james blog
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Archives
esoterisme
8 octobre 2015

Une adolescente péruvienne prétend qu’elle a été possédée par le diable après avoir joué à Ouija sur ton téléphone

lightcame

, rapporte le Daily Mail.

Des images saisissantes filmées à un hôpital local montrent Patricia Quispe de Chosica, au Pérou, en pleines convulsions pendant qu’elle crie «666» et «laisse-moi partir, laisse-moi partir».

Des amis de l’ado ont affirmé qu’elle leur a mentionné avoir téléchargé une application Ouija pendant le week-end pour s’amuser et tenter de communiquer avec le monde des esprits.

Lorsqu’ils sont revenus à la maison, les parents de Patricia ont remarqué qu’elle semblait malade et ont finalement appelé une ambulance lorsqu’elle s’est mise à avoir des convulsions et de l’écume à la bouche.

Les amis de Patricia ont dit que sa personnalité a commencé à changer et qu’elle parlait avec une voix différente au moment où elle a perdu le contrôle de son corps et s’est mise à appeler le diable.

Des infirmiers ont confirmé que la jeune femme semblait être extrêmement forte et qu’il était difficile de la contrôler, et ont affirmé avoir travaillé pendant plus d’une demi-heure avant de réussir à la maîtriser.

Mme Quispe a été envoyée dans une aile psychiatrique pendant que des docteurs évaluent sa condition et tentent de déterminer la cause de son comportement étrange.

preuve que la technologie peut servir a déplacer et véhiculer des énergies de basses frequences en creant des brèches dans votre aurra qui sera exploiter pare toute entités qui sera appellée dans le cas present la ouija appelle les demons et là c'est très dangereux .

petit rappel le mal n'ayant pas le pouvoir de vous obliger a pécher seulement a vous suggerer de faire telle ou telle chose une fois que vous creez cette bréche vous venez juste de l'inviter et le piège se referme sur vous hélas . rjames

 

Peru teen possessed and screaming for the Devil after Ouija App

http://www.journaldemontreal.com/2015/10/06/une-ado-possedee-par-le-diable-apres-avoir-joue-a-ouija-sur-son-telephone

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17 septembre 2015

Occultisme ,Magie et technologie de pointe

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J.L. : Vous étiez dans la Navy ? On dit que c’est là qu’on forme les meilleurs…

KEVIN : No comment. Je ne peux rien vous dire. Si l’on vous fait parler, vous n’aurez rien à déclarer. (rires) Vous n’aurez qu’à inventer une histoire d’extraterrestres si l’on vous torture…hum… je ne sais pas si vous appréciez mon humour de soldat?

Anyway. Mon penchant pour l’ésotérisme et ma curiosité m’ont permis de découvrir des choses que ni les spiritualistes ni les scientistes ne peuvent imaginer. Il faut à la fois de l’intuition mystique et de la logique si l’on veut se repérer dans ce…hum…merdier.

Sans qu’on me dise clairement à quoi servaient certaines de nos activités spéciales, j’ai fini par découvrir en m’informant auprès d’ingénieurs de l’armée, que des laboratoires secrets se livraient à des expériences sur des êtres du monde invisible.

Vous avez entendu parler de ces choses ? Ok.

Je ne travaillais pas directement sur ce projet, mais j’ai obtenu des informations classées secret défense auxquelles aucun militaire de ma catégorie ne pouvait avoir accès. De fil en aiguille, j’ai remonté la filière, sans me faire remarquer, et j’ai découvert un fait incroyable : des laboratoires – on ne sait pas qui les dirige ni d’où vient l’argent – ont élaboré une technologie pour contrôler des créatures invisibles : élémentaux, désincarnés, esprits d’anciennes civilisations, ou bien ces créatures ectoplasmiques, les êtres de lumière du new age.

Vous comprenez ? J’essaie d’utiliser la terminologie conventionnelle.

Au début, en découvrant ces recherches, j’ai trouvé cela amusant, et finalement assez puéril de la part de la plus grande puissance du monde. Avons-nous besoin d’entités invisibles pour espionner les islamistes ou les chinois ? Voulons-nous envoûter nos ennemis ? Allons-nous envoyer des esprits désincarnés sur Jupiter ? Créer une race d’esclaves invisibles ?

En y réfléchissant, ces hypothèses qui me semblaient saugrenues, commencèrent à prendre du sens. Si la technologie permet de contrôler les êtres d’un plan immatériel, il y aurait de multiples applications possibles. Encore fallait-il y croire, ce que mes collègues formatés ne pouvaient admettre.

Mais je savais que cela existait, puisque j’avais travaillé à recueillir des données pour alimenter ces recherches, et je tentai de découvrir à quoi cela finirait par aboutir. Là où je me trompais, c’est que cela avait déjà abouti expérimentalement, car la science officielle a un demi siècle de retard sur les recherches secrètes.

Je ne vous parlerai pas en ingénieur, car je ne suis pas un technicien.

J’ai appris à comprendre le fonctionnement des systèmes de manipulation de la conscience, comme par exemple les armes à ondes courtes, cette technologie qui peut semer l’euphorie ou la dépression sur une population ciblée, et dont les fréquences pourraient également affecter des entités non physiques.

C’est assez nouveau, n’est-ce pas ?

J.L. : J’ai publié un article relatant l’enregistrement par les services secrets britanniques de la voix de désincarnés. C’était avant la dernière guerre mondiale. Comme toujours, les anglais avaient de l’avance. Certains chercheurs américains ont vaguement évoqué ces systèmes de contrôle d’entités invisibles ou d’esprits désincarnés. Il s’agit d’une technologie qui allie les ondes émises par des appareils avec les messages télépathiques du cerveau organique.

KEVIN : That’s right.

Nous avons des bases secrètes où l’on manipule des entités qui appartenaient à l’univers des sorcières ou à la superstition religieuse.

Il existe des bases spécialisées dans la région arctique et dans d’autres secteurs, mais celles proches du pôle nord ont une fonction de balayage planétaire plus intense. Toujours le Pôle Nord !

On y a installé des appareils qui permettent d’interférer dans les télécommunications, comme par exemple, la possibilité d’émettre des messages simultanément dans les circuits télévisuels du monde entier via le relais de satellites. Cela servira pour le jour J dont nous reparlerons dans un moment.

Les gens ne peuvent imaginer ces choses. Le moment venu, le monde sera halluciné par le bouquet final, mais à vrai dire, le public n’y verra que du feu. Vous savez, l’être humain est comme un enfant, il ne cherche pas à savoir ce qu’on fait dans son dos. Il ne cherche pas à se défendre. Il est obéissant et résigné. Il ne cherche même pas l’origine ou la finalité de sa propre existence. C’est étrange n’est-ce pas ?

L’homme a reçu un implant d’indifférence et de soumission. Il a été manipulé pour rester apathique quoiqu’il endure, comme sous l’emprise d’une narcose qui étouffe la conscience des plus intelligents.

J.L. : Tout à fait. Il est donc possible que des laboratoires secrets puissent émettre des ondes et des impulsions qui influencent les êtres…disons, sur le plan astral, la dimension invisible au dessus du plan matériel ?

KEVIN : Right. Mais nous y reviendrons.

Je voulais simplement vous préciser comment j’en suis venu à m’intéresser à l’occultisme, et pourquoi j’ai fait le lien entre magie et technologie de pointe. La magie est désormais une technologie qui utilise des machines.

Well.

Ce qui est important c’est de comprendre qu’il n’y a pas de séparation entre la dimension physique et invisible – le plan astral, comme vous dites. Je précise que les anglo-saxons confondent éthérique et astral, but anyway.

L’être humain dispose d’une enveloppe d’énergie subtile, le corps astral par lequel il est immergé, inconsciemment, dans cette dimension subtile. Nous vivons dans l’astral.

Votre corps physique est plongé dans le monde matériel et votre conscience est normalement attachée au corps mais elle peut glisser vers la conscience astrale. Vous connaissez ces choses, mais je récapitule.

Donc, il est faux de penser que le monde astral, et les dimensions éthériques, mentales, causales, etc – selon la terminologie ésotérique admise – seraient des domaines divins comme les spiritualistes le croient naïvement.

C’était la croyance des animistes sur laquelle sont fondées les religions et l’occultisme vulgaire. On croit naïvement que Dieu et les anges vivent dans l’au-delà. Mais l’au-delà n’est qu’un miroir.

Les puissances éternelles – qui sont des champs électromagnétiques de très haute vibration – sont sur d’autres dimensions, inviolables et pures. Rien à voir avec l’au-delà.

Le monde divin est hors de portée des hiérarchies inférieures, aussi éthérées soient-elles. C’est l’ABC de la connaissance ésotérique, mais qui le sait et qui l’enseigne ?

En fait, le monde de l’au-delà – avec ses paradis et ses enfers – est le miroir de notre monde visible rempli de merveilles et d’horreurs. Les plans invisibles les plus élevés de l’au-delà demeurent hors d’atteinte aux investigateurs clairvoyants.

C’est dans ces régions dites  » célestes  » qu’on trouve les systèmes de contrôle du système solaire et les éons (gouvernants) des peuples et des religions.

Comme ici-bas, il y en a des bons et des moins bons.

Sur les plans intermédiaires, il y a les prédateurs organisés en fraternités, en réalité des syndicats du crime et du racket de l’énergie humaine. C’est une mafia cosmique.

Vous en avez déjà parlé dans votre revue ? Ok.

Vous avez dénoncé les mystifications du new age qui plonge les gens dans l’illusion astrale. C’est bien vu. Je voulais remettre en mémoire ces données pour introduire la suite. Ok ?

J.L. : Nous sommes d’accord. J’ai voulu montrer que le monde invisible n’est pas le monde divin. La plupart des gens ignorent ce fait, et les petits maîtres et gourous n’en touchent pas mot. La mafia invisible est bien entendu encore plus secrète que la mafia terrestre. La plupart des occultistes n’osent pas soulever le voile, quant aux médiums, ils sont immergés dans l’illusion astrale et ils servent de rabatteurs aux pirates de l’invisible. Le cloisonnement dont vous parlez entretient l’ignorance à tous les niveaux.

A vrai dire, j’ai peu de retour sur cette question, et j’imagine que ces clarifications passent au dessus de la tête des gens. Ils prient, méditent, et pratiquent des méthodes spirituelles sans trop s’occuper de ce qu’il y a derrière. Un être humain désire se sentir bien, et s’il y arrive plus ou moins, n’essayez pas de le faire redescendre de son tapis volant. Il criera au viol. Les gens veulent rêver, et ils trouvent moins de joie dans la vérité que dans les évasions spirituelles agréables. Je ne juge pas, c’est la vie. La vie est un rêve.

KEVIN : C’est la vie, monsieur (en français). L’apathie des humains est un problème crucial qui se pose à la fraternité qui lutte pour reprendre le contrôle des affaires planétaires. Mais nous y reviendrons, ok ?

Il faudrait éveiller un nombre suffisant de personnes pour rétablir un équilibre car les éons sont en train d’inonder le monde avec de fausses révélations, non dénuées de valeur, mais trompeuses parce qu’elles sont négatives pour l’ouverture de la conscience dans l’ère où nous sommes..

Les révélations pseudo spirituelles agissent comme des implants qui bloquent la découverte de la vérité supérieure.

Nous pensons que les révélations transmises par la clairvoyance inférieure, médiumnité et channeling, sont issues d’une manipulation technico-magique. Les entités qui délivrent leurs messages aux channels sont dirigées par des opérateurs qui n’ont rien de spirituel. Ce sont des ingénieurs de l’occulte.

Il faut s’attendre à un subversion totale de la conscience. C’est l’abomination, si vous voyez ce que cela veut dire.

Comment un être humain qui ne connaît pas les lois du monde invisible ni la technologie secrète, pourrait-il imaginer qu’on se moque de lui quand on lui promet  » la paix, l’amour, et une évolution spirituelle  » dans une pochette-surprise ?

A cause du conditionnement religieux infantilisant, qui est le même chez tous les peuples, un être humain n’est pas préparé à démasquer l’imposture d’un phénomène provenant de l’invisible. Par l’image ou par le son, il sera leurré, car toute manifestation subtile lui paraît spirituelle, sacrée ou divine.

Il se ferait pendre plutôt que d’avouer qu’il est sous une emprise occulte durant ses moments d’exaltation. Cela est valable dès que l’on s’assoit pour méditer ou pour prier. On ne se doute pas que notre immobilité et l’élévation momentanée de notre niveau vibratoire attire des curieux indésirables. Ils nous observent alors que nous sommes incapables de discerner leur présence.

Ils étudient nos failles, analysent nos pensées et nos désirs comme sur un écran, et lorsque cela est possible, certaines entités circulent à travers notre aura et lui impriment leur sceau.

Habituellement, les choses en restent là, mais si nous forçons notre système énergétique par des techniques spirituelles, l’ouverture anormale des chakras et leur rotation accélérée peut aspirer des forces nuisibles. Le semblable attire le semblable, et celui qui n’a pas effectué les protocoles de la purification spirituelle, risque de sérieux désagréments.

Curieusement, ces anomalies sont considérées comme des dons et des pouvoirs, et les victimes sont présentées comme des êtres évolués. C’est pourquoi nombre d’illuminés, envoûtés par des entités astrales ont témoigné avoir rencontré Dieu, le Christ, la Vierge, Krishna, Bouddha ou un  » maître de la grande loge blanche « .

Aujourd’hui, les ingénieurs-occultistes ont créé de nouveaux produits qui synthétisent les apparitions divines traditionnelles avec des images fantaisistes d’extraterrestres. Avez-vous vu le portrait du commandant Ashtar, une sorte de  » maître ascensionné  » encore plus ridicule que les autres. Il est auréolé de l’inévitable lumière astrale, et porte un uniforme chamarré avec fourragère, médailles ainsi que la casquette d’officier d’une flotte de vaisseaux intergalactique. C’est une farce grossière. Il faut être freaky (dingue) pour y accorder du crédit. This is all bullshit. (c’est de la connerie) The New age business is bullshit !

Joel Labruyère

8 septembre 2015

Les ombres noires – Carlos Castenada

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(…) L’obscurité s’était installée très rapidement, et le feuillage des arbres qui, un instant plus tôt, était d’un vert éclatant,

paraissait à présent beaucoup plus sombre et dense. Don Juan me dit que si je regardais avec une grande attention la

couleur foncée du feuillage, sans focaliser mes yeux et avec une sorte de regard en coin, je verrais une ombre fugitive traverser

mon champ de vision.

" C’est le meilleur moment de la journée pour faire ce que je te demande. Il va te falloir un moment pour trouver en toi le degré d’attention nécessaire. Ne t’arrête pas avant d’avoir entrevu cette ombre noire. "
Je vis effectivement se profiler une étrange ombre noire sur le feuillage des arbres, une ombre qui partait et revenait,

puis diverses ombres évanescentes se déplaçant de droite à gauche, de gauche à droite, ou s’élevant très haut en l’air.

On aurait dit de gros poissons noirs, de gigantesques espadons volants. J’étais complètement absorbé par cette vision qui finit

par m’effrayer. Il faisait désormais trop sombre pour voir le feuillage, mais je distinguais toujours ces ombres noires fugitives.

" Qu’est-ce que c’est, don Juan ? Je vois des ombres noires s’agiter partout.
– C’est l’univers à l’état naturel, me répondit-il, l’univers incommensurable, non linéaire, délivré du joug de notre

syntaxe.

Les sorciers mexicains d’autrefois furent les premiers à voir ces ombres et ils les suivirent partout.

Ils les voyaient comme tu les vois, et ils les voyaient également sous forme d’énergie circulant dans l’univers.

Et ils ont alors fait une incroyable découverte. "
Il se tut et me regarda. Ses pauses étaient toujours très étudiées et il savait me tenir en haleine.

 

" Qu’ont-ils découverts, don Juan ?
– Ils ont découvert que nous ne sommes pas seuls, me dit-il aussi clairement qu’il le put.

Venu des profondeurs du cosmos, un prédateur est là, qui toute notre vie nous maintient sous son emprise.

Les êtres humains sont prisonniers et ce prédateurs est notre seigneur et maître.

Il étouffe toute velléité de protestation ou d’indépendance et nous empêche d’agir librement. "

L’obscurité alentour semblait réduire ma faculté d’expression. S’il avait fait jour, j’aurais éclaté de rire, mais en pleine nuit, je me sentais comme muselé, paralysé.

" Il fait nuit noire, me dit don Juan, mais si tu regardes du coin de l’œil, tu vas continuer à voir ces ombres fugitives aller et venir autour de nous. "
Il avait raison. Je pouvais toujours les voir et leurs mouvements me donnaient le tournis. Don Juan alluma la lumière, ce qui eut pour effet de tout dissiper.

 

" Te voilà arrivé, grâce à tes seuls efforts, à ce qui était pour les anciens chamans le " cœur du sujet ". Je tourne autour du pot depuis longtemps en te laissant entendre que quelque chose nous retient prisonniers. Nous sommes effectivement tous prisonniers ! C’était un fait énergétique pour les sorciers d’autrefois.

 

– Pourquoi ce prédateur exerce-t-il ce pouvoir sur nous comme vous le dites, don Juan ? Il doit y avoir une explication logique !

 

– Il y a une explication, me répondit don Juan, qui est extrêmement simple. Ils nous tiennent sous leur emprise parce que nous sommes leur source de subsistance.

Ils ont besoin de nous pour se nourrir, et c’est pour cela qu’ils nous pressurent implacablement.

Exactement comme nous qui élevons des poulets pour les manger, ils nous élèvent dans des " poulaillers " humains pour ne jamais manquer de nourriture. "

 

Je me sentir secouer négativement la tête. Je ne pouvais exprimer mon violent sentiment de malaise et de révolte,

et mon corps s’agitait pour le faire remonter à la surface. Je tremblais de la tête aux pieds sans pouvoir me contrôler.

 

" Non, non, non, m’entendis-je dire. C’est absurde, don Juan ! Ce que vous dites est horrible.

Cela ne peut tout simplement pas être vrai, ni pour les sorciers, ni pour des gens normaux, ni pour personne.

 

– Et pourquoi ? me répondit calmement don Juan. Pourquoi donc ? Parce que cela te met en fureur ?
– Oui, cela me met en fureur, répliquai-je. Ce sont des idées monstrueuses !
– Eh bien, je ne t’ai pas encore tout dit. Ecoute-moi jusqu’au bout et on verra comment tu te sens.

Attention, je vais t’infliger un choc !

Ton esprit va subir de terribles attaques, et tu ne pourras pas fuir, parce que tu es pris au piège ;

non parce que je te retiens prisonnier, mais parce que quelque chose en toi t’empêchera de partir,

même si cela te rend fou de rage. Alors, rassemble tes forces ! "

 

Don Juan avait raison. Je ne serais pas parti de chez lui pour un empire, et pourtant j’abominais toutes les idioties

qu’il était en train de me débiter.

" Je vais faire appel à ton esprit analytique, me dit don Juan. Réfléchis un moment, et dis-moi comment tu peux expliquer

la contradiction entre, d’une part, l’intelligence de l’homme sur le plan scientifique et technique et, d’autre part,

la stupidité de ses systèmes de croyances ou l’incohérence de son comportement.

Ce sont les prédateurs, disent les sorciers, qui nous ont imposé nos systèmes de croyance, nos idées sur le bien

et le mal, nos mœurs sociales.

Ce sont eux qui suscitent nos espoirs et nos attentes, nos rêves de succès ou notre peur de l’échec, eux encore qui

insufflent dans notre esprit convoitise, avidité et lâcheté et qui le rendent prétentieux, routinier et égocentrique.

 

– Mais comment s’y prennent-ils, don Juan ? lui demandai-je, de plus en plus irrité par ses paroles.

Ils nous chuchotent tout cela dans le creux de l’oreille pendant notre sommeil ?

 

– Non, ils ne procèdent pas aussi bêtement, me répondit don Juan en souriant.

Ils sont extrêmement efficaces et organisés, et pour s’assurer de notre obéissance, de notre docilité et de notre apathie,

ils ont accompli une manœuvre extraordinaire – extraordinaire, bien sûr, sur un plan stratégique, mais horrible du point de vue

de ceux qui en sont victimes.

Ils nous ont donné leur esprit ! Tu m’entends ? Les prédateurs ont remplacé notre esprit par le leur, qui est bizarre, incohérent, grincheux, et hanté par la peur d’être percé à jour.

 

" Tu n’as jamais souffert de la faim, poursuivit-il, et tu as pourtant une sorte d’angoisse à propos de la nourriture.

C’est celle du prédateur qui redoute continuellement qu’on découvre son manège et lui coupe les vivres. P

ar le biais de l’esprit humain qui est en réalité le leur, les prédateurs nous inculquent ce qui les arrange pour améliorer leur sécurité et avoir moins peur.

 

– Peut-être tout cela est-il vrai, don Juan, mais si c’est le cas, il y a là quelque chose d’odieux qui me répugne et m’oblige à prendre

le parti contraire. Et comment font-ils pour nous manger ? "

 

Don Juan me fit un large sourire. Il avait l’air de bien s’amuser.

Il m’expliqua que les sorciers voyaient les nouveaux-nés et les bébés comme d’étrange boules d’énergie lumineuse,

recouvertes de haut en bas d’un revêtement brillant, un peu comme si une housse en plastique enveloppait étroitement leur cocon d’énergie.

C’était cette couche brillante de conscience, me dit-il, que consommaient les prédateurs.

Et lorsque les êtres humains atteignaient l’âge adulte, il n’en restait qu’une étroite bande à hauteur des orteils qui permettait t

out juste à l’humanité de survivre.

Comme en rêve, j’entendis don Juan me déclarer qu’à sa connaissance, l’espèce humaine était la seule à avoir cette couche

brillante de conscience à l’extérieur du cocon lumineux.

C’est pourquoi nous étions une proie facile pour le mode de conscience différent, plus pesant, des prédateurs.

Il me révéla alors quelque chose d’encore plus traumatisant : cette étroite bande de conscience était le siège de l’auto-contemplation dans laquelle l’homme était irrémédiablement piégé.

 En jouant sur cette auto-contemplation qui est le dernier brin de conscience qui nous reste, les prédateurs suscitaient des éclairs de conscience qu’ils dévoraient avec l’acharnement d’un rapace.

Et pour les provoquer, ils nous donnaient à résoudre des problèmes idiots et se nourrissaient du flamboiement énergétique de nos pseudo-intérêts.

Il devait y avoir dans ce que disait don Juan quelque chose de si pénible et bouleversant pour moi que j’en avais des haut-le-cœur.

 

Après une pose suffisamment longue pour me permettre de récupérer, je demandai à don Juan :

 " Mais puisqu’ils voient les prédateurs, pourquoi les sorciers mexicains, anciens ou actuels, ne font-ils rien ?
– On ne peut strictement rien faire, me dit tristement don Juan d’une voix grave, hormis se discipliner au point qu’ils ne puissent nous toucher. Et comment demander à nos semblables d’affronter les rigueurs d’une telle discipline ? Ils réagiraient en riant et se

moquant de nous, et les plus agressifs d’entre eux s’énerveraient et nous tabasseraient.

Ce n’est pas qu’ils ne nous croiraient pas ! Il y a au tréfonds de chaque être humain une connaissance ancestrale, viscérale,

de l’existence des prédateurs. "

 

Mon esprit analytique jouait au yo-yo. Tout ce que me racontait don Juan était grotesque, absurde, et en même temps me semblait raisonnable, très simple. Toutes les contradictions humaines s’expliquaient. Mais comment prendre tout cela au sérieux ?

Don Juan me poussait sur le trajet d’une avalanche qui m’emporterait à jamais.

(…) Don Juan continua à enfoncer le clou toujours plus profondément. " Les sorciers mexicains d’autrefois voyaient le prédateur.

 

 Ils l’ont appelé planeur parce qu’il jaillit de l’espace. Il n’est pas beau à voir. C’est une grande ombre, d’un noir impénétrable,

qui fonce vers le sol et se pose lourdement.

 Ces sorciers ne savaient pas exactement quand il avait fait son apparition sur terre.

Dans leur idée, l’homme avait sans doute été à une époque un être complet doué d’une conscience prodigieuse lui permettant d’accomplir d’incroyables prouesses – tous ces exploits que nous retrouvons aujourd’hui dans nos légendes mythologiques.

Ces facultés semblaient par la suite avoir disparu pour donner l’être humain actuel, un être diminué, comme abruti par des sédatifs. "

 

J’aurai dû me mettre en colère, le traiter de paranoïaque, mais je ne sais trop pourquoi, ce genre d’indignation toujours latente

chez moi m’avait quitté.

Quelque chose en moi avait même dépassé ce stade où je me disais : " Et si c’était vrai ? "

Face à don Juan qui me parlait cette nuit là, je sentais au plus profond de mon être que tout ce qu’il me disait était vrai,

mais en même temps, avec une force égale, que tout ce qu’il me disait était complètement absurde.

 

" Que voulez-vous dire, don Juan ? " lui demandai-je faiblement.

 

" Ce que je veux dire, c’est que nous avons affaire à forte partie.

C’est un prédateur très malin et bien organisé, qui procède méthodiquement pour nous neutraliser et nous empêcher d’être

la créature magique que nous étions destinés à être.

Nous ne sommes plus désormais qu’une source de ravitaillement et n’avons d’autres rêves que ceux d’un animal que l’on élève

pour sa viande : des rêves banals, conventionnels et imbéciles. "

(…) " Ce prédateur, me dit don Juan, est évidemment un être inorganique. Mais il n’est pas pour nous complètement invisible c

omme le sont les autres. Je suis sûr que les enfants le voient, et devant l’horreur que leur inspire cette vision, ils préfèrent ne plus y penser.

Et même s’ils cherchaient à mieux le voir, tout le monde autour d’eux les en dissuaderait. "

Description de ce qu’est un être inorganique, page 231 dudit livre : " Les vieux chamans ont découvert que l’ensemble de l’univers

est constitué de deux forces jumelles opposées, mais complémentaires.

Ainsi notre monde a un jumeau, un monde opposé et complémentaire peuplé par des êtres doués de conscience, mais dénués d’organisme, auxquels ils avaient donné le nom d’êtres inorganiques. (…)

L’ensemble de l’univers regorge de toutes sortes de mondes où la conscience peut être organique ou inorganique. "

" La seule alternative qui reste à l’humanité, continua don Juan, est la discipline. Seule la discipline a un effet dissuasif.

Mais je n’entends pas par ce terme une affreuse routine où l’on saute du lit tous les jours à cinq heures du matin pour s’asperger d’eau glacée ! Pour un sorcier, la discipline est la faculté d’affronter sereinement les difficultés imprévues.

Il la considère comme un art : l’art de faire face à l’infini sans broncher, non pour faire étalage de sa force, mais pour lui témoigner

son admiration et son respect.

 

– En quoi la discipline des sorciers peut-elle avoir un effet dissuasif ?
– Les sorciers disent qu’elle rend la couche brillante de conscience inconsommable pour le planeur, me dit don Juan en scrutant

mon visage comme pour y déceler un signe d’incrédulité. Il est alors perplexe. Je suppose qu’il n’a jamais entendu dire qu’une

couche brillante de conscience pouvait ne pas être comestible. Et cette perplexité ne lui laisse d’autre issue que de s’abstenir de poursuivre son infâme activité.

" A partir du moment où les prédateurs ne la mangent plus, notre couche brillante de conscience se développe. En simplifiant à l’extrême, on pourrait dire que, grâce à leur discipline, les sorciers éloignent les prédateurs, ce qui permet à leur couche brillante de conscience de se reformer et de retrouver progressivement sa taille normale. Les sorciers d’autrefois la comparaient à un arbre qui atteint sa hauteur et son volume si on ne le taille pas. Et à mesure que le niveau de conscience s’élève au-dessus des pieds, de nouveaux modes de perception surgissent automatiquement.

" Les anciens sorciers avaient découvert une excellente tactique : ils tenaillaient l’esprit des planeurs par la discipline.

Ils s’étaient aperçus que s’ils lui opposaient leur silence intérieur, cette implantation étrangère disparaissait, ce qui confirmait l’origine extérieure de cet esprit. L’implantation étrangère tentait évidemment de revenir, mais elle avait perdu de sa force, et un processus se mettait en marche dans lequel l’esprit des planeurs prenait la fuite de plus en plus souvent, jusqu’au jour où il disparaissait définitivement.

Un triste jour, en fait, puisqu’on doit dès lors se débrouiller tout seul en ne comptant que sur ces propres ressources, qui sont pratiquement nulles. Personne n’est plus là pour nous dire que faire, aucun esprit clandestin ne nous dicte plus les idioties auxquelles nous sommes accoutumés.

 

" Mon maître, le nagual Julian, disait fréquemment à ses disciples que c’était le moment le plus difficile de la vie d’un sorcier, car notre véritable esprit, celui qui nous appartient en propre et se résume à notre expérience personnelle, est devenu timide, inquiet et fuyant après une vie entière d’asservissement. C’est alors, selon moi, que débute le véritable combat du sorcier. Le reste n’est que simple préparation. "

(…) " Que voulez-vous dire par tenailler l’esprit des planeurs ?
– La discipline le met au supplice, me répondit-il. C’est donc grâce à leur discipline que les sorciers peuvent se débarrasser de cette implantation étrangère. "

 

J’étais extrêmement troublé. Soit don Juan était bon pour l’asile, soit ce qu’il venait de me raconter était si terrifiant que mon sang se glaçait dans mes veines.

Je notai cependant la vitesse à laquelle se ranima mon énergie pour tout nier en bloc. Après un instant de panique, j’éclatai de rire, comme si don Juan venait de me raconter une bonne plaisanterie. Je m’entendis même lui dire :

 

" Don Juan, don Juan, vous êtes incorrigible ! "
Il parut comprendre tout ce que j’éprouvais et secoua la tête, levant les yeux au ciel, comme pour feindre le désespoir.

 

" Je suis si incorrigible que je vais asséner à l’esprit des planeurs qui t’habite un coup supplémentaire, en te confiant l’un des secrets les plus extraordinaires de la sorcellerie. C’est la conclusion à laquelle ont abouti les sorciers, une conclusion qu’ils ont mis des milliers d’années à établir et vérifier. "

 

Il me sourit d’un air machiavélique.

" L’esprit des planeurs s’enfuit définitivement lorsqu’un sorcier réussit à saisir la force vibratoire qui assemble les champs d’énergie qui nous constituent.

S’il maintient suffisamment longtemps sa pression, l’esprit des planeurs, vaincu, bat en retraite.

Et c’est exactement ce que tu vas faire : te cramponner à l’énergie qui maintient ta cohésion. "

 

J’eus une réaction totalement imprévisible et inexplicable. Une partie de moi était vraiment ébranlée,

comme si elle avait reçu un coup. Je me sentis envahi par une terreur injustifiée que j’associai aussitôt à mon éducation religieuse.

Don Juan me regarda de la tête aux pieds.
" Tu redoutes la colère divine, non ? Sois tranquille, cette peur n’est pas la tienne.

C’est celle des planeurs, car ils savent que tu vas faire exactement ce que je vais te dire. "

 

Ses paroles ne me rassurèrent absolument pas, et je me sentis encore plus mal.

J’avais des spasmes involontaires que je ne pouvais maîtriser.

 

" Ne t’inquiète pas, me dit calmement don Juan. Ce genre de crise passe très rapidement. L’esprit des planeurs n’a pas la moindre force de concentration. "

 

Quelques instants plus tard, toutes ces manifestations disparurent comme don Juan l’avait prédit. Dire que j’étais perplexe serait un euphémisme. Pour la première fois de ma vie, seul ou avec don Juan, je ne savais plus du tout où j’en étais. Je voulais m’extraire de mon fauteuil pour faire quelques pas, mais j’étais mort de peur. La tête farcie d’affirmations rationnelles, je me sentais pourtant terrorisé comme un enfant. Je me mis à respirer profondément et tout mon corps se couvrit de sueurs froides.

J’avais déchaîné en moi quelque chose d’épouvantable : des ombres noires fugitives bondissaient partout où que je tourne mon regard.

 

Je fermais les yeux et reposai la tête sur le bras du fauteuil. " Je ne sais plus que faire, don Juan. Vous avez vraiment réussi à me déboussoler cette nuit.

 

– Tu es déchiré par une lutte intérieure, me dit don Juan.

Tout au fond de toi, tu sais que tu ne peux t’opposer à ce qu’une indispensable partie de toi-même, la couche brillante de conscience, serve inexplicablement à nourrir de mystérieuses entités.

 

Et quelque chose d’autre en toi refuse de toutes ses forces cette situation.

 

" Ce qui est révolutionnaire dans l’attitude des sorciers, poursuivit-il, c’est qu’ils se refusent à respecter un accord auquel ils n’ont

pas participé. Personne ne m’a jamais demandé si j’acceptais d’être mangé par des êtres ayant un mode de conscience différent !

Mes parents m’ont simplement mis au monde pour les ravitailler, comme cela s’était passé pour eux, et c’est tout. "

(…) Revenu chez moi, je m’aperçu que l’idée des planeurs m’obsédait chaque jour davantage, jusqu’au jour où je sentis que les conclusions de don Juan étaient irréfutables. J’avais beau m’efforcer de trouver une faille à sa logique, elle était imparable.

Plus j’y réfléchissais, plus j’observais mes semblables et moi-même, plus s’intensifiait ma conviction que quelque chose nous rendait incapables de toute activité ou interaction non focalisée sur le moi. Mon seul souci, comme celui de tous ceux que je connaissais ou rencontrais, était mon moi.

" Tous les êtres humains sur terre semblent avoir exactement les mêmes réactions, les mêmes pensées, les mêmes sentiments.

Ils réagissent de manière presque identique aux mêmes stimuli.

Le langage qu’ils utilisent jette une sorte de voile sur leurs attitudes, mais si l’on gratte un peu, on voit bien qu’ils ne peuvent

échapper à cette similitude de comportement. " Don Juan

(…) Je fis des recherches anthropologiques approfondies sur la présence d’éventuelles allusions aux planeurs dans d’autres cultures. Elles s’avérèrent totalement infructueuses. Don Juan paraissait être l’unique source d’informations à cet égard. Dès que je le vis la fois suivante, je lui reparlai immédiatement des planeurs.
" J’ai fait tout mon possible pour rester rationnel sur ce plan, mais je n’y arrive pas. Il y a des moments où je suis complètement d’accord avec vous sur les prédateurs.

 

– Concentre ton attention sur les ombres fugitives que tu vois vraiment ", me dit don Juan en souriant.

 

Je lui fit remarquer qu’elles mettaient en péril ma rationalité. Je les voyais partout.

Depuis ma dernière visite chez lui, j’étais incapable de dormir dans le noir.

Garder la lumière allumée ne me gênait pas du tout, alors que s’il faisait nuit, tout se mettait à bondir autour de moi.

Je ne voyais jamais de véritables formes ou silhouettes complètes, mais seulement ces fameuses ombres noires fugitives.

 

" L’esprit des planeurs ne t’a pas quitté, me déclara don Juan. Il a été gravement atteint et essaie à tout prix de conclure un nouvel arrangement.

Mais il s’est produit en toi une sorte de rupture définitive, et le planeur le sait. Le vrai danger, c’est que l’esprit des planeurs t’ait à l’usure et te fasse abdiquer en jouant sur la contradiction entre ses affirmations et les miennes.

 

" L’esprit des planeurs n’a pas d’opposant, poursuivit don Juan, et lorsqu’il propose quelque chose, il acquiesce à sa propre proposition e

t te fait croire que tu as raison. Il va affirmer que les prétendues révélations de don Juan sont complètement absurdes,

puis il va tomber d’accord avec se propre déclaration et te faire dire : " Mais oui, c’est vrai, il raconte n’importe quoi ! "

C’est comme ça qu’ils nous dominent.
" Les planeurs sont un constituant fondamental de l’univers et nous devons nous efforcer de les voir sous leur véritable jour –

terrifiants, monstrueux. C’est par leur intermédiaire que l’univers nous met à l’épreuve.

 

" Nous sommes des sondes énergétiques douées de conscience, reprit-il comme s’il avait oublié ma présence,

que l’univers a créées pour prendre conscience de lui-même. Les planeurs constituent pour nous un défi auquel nous ne pouvons nous soustraire. Nous ne devons pas les mésestimer.

Nous devons les vaincre pour que l’univers laisse les êtres humains poursuivre leur existence. "

 

J’aurai voulu que don Juan m’en dise davantage, mais il se contenta d’ajouter : " Le choc, tu l’as reçu la dernière fois.

On pourrait parler pendant des heures des planeurs, mais il est temps de passer à autre chose. "
(…)

Chapitre extrait du livre de Carlos Castaneda " Le voyage définitif "
Ed. du Rocher – 1998 – page 261

7 septembre 2015

Le serpent qui descend est l’abominable organe Kundartiguateur et le feu Luciférien

 

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Parmi les neiges éternelles du Tibet millénaire chargé d’innombrables traditions, il existe certaines écoles tantriques noires.

Malheur à celui qui s’affilie à ces écoles ténébreuses, « mieux aurait valu pour lui ne pas être né ou s’accrocher une meule de pierre au cou et se jeter au fond de la mer ».

    * L’objectif de base, fondamental, des écoles tantriques noires est de développer l’abominable organe Kundartiguateur (la queue de Satan) [NDE le feu luciférien].

    * L'infrasexualité est le fondement de la magie noire de la race lunaire qui déteste le tantrisme blanc du maithuna et développe l'organe Kundartiguateur NDE.

    * Renoncer au sexe développe l’abominable organe Kundartiguateur NDE.

     

* Le yoga sexuel blanc enseigne que par le contact des atomes solaires et lunaires du système séminal dans le Triveni, près du coccyx, le serpent igné de nos pouvoirs magiques s’éveille pour entamer sa marche vers l’intérieur et vers le haut par le canal médullaire.

Les yogis noirs du clan de Dag-Dugpa ne réalisent jamais ce contact des atomes solaires et lunaires à l’intérieur de l’organisme, mais toujours à l’extérieur de l’organisme.

Les yogis noirs (Asura Samphata) commettent le crime d’éjaculer le sperme (Shuhra) durant le Maïthuna pour le mêler avec la raja féminine et parvenir ainsi au contact des atomes solaires et lunaires à l’intérieur même de la Yoni de la femme.

Il n’y a pas de doute que pour les Bonzes et les Dugpas au bonnet rouge, le plus difficile est la réabsorption de la liqueur séminale après qu’elle ait été éjaculée.

Dans ce processus de réabsorption, il existe une technique et une force de type psychique terriblement maligne [NDE le feu luciférien]

 

    ! Le Vajroli Mudra combiné à la force mentale permet aux Bonzes et Dugpas au bonnet rouge d’absorber par l’urètre la liqueur séminale répandue.

Durant l’acte sexuel courant et ordinaire, l’animal intellectuel répand des millions d’atomes solaires au voltage très élevé, qui sont immédiatement remplacés par des billions d’atomes sataniques de l’ennemi secret, recueillis dans les enfers atomiques de l’homme par le processus de contraction des organes sexuels suivant le coït.

Lorsque le sperme n’est pas répandu, les atomes solaires retournent vers l’intérieur et vers le haut par Ida et Pingala, se multipliant alors d’une façon extraordinaire en quantité et en qualité.

Le sperme que les tantristes noirs réabsorbent par l’urètre en l’extrayant du vagin s’est en fait transformé en un épouvantable accumulateur d’atomes sataniques [Le feu luciférien de l'organe Kundartiguateur NDE].

Quand ce genre spécial d’atomes sataniques essaient de monter jusqu’au Golgotha du Père (le cerveau), ils sont alors violemment rejetés contre le coccyx par les trois souffles akashiques qui travaillent dans Ida, Pingala et Sushumna.

Les atomes séminaux malins de ce type se précipitent par Ida et Pingala et luttent violemment pour parvenir au cerveau, mais tous leurs efforts sont inutiles, puisque les trois souffles akashiques les projettent vers cette région du coccyx où réside l’atome malin qui a le pouvoir de mettre en activité l’abominable organe Kundartiguateur.

[Ces magiciens noirs qui ont développé l’organe Kundartiguateur vivent des éternités entières dans les mondes infernaux, avant de se réduire en poussière cosmique. NDE]


    ! Chez toute personne normale et ordinaire, le serpent igné de nos pouvoirs magiques reste enfermé dans le centre coccygien, enroulé trois fois et demie d’une façon merveilleuse.

Lorsque le serpent monte par le canal médullaire, nous nous transformons en anges, mais lorsque le serpent descend, lorsqu’il se précipite à partir du coccyx vers les enfers atomiques de l’homme, nous nous transformons en démons lunaires terriblement malins.

    * Le serpent est la Kundalini ; le serpent qui descend est l’abominable organe Kundartiguateur [NDE le feu luciférien].

Le serpent qui monte par le canal médullaire est le serpent d’airain qui guérissait les Israélites dans le désert ; le serpent qui descend est le serpent tentateur de l’Eden, le terrible serpent Python à sept têtes qui se traînait dans la terre boueuse et qu’Apollon, irrité, blessa avec ses dards.

L’abominable organe Kundartiguateur confère aux tantristes noirs des pouvoirs psychiques (Siddhis) terriblement malins [NDE le feu luciférien].

Jamais l’abominable organe Kundartiguateur ne pourrait ouvrir les sept Eglises de l’Apocalypse, les sept centres vitaux de l’épine dorsale, puisque jamais il ne parviendrait à monter par le canal médullaire ; par contre, il met bel et bien en activité l’antithèse des sept Eglises, les sept centres malins ou sept chakras ténébreux du bas-ventre.

Les Musulmans affirment que l’enfer a sept portes, et que celles-ci se trouvent dans le bas-ventre ; l’abominable organe Kundartiguateur a le pouvoir d’ouvrir ces sept portes.

Le fait de développer l’abominable organe Kundartiguateur et de mettre en activité les sept chakras infernaux du bas-ventre équivaut par le fait même à se transformer en la bête immonde à sept têtes et dix cornes sur laquelle s’assied la Grande Prostituée dont le nombre est 666.

Ceux qui commettent le crime de développer l’abominable organe Kundartiguateur divorcent pour toujours de la triade spirituelle Atman-Bouddhi-Manas et s’enfoncent dans les mondes infernaux.



    # Kundalini est un mot composé : Kunda nous rappelle l’abominable organe Kundartiguateur ; Lini est assurément un mot atlante qui signifie fin.

Le feu de la Pentecôte qui monte par le canal médullaire signifie la fin de l’abominable organe Kundartiguateur [NDE le feu luciférien].

Le feu de l’Esprit Saint qui monte par le canal médullaire ouvre l’Eglise d’Ephèse (le chakra coccygien) ; il ouvre l’Eglise de Smyrne (le chakra prostatique) ; il ouvre l’Eglise de Pergame (le chakra ombilical) ; il ouvre l’Eglise de Thyatire (le chakra du cœur) ; il ouvre l’Eglise de Sardes (le chakra laryngien) ; il ouvre l’Eglise de Philadelphie (le chakra frontal) ; il ouvre l’Eglise de Laodicée (le lotus aux mille pétales, la couronne des saints, dans la glande pinéale) ; et il met fin à l’abominable organe Kundartiguateur.

La couleuvre maudite, le feu luciférien, la queue de Satan, ouvre de fait les sept Eglises antithétiques, infernales, du bas-ventre. [Avec Kundartiguateur, la personnalité humaine finit par se séparer définitivement de l’Esprit Divin NDE].

Le feu ascendant confère à l’Intime, à l’esprit, des pouvoirs sur Prithvi, l’élément terre, dans l’Eglise d’Ephèse ; des pouvoirs sur l’eau, Apas, dans l’Eglise de Smyrne ; des pouvoirs sur le feu, Tehas, dans l’Eglise de Pergame ; des pouvoirs sur l’air, Vayu, dans l’Eglise de Thyatire ; des pouvoirs sur l’éther ou Akasha dans l’Eglise de Sardes ; des pouvoirs sur la lumière par l’œil de Shiva, dans l’Eglise de Philadelphie ; et l’union avec l’Intime dans l’Eglise de Laodicée.

L’abominable organe Kundartiguateur, le feu descendant, même s’il confère au yogi noir certains Siddhis, certains pouvoirs magiques intimement reliés aux sept chakras infernaux du bas-ventre, le transforme en un habitant du monde souterrain, en un esclave des éléments.

Les adeptes de la main gauche ont fondé dans le monde occidental de nombreuses écoles de tantrisme noir ; ces organisations ténébreuses arborent des titres sublimes.

Nous connaissons le cas d’un grand initié qui, avant de se désincarner, fonda une école de tantrisme blanc ; malheureusement, il commit l’erreur de laisser son fils, un jeune sans expérience, comme directeur général. Ce jeune homme ingénu et sans véritable expérience ésotérique se laissa bientôt tromper par des tantristes noirs, et il finit par enseigner publiquement le tantrisme noir.

Le résultat de tout ceci fut épouvantable : certains membres de cette fraternité, aussi dépourvus d’expérience, acceptèrent l’enseignement tantrique noir et se transformèrent finalement en démons terriblement malins.

n°26062 Ph. n°55413 - Le fait de développer l’abominable organe Kundartiguateur et de mettre en activité les sept chakras infernaux du bas-ventre équivaut par le fait même à se transformer en la bête immonde à sept têtes et dix cornes sur laquelle s’assied la Grande Prostituée dont le nombre est 666.
§ n°26067 Ph. n°55427 - La couleuvre maudite, le feu luciférien, la queue de Satan, ouvre de fait les sept Eglises antithétiques, infernales, du bas-ventre.
§ n°26069 Ph. n°55435 - L’abominable organe Kundartiguateur, le feu descendant, même s’il confère au yogi noir certains Siddhis, certains pouvoirs magiques intimement reliés aux sept chakras infernaux du bas-ventre, le transforme en un habitant du monde souterrain, en un esclave des éléments.

tout ses enseignements viennent des créatures de l'astral qui vous attirent avec des leurres en fait votre corps a des points de vortex secrets que si vous les activaient sans aucune pratique spirite ou religieuse pure vous deviendrez une proie facile allant jusqu'à la folie car vous serez possédé par les pires creatures de ce bas monde qui peuvent restés aux portes de vos chakras cachés mais qui influenceront votre vie et les signes sront fourmillement des pieds ou dans le corps sensation de chaleur dans un membre bruit sourd dans l'oreille ,maladie  ou mal a dit introuvable inexplicable par les medecins par tous les systemes  scanner etc ....cauchemard avec visions de creatures noire ou horribles ecriture automatique à ce stade vous pouvez vous considérer comme avoir été infesté par ces entités de l'astral ........à suivre

19 août 2015

Histoire & Sciences Occultes Paris secret et codée de ses monuments

Le Temple secret
du Champ de Mars

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Il est là, paisible, tapi dans un recoin du Champ de Mars avec pour témoins de ses mystères, les jeux des enfants. Et pourtant, ce ne sont pas les secrets qui manquent sur ses quatre murs! Le monument érigé par François Mittérand en 1989,

à l’occasion du bi-centenaire de la Déclaration des Droits de l’Homme, a toutes les apparences d’un petit temple antique. Ses façades incrustées de triangles, de cercles et de pyramides inversées, représentent une véritable encyclopédie de la connaissance ésotérique et maçonnique ! Rien d’étonnant, direz-vous puisqu’ils témoignent de ce moment historique où la pensée maçonne a été le fondement même du politique! La porte du temple est encadrée par les “colonnes de Boaz et Jachim”, répliques du temple de Salomon. Or la tradition maçonnique est bâtie entre autre, sur la légende d’Hiram, l’architecte du temple Salomon, assassiné. La forme du monument censé rappeler le tombeau d’Hiram, cacherait-elle une salle souterraine qui pourrait être une sépulture? De discrètes grilles d’aération disséminées à intervalles réguliers, témoignent de l’existence d’une salle souterraine! En levant la tête, on découvre au dessus de la porte, un oeil de boeuf et un serpent qui se mord la queue. En alchimie, l'Ouroubos. Ce symbole représente, s’il est seul, l’unité de la matière, la vie éternelle, la régénération. Certains vont même jusqu’à y voir le signe de la sagesse, du pouvoir et de l’énergie créatrice. Le médaillon central donne au monument son caractère définitivement maçonnique : une poignée de main symbolisant la fraternité entre franc-maçons. Dessous une corne d’abondance censée représenter le vase sacré ou Graal, croise avec un caducée, emblème d’Hermes. Autour, de multiples médailles commémorent les franc-maçons les plus illustres. Faisons le tour et plaçons nous à l’opposé. En mettant en oeil contre le triangle divin, on admire la face cachée de la connaissance réservée aux seuls initiés ! Observation plus étrange: l’ alignement du monument avec le temple solaire de l’Observatoire de Paris, la grande Arche de la Défense et la pyramide du Louvre!

Voici un film documentaire réalisé par Shulmeister , qui nous propose un parcours dans la géométrie codée et sacrée à Paris, les monuments issu de la franc maçonnerie, ainsi qu'un décryptage du texte et des monuments représentant "les droits de l'homme".

- Le Serpent
- La Colonne de Juillet, le Soleil
- Le Monument des droits de l'homme, la Lune
- L'Observatoire de Paris, la porte vers les étoiles
- Les Axes Géographiques occultes
- Le Temple d'Isis
- La Société des Angéliques

Histoire & Sciences Occultes - Un secret d'Initiés PARTIE 1

Histoire & Sciences Occultes - Un secret d'Initiés PARTIE 2

Histoire & Sciences Occultes - Un secret d'Initiés PARTIE 3

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15 août 2015

Elisabeth Bathory La comtesse Sanglante

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Il est impossible de s'intéresser au phénomène, réel ou imaginaire, du vampirisme sans se référer à un personnage qui défraya la chronique au XVIIE siècle en Hongrie et Transylvanie, et qui a provoqué, dans la mémoire des peuples, l'apparition d'une image surprenante, ambiguë, terrifiante, qui est loin de laisser indifférent : la comtesse Elizabeth Bathory est en effet une des incarnations les plus caractéristiques de ce que l'on a coutume de classer dans la catégorie des vampires humains, malgré les interférences inévitables qui se sont produites entre ce que l'on sait de sa vie et des zones d'ombre que l'on n'a pas osé dévoiler en plein jour. Ce fut une criminelle, assurément. Mais ce fut aussi une femme mystérieuse qui a emporté dans la tombe de lourds secrets qu'il est bien difficile de cerner en toute objectivité.

Elizabeth Bathory est née en 1560, d'une famille de sang royal, comptant dans ses proches parents le prince de Transylvanie, Sigismond Bathory, un oncle qui devint roi de Pologne, des gouverneurs de province, de hauts magistrats, des évêques et un cardinal. Cette famille remontait très loin dans le temps et comptait un certain nombre d'aventuriers hongrois descendant probablement des Huns et qui s'étaient imposés par le sang et la violence, comme il était de règle à ces époques troublées où la Hongrie allait passer d'un paganisme pur et dur à un catholicisme très inféodé à Rome. Du temps d'Elizabeth, rien n'était d'ailleurs vraiment net dans cette région bouleversée par l'apparition des Réformateurs luthériens et calvinistes et où le catholicisme romain se heurtait au Christianisme orthodoxe et aux innombrables communautés musulmanes disséminées par les Turcs. Sans parler des vestiges virulents d'un paganisme hérité du fonds asiatique :" L'ancienne terre des Daces était païenne encore, et sa civilisation avait deux siècles de retard 1 sur celle de l'Europe occidentale. Là, régnaient, gouvernées par une mystérieuse déesse Mielliki, les innombrables forces des grands bois, tandis qu'à l'Ouest, le vent habitait seul, la montagne de Nadas. Il y avait un dieu unique, Isten, et l'arbre d'Isten, l'herbe d'Isten, l'oiseau d'Isten... Dans les Carpates superstitieuses, il y avait surtout le diable, Ordôg, servi par des sorcières, elles-mêmes assistées de chiens et de chats noirs. Et tout venait encore des esprits de la nature et des fées des éléments ; de Delibab, la fée de midi aimée du vent et mère des mirages 2, des Tünders 3, sœurs de toutes merveilles et de la Vierge de la cascade peignant ses cheveux d'eau 4. Dans les cercles d'arbres sacrés, de chênes et de noyers féconds, se célébraient encore secrètement les anciens cultes du soleil et de la lune, de l'aurore, et du cheval noir de la nuit 5. C'est dans cette atmosphère très particulière, encombrée de sortilèges et de traditions ancestrales venus d'ailleurs, que se déroula l'enfance d'Elizabeth Bathory, et cela explique certainement beaucoup de choses concernant le comportement et le mode de pensée de cette comtesse qu'il faut bien se résoudre à qualifier de ", sanglante ".Il faut aussi prendre en compte la lourde hérédité d'Elizabeth : sa lignée ne comportait pas que des petits saints, bien au contraire. Un certain nombre de ses ancêtres avaient été des brutes sanguinaires, et dans sa parenté immédiate se trouvaient quelques homosexuels mâles notoires. Un de ses frères était un dépravé pour lequel tout était bon, la plus tendre fillette comme la plus ratatinée des femmes âgées. Une de ses tantes grande dame de la cour de Hongrie défrayait la chronique scandaleuse : lesbienne impénitente, on disait, tribade " à l'époque, elle était tenue pour responsable de la dépravation de douzaines de petites filles. Et puis, la propre nourrice d'Elizabeth, joIlona, qui deviendra son âme damnée, personnage trouble et inquiétant, pratiquant la magie noire et les sortilèges les plus pervers, eut une influence déterminante sur l'évolution de son esprit.

Elizabeth Bathory

Les descriptions qu'on possède d'Elizabeth Bathory, ainsi qu'un portrait qu'on en a conservé, nous la montrent d'une grande beauté : " Les démons étaient déjà en elle ; ses yeux larges et noirs les cachaient en leur morne profondeur ; son visage était pâle de leur antique poison. Sa bouche était sinueuse comme un petit serpent qui passe, son front haut, obstiné, sans défaillance. Et le menton, appuyé sur la grande fraise plate, avait cette courbe molle de l'insanité ou du vice particulier. Elle ressemblait à quelque Valois dessiné par Clouet, Henri Ill peut-être, en féminin 1. " Bref, quelque chose de mélancolique, de secret et de cruel. Le blason des Bathory n'était-il pas composé de trois dents de loup, d'un croissant de lune, d'un soleil en forme d'étoile à six pointes, le tout entouré d'un dragon qui se mord la queue ?

On ne sait pas grand-chose sur la jeunesse et l'adolescence d'Elizabeth, sinon qu'elle se réfugiait souvent dans une solitude farouche. Par ailleurs, depuis son plus jeune âge, elle souffrait de maux de tête parfois intolérables qui la faisaient se rouler par terre. Était-ce de l'épilepsie ? Il semble plutôt qu'Elizabeth était en proie à des crises d'hystérie qu'il serait tentant d'assimiler à des crises de possession démoniaque. 

Mais cette hystérie explique en partie sa déviance sexuelle : sa sensualité était exacerbée, mais morbide, et si elle ne refusa pas les contacts masculins, elle évolua toute sa vie dans des retraites peuplées uniquement de femmes ; elle ne sacrifia jamais un seul homme à ses débauches, mais uniquement des femmes, et elle était incontestablement homosexuelle. On prétend même que c'est sa tante Klara Bathory, qu'elle fréquentait assidûment, qui l'avait initiée au culte de Sapho.
Il faut dire que l'homosexualité était à la mode, en cette fin de XvIe siècle : à Paris, la cour des Valois donnait un exemple que s'empressaient de suivre les autres cours européennes, orientales autant qu'occidentales, celle de Rome ne faisant pas exception. Et le lesbianisme descendait même dans la rue :en Allemagne et dans tout le Saint-Empire, il y avait encore des héritières de cette étrange secte de triba des flagellantes qui parcouraient, au XlVe siècle, les villes et les villages, se mettant nues en public, se fouettant mutuellement, hurlant des chants et pratiquant des attouchements indécents. Vestiges d'un culte de la Déesse des Origines ? Probablement, mais avec des rituels érotiques sanguinaires. On peut toujours se demander si Elizabeth Bathory, si précocement initiée par sa tante Klara, n'a pas consacré sa vie à cette religion instinctuelle et viscérale tout entière vouée à l'adoration de la Grande Déesse des temps obscurs, celle qu'on a prisé trop hâtivement pour la terrible Hécate lunaire, divinité grecque des carrefours (où rôde également le Diable !), et qui n'est en réalité que l'image du Soleil rouge, divinité ô combien féminine, la fameuse et cruelle Artémis des Scythes, celle qui, dans la tragédie d'Euripide, Iphigénie en Tauride, réclame incessamment le sang des mortels pour nourrir son existence surnaturelle ? Il y a là un bel exemple de vampirisme 1. Mais l'homosexualité d'Elizabeth Bathory n'était pas exclusive. On lui prête plusieurs aventures masculines avant son mariage et après son veuvage. Toute jeune, immédiatement après sa puberté, elle aurait eu une petite fille d'un paysan. Elle avait quatorze ans et elle était déjà fiancée à Férencz Nàdasdy, un comte appartenant à la meilleure noblesse hongroise, redoutable guerrier qui devint illustre et mérita, par la suite, le titre de " Héros noir de la Hongrie ". Mais on sait ce que signifiaient les mariages dans la bonne société d'alors. Il semble que, se trouvant enceinte, elle demanda à Ursula Nàdasdy, mère de son fiancé, laquelle était chargée de sa " protection ", la permission d'aller dire adieu à sa propre mère, Anna Bathory, accompagnée d'une seule femme en qui elle avait toute confiance. On ne dit pas si Anna Bathory approuva le comportement de sa fille, mais elle fit contre mauvaise fortune bon cœur. Craignant le scandale et la rupture du mariage de sa fille, elle aurait amené secrètement Elizabeth dans un de ses châteaux les plus éloignés, du côté de la Transylvanie, laissant courir le bruit que sa fille, atteinte d'une maladie contagieuse, avait besoin de repos et d'isolement absolus. Elle l'aurait alors soignée, aidée d'une femme venue du château familial de Csejthe et d'une accoucheuse qui avait fait le serment de ne rien révéler. Une petite fille serait donc née, à laquelle on aurait donné également le prénom d'Elizabeth, et qui aurait été confiée., Moyennant pension, à la femme de Csejthe qui avait accompagné sa fille. Quant à la sage-femme, elle fut renvoyée de Roumanie avec de quoi vivre largement, mais interdiction de jamais revenir en Hongrie. C'est alors qu'Elizabeth Bathory et sa mère seraient parties directement pour Varanno où devaient êtres célébrés les noces de l'héritière des Bathory avec l'héritier des Nàdasdy.


Château de Csejthe

Ces noces eurent lieu le 8 mai 1575. Elizabeth avait quinze ans, et son mari en avait vingt et un. L'empereur Maximilien de Habsbourg assista lui-même au mariage. Le roi Matthias de Hongrie et l'archiduc d'Autriche envoyèrent de somptueux cadeaux aux nouveaux époux qui s'en allèrent passer leur lune de miel dans le château de Csejthe, dans le district de Nyitra, région montagneuse du nord-ouest de la Hongrie, encore célèbre aujourd'hui par la qualité de ses vignobles, mais aussi pour ses châteaux forts en ruines, ses histoires de fantômes et ses traditions vivaces de vampires et de loups-garous. Mais le séjour de Férencz Nàdasdy fut de courte durée. Ses devoirs de combattant l'appelaient à la guerre à travers toute la Hongrie et les pays avoisinants. Il laissa donc sa jeune et belle épouse régner sur le château de Csejthe et sur les vastes domaines qui l'entouraient. Que se passa-t-il donc alors ? Il est probable que la sensualité d'Elizabeth, fortement éveillée par son mari - qui lui fit d'ailleurs deux enfants - se sentit quelque peu frustrée. On lui prêta plusieurs intrigues amoureuses, mais sans lendemain, dont une avec un de ses cousins, le comte Gyorgy Thurzo, futur premier ministre de Hongrie et qui fut d'ailleurs, par la suite, son juge le plus sévère.

Cela ne veut pas dire que les époux ne s'entendaient pas bien : au contraire, leurs retrouvailles étaient toujours de nouvelles lunes de miel. Mais le seul tort du mari était d'être trop souvent absent. Et, un jour de 1586 ou 1587, alors que Férencz Nàdasdy était en plein combat contre les Serbes, on raconte qu'arriva au château de Csejthe (un grand jeune homme au teint cadavérique, dont le nom est resté perdu pour l'histoire. Il était habillé de noir, avait de profonds yeux noirs et de longs cheveux noirs tombant jusqu'aux épaules. Lorsque les servantes de la comtesse racontèrent au village de Csejthe qu'il avait aussi des canines qu'elles jugeaient anormalement longues, plus personne ne douta qu'un vampire s'était installé au château, et les villageois n'allèrent plus se coucher sans avoir soigneusement barricadé leurs portes et leurs fenêtres avec des planches 1 ". Cette histoire s'inscrit très bien dans le décor que suscite le personnage hors pair de la comtesse Bathory, mais elle est plus que suspecte. Toujours est-il qu'Elizabeth s'absenta pendant plusieurs semaines. Était-elle partie avec son " vampire " ? Les villageois murmurèrent, paraît-il, que la comtesse avait été littéralement " vampirisée " par le sombre inconnu. Il est plus vraisemblable de croire que cet homme était une sorte de sorcier, ou de prêtre plein, qui initia Elizabeth à certaines pratiques magiques. Car elle ne faisait pas mystère de ses fréquentations auprès des mages, des sorcières et autres personnages, toujours féminins, qui officiaient dans les forêts, à l'abri des regards indiscrets.

Plus intrigante est la relation entretenue réellement par Elizabeth Bathory avec une mystérieuse inconnue, dont personne ne savait le nom, , et qui venait voir Elizabeth, déguisée en garçon. Une servante avait dit à deux hommes, - ils en témoignèrent au procès -, que, sans le vouloir, elle avait surpris la comtesse seule avec cette inconnue, torturant une jeune fille dont les bras étaient attachés très serrés et si couverts de sang qu'on ne les voyait plus ,. Ce n'était pas une paysanne, mais une femme de qualité qui, sans être masquée, éprouvait le besoin de se travestir, sans doute pour éviter de se faire reconnaître. " Cette visiteuse, pour laquelle on emploie le mot " dame ", était-elle une amie descendue de quelque château des environs pour ces fêtes à deux ? Amie ignorée et intermittente, en tout cas, puisqu'à Csejthe on connaissait à peu près tout le monde appartenant à la contrée. Une étrangère ? Alors, quelles étaient exactement les relations entre elle et Elizabeth ? Leurs sadiques plaisirs étaient-ils les seuls " Il est bien difficile de répondre, d'autant plus que si la comtesse Bathory a commis et fait commettre d'innombrables crimes de sang sur des jeunes filles, on a considérablement brodé sur son action. Et ce ne sont pas les minutes de son procès, pourtant fort précises quant aux témoignages recueillis, qui peuvent donner la solution des véritables motivations d'Elizabeth Bathory.

Cependant, Férencz Nàdasdy mourut soudainement en 1604. Devenue veuve, la comtesse semble n'avoir rien changé à son mode de vie. Les tortures qu'elle infligeait à ses servantes, elle les pratiquait depuis longtemps et son mari le savait parfaitement, considérant celles-ci comme de simples amusements de la part de sa femme. D'ailleurs, dans toutes les maisons nobles de ce temps, il était courant de fouetter les servantes pour un oui ou pour un non. L'état de servage n'existait plus en Hongrie, mais les vieilles habitudes ont du mal à disparaître, surtout quand elles sont acceptées, bon gré, mal gré, par celles qui en sont les victimes. L'un des témoignages du procès est catégorique : à la question de savoir depuis combien de temps la comtesse maltraitait les jeunes filles, un témoin répond : , Elle commença quand son mari était encore en vie, mais alors ne les tuait pas. Le comte le savait et ne s'en souciait guère. " On raconte une curieuse anecdote à ce sujet, non pas sur le début des sévices opérés par Elizabeth, mais sur la naissance de sa fascination pour le sang qui coule. " Un jour qu'elle avait frappé une servante assez violemment pour la faire saigner du nez, parce qu'elle lui avait tiré les cheveux en la peignant, un peu du sang de la jeune fille tomba sur le poignet d'Elizabeth. Un peu plus tard, la comtesse crut remarquer que la peau de l'endroit où était tombé le sang était devenue plus blanche et plus douce que la peau environnante. Intriguée, elle se baigna le visage avec le sang d'une des victimes de ses orgies sadiques. Son visage lui sembla rajeuni et revivifié par le traitement 1. "

Le souci primordial d'Elizabeth Bathory, depuis son plus jeune âge, avait été sa beauté: elle avait une peur atroce de vieillir et de s'enlaidir. Il n'en fallait pas plus pour s'imaginer qu'elle pouvait indéfiniment préserver sa beauté grâce à du sang frais de jeunes filles, de préférence vierges, donc revêtues de cette aura magique que confère la virginité. " Le sang, c'est la vie ! " répétait Renfield au docteur Seward. Mais pour Elizabeth Bathory, la vie, c'était la beauté et la jeunesse. Si l'anecdote est vraie, on comprend mieux ce goût du sang chez elle. Et cela nous ramène inévitablement au vampirisme.

Elizabeth Bathory passait son temps au château de Csejthe, faisant également de fréquents séjours à Presbourg et surtout dans la demeure qu'elle avait acquise à Vienne, non loin de la cathédrale, demeure qui semble avoir été marquée aussi par de sanglantes orgies. A Csejthe comme ailleurs, Elizabeth était toujours accompagnée de sa nourrice jo Ilona et de sa servante Dorottya Szentes, dite Dorko, deux femmes vieilles, vulgaires, sales, d'une totale immoralité ' et probablement sectatrices d'une de ces mystérieuses cohortes de sorcières avorteuses qui pullulaient encore dans les campagnes de l'Europe centrale. Il semble qu'elles aient été les principales pourvoyeuses de " chair freiche " de la comtesse, en même temps que ses "agents d'exécution " quand il s'agissait de frapper, de saigner, puis d'enterrer les malheureuses victimes. Autour de ce duo infernal, il y avait un homme à tout faire, Ujvari johanes, dit Ficzko, une sorte de nabot disgracieux, et une lavandière, Katalin Beniezky. Elizabeth vivait au milieu de cette troupe entièrement vouée à son service et à la satisfaction de ses instincts les plus bas. Cela constituait pour elle le personnel permanent et indispensable. Mais il y avait aussi le personnel " volant ", de belles jeunes filles dont elle faisait ses servantes, et parfois ses concubines, du moins tant qu'elle y trouvait une certaine nouveauté. Car ces " servantes " disparaissaient les unes après les autres, et il fallait bien que le " personnel permanent " se chargeât de renouveler un cheptel qui devait être toujours jeune et beau. Certes, il y en avait toujours en réserve. On prétend même que la comtesse veillait à ce que ces jeunes filles retenues prisonnières fussent bien nourries et engraissées, car elle croyait que plus elles étaient dodues, plus elles avaient de sang dans les veines, et que plus elles étaient bien portantes, plus la vertu de ce sang était efficace. Plus que jamais, le sang était la vie: Elizabeth Bathory croyait-elle pouvoir échapper au vieillissement et à la mort, et gagner ainsi une éternelle jeunesse ? Il semble qu'il faille prendre très au sérieux cette conviction.

Un autre personnage vint bientôt compléter la sinistre troupe, une certaine Darvulia Anna. On a largement brodé sur cette femme sous prétexte que son nom évoque celui de Dracula. Il n'est pas nécessaire d'en venir là, car il apparaît que Darvulia était une sorcière de la meilleure tradition, une magicienne noire qui connaissait des formules et des incantations sataniques et qui n'hésitait pas, comme le fera plus tard la Voisin, en France, au moment de l'affaire des Poisons, à procéder à des sacrifices humains pour obtenir l'aide des puissances démoniaques. Sans doute Darvulia Anna sut-elle convaincre Elizabeth Bathory, déjà quadragénaire mais toujours très belle, qu'elle connaissait les recettes infaillibles pour prolonger indéfiniment cette beauté. La comtesse ne put plus se passer de Darvulia, et il est établi que la présence de cette ( sorcière" ne fit qu'augmenter la fréquence des (, sacrifices " qu'Elizabeth offrait à la mystérieuse divinité assoiffée de sang qu'elle n'avait jamais cessé d'adorer depuis sa plus tendre enfance. Les plus belles filles de Transylvanie et de Hongrie, lorsqu'elles étaient repérées par les émissaires de la comtesse, prenaient le chemin du château de Csejthe. Tous les moyens étaient bons : menaces, intimidation, promesses d'argent, achat pur et simple dans certaines familles pauvres. Mais la plupart d'entre elles ne ressortaient jamais plus de la sinistre forteresse.

On a probablement fort exagéré les récits concernant les supplices infligés à ces innocentes jeunes filles par la comtesse Bathory et ses âmes damnées. Mais il en est de suffisamment établis pour se faire une idée de l'atmosphère malsaine et macabre qui régnait dans les souterrains du château de Csejthe. Les filles étaient frappées avec violence. Certaines avaient le cou percé selon la plus pure tradition vampirique. D'autres étaient liées avec des cordes qu'on tordait ensuite afin qu'elles puissent s'enfoncer dans les chairs, ce qui permettait de leur ouvrir les veines et de faire jaillir le sang sur la comtesse. On prétend même' qu'on remplissait parfois des baignoires de sang et qu'Elizabeth s'y baignait avec ravissement. Mais comme sa peau délicate ne supportait pas d'être essuyée avec des serviettes, ce sont d'autres filles qui devaient la débarrasser du sang en lui léchant tout le corps avec leurs langues. Celles qui, ne supportant pas une telle horreur, s'évanouissaient, étaient ensuite sévèrement châtiées avant de servir de victimes à leur tour. On imagine aisément le contexte érotique de ces rituels. Selon certaines sources, toujours quelque peu discutables, certaines de ces jeunes filles finissaient leur vie dans le lit même de la comtesse. Elizabeth faisait venir les filles qui lui plaisaient le mieux et s'abîmait avec elles des nuits entières dans des embrassements - et des embrasements - homosexuels, avant de les mordre cruellement, parfois jusqu'à la mort. On comprend que de telles relations aient pu intéresser au plus haut point un spécialiste de l'érotisme dans la souffrance comme l'a été Georges Bataille, et aussi inspirer un certain nombre de films plus ou moins érotiques, mais parfaitement sadiques.

Il y a aussi la fameuse "Vierge de Fer". Est-ce une légende ? Actuellement, cet automate monstrueux peut encore être vu au château de Riegersburg, en Styrie. Est-ce celui dont, paraît-il, se servait la comtesse Bathory? Il s'agissait d'une statue de bois articulée, avec des mécanismes de fer, en forme de femme. Image de la déesse cruelle qu'adorait Elizabeth ? Peut-être. Ce qu'il y avait de terrible dans cet automate, c'était les pointes acérées qui pouvaient transpercer les corps qu'on soumettait à l'étreinte de la " Vierge ,. Car il est possible que des filles aient été ainsi livrées à la Vierge de Fer: les bras de celle-ci se refermaient sur le jeune corps et le pressaient de plus en plus contre les pointes acérées, permettant au sang de couler en abondance, sous les yeux d'Elizabeth et de celles qui partageaient obligatoirement ses infernales jouissances. La comtesse Bathory eût certainement été très à l'aise dans l'élaboration d'un Musée des Tortures. Et même si cette histoire de Vierge de Fer est une légende racontée après coup, l'anecdote reste néanmoins significative: toute la vie d'Elizabeth était imprégnée de sang, parce que le sang, c'est la vie.

Cependant, même si l'on est un personnage considérable, même si l'on est apparenté aux plus nobles familles de Hongrie, de Roumanie et du Saint-Empire, même si l'on prend des précautions pour éviter que les langues se délient, de telles manoeuvres ne passent pas inaperçues. On n'empêche pas certaines personnes de murmurer. On n'empêche pas les allusions, et ces allusions se colportent de village en village. Trop, c'est trop... Des rumeurs incroyables parvinrent jusqu'à la cour de Vienne, et les autorités ecclésiastiques, sentant qu'il y avait sans doute des pratiques relevant de l'hérésie ou du paganisme, commencèrent à se livrer à de discrètes enquêtes. Mais comment faire pour savoir la vérité, alors qu'en principe, la belle comtesse Bathory était insoupçonnable et " intouchable " ?

Évidemment, personne n'osait porter officiellement plainte, pas même les parents des jeunes filles disparues qui craignaient trop les représailles, y compris celles de forces diaboliques qu'on disait être au service de la comtesse. Les Bathory et les Nàdasdy étaient bien trop puissants... Mais cela n'empêcha nullement le roi Matthias de Hongrie de prendre l'affaire en main. Convaincu, par certains témoignages, que l'héritière des Bathory était coupable de crimes de sang, il ordonna une enquête qu'il confia au gouverneur de la province, lui-même cousin d'Elizabeth. Le gouverneur se rendit secrètement à Csejthe et s'informa auprès de certaines personnes de confiance, en particulier le curé qui, sans avoir l'intention de le publier de son vivant, avait rédigé un long mémoire dans lequel il signalait quantités de faits pour le moins troublants. L'envoyé du roi Matthias fut très vite édifié, et, lorsqu'il eut fait son rapport, la décision du roi fut implacable: arrêter la comtesse Bathory et tous ses complices. Et cette tâche, il la confia à un autre cousin d'Elizabeth, et qui avait été un temps son amant, son premier ministre, le comte Gyorgy Thurzo.

Le 29 décembre 1610, à la tête d'une troupe armée et accompagné du curé de Csejthe - à qui il arriva d'ailleurs une curieuse aventure à cause d'un groupe de chats ! - et en présence des deux gendres d'Elizabeth Bathory, le comte Thurzo pénétra dans le grand château. La garnison n'opposa aucune résistance et les grandes portes étaient même entrouvertes. Tous purent donc pénétrer à l'intérieur sans aucune difficulté : " Ils allèrent à travers le château, et, accompagnés de gens munis de torches connaissant les entrées des escaliers les plus secrets, descendirent au souterrain des crimes, d'où montait une odeur de cadavre, et pénétrèrent dans la salle de tortures aux murs éclaboussés de sang. Là se trouvaient encore les rouages de la , Vierge de Fer ", des cages et des instruments, auprès des brasiers éteints. Ils trouvèrent du sang desséché au fond de grands pots et d'une sorte de cuve ; ils virent les cellules où l'on emprisonnait les filles, de basses et étroites chambres de pierre; un trou profond par où l'on faisait disparaître les gens; les deux branches du souterrain, l'une conduisant vers le village et débouchant dans les caves du petit château, l'autre allant se perdre dans les collines... Enfin, un escalier montant dans les salles supérieures. Et c'est là, étendue près de la porte, que Thurzo vit une grande fille nue, morte; celle qui avait été une si belle créature n'était plus qu'une immense plaie. A la lumière de la torche, on pouvait voir les traces laissées par les instruments de torture: la chair déchiquetée, les seins tailladés, les cheveux arrachés par poignées; aux jambes et aux bras, par endroits, il ne restait plus de chair sur les os 1. " Plus loin, toujours dans le souterrain, Thurzo et ses hommes découvrirent plusieurs douzaines de jeunes filles, d'adolescentes et de jeunes femmes. Certaines étaient affaiblies, presque complètement vidées de leur sang; d'autres, dans un état d'hébétude totale, étaient encore intactes : c'était le bétail réservé aux prochaines orgies. Par la suite, on exhuma une cinquantaine de cadavres de jeunes filles dans les cours et les dépendances du château.

Elizabeth Bathory ne se trouvait pas dans le château. Il est vraisemblable de penser qu'après une nuit d'orgie rituelle, elle s'était retranchée dans son repaire constitué par le petit château, son domaine réservé où peu de gens avaient le droit de s'introduire. Lorsque le comte Thurzo se présenta devant elle, elle ne songea pas un seul instant à nier l'évidence. Aux accusations que lui porta légalement son cousin et ex-amant, elle répondit que tout cela relevait de son droit de femme noble, et qu'elle n'avait de comptes à rendre à personne. Sans se laisser impressionner, Thurzo la fit mettre sous surveillance, et la comtesse s'enferma dans un mutisme hautain dont elle ne se départit jamais plus.

Mais la procédure de la justice était en marche et plus rien ne pouvait l'arrêter désormais. Le roi Matthias était décidé à aller jusqu'au bout, Gyorgy Thurzo et les membres des familles Bathory et Nàdasdy également, même s'ils craignaient de supporter les conséquences d'un étalage public des turpitudes de la comtesse. En fait, chacun se trouvait embarrassé, car tout cela éclaboussait la plus haute société austro-hongroise de l'époque. Matthias de Hongrie était le plus acharné à vouloir justice, le comte Thurzo le plus réservé, et aussi le plus calme. Il devait y avoir procès : il aurait lieu, mais on prendrait soin de n'y point faire paraître la principale inculpée, ce qui était une façon élégante de ne pas mouiller certains membres de l'aristocratie qui avaient, sans nul doute, d'une façon ou d'une autre, été complices de la meurtrière. Il fallait des accusés pour en faire des coupables. On se rabattit sur l'entourage immédiat d'Elizabeth. On savait que ceux-là, qui appartenaient aux classes les plus obscures de la société, n'étaient pas dangereux et que leur condamnation servirait d'exutoire.

On a retrouvé le procès-verbal des interrogatoires qui furent menés pendant l'instruction. On est en droit de se demander si ces dépositions ont été acquises au moyen de la torture, méthode pratiquée couramment à l'époque, et c'est pourquoi il convient de les prendre avec toutes les réserves qui s'imposent. Mais ces dépositions ne sont nullement en contradiction avec d'autres témoignages, et avec les bruits qui circulaient depuis fort longtemps sur les atrocités qui se commettaient aussi bien à Vienne qu'à Csejthe à la demande formelle de la comtesse Bathory. Et même s'il faut faire la part de l'exagération et du lavage de cerveau qu'ont subi les témoins, les récits sont hallucinants. Il y a là un accent de vérité qui ne trompe pas: ces témoins, participants actifs des turpitudes d'Elizabeth, donc motivés par une foi énigmatique d'origine païenne et ancestrale, sont parfaitement conscients de ce qu'ils racontent, et d'ailleurs, ils ne manifestent jamais le moindre remords, le moindre sentiment de culpabilité quant à ce qui leur est reproché. A les entendre, tout ce qui s'est passé au château de Csejthe est parfaitement naturel et ne souffre pas d'être discuté. Qu'on en juge sur pièces .

Ainsi, le premier témoin, Ficzko, après avoir avoue avoir tué trente-sept jeunes filles et participé à leur inhumation, est amené à parler de l'origine des victimes et du sort qui leur était réservé : (, Dorko et une autre allèrent en chercher. Elles leur dirent de les suivre dans une bonne place de service. Pour une de ces dernières, venant d'un village, il fallut un mois pour la faire arriver et on la tua tout de suite. Surtout des femmes de différents villages s'entendaient pour fournir des jeunes filles 2. Même une fille de l'une d'elles fut tuée; alors la mère refusa d'en amener d'autres. Moi-même, je suis allé six fois en chercher avec Dorko. Il y avait une femme spéciale qui ne tuait pas, mais qui enterrait... Une femme, Szabo, a amené des filles, et aussi sa propre fille, quoique sachant qu'elle serait tuée. jo Ilona aussi en a fait venir beaucoup. Kata n'a rien amené, mais elle a enterré toutes les filles que Dorko assassinait. " On voit ainsi que la comtesse sanglante avait constitué une véritable meute pour rabattre, par tous les moyens, les filles dont elle avait besoin pour assouvir ses passions, ou plutôt pour procéder à ces étranges sacrifices.

Où cela devient presque insupportable, c'est lorsque les témoins donnent des détails sur les supplices. C'est toujours Ficzko qui parle: " Elles (les complices d'Elizabeth) attachaient les mains et les bras très serrés avec du fil de Vienne, et les battaient à mort, jusqu'à ce que tout leur corps fût noir comme du charbon et que leur peau se déchirât. L'une supporta plus de deux cents coups avant de mourir. Dorko leur coupait les doigts un à un avec des cisailles, et ensuite leur piquait les veines avec des ciseaux... jo Ilona apportait le feu, faisait rougir les tisonniers, les appliquait sur la bouche et mettait le fer dedans. Quand les couturières faisaient mal leur travail, elles étaient menées pour cela dans la salle de torture. Un jour, la maîtresse elle-même a mis ses doigts dans la bouche de l'une et a tiré jusqu'à ce que les coins se fendent. Il y avait aussi une autre femme qui s'appelait Ilona Kochiska, et qui a aussi torturé des filles. La maîtresse les piquait d'épingles un peu partout; elle a assassiné la fille de Sitkey parce qu'elle avait volé une poire... La maîtresse a toujours récompensé les vieilles quand elles avaient bien torturé les filles. Elle-même arrachait la chair avec des pinces, et coupait entre les doigts. Elle les a fait mener sur la neige, nues, et arroser d'eau glacée; elle les a arrosées elle-même et elles en moururent... Dans le coche, quand la maîtresse voyageait, elles étaient pincées et piquées d'épingles. "

Le témoignage de la nourrice, jo Ilona, n'est pas moins édifiant: ", Elle battait les filles cruellement et Darvulia mettait les jeunes servantes dans l'eau froide et les laissait toute la nuit. La comtesse elle-même déposait dans leur main une clef ou une pièce d'argent rougie au feu. A Sravar, Elizabeth a, devant son mari Férencz Nàdasdy, dévêtu une petite parente de son mari, l'a enduite de miel et laissée un jour et une nuit dans le jardin pour que les insectes et les fourmis la piquent. Elle, jo Ilona, était chargée de mettre entre les jambes des jeunes filles du papier huilé et de l'allumer... Dorko coupait avec des ciseaux les veines des bras ; il y avait tant de sang qu'il fallait jeter de la cendre autour du lit de la comtesse, et celle-ci devait changer de robe et de manches. Dorko incisait aussi les plaies boursouflées et Elizabeth arrachait avec des pinces la chair du corps des filles... C'est de Darvulia qu'Elizabeth apprit les plus graves cruautés ; elles étaient très intimes. jo Ilona savait, et avait même vu, qu'Elizabeth a brûlé le sexe de certaines filles avec la flamme d'un cierge. " Tout cela est corroboré par Dorko : (, La comtesse torturait les filles avec des cuillères rougies au feu, et leur repassait la plante des pieds avec un fer rouge. Leur arrachait la chair aux endroits les plus sensibles des seins et d'ailleurs avec de petites pinces d'argent. Les mordait en les faisant amener au bord de son lit quand elle était malade. En une seule semaine, cinq filles étaient mortes. "

Le reste est à l'avenant et nous prouve que le marquis de Sade, dans son délire somme toute parfaitement inoffensif, n'a rien inventé. Car ces témoignages, quelles que soient les réserves qu'on peut émettre à leur propos, sont terriblement accablants. Et, sans trop risquer de se tromper, il faut bien se résoudre à accepter comme un minimum absolu le chiffre ahurissant de six cents jeunes filles sacrifiées par la comtesse Elizabeth Bathory et ses complices. La comtesse fut évidemment reconnue coupable par les juges qui se penchaient sur son cas. Mais la question se posait quant à la peine qu'elle devait encourir. On sait que le roi Matthias était résolu à condamner la comtesse à mort, quels que fussent ses liens avec l'illustre famille des Bathory. Mais la famille Bathory, et le comte Gyorgy Thurzo le premier, n'avaient aucune envie de salir leur nom en faisant procéder à l'exécution publique d'une des plus grandes dames de l'Empire. Il y eut des négociations, des compromis. On se dit qu'il valait mieux faire passer Elizabeth pour folle que pour une criminelle. Le verdict tomba: les principaux complices, Jo Ilona, Ficzko, Dorko et Katalin Beniezky furent condamnés à la décapitation et rapidement exécutés. Quant à la comtesse de sang royal Elizabeth Bathory, elle fut condamnée à être murée vive dans ses appartements privés du petit château de Csejthe. Sous la surveillance des juges et du comte Thurzo, des maçons murèrent donc les fenêtres et les portes de ses appartements, ne laissant qu'une petite ouverture par laquelle on passerait tous les jours de l'eau et de la nourriture. Elizabeth Bathory se laissa enfermer sans prononcer une parole. Elle vécut quatre ans dans la solitude et l'obscurité. Aux dires de ceux qui la virent dans son dernier sommeil, en dépit de son âge - très avancé pour l'époque - de cinquante-quatre ans, sa beauté était inaltérée. Et l'on retrouva, dans ses appartements, de nombreux grimoires, et surtout des invocations sataniques dans lesquelles elle conjurait le Diable de faire mourir ses ennemis, le comte Thurzo en tête, et de leur envoyer des démons sous forme de chats noirs. C'est ce qui était arrivé au curé de Csejthe Igrsqu'il avait accompagné les justiciers dans les souterrains du château. Coïncidence? Il est bien certain que la magie, et une magie des plus noires et des plus sinistres, est la seule explication plausible de l'invraisemblable comportement de la comtesse Elizabeth Bathory.

En fait., bien des questions se posent. Dans son invocation, faite la veille de son arrestation, Elizabeth Bathory implorait l'aide des puissances maléfiques, demandant particulièrement à Satan, qu'elle appelle le Suprême Commandeur des Chats, de lui envoyer quatre-vingt-dix-neuf chats contre ses ennemis. Or, le curé de Csejthe, auteur du mémoire qu'il espérait bien transmettre un jour, était l'un de ses plus ardents ennemis, bien qu'il fût réduit au silence par peur des représailles. D'après le témoignage du prêtre, lors de la perquisition dans le château, il fut assailli par six chats qui le griffèrent et le mordirent avant d'être chassés par les hommes d'armes et de dispar ECitre comme des fantômes. Hallucination ? Superstition ? Rien n'est bien clair dans cette histoire pourtant réelle de la comtesse Bathory.

Était-elle sorcière ? Incontestablement, ou du moins magicienne, prêtresse d'une religion noire et rouge héritée de la nuit des temps. Il serait vain de prétendre qu'elle était folle. Il serait stupide de ne voir en elle qu'une dépravée sexuelle assouvissant ses désirs pervers sous le couvert de ce qu'elle croyait être son impunité. Certes, la composante sexuelle, sadique et lesbienne, ne fait aucun doute dans son comportement. Mais ce n'est pas suffisant pour expliquer de telles horreurs. Et pourquoi n'a-t-elle sacrifié, ou fait sacrifier, à son culte sanguinaire que des femmes, des filles vierges ? Le sang des vierges a donc tant de vertu qu'il puisse procurer à ceux qui savent en profiter l'immortalité dans la beauté et le printemps éternel ?

Ici, la relation entre le personnage d'Elizabeth Bathory, personnage réel, rappelons-le, et le sinistre comte Dracula, personnage romanesque mais surgi d'une longue tradition et intégré dans un ouvrage de fiction initiatique, est absolument nette. Oui, la comtesse Bathory est une femme vampire se régénérant dans le sang des jeunes vierges qu'elle sacrifie en l'honneur d'une mystérieuse et cruelle déesse des anciens jours. Elle mordait ses victimes, nous dit-on. On n'ajoute pas qu'elle buvait leur sang, mais elle s'en inondait, ce qui revient au même. Aurait-elle pu survivre autant d'années, dans toute sa beauté, sans cette thérapeutique " quelque peu spéciale ?


Elizabeth Bathory a emporté son secret dans la tombe, si tant est qu'elle ait réellement une tombe. Car les vampires, c'est bien connu, ne meurent jamais vraiment.

 

18 mai 2015

New-Age : Une expérience initiatique, et la Connaissance qu'on vous fait miroiter

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Que recherche donc l'adepte du New-Age ? Une expérience initiatique, et l'accès à la Connaissance qu'on lui a fait miroiter dès l'abord.
N'oublions donc pas que cette recherche est stigmatisée dès le récit de la Genèse, en Adam et Eve : "Tu peux manger de tous les arbres du jardin. Mais de l'arbre de la connaissance du bien et du mal tu ne mangeras pas, car le jour où tu en mangeras, tu deviendras passible de mort." (Gn 2, 16-17). "Vous serez comme des dieux" réplique le serpent (Gn 3, 5).
 

Maxime écrivait: "L'homme a voulu s'emparer des choses de Dieu sans Dieu, avant Dieu, et non selon Dieu."

 

Pour l'adepte du New-Age, l'accès au "salut" se fait par la gnose, par un savoir supérieur réservé à une élite, et qui plus est, par un savoir… qui se paye (il faut bien acheter les livres, payer les stages, etc.) ! Curiosité, attrait de l'insolite, du merveilleux, voir des pouvoirs occultes, mais aussi attrait pour une certaine "facilité", dans la mouvance de "L'Alchimiste" de Paolo Cuelho: pour se réaliser pleinement en ce monde, il suffit de suivre sa "légende personnelle", répondre à ses propres désirs, à ses propres envies…

 

Sur le site internet "Emeraude", site "dédié à notre Mère, la Terre", on lit par exemple les lignes suivantes (communication télépathique de "Lumière de l'Être" reçue en 1997): "J'aimerais vous rappeler, bien-aimés frères et sœurs de l'humanité, que la Réalisation Christique ne se fait pas seulement par la foi dans le Divin. Elle se fait également par l'intérêt et l'action de l'esprit vers la Connaissance. La Foi guide le pèlerin sur la route qui le conduit à la demeure du Père et la Connaissance révèle les indications de cette route. Pendant toute mon incarnation de Jésus, J'ai cultivé une détermination à vouloir m'ouvrir à des réalités qui m'étaient totalement étrangères. Cette attitude a grandement contribué à nouer mon esprit de la Connaissance et a amplifié ma Foi de la grandeur des affaires du Père." S'ouvrir à la Connaissance: nous retrouverons cet appel dans tous les mouvements se réclamant du Nouvel Age.

 

La déification de la volonté est également monnaie courante. Les livres de Paolo Coelho sont assez représentatifs dans ce domaine, lui qui fait dire par exemple à l'un de ses personnages dans "L'Alchimiste": "Il y a une grande vérité en ce monde: qui que tu sois et quoi que tu fasses, lorsque tu veux vraiment quelque chose, c'est que ce désir est né dans l'Ame de l'Univers."

 

Nous sommes bien loin, à l'opposé même de la prière enseignée par Jésus, prière adressée à Dieu notre Père: "Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel" (Mat 6, 10). Abandon à la volonté divine dont Il nous a donné l'exemple, et montré le chemin:

 

"Non pas comme je veux, mais comme tu veux… Que ta volonté soit faite !" (Mat 26, 39-42)

"Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m'a envoyé" (Jean 4, 34)

"Je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé" (Jean 6, 38).

 

Il n'y a évidemment aucune place pour l'individualisme en Jésus, aucune recherche personnelle, tout est remis à la Souveraineté de Dieu:
"De la gloire, je n'en reçois pas qui vienne des hommes." (Jean 5, 41)

"Celui qui parle de lui-même cherche sa propre gloire; mais celui qui cherche la gloire de celui qui l'a envoyé, celui-là est véridique et il n'y a pas en lui d'imposture." (Jean 7, 18)

"Si je me glorifie moi-même, ma gloire n'est rien; c'est mon Père qui me glorifie, lui dont vous dites: Il est notre Dieu." (Jean 8, 54)

 

Et Jésus définit clairement quel doit être le cheminement des hommes:
"Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi." (Jean 14, 6).

"Une fois élevé de terre, j'attirerai tous les hommes à moi." (Jean 12, 32)
"Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive." (Mat 16, 34 – Marc 8, 34 – Luc 9, 23)

 

Initiation
&
Hiérarchies spirituelles 

Détailler le processus et les étapes des différents niveaux initiatiques que doit, au sein du mouvement New-Age, parcourir l'homme pour atteindre le sommet de son accomplissement spirituel, n'offre que bien peu d'intérêt. Contentons-nous donc de jeter un œil sur cet aperçu donné sur le site internet de Shakti, une "revue encyclopédique de spiritualité". On y apprend que les initiations sont au nombre de cinq pour le règne humain (pour le règne végétal, demandez à votre fleuriste), et qu'elles s'échelonnent sur une dizaine de vies (ce qui représente tout de même plusieurs siècles !), pour aboutir enfin à la dernière incarnation. Mais avant d'accéder à la première initiation, le prétendant aura du vivre des dizaines de milliers de vies, pendant lesquelles il aura progressé péniblement, surmontant les épreuves, et se libérant peu à peu de son karma... Et dire que nombreux sont ceux que cette théorie attire !

 

Voyons donc ce qu'il en est de ces initiations: Première initiation: "maîtrise du corps physique"; deuxième initiation: "maîtrise du corps astral" ; troisième initiation, "maîtrise du corps mental" ; quatrième initiation: "lorsque le lien avec l'âme est total" ; cinquième initiation:"lorsque la personnalité est totalement imprégnée par l'âme et l'Étincelle divine. L'individu est alors un Maître de sagesse ou Maître ascensionné". Et voilà la perspective offerte à l'adepte: devenir peu à peu son propre maître, jusqu'au titre de "Maître de sagesse"… Voilà sans doute l'une des principales raisons du succès de ces théories, qui mettent tristement en valeur l'immensité de l'orgueil humain…

 

Vous vous demandez où vous en êtes personnellement de ce parcours ? Ne vous faites pas trop d'illusions: selon le "Maître" deBenjamin Creme (in "La mission de Maitreya"), sur 6 milliards d'êtres humains actuellement en "incarnation": 6 millions (soit un pour mille) sont aux portes de la 1ère initiation – "c'est-à-dire ayant commencé à prendre contact avec leur âme", 850.000 ont atteint la 1ère initiation, 250.000 la 2ème, 3.000 ont la 3ème, et 450 seulement la 4ème… Et Benjamin Creme de préciser que le total des âmes s'élève à 60 milliards ! Nous avons donc toutes les chances de nous trouver dans la première catégorie (celle des humains particulièrement obtus et fermés aux révélations présentes), ce qui nous laisse encore quelques siècles devant nous pour progresser… Réjouissante perspective !

 

"Il y a eu de faux prophètes dans le peuple, comme il y aura aussi parmi vous de faux docteurs, qui introduiront des sectes pernicieuses et qui, reniant le Maître qui les a rachetés, attireront sur eux-mêmes une prompte perdition. Beaucoup suivront leurs débauches, et la voie de la vérité sera blasphémée, à cause d'eux. Par cupidité, au moyen de paroles trompeuses, ils trafiqueront de vous, eux dont le jugement depuis longtemps n'est pas inactif et dont la perdition ne sommeille pas." (2 P 2, 1-3)

 

Les précisions qui suivent prêteraient à sourire, si le sujet n'était pas aussi grave. Elles figurent dans un livre d'Alice Bailey (dont nous reparlerons): "Les rayons et les initiations", et reprises on ne peut plus sérieusement sur le site de Shakti déjà cité.

 

On y apprend que parmi les "Grands Initiés" se trouvaient Abraham et Moïse (difficile de les passer sous silence…), et qu'auraient atteint la "troisième initiation" les personnalités suivantes (accrochez-vous…):
Dans le domaine de la politique: Jeanne d'Arc, Francis Bacon, Abraham Lincoln, Winston Churchill, Mao Tsé Toung, Willy Brandt; pour ce qui est de la littérature: Shakespeare; pour la poésie: Milarepa (Tibet), qui était en fait un "Instructeur spirituel" (petit cachotier !); pour la peinture: Michel-Ange, Rembrandt, Raphaël, Titien, Véronèse, Gréco, Rubens (Léonard de Vinci avait quant à lui atteint la quatrième initiation !); et dans le domaine de la musique: Bach, Mozart et Beethoven. Mozart - qui est soit dit en passant déjà revenu (n'oubliez pas la "loi" de réincarnation) - aurait été dans sa vie suivante un luthier aimé de tous ceux qui le rencontraient, et aurait atteint également cette quatrième initiation !

 

On trouve également dans les 3 tomes de "La mission de Maitreya" de Benjamin Creme, de nombreuses précisions sur les fondateurs du mouvement New-Age, ainsi que sur quelques personnalités historiques, ou attachées au christianisme… précisions toujours reprises sur le site de Shakti. Par exemple: Helena Petrovna Blavatsky (1831-1891), co-fondatrice de la Société théosophique: "Ame de 1er rayon, personnalité de 2ème rayon, corps mental de 1er rayon, corps astral de 6ème rayon". On ne peut être plus précis !

 

Selon le Maître de Benjamin Creme, elle a été Cagliostro (1743-1795) dans sa vie précédente. et s'est réincarnée depuis 1984 dans un corps masculin à Leningrad (et devrait devenir un Maître à la fin de sa vie présente)…
Helena Roerich (1879-1947), occultiste russe: "Ame de 1er rayon, personnalité de 2ème rayon"... Comme H.P. Blavatsky, c'était aussi une disciple directe du Maître Morya... Jeanne d'Arc (1412-1431)... "Le Maître de Benjamin Creme a indiqué que les voix qu'elle entendait étaient les messages du Maître Hilarion, sur le même rayon d'âme qu'elle, c'est-à-dire le 5ème. De rayon de personnalité 1, elle était bien armée pour le commandement. Jeanne d'Arc est maintenant un Maître resté sur Terre."
Ste Thérese d'Avila (1515-1582)… Auraient atteint la 2ème initiation : Ste Marie, mère de Jésus: "Ame 6, personnalité 6, corps mental 2, corps astral 2. Elle a eu ensuite des incarnations non médiatiques avant de devenir Maître (5ème degré). Elle est maintenant un Maître du 6ème degré, à l'origine des "apparitions" de la Vierge, et de miracles tels que des larmes ou du sang coulant de statues ou d'icônes." Annie Besant (1847-1933): "Ame 7, personnalité 1, avec sous-rayon 7, donc très attachée à l'aspect rituel" (oh la vilaine !)… mais aussi Marie Curie (1867-1934), Indira Gandhi (1917-1984), ou Maria Callas (1923-1977) ! Auraient "commencé la polarisation mentale (à mi-chemin entre la 1ère et la 2ème initiation)" : Elisabeth 1ère (1533-1603), Catherine la Grande (1729-1796), George Sand (1804-1876), Sarah Bernhardt (1844-1923), Marguerite Yourcenar (1903-1987), Françoise Dolto (1908-1988), Greta Garbo (1905-1990)... mais aussi Ste Thérèse de Lisieux (1873-1897) ou Marthe Robin (1902-1981) !
Ces précisions sur le cheminement spirituel des âmes est pour le moins édifiant. Ce qui suit ne l'est pas moins….

 

Je vous propose de rester sur le site de Shakti, décidément inépuisable en ce domaine, lui qui a puisé aux sources "inspirées" que sontBenjamin Creme et Alice Bailey, pour nous offrir l'organigramme de l'actuelle Hiérarchie Spirituelle, qui préside aux destinées de notre monde...
Au sommet, se trouve le Seigneur du Monde, Sanat Kumara. Son bras droit (son premier ministre en quelque sorte) est le Christ. Mais attention, il ne s'agit pas de Jésus. Ce Christ est Maitreya (son nom oriental), "Maître du 7ème degré, Maître des Maîtres de 6ème degré chargés des ashrams sur les sept rayons, lesquels sont les chefs d'autres Maîtres de 6ème et 5ème degrés." Vous suivez ? Bien, poursuivons donc la revue de détail.


Voici quelques noms de "Maîtres" restés sur terre (ils seraient une soixantaine à ce jour), pour notre plus grand bien, avec leur situation spirituelle (il est important de savoir à qui l'on parle) et leurs antécédents: "Maître Morya ou Maître M., du 6ème degré sur le 1er rayon, qui fut l'apôtre Pierre; Maître Koot Houmi (Hoomi) ou Maître K.H., du 6ème degré, sur le 2ème rayon, qui fut Jean le bien aimé; Maître Sérapis du 6ème degré sur le 4ème rayon; Maître Hilarion du 6ème degré sur le 5ème rayon, qui fut Paul de Tarse; Maître Jésus, 6ème degré, sur le 6ème rayon, qui fut Jésus de Nazareth puis Apollonius de Tyane; Maître Rakoczi, ou Maître R., du 6ème degré sur le 7ème rayon, qui fut Francis Bacon puis le comte de Saint-Germain; et enfin le Maître qui fut Marie, la mère de Jésus, du 6ème degré sur le 6ème rayon, qui est à l'origine des apparitions de la Vierge Marie."

 

Au-delà du ridicule d'une telle énumération, retenons la gravité d'une telle récupération des principaux piliers du christianisme… Songeons que tout cela est pris très au sérieux par de nombreux adeptes, prêts à gober tout ce qui leur est donné en pâture, pourvu qu'ils aient l'espérance d'une élévation spirituelle, et l'accès à la Connaissance… Et il y a là de quoi frémir…

 

"Auparavant doit venir l'apostasie et se révéler l'Homme impie, l'Etre perdu, l'Adversaire, celui qui s'élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu'à s'asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu..." (2 Th 2, 3-4)

"Sa venue à lui, l'Impie, aura été marquée, par l'influence de Satan, de toute espèce d'œuvres de puissance, de signes et de prodiges mensongers, comme de toutes les tromperies du mal, à l'adresse de ceux qui sont voués à la perdition pour n'avoir pas accueilli l'amour de la vérité qui leur aurait valu d'être sauvés..." (2 Th 2, 9-10)

 

Les méditations

Le New-Age propose à l'adepte "d'élargir sa conscience". Il trouvera en même temps mieux-être personnel et accès à la Connaissance.
Quelques techniques de base lui sont proposées pour cela: méditation, relaxation, yoga, sophrologie…

 

Le danger de la contemplation narcissique y est évident. Est-il besoin de préciser que la sérénité naturelle induite par ces techniques (yoga, zen, etc.) - qui provoquent la dissolution de la conscience personnelle - n'a rien à voir avec la Paix surnaturelle de l'Esprit ? Celle-ci ne nécessite pas un recours à des "techniques" humaines pour être accueillie. Et il n'y a pas plus de yoga chrétien qu'il n'y a d'oraisonhindoue ou bouddhiste. Par ailleurs, les sensations du corps éprouvées lors de ces séances de "relaxation" sont volontairement ou non confondues par les pratiquants avec de soi-disant phénomènes spirituels…

 

Le New-Age ayant largement puisé dans les philosophies bouddhiste et hindouiste les éléments constitutifs de ces techniques de méditation, il semble important d'étudier succinctement mais précisément ce qu'il en est véritablement en Orient.

 

Le Bouddhisme tout d'abord.

Pour le bouddhiste, la vie en ce monde est douleur. La seule quête spirituelle possible consiste donc à s'en échapper. Dans son premier sermon à Bénarès, Siddharta Gautama devenu Buddha (= éveillé) dira qu'il faut arracher les hommes à la souffrance, le seul moyen efficace pour parvenir à ce but étant l'extinction du désir: "L'extinction du désir, l'extinction de la haine, l'extinction de l'illusion (causes ou fruits du désir), cela, ô moines, est appelé l'absolu. [...] Ne te laisse pas abuser, Ananda, la vie est une longue agonie. [...] N'attendez rien des dieux impitoyables... Attendez tout de vous-mêmes, en n'oubliant pas que chaque homme crée sa prison, et que chacun peut acquérir un pouvoir supérieur à celui d'Indra lui-même." (Indra est le Roi des dieux dans le védisme-hindouisme). L'homme étant défini comme son propre maître, c'est donc par son effort personnel qu'il supprimera la souffrance, en passant par l'extinction du désir.

 

Ashvaghosa, l'un des maîtres actuels du bouddhisme tibétain en France, explicite ainsi l'idée de l'impermanence des choses, et de l'illusion de la vie: "Toute existence est comme une réflexion dans un miroir, sans substance, un simple fantôme de l'esprit. [...] Les idées cessant, le monde se termine aussi [...]. Tous les phénomènes ont leur origine dans l'esprit et n'ont réellement aucune forme extérieure: c'est une erreur de croire que quelque chose est là." Rien n'existerait donc en dehors de l'esprit.

 

Nagarjuna, autre maître du bouddhisme en France, va encore plus loin: "L'océan du sans formes est à la base de toutes les formes... Il n'y a ni naissance ni mort, ni unité ni pluralité. Tout est illusion, tout est Vide. Cette vacuité n'est ni l'être ni le non-être, ni le néant..." Il y a là identification du Vide et de l'esprit pur, dans l'unique Réalité.

 

On retrouve cette approche de la Réalité bouddhique dans le Livre des Morts tibétains (Bardo-Thödol): "Tu vas connaître la Réalité, dans l'état de Bardo où toutes choses sont comme le ciel vide sans nuages (la Sagesse du Miroir), et où l'intelligence nue et sans tache est comme une vacuité transparente sans circonférence ni centre (la Sagesse du Vide)..."
Dans ce monde d'illusion, les dieux mêmes ne sont que création de l'esprit de l'homme: "Puisses-tu reconnaître que toute apparition (toute déité) est une réflexion de ta propre conscience. [...] Puisses-tu ne pas craindre les troupes des divinités paisibles et irritées qui sont tes propres formes-pensées."

 

Une dernière citation permettra de situer parfaitement la pensée bouddhique relative à la nature de l'esprit. Nous l'emprunterons au Lama Denis Teundroup, disciple européen de Kalou Rinpoche, et "père-abbé" du monastère de Karma-ling (cité in "Les Racines du Monde", de Jean Denis, 1993):

 

"L'enseignement bouddhique propose la compréhension de ce qui est intérieur à nous-mêmes: l'esprit. Le bouddhisme est donc ce qu'on peut appeler une voie d'intériorité. [...] Cette pratique est fondée sur la méditation, c'est-à-dire l'expérience d'une relation juste à notre vécu intérieur et extérieur, à toutes nos expériences. [...] Nous portons en nous la racine de nos conditionnements et de nos souffrances, tout comme nous portons en nous l'éveil, la nature du Buddha, l'état fondamental de l'esprit au-delà du jeu des projections de l'ego. [...] Dans la méditation bouddhique, il n'y a plus ni sujet ni objet, mais l'expérience immédiate d'une réalité non dualiste. Car ne n'est plus l'intellect qui perçoit, mais une qualité énergétique particulière, permettant l'unification de l'esprit par la libération des projections conditionnées de l'ego. La connaissance transcendante est la découverte de l'expérience non dualiste en laquelle l'esprit est auto-connaissant, il est le sujet et l'objet de sa propre connaissance. [...] Cette connaissance est au-delà des concepts et au-delà de toutes les formulations.
 

Le pur esprit irradiant en lui-même est le corps de la divinité, une luminosité vide, l'absence de toute fixation, tout comme l'expérience de la lune dans l'eau. Son mode d'être essentiel est vacuité, liberté vis-à-vis de toutes les catégories du mental. [...] Sans origine, sans fin et sans localisation spatiale, elle est immortelle, c'est l'intelligence fondamentale, la merveille des merveilles."

 

Ne perdons jamais de vue la différence entre ces deux termes: fusion et union, celui-ci supposant deux objets à unir, principe de la dualité.
 

On voit donc ici affirmée le principe de la non dualité, associé à l'état de vacuité qui caractérise la pureté acquise de l'esprit. Nous sommes bien aux antipodes du christianisme. Mais retenons ces formulations: elles seront reprises (et déformées) par tous les gourous new-age...

 

L'Hindouisme ensuite.

Nous retrouvons la notion de non-dualité, mais cette fois dans l'intime identification entre le Soi (le moi profond de l'être humain, l'âtman selon le terme hindou sanskrit) et l'Esprit immortel, le Principe Unique, l'Absolu: le Brahman. L'Upanishad, écrit du VIII° siècle avant Jésus-Christ, définissait ainsi cette double "qualité" du Brahman: "Il y a en vérité deux aspects du Brahman: le corporel et l'incorporel, le mortel et l'immortel, le fixe et le mobile, le sensible et le transcendant." (2, 3, 1).

 

Pour parvenir à saisir cette unicité au plus profond de lui-même, l'hindou est appelé à pratiquer le yoga, discipline qui lui ouvre le chemin de l'intériorité. Shankara écrit ainsi au VIII° siècle de notre ère: "Le Soi est Brahman [...] le Soi est tout cet univers. Rien d'autre n'existe que le Soi... Je suis Brahman!" ("Shankara et le Vedanta" de Paul Martin-Dubost, Paris, Le Seuil, 1973). Et cette identification à l'Absolu atteint son sommet dans les lignes qui suivent, extraites d'un poème de Shankara: "Je ne connais ni la mort, ni le doute, ni les distinctions de castes. Point de père, point de mère. Je n'ai jamais pris naissance. Je n'ai aucun ami, aucun parent, point de maître, point de disciple. Je suis Intelligence et Félicité pures..." (op. cit.) Être, Intelligence et Félicité (Sac-Cid-Ananda), triple qualité du Brahman, unifié ici au Soi de Shankara.

 

Un autre élément de la croyance hindoue est à prendre en compte: le samsara, principe de la réincarnation. Dans la Bhagavad-Gita, Vishnu - créateur et destructeur des cycles du monde - s'exprime ainsi: "Les mondes sont assujettis aux retours [..]. Quand on sait que la durée complète d'un "jour de Brahman" est de mille éons, et de mille éons sa nuit, on connaît vraiment ce qu'est un cycle cosmique. [...] Cette multitude des êtres, lorsqu'elle est venue encore et encore à l'existence, se résorbe malgré soi, quand vient "la nuit" ; elle surgit à nouveau quand revient "le jour"." (VIII, 16-19). Cycle des mondes, cycle de la vie des êtres. Toujours dans la Bhagavad-Gita, est explicité ce retour incessant à l'existence: "En vérité, jamais ne fut le temps où je n'étais point, et plus tard ne viendra pas celui où je ne serai pas. Comme l'âme passe physiquement à travers enfance et jeunesse et vieillesse, ainsi passe-t-elle à travers les changements de corps. Le sage ne s'y trompe pas. [...] Les corps ont une fin; l'esprit qui s'y incarne est éternel, indestructible, incommensurable. [...] A la façon d'un homme qui a rejeté ses vêtements usagés et en prend d'autres, neufs, l'âme incarnée, rejetant son corps usé, voyage dans d'autres qui sont neufs. [...] En vérité, pour qui est né, la mort est certaine et certaine la renaissance pour qui est mort..." (II, 12-13, 18, 22, 27)

 

Notons au passage que pour ce qui concerne la connaissance de ces vies antérieures, très en vogue dans tous les mouvements New-Age, hindouistes et bouddhistes restent extrêmement réservés. Tel le Lama Denis Teundroup déjà cité, qui rappelle que "en ce qui concerne les souvenirs des vies antérieures que prétendent avoir les êtres ordinaires, le bouddhisme demeure très réservé. Il n'est pas possible de distinguer ce qui peut être authentique de la pure affabulation ou hallucination. Dans le doute, mieux vaut traiter ce genre de phénomènes comme des projections illusoires, ce qui évite de délirer." (cité in "Les Racines du Monde", de Jean Denis, 1993).
Les Maîtres du New-Age n'étant pas des "êtres ordinaires", il est bien évident qu'ils peuvent ne pas se sentir concernés par cette prudente mise en garde...

 

On l'aura compris, cette perspective de réincarnations infinies n'a rien de réjouissant. Les philosophies orientales ont donc axé la quête de l'être humain sur la Délivrance de cet enchaînement (au sens strict du terme) des réincarnations. Cette délivrance est appelée moksha. Reprenons la Bhagavad-Gita: "Les sages adonnés à la vigilance, détachés du fruit des actes, sont libérés du lien des renaissances [...]. L'homme qui, abandonnant tout ses désirs, va et vient, libre d'attachement, ne dit plus: C'est à moi, ni Je; celui-là accède à la paix [...], ne s'égare plus [...]; à l'heure ultime il atteint le Brahman." (II, 51, 71-72) "Ceux pour qui la connaissance détruit l'inconnaissance, pour eux la connaissance tel un soleil, illumine la réalité suprême. Tendus vers elle d'un esprit vigilant, s'identifiant à elle, ayant en elle leur fin ultime, ils arrivent à l'état où il n'y a plus de retour [...]. Le Sage, tendu vers la Délivrance, sa fin ultime, est dépris du désir, de la crainte, de la colère; il est libéré à jamais." (V, 16-17, 27-28).

 

La quête spirituelle de l'oriental consiste donc à échapper à la roue des réincarnations. Au bout du voyage: le Vide pour le bouddhisme, et la fusion avec le Brahman pour l'hindouisme.

 

Il peut évidemment sembler étrange qu'une telle perspective ait pu trouver écho en Occident, mais comme nous avons commencé à le voir, pour masquer la lourdeur de cette loi implacable, les porte-parole du mouvement New-Age n'ont pas manqué d'arguments... tous aussi fallacieux que trompeurs. Revenons donc à leur écoute.

 

Méditations Nouvel Age  

L'individualisme spirituel qui caractérise ces pratiques de méditation présentées par les groupements New-Age, est toujours masqué par un vocabulaire chatoyant, qui enveloppe d'un papier cadeau rutilant ces méditations "unifiantes", censées agir pour le mieux-être de la planète tout entière. Un succédané de charité, passive, édulcorée, et de surcroît pratiquée à distance !

 

En voici un exemple, avec la "Méditation du Pissenlit" proposée par Daniel Meurois sur son site internet. On y retrouve les incontournables références au passé lointain et inconnu (les "peuples du soleil"), les termes empruntés à l'Orient ("prâna", mot qui désigne dans le monde hindouiste l'ensemble des énergies qui circulent en l'homme), et les formulations habituelles du New-Age ("ouvrez votre âme", "l'écran de votre conscience", "visualisation", "harmonie", etc.):

 

"Voici une vieille façon d'agir utilisée autrefois chez les peuples du Soleil. Ce n'est pas une technique mais un moyen d'ouvrir la nouvelle ère du Don. Nous la nommons la Méditation du pissenlit. Elle voyagera à nouveau de poitrine en poitrine. Voici: asseyez-vous à même le sol et les pieds déchaussés. Lorsque vous serez calme et relaxé, ouvrez votre âme, écoutez le silence et sentez la lumière du prana tourner autour de vous.
Ensuite, commencez à projeter sur l'écran de votre conscience la sphère duveteuse d'un pissenlit prêt à essaimer. Visualisez bien les milles graines dans toute leur perfection et chargez chacune d'elles de toutes les qualité dont la Terre a soif. Ainsi rayonneront la graine de l'harmonie, celle de la tolérance, de l'amour inconditionnel, de la Paix et de tous les trésors qu'un cœur peut contenir et générer. Lorsque la sphère duveteuse sera ainsi chargée de ces messages, avec votre "souffle intérieur", éparpillez-les et voyez-les se disséminer à travers les cieux des cent contrées de la Terre et y déverser leur suc..."

 

Cette émission à distance de "bonnes vibrations", "d'ondes harmonieuses", "d'énergie positive"… remplace ainsi avantageusement pour l'adepte du New-Age l'épuisante charité du christianisme. "Moi d'abord": si je vais bien, le monde ira mieux, donc je ne m'occupe que de moi. Voilà ce dont on a convaincu l'adepte, qui ne doit avoir pour seule préoccupation que son bien-être, son évolution spirituelle, son destin. Et plongé dans cet égocentrisme spirituel, le "new-ager" est bien persuadé d'aimer l'humanité entière…

 

Par ailleurs, notez qu'au cours de cette méditation, c'est le cœur qui génère de lui-même les trésors d'amour qu'il va diffuser autour de lui… L'homme est considéré comme un petit dieu, capable de toutes les merveilles, de toutes les réalisations, de tous les "possibles". Cette auto-déification est une constante nous l'avons dit de la philosophie New-Age. Elle rejoint ici la philosophie hindouiste, qui recherche la fusion du Moi et du Soi, refusant toute idée de dualité (d'altérité), et donc d'un rapport Créateur – créature. C'est la raison pour laquelle il n'est jamais question de Dieu dans les doctrines New-Age, mais tout au plus de la "Divinité", vaste concept indéfinissable, que les différents "gourous" se gardent d'ailleurs bien de préciser davantage…

 

Également empruntée à l'Orient, une affirmation telle que "Ce que vous vivez sur terre, n'est qu'illusion", trouvée sur le site de L'éveil à la conscience (dont le logo est un magnifique arc-en-ciel…). Sur ce même site, on trouve d'autres citations telles que: "Au sujet de vos croyances: Vous croyez à certaines choses mais des quantités de gens croient complètement autre chose et même le contraire. Les croyances ne sont pas la réalité. Tous ceux qui deviennent conscients découvrent la réalité." Autrement dit, votre foi ne vaut rien, puisque d'autres personnes ont une foi différente de la vôtre…

 

"Jésus leur dit: « Je suis le pain de vie. Qui vient à moi n'aura jamais faim ; qui croit en moi n'aura jamais soif »." (Jean 6, 35)

"« En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle »." (Jean 6, 47)

"Jésus l'a dit, il l'a clamé : « Qui croit en moi, ce n'est pas en moi qu'il croit, mais en celui qui m'a envoyé. […] Moi, lumière, je suis venu dans le monde pour que quiconque croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres »." (Jean 12, 44-46)

 

On y lit aussi : "La connaissance est pratique, concrète et vécue. La connaissance est l'expérience d'une certaine réalité. La connaissance vécue par l'expérience directe procure la conscience." … Comment ne pas avoir pitié de cet auteur, qui ignore que "l'amour du Christ surpasse toute connaissance" (Ep 3, 18) !

 

Ce même site propose tout un panel de méditations ("méditation sur l'opulence", "méditation sur la lumière dorée", "méditation avec le symbole de la pyramide"), et de nombreuses méditations suggérées par les "Êtres de Lumière"… Particulièrement remarquable est la "Méditation Merkabah", qui permet, après une longue séance de "toucher de doigt" et de respirations cadencées en 7 secondes, de pénétrer dans les "vibrations de la 5° dimension" (la quatrième dimension est complètement dépassée !). mais parvenu à ce degré,"L'Énergie est multipliée par mille, mais attention aux pensées, elles sont très puissantes."… Ah, la puissance de la pensée, voilà décidemment un appât bien classique, sous couvert de charabia ésotérico-magique !

 

Sur le site Shakti, "Revue encyclopédique de spiritualité, élaborée dans le respect de toutes les religions et à la lumière des enseignements ésotériques" (mais typiquement New-Age !), il nous est proposé cette citation de Saï Baba: "Si l'homme désire transformer sa vie intérieure comme extérieure en une vie de splendeur, la méditation est la meilleure discipline spirituelle qu'il puisse adopter." Notez bien: la méditation, pas la prière. Sur ce même site, l'on nous rappelle que méditer, c'est "simplement être, sans activité, sans pensée, sans émotion." (Osho Rajneesh, in "Techniques de méditation"). Et la citation suivante de Benjamin Creme(né en 1922, l'une des références incontournables aujourd'hui du Nouvel Age), précise ce qu'il en est (in "La Transmission, une méditation pour le Nouvel Age"): "La prière dans sa forme ordinaire est l'expression d'une supplication habituellement manifestée par l'intermédiaire du plexus solaire. Dans sa forme la plus élevée, la prière est aspiration; plus l'aspiration est élevée, plus elle fait appel à l'activité du cœur. La méditation est une méthode visant à faire passer la personnalité sous le contrôle de l'âme. Par la méditation, un pont est édifié entre le cerveau physique et l'âme". La prière, acte d'amour. La méditation, oubli du cœur. Au-delà du jargon ésotérico-new-age de l'auteur, on ne pouvait mieux résumer l'antinomie de la pratique chrétienne et de celle du Nouvel Age !

 

On retrouve également sur cette page internet de nombreuses allusions au "Traité sur la Magie Blanche" d'Alice Bailey, qui fait également référence dans ce milieu.

 

Plus instructive sur ce site est la présentation des différentes formes de méditations: "méditation Zen", "Kriya Yoga", "méditation transcendantale", "méditation de transmission", "méditation sur la Lumière", etc..
Notons au passage que le Yoga semble avoir été introduit en France dès les années 1930 par un certain Félix Guyot (1880-1960), qui venait de publier à Londres sous le pseudonyme de C. Kerneiz un ouvrage intitulé "Yoga for the West" (Rieder, London). Il publie à Paris des articles dans la revue "Le Lotus bleu" (organe de liaison de la Société Théosophique), et tient la rubrique astrologique du "Journal de la Femme". C'est à la même époque que Jean Herbert (1897-1980) fait connaître en France les "Maîtres" de l'Hindouisme. Les cours dispensés par Kerneiz rencontrent un grand succès, cours destinés comme il le déclare lui-même dans la préface de son livre "à celui qui, en désaccord fondamental avec son milieu, douloureusement insatisfait de la vie tant dans ce qu’elle lui donne de bon que dans ce qu’elle lui donne de mauvais, a ressenti l’appel de l’Absolu"… L'expression "douloureusement insatisfait de la vie" sera reprise par les marchands de stages, ateliers, conférences et initiations de tout poils, nous le verrons au chapitre "maladie-guérison".

 

L'on apprend donc sur ce site internet cité plus haut que dans la "Méditation transcendantale", "l'énergie provient d'un Maître de la Hiérarchie, comme Guru Dev par exemple", qu'elle a été introduite en occident par Maharishi Mahesh Yogi, et qu'elle aurait 4 millions d'adeptes dans le monde entier, dont 50.000 en France… On devient pratiquant à la suite d'une cérémonie d'initiation, au cours de laquelle est attribuée "les yeux dans les yeux" un "mantra", qui sera aussi personnel que secret… "Initiation", "secret", voilà les mots choisis pour attirer l'adepte potentiel. Mais pour compléter l'attirail, l'accès aux pouvoirs surnaturels est indispensable: "La méditation peut, selon le niveau du méditant, engendrer des phénomènes "surnaturels" décrits par Patanjali (puissance, omniscience, invisibilité, lévitation...)."

 

"Vous serez comme des dieux…" (Gn 3, 5) !

 

Dans la "Méditation de transmission" signalée plus haut – "méditation de service tournée vers l'humanité dans son ensemble","L'énergie est contrôlée par les Maîtres de la Hiérarchie. Elle est disponible dès la récitation de la Grande Invocation... L'essentiel du travail est accompli par les Maîtres." Nous expliciterons cette référence à la "Hiérarchie" un peu plus loin. Qu'est-ce que cette "Grande Invocation" ? Un ersatz de prière, divisé en strophes, où l'on lit des phrases telles que "Du point de Lumière dans la Pensée de Dieu, que la lumière afflue dans la pensée des hommes""Que le dessein guide le faible vouloir des hommes, le Dessein queles Maîtres connaissent et servent""Que Lumière, Amour et Puissance restaurent le Plan sur la Terre."… Et Benjamin Creme de conseiller, en récitant la Grande Invocation, "de visualiser le Bouddha pour la 1ère strophe, le Christ pour la seconde et une boule de lumière blanche pour la troisième"… On voit apparaître pour la première fois cette "Invocation" dans "L'état de disciple dans le Nouvel Age" d'Alice Bailey, livre qu'elle a rédigé comme tous les autres sous la dictée d'un "Guide spirituel invisible", Djawhal Kuhl, "grand esprit de la Fraternité Blanche Universelle". Cette invocation y est présentée comme étant appelée à remplacer le "Notre Père"… Le dernier ouvrage qu'Alice Bailey écrit sous la dictée de D.K. se termine par cet appel: "Puissent la lumière, l'amour et le pouvoir briller sur votre chemin, et puissiez-vous, en temps voulu et le plus tôt possible, vous tenir devant l'Initiateur…" "Initiation", "pouvoir": nous sommes toujours dans ce même schéma d'une ascension forcée, où sous couvert d'amour universel, on amène l'adepte sur ce terrible chemin de l'orgueil spirituel…
 

Peut-être plus grave encore – mais il semble n'y avoir pas de limite dans ce domaine que nous avons abordé… - est la "Méditation sur la lumière", proposée par Saï Baba. Inutile de détailler le long déroulement de cette méditation. Signalons seulement que le méditant la conclut par cette affirmation, énoncée lentement: "Le Père et Moi sommes un, Je suis un avec Jésus et avec le Père, Je suis Divin, Je suis Celui qui Suis: SO-HAM SO-HAM SO-HAM, JE-SUS JE-SUS JE-SUS." Est-il nécessaire de rappeler que "JE SUIS celui qui suis" est la traduction (si tant est que cette traduction soit possible…) des quatre lettres hébraïques du Tétragramme sacré, du Nom imprononçable de Dieu, qu'entendit Moïse sur le Mont Sinaï ?
Nous reparlerons de Saï Baba un peu plus loin.

 

"Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la charité, je ne suis qu'airain qui sonne et cymbale qui retentit. Quand j'aurais le don de prophétie et que je connaîtrais tous les mystères et toute la science, quand j'aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien…" (1 Cor 13, 1-3)

 

Signalons encore le "site de Jésus-Christ", site "purement divin", qui "vous propose de vivre un moment énergétique privilégié avec celui qui 2000 ans après fait encore parler de lui tellement son passage a marqué les humains". Sur ce site est proposée une méditation mensuelle, "face à l'est, séance vibratoire de 20 mn maximum. Ne manquez pas de rendre Grâces à la Divinité pour ce moment Divin". Le texte de la méditation est court, tel celui-ci: "Merci Christ de m'avoir libéré de toutes mes illusions", texte sous lequel est précisé que "L'année 2002 correspond à l'année chinoise, Cheval Eau, l'année la plus prospère de l'astrologie chinoise. Cette année Cheval Eau ne revient que chaque 59 ans." A noter que l'on retrouve ces même phrases sur le site internet d'Eileen Caddy (voir plus loin), dont celui-ci dépend directement… Avec une adresse internet qui mentionne explicitement le Christ (lechrist.net), le piège est plus grand encore…

 

Quelques sites s'annonçant comme "catholiques" n'échappent pas à cette tentation du syncrétisme, et aux pièges tendus par la vague du Nouvel Age. Nous n’en sommes pas étonné vu la source babylonienne du Catholicisme que l’Apocalypse nomme «la Grande Prostituée». Témoin ce site où l'on trouve après des pages d'Évangile, des Psaumes et des citations de saint Jean de la Croix, d'autres textes bien loin du catholicisme, parmi lesquels "Bouddha vivant, Christ vivant" de Thich Nhat Hanh ("le bouddhisme n'est fait que d'éléments non-bouddhiques, dont les éléments chrétiens, et le christianisme est fait d'éléments non-chrétiens, dont des éléments bouddhistes" …"Quand nous sommes calmes, quand nous regardons profondément en touchant la source de notre vraie sagesse, nous touchons le Bouddha vivant et le Christ vivant en nous-mêmes et en chaque personne que nous rencontrons"…), quelques "logions" de l'Évangile apocryphe de Thomas, ou encore ce texte de Krishnamurti (1895-1986) dont nous reparlerons plus loin, concernant précisément la méditation: "Écoutez le mouvement de vos pensées; ne les contrôlez pas, ne les façonnez pas, ne dites pas: "Celle-ci est bonne, celle-là est mauvaise." Mais accompagnez-en le mouvement. C'est cela, la conscience dénuée de tout choix, de toute condamnation, comparaison ou interprétation, et qui n'est qu'observation. Voilà qui rend l'esprit hautement sensitif." Nous sommes là dans une autre constante du New-Age: si le Bien et le Mal sont reconnus dans l'Absolu, ils n'ont aucune existence sur le plan relatif. Voilà qui explicite un peu mieux encore le succès rencontré par cette philosophie du Nouvel Age… Mais à qui peut profiter cette suppression de la distinction entre le bien et le mal, sinon au maître du Mal lui-même…?

 

"Les exercices corporels, eux, ne servent pas à grand-chose: la piété au contraire est utile à tout, car elle a la promesse de la vie, de la vie présente comme de la vie future." (1 Tim 4, 8)

 

Il y a, c'est exact, bien des étapes, des degrés, sur le chemin de l'amour. Mais nul besoin d'initiation pour les parcourir: ce cheminement – qui est aussi un "dépouillement" - s'accomplit au fur et à mesure de notre abandon confiant entre les mains de Jésus-Christ sur le chemin de la Croix. Ce n'est pas la connaissance qui fait grandir, c'est l'Amour ! Mais attention, l’amour sans la vérité n’est que de la prostitution spirituelle. Or selon les Écritures l’amour n’est pas un sentiment, mais un renoncement, un sacrifice:

 

"Qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi la sauvera" (Mat 10, 39 & 16, 25 – Marc 8, 35 – Luc 9, 24 & 17, 33).

"Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis" (Jean 15, 13).

 

Il est également important de bien noter la différence entre l'extase et l'enstase, telle que les définissait très bien Mircea Eliade: dans l'extase, le mystique est "ravi" hors de lui-même vers le Bien-Aimé. Dans l'enstase, l'adepte rentre complètement en lui-même, pour atteindre l'expérience impersonnelle du pur acte d'exister. L'extase appartient à la mystique chrétienne, l'enstase est spécifiquement "new-age".

 

"Apprends à rechercher toutes les réponses en toi" lit-on dans "La petite voix" d'Eileen Caddy (titre original: "Opening Doors Within"). "Eileen Caddy est une référence pour tous ceux qui veulent accéder à une nouvelle conscience" lit-on sur la page d'accueil de son site internet. On y trouve surtout une véritable invitation à rejoindre le Nouvel Age: "Un nouveau concept est comme une graine plantée dans la chaleur de ta maison. La graine ne peut être retirée directement de cette atmosphère tant qu'elle n'est pas assez forte pour être plantée là où elle doit résister aux éléments extérieurs. Il en est de même avec un nouveau concept: il ne peut être sorti comme un lapin d'un chapeau par un prestidigitateur. Lui donner substance et forme prend du temps. Il doit être testé sur un petit nombre avant de pouvoir être donné à tous. Cela demande un grand amour et une grande patience; cela demande de la consécration et du dévouement. Ce processus est ce qui se passe en ce moment avec le Nouvel Age. C'est tout neuf. Beaucoup de nouvelles idées et de nouveaux concepts sont en train de naître, et chacun doit être testé, compris, aimé et chéri. Si tu es un pionnier du Nouvel Age, tu dois être prêt à aller de l'avant sans peur et être prêt à essayer le plus neuf du neuf." Tout tenter, et ne rien craindre dans le domaine de l'expérimentation… Voilà la porte ouverte à tous les dangers, sous couvert de "dévouement" à la cause de l'ère nouvelle. A qui profite le crime ?

 

De même Paolo Coelho invite-t-il son lecteur à suivre sa "légende personnelle" dans "L'Alchimiste" (1994), livre vendu à près de 10 millions d'exemplaires et traduit en trente-quatre langues... Vous noterez au passage que la première scène de ce livre se déroule devant une petite église en ruine, image bien révélatrice de la pensée de l'auteur: "Le toit s'était écroulé depuis longtemps et un énorme sycomore avait grandi à l'emplacement où se trouvait autrefois la sacristie…" Et un peu plus loin il ajoute: "Il avait étudié la théologie, mais connaître le monde, c'était là quelque chose de bien plus important que de connaître Dieu ou les péchés des hommes."Voilà l'intention clairement posée ! Revenons à la "Légende personnelle": "Le jeune homme ne savait pas ce que voulait dire "Légende Personnelle". "C'est ce que tu as toujours souhaité faire. Chacun de nous, en sa prime jeunesse, sait quelle est sa Légende Personnelle. A cette époque de la vie, tout est clair, tout est possible, et l'on n'a pas peur de rêver et de souhaiter tout ce qu'on aimerait faire de sa vie. Cependant, à mesure que le temps s'écoule, une force mystérieuse commence à essayer de prouver qu'il est impossible de réaliser sa Légende Personnelle. […] Il y a une grande vérité en ce monde: qui que tu sois et quoi que tu fasses, lorsque tu veux vraiment quelque chose, c'est que ce désir est né dans l'âme de l'Univers. C'est ta mission sur la Terre.[…]. Accomplir sa Légende Personnelle est la seule et unique obligation des hommes. Tout n'est qu'une seule chose. Et quand tu veux quelque chose, tout l'Univers conspire à te permettre de réaliser ton désir..." Voilà le seul chemin offert à l'homme: assouvir ses désirs… Tel est le condensé de ce message qui a fait le tour du monde… terrifiant ! "Relâche-toi et laisse-Moi prendre les rênes. Pourquoi ne pas jouir de la vie?" insiste la "Petite Voix" d'Eileen Caddy. Comment résister à une philosophie aussi permissive, qui prône la jouissance passive et l'autosatisfaction ? L'hédonisme reste sous-jacent dans bien des aspects de la philosophie Nouvel-Age: priorité accordée au plaisir et à la liberté sans frein, au mépris de toute morale, naturelle ou chrétienne. Et tandis que les médias se pâment d'admiration devant ces livres, l'on s'étonne de voir la jeunesse braver toute forme d'autorité et réclamer toujours plus de liberté et moins de contraintes…

 

On pourra lire avec intérêt sur ce sujet "Hédonisme ou Christianisme ?" de Maurice Caillet, médecin, chirurgien, et ancien franc-maçon, qui a vécu à 50 ans un retournement "inattendu" de sa vie en découvrant le message libérateur de l'Evangile… Thérèse de Lisieux disait de la prière qu'elle est un "dialogue d'amour avec Dieu", et le Padre Pio "un cœur à cœur avec Dieu". Est-il besoin de techniques pour apprendre à aimer ?

 

Maîtres invisibles
&
Royaumes secrets 

C'est le baron von Hund, fondateur de la Stricte Observance Templière, qui invente en 1756 les Supérieurs Inconnus: ce sont des sages tout-puissants auxquels sa société est censée obéir. Cette notion de hiérarchie occulte va dès lors se propager rapidement, offrant à toutes les doctrines personnelles une légitimité "supérieure" et une portée universelle.

 

On les retrouve ainsi à la fondation de la Société de Théosophie aux USA en 1875, Société fondée nous l'avons vu par Helena Petrovna Blavatsky (1831-1891) et le colonel Henry Steel Olcott (1832-1907). Dans son premier ouvrage ("Isis dévoilée"), H.P. Blavatsky fait état de communications transmises par des êtres mystérieux, gardiens des vérités oubliées, ces fameux Supérieurs Inconnus. Dans son deuxième ouvrage ("La Doctrine Secrète"), emprunté cette fois aux littératures hindouistes et bouddhiques, les Supérieurs Inconnus sont remplacés par les Maîtres Invisibles, vivant dans un sanctuaire sacré de l'Himalaya: le royaume deShamballa (Il s'agit en fait dans la tradition bouddhiste de la terre mystérieuse des Bouddhas).

 

Ce royaume de Shamballa sera exploré et détaillé par Alice Bailey (1880-1949). Très marquée par la théorie des Maîtres Invisibles, elle affirme être en contact avec l'un d'entre eux, Djawahl Khul, qui lui dictera par télépathie pas moins de 18 ouvrages, qui font toujours référence dans de nombreux groupes New-Age. Elle écrit en septembre 1939 ces lignes pour le moins inquiétantes (La situation générale sur terre, in "L'Extériorisation de la Hiérarchie"): "La force de Shamballa est active chez tous, car elle produit la fédération et la synthèse (…). Les hommes qui inspirèrent et commencèrent la révolution française; le grand conquérant, Napoléon; Bismarck, le créateur d'une nation; Mussolini, qui a régénéré son peuple; Hitler, qui a porté sur ses épaules un peuple en détresse; Lénine, l'idéaliste; Staline et Franco, sont tous des expressions de la force de Shamballa et de certaines énergies peu comprises. Ils ont opéré des changements significatifs à leur époque et pour leur génération, ils ont modifié la face de l'Europe et, par contrecoup, affecté l'Asie ainsi que les attitudes conditionnant la vie et la ligne de conduite politique de l'Amérique." Elle se trouvera bien obligée de changer radicalement d'avis moins d'un an plus tard…

 

Louis Jacoliot (1806-1890), contemporain de Blavatsky, parle semble-t-il le premier du palais secret des Brahmâtmâ, chef suprême de tous les initiés: l'Agarttha (traduction d'un terme du bouddhisme: mahayânâ).

 

Saint-Yves d'Alveydre (1842-1909) reprend cette idée et dévoile à son tour dans un ouvrage publié après sa mort (en 1910: "Mission de l'Inde en Europe" – le titre est tout un programme !) l'existence d'une cité souterraine appelée l'Agarttha, siège du "Souverain Pontife""support des âmes dans l'Esprit de Dieu". Il est évident qu'excepté les plus hauts initiés, personne n'a jamais vu face à face le Souverain Pontife de l'Agarttha… "Pourtant, dans certaines cérémonies bien connues, à Jaggernat, par exemple, il apparaît aux yeux de tous dans Ses splendides vêtements. Monté sur son éléphant blanc, il ruisselle, depuis sa tiare jusqu'à Ses pieds, d'une lumière éblouissante qui aveugle tout regard, dans les scintillements semblables qui l'entourent. Mais il est impossible de distinguer Ses traits parmi ceux des autres pontifes, car une frange de diamants réfléchissant tous les feux du Soleil voile Son visage d'un flamboiement."L'Agarttha, ce lieu aussi sacré que secret est "indépendant, synarchiquement organisé et composé d'une population s'élevant à un chiffre près de vingt millions d'âmes. (…) Autour du territoire sacré et de sa populations si considérable déjà, s'étend une confédération synarque de peuple, dont le total s'élève à plus de quarante millions d'âmes. (…) L'Agarttha tout entière est une image fidèle du Verbe éternel à travers toute la Création. (…) Les bibliothèques qui renferment le véritable corps de tous les arts et de toutes les sciences antiques depuis cinq cent cinquante-six siècles, sont inaccessibles à tout regard profane et à tout attentat. (...) Seul, le Souverain Pontife de l'Agarttha avec ses principaux assesseurs, (...) rassemble tout entier dans sa totale connaissance, dans sa suprême initiation, le caractère sacré de cette bibliothèque planétaire."

 

"Heureux les pauvres en esprit; car le royaume des cieux est à eux." (Mat 5, 3)

 

L'information est reprise par Ferdinand Ossendowski (1876-1944) dans son livre "Bêtes, Hommes et Dieux", publié en 1924. On y découvre de nouvelles descriptions: "La capitale d'Agharti est entourée de villes où habitent des grands prêtres et des savants. Elle rappelle Lhassa où le palais de Dalaï-Lama, le Potala, se trouve au sommet d'une montagne recouverte de temples et de monastères. Le trône du Roi du Monde est entouré de deux millions de dieux incarnés. Ce sont les saints panditas. Le palais lui-même est entouré des palais des Goiros qui possèdent toutes les forces visibles et invisibles de la terre, de l'enfer et du ciel et qui peuvent tout faire pour la vie et la mort des hommes. Si notre folle humanité ne met pas un terme à ses guerres, ils sont capables de transformer la surface de la Terre en un vaste désert. Ils peuvent assécher une mer, faire d'un continent un océan, réduire une montagne à sa plus simple expression. Un mot, un signe, un commandement, et les arbres, les herbes, les buissons se mettent à pousser, des hommes vieux et faibles redeviennent jeunes et vigoureux, les morts ressuscitent. Dans d'étranges véhicules, inconnus de nous, ils franchissent à des vitesses incroyables les tunnels souterrains qui séparent une ville d'une autre. (…) Il n'est pas juste que le bouddhisme et notre religion jaune le cachent. La reconnaissance de l'existence du plus saint et du plus puissant des hommes, du royaume bienheureux, du grand temple de la science sacrée est une telle consolation pour nos cœurs de pécheurs et nos vies corrompues que le cacher à l'humanité serait un péché."

 

"Où étais-tu quand je fondai la terre ? Parle, si ton savoir est éclairé…
As-tu, une fois dans ta vie, commandé au matin ? Assigné à l'aurore son poste, Pour qu'elle saisisse la terre par les bords Et en secoue les méchants ?… Les portes de la Mort te furent-elles montrées,
As-tu vu les portiers du pays de l'Ombre ?… Connais-tu les lois des Cieux, Appliques-tu leur charte sur la terre ?… Le censeur de Dieu va-t-il répondre ?" (Job 38 à 40)

"Ne le sais-tu pas ? Ne l'as-tu pas entendu dire ? YHWH est un Dieu éternel, créateur des extrémités de la terre. Il ne se fatigue ni ne se lasse,
insondable est son intelligence." (Ésaïe 40.28)

"Le Seigneur seul sera proclamé juste. A personne il n'a donné le pouvoir d'annoncer ses œuvres et qui découvrira ses merveilles ?
Qui pourra mesurer la puissance de sa majesté et qui pourra en outre raconter ses miséricordes ? On n'y peut rien retrancher et rien ajouter,
et l'on ne peut découvrir les merveilles du Seigneur. Quand un homme a fini, c'est alors qu'il commence, et quand il s'arrête, il est tout déconcerté." (Ecclésiastique 18.1-7)

 

René Guénon (1886-1951) reprendra à son tour cette thèse, après avoir rencontré à plusieurs reprises Ossendowski, thèse qu'il développera en 1927 dans un ouvrage ayant précisément pour titre "Le Roi du monde". Ce Roi est doté d'un pouvoir tout à la fois sacerdotal et royal: "Le "Roi du Monde" doit avoir une fonction essentiellement ordonnatrice et régulatrice (...) fonction pouvant se résumer dans un mot comme celui d'"équilibre" ou d'"harmonie", ce que rend précisément en sanscrit le terme Dharma: ce que nous entendons par là, c'est le reflet, dans le monde manifesté, de l'immutabilité du Principe suprême." Pour faire le lien avec les traditions issues des textes bibliques, René Guénon ajoute: "Le nom de Melchissédec, ou plus exactement Melki-Tsedeq, n’est pas autre chose que le nom sous lequel la fonction même du "Roi du Monde" se trouve expressément désignée dans la tradition judéo-chrétienne." Mais ne nous y trompons pas, Melchisédech n'est que de seconde importance, parce que rattaché à une tradition secondaire, et non à la Tradition primordiale: "Le titre de "Roi du monde", pris dans son acception la plus élevée, la plus complète et en même temps la plus rigoureuse, s'applique proprement à Manu, le Législateur primordial et universel." Celui-ci règne sur la Tradition primordiale pendant toute la durée de ses différents cycles. Pour René Guénon, le Roi du Monde est donc essentiellement un principe: "L’Intelligence cosmique qui réfléchit la Lumière spirituelle pure et formule la Loi propre aux conditions de notre monde ou de notre cycle d’existence"

 

"« Qui donc est le plus grand dans le Royaume des Cieux ? » Il appela à lui un petit enfant, le plaça au milieu d'eux et dit: « En vérité je vous le dis, si vous ne retournez pas à l'état des enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux. Qui donc se fait petit comme ce petit enfant-là, celui-là est le plus grand dans le Royaume des Cieux. »." (Mat 18, 1-4)

 

Nicolas Roerich (1874-1947) mène à son tour une longue expédition en Asie Centrale en 1928. Il séjourne alors plusieurs mois dans la chaîne de l'Himalaya, et part un jour tout seul sur un poney à la recherche d'un point du Tibet du Nord où il pense découvrir tout à la fois l'entrée de l'Agarttha et le Royaume de Shamballa. Quand il reparaît plusieurs jours plus tard, les Ladakhis de son escorte se prosternent à ses pieds, pensant que seul un dieu pouvait revenir vivant de l'endroit où il s'est rendu… Voir à ce sujet le site internet "Les Portes de l'Ere Nouvelle". Roerich relate son voyage dans un livre ("Shamballa"). Il aurait ainsi déclaré à son retour: "Les étoiles manifestent une évolution nouvelle. A nouveau, le Feu Cosmique se rapproche de la Terre. A nouveau, l'humanité sera soumise à l'épreuve. Mais comme la Lumière dévore l'obscurité, ainsi les œuvres du Malin seront consumées et détruites. Et le Maître Radieux de la Nouvelle Ère manifestera à tous Sa splendeur."

 

Daniel Meurois et Anne Givaudan, qui pratiquent la technique du "voyage astral", proposent également une exploration de Shamballa dans Le Voyage à "Shambhalla" (notez le "h" supplémentaire, sans doute pour un surcroît de mystère), "pour ceux qui s'intéressent au travail effectué par les Maîtres de Sagesse qui oeuvrent au bon déroulement de la libre circulation des énergies divines sur notre planète, et qui tâchent de guider l'humanité vers un retour à la Source." Tout un programme…

 

Les livres sur ce sujet ne manquent d'ailleurs pas, c'est ce que l'on appelle un titre "porteur": Voici quelques exemples de ces ouvrages (que nous vous dissuadons vivement, comme toutes les autres références de ce dossier, d'acquérir !), avec les commentaires des éditeurs ou des auteurs:

 

"Shambhala, Oasis de Lumière d'Andrew Tomas" (Ed. Le Hierarch, Ed. Robert Laffont - coll. "Les Enigmes de l'Univers", 1976, et Ed. A. Brêthe). Au sommaire: description de rencontres avec des Maîtres ascensionnés et avec des adeptes en Orient, visite à une âme désincarnée dans l'Au-delà accompagné de Jésus (décors imaginaires et réalité), activités spéciales sur le plan physique de la Terre, etc. On y apprend par exemple que: "Les archives du Vatican renferment un nombre considérable de rapports précis de missionnaires catholiques des derniers cent cinquante ans sur les mystérieuses députations qu’envoyaient les empereurs de Chine aux Esprits des Montagnes. Ces êtres résidant dans le Nan Chan ou Monts Kun-Lun, étaient habituellement décrits revêtus de corps solides visibles qui, cependant, n’avaient ni chair ni sang. Etait-ce des surhommes dans une enveloppe humaine artificiellement obtenue d’une matière atomique cristallisée, les soi-disant dieux nés de l’esprit ? Les écrits indiens parlent du pouvoir dont jouissaient les corps divins de devenir plus lourds et plus denses, plus légers et plus éthérés."

 

"Le Soleil de Shamballa et l'Ecole de Vie Divine du Maître de Saint-Jean" d'Olivier Martin. Au sommaire: le Maître de Shamballa, la hiérarchie du Christ, l'instructeur du monde, l'initiation essénienne et le Saint-Graal, l'école de Melchisédek et la tradition cosmique, la fraternité cathare, le Maitreya bouddha, le renouvellement de l'âme du monde, le chemin vers Shamballa, les sept degrés vers l'illumination, la science des Trismégistes, etc.. "Pour ceux qui veulent vivre dans la lumière et communiquer avec le rayonnement de Shamballa, toutes les méthodes sont données dans ce livre. La plus haute initiation solaire y est décrite et l'enseignement du centre initiatique qui guide les initiés de la planète y est transmis."

 

"La Fraternité de Shamballa" de Jan Van Rijckenborgh et Catharose de Petri (Ed. Rose+Croix d'Or, Ed. Septenaire). "Comment ouvrir les sept passages secrets vers Shamballa ? Ni exercice, ni voyage astral, ni technique occulte ne pourront jamais faire découvrir ces passages qui mènent, dans le cerveau humain, vers la merveilleuse pinéale, le siège de la conscience universelle. Pénétrer dans Shamballa, c'est réorienter totalement le mystérieux sanctuaire de la tête vers le Grand But, la véritable royauté de l'homme, pour rétablir, à l'aide de la septuple lumière qui provient du cœur, la liaison avec les sept aspects de la «Terre Sainte», son domaine de vie originel."

 

"Disciple et Shamballa" de Raymund Andrea (Diffusions Rosicruciennes*). "Shamballa est un centre d'énergies suprahumaines. C'est aussi le lieu d'où émane l'orientation et l'évolution de l'humanité. Un ouvrage authentique qui aidera le disciple déjà avancé sur le Sentier à se préparer à participer à l'œuvre de Shamballa. Cet ouvrage est aussi une source de réflexion sur l'importance de la volonté spirituelle dans la quête initiatique."

 

"Shamballa" de Jean-Claude Genel (Ed. des 3 Monts, Ed. Telesma). Au sommaire: La trame divine de l'histoire humaine - Connais-toi toi-même - Et tu connaîtras les Shamballas de l'Univers - De Jésus au Christ, les Initiations de l'Humanité... "L'auteur nous offre ici une réflexion d'une rare qualité sur ce que représente Shamballa. Il pose les questions essentielles qui nous permettent de saisir l'aspect spirituel de l'histoire humaine - de Moïse à Bouddha, de Jésus à Maitreya. Les temps troublés que nous traversons semblent nous inviter à enfin concrétiser notre réalité mystique dans le quotidien. Ce livre serait-il le mode d'emploi pour y parvenir ? Peu d'ouvrages ont parlé avec tant de justesse et d'originalité de Shamballa."

 

Citons encore: "Shamballa, la Voie Sacrée du Guerrier" de Chögyam Trungpa, "Des Mondes souterrains au Roi du Monde" de Serge Hutin, "La Vie des Maîtres" de Baird T. Spalding, "Le Secret de Shamballa" de James Redfield, etc., etc., etc. !

 

Rien de plus "in" désormais que de proposer par exemple des stages de "Thérapie Multidimensionnelle Shamballa". Ne riez pas, ça existe: c'est ce que vous apprendrez sur le site du "Shamballa Multidimensionnel de Saint Germain", où l'on vous dit tout de l'initiation aux "4 niveaux de la Maîtrise en Reiki de Shamballa", les Maîtres de Sagesse et "l'immortel" comte de Saint Germain ayant"demandé à Hari Das Melchizedek de réintroduire le Reiki originel de Shamballa". Ils souhaitaient, ces bons Maîtres, "offrir, au travers des initiations à Shamballa, une ouverture simple et profonde à l’Energie"… Bien joué, c'est aussi une ouverture simple et profonde du porte-feuille des pauvres âmes qui ne manqueront pas de répondre à l'appel… Mais pourquoi y répondre vous demandez-vous ? Parce qu'ainsi, "vous pourrez vous reconnecter avec Votre Soi, avec Votre Réalité Supérieure et travailler à tous les niveaux de votre Etre pour les intégrer sur ce plan, dans la vie de tous les jours. Bien au-delà d'une technique, Shamballa est une Conscience pour vous inviter à redécouvrir le Maître que vous êtes." Et le tour est joué, nous sommes de retour à la base de la philosophie New-Age: vous êtes un Maître en puissance, vous n'avez donc plus besoin de Dieu….

 

Aujourd'hui, de nombreux messages délivrés sur internet s'appuient sur les écrits de H.P. Blavatski et de René Guénon. Parmi ceux-ci, notons les messages "transmis" par El Morya, ce membre de la Grande Fraternité Blanche dont nous avons déjà parlé. Voir par exemple les pages internet suivantes: El Morya 1, El Morya 2, El Morya 3, El Morya 4...

 

Dans la hiérarchie de cette organisation, El Morya est le "Seigneur (Chohan) du Premier Rayon de la Volonté de Dieu" et "Chef du Conseil de Darjeeling". Successivement Abraham, Melchior (l'un des trois mages), le roi Arthur, Thomas Becket, Thomas More, Akbar (empereur mongol), Thomas Moore (le poète irlandais), et enfin El Morya Khan au gré de ses "réincarnations", El Morya a été à l'origine de la fondation de la Société Théosophique. Avec un tel patronage, on comprend mieux la personnalité de H.P. Blavatsky… Il transmis à sa "messagère" Elizabeth Clare Prophet les enseignements du "Christ Universel" pour l'Ère du Verseau, que celle-ci consigna dans un livre qui a pour titre "Le Chela et le Sentier". Au sujet de Shamballa, El Morya nous apprend donc que le Roi du Monde incarne l'énergie de Shamballa: il serait l'Être le plus puissant de la Terre, car "tout en résidant dans l'Agarttha, au centre de notre planète, il vit et respire en même temps dans le Cœur du Soleil." C'est lui qui, à la fin du Kali Yuga, doit ouvrir à l'humanité le grand Livre de la Connaissance, qui contient toutes les archives de notre passé aussi bien que de notre futur. Il contrôle cette substance que les Initiés nomment "l'énergie du Ka" et qui provient de notre Soleil central, siège de l'Intelligence multidimensionnelle, et il en assure la redistribution à l'humanité… Tout un programme !

 

A côté des Maîtres Ascensionnés de la Fraternité Blanche Universelle, on trouve les Frères de la Lumière, membres de laGrande Loge Blanche. Organisation concurrente ? C'est en tous cas une organisation parfaitement structurée, comme nous l'apprend cette page du site "Magie et Evolution Divines": "Les Frères de la Lumière constituent une Organisation Mystique à laquelle adhèrent les plus Grands Initiés de notre Système Planétaire. Ils forment une Société comportant des grades hiérarchiques correspondant chacun au degré de perfection de ses Membres. A leur tête se trouve le Premier Initié qui a rang de Mahatma. Celui-ci représente l'Ordre Divin et est Gardien de tous les mystères. Il est appelé, dans la Hiérarchie, "Urgaya", l'Homme sage de la Montagne ou encore le "Vieux Maître". Il a été le premier Initié depuis l'origine des temps mais il ne s'incarne que très rarement…Douze Adeptes sont subordonnés au Vieux Maître. Ils ont atteint la perfection spirituelle la plus élevée et se chargent également des tâches les plus difficiles… Urgaya et les Douze Adeptes forment "le Conseil de l'Ancien" et se rencontrent régulièrement, à certaines périodes ou lorsque d'importantes décisions concernant l'Humanité doivent être prises. Ces Douze Adeptes contrôlent Soixante Douze Sages ou "Illuminés" auxquels sont subordonnés Trois Cent Soixante Maîtres… Le siège de la Grande Loge Blanche n’est pas visible aux yeux humains; son siège est sur un plan subtil donc invisible pour nous." Que l'on me pardonne, mais il faut tout de même avoir une sérieuse dose de naïveté pour prendre au sérieux une telle description… Est-elle là pour rassurer les futurs adeptes, sur ce mouvement qui paraît bien flou au premier abord ? Cette hiérarchisation des "Supérieurs" est-elle destinée à accréditer le sérieux des affirmations présentes sur ce site ? Il est vrai que depuis la trilogie de la "Guerre des Etoiles", tout cela doit sembler presque banal…

 

Le site "Messages des Etres de Lumières" ouvre largement ses pages à ces "Hiérarchies Supérieures", quoique – comme nous l'explique un "Messager" sur ce site, ce terme ne soit pas approprié: "Hiérarchies Supérieures n'est qu'un terme que notre canal emploie pour faciliter certaines compréhensions. Nous n'avons pas voulu encombrer vos esprits avec les plans (comme d'autres êtres sur terre vous l'ont enseigné); cela n'a aucune importance pour le travail que nous attendons de vous et pour le message que nous voulons faire passer. Lorsque nous parlons de Hiérarchies Supérieures, c'est simplement dans le sens de vos frères supérieurs, mais supérieurs en évolution, supérieurs en Amour, en conscience." L'un de ces "Messagers" rappelle par exemple l'une de leur fonction: "Nous habitons le vrai royaume de ce monde. Nous sommes la réalité de ce monde, nous n'avons pas besoin de parler comme vous car nos esprits sont suffisamment purs pour pouvoir communiquer les uns avec les autres. C'est cela que vous devrez apprendre à faire demain: à purifier suffisamment vos pensées afin que vous puissiez communiquer autrement que par la parole." Et tant pis pour les opérateurs téléphoniques !
Plus sérieusement, on y exploite cette attirance pour la "puissance" et les "pouvoirs". Par exemple, à la question "Pouvez-vous nous dire ce que sont les Cathédrales de Lumière et l'Ecole des Guides de Lumière ?", il est répondu : "Il existe, dans des sphères de haute réalisation, dans ce que vous pourriez appeler la sixième ou la septième dimension, des points de jonction d'une puissance extraordinaire. Certains êtres, même du plan de la Terre, sont conduits dans ces lieux pour leur permettre un enseignement beaucoup plus puissant, pour leur permettre d'acquérir des énergies considérables. Ceux qui sont conduits dans ces lieux, sont souvent des êtres qui se sont incarnés volontairement sur ce monde pour aider leurs frères ou qui sont vraiment en fin de cycle d'humanité terrestre. Dans ces lieux, il y a des êtres d'une force et d'une puissance énorme." Sous-entendu, travaillez avec soin comme nous vous le suggérons ici, et vous aurez accès vous aussi à cette puissance…

 

"« Ma grâce te suffit: car la puissance se déploie dans la faiblesse. » C'est donc de grand cœur que je me glorifierai surtout de mes faiblesses, afin que repose sur moi la puissance du Christ… Car lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort." (2 Co 12, 9-10)

 

Citons également le "Site de l'Elite de la Nouvelle Ere" où l'on peut lire les lignes suivantes: "Nous sommes à la périphérie d’un cercle, mais le secret se tient au centre et sait. Le centre est-il occupé, comme le prétendent les Gnostiques Alexandrins, par Melki-Tsedeq qualifié de "Grand receveur de la lumière éternelle" ? La lumière intelligible viendrait ainsi par un rayon directement émané du Principe, pour être réfléchie dans le monde.


Remarquons que durant les périodes de renouvellement, le monde retourne à l’origine, s’y régénère et s’y reconstruit. C’est pourquoi le roi considéré comme étant un père du peuple, inaugure et impulse tout nouveau cycle. L’espace est reconstitué, le temps reprend son cours, la lune et le soleil retrouvent leurs routes et poursuivent correctement leur marche: la vertu royale a été restaurée en force. Il y a expulsion du monde ancien, déséquilibré, donc funeste, puis régénération du temps et de l’espace. Une nouvelle vertu va rayonner. Elle évacue hors du temps et de l’espace, l’ordre ancien, périmé et déchu. Elle proclame et installe l’ordre neuf dans tous les quartiers de l’univers. A la fin du cycle, 12 soleils apparaissent simultanément, rentrant dans l’unité essentielle et primordiale de leur nature commune. Le centre spirituel a la forme circulaire liée au cycle Zodiacal par 12 rayons de lumière. Si le soleil figure le Christ, les 12 rayons sont les 12 Apôtres (les rayons sont envoyés par le soleil).
Agarttha est le centre qui a recueilli l’héritage de l’antique "dynastie solaire".

 

Le chef suprême de l’Agarttha est un souverain pontife, qui unit la force et la sagesse; celui qui remplit la fonction de médiateur, établissant la communication entre ce monde et les mondes supérieurs. Il incarne l’union de deux pouvoirs sacerdotal et royal. Le Roi du monde est en rapport, selon M.Ossendowski, avec les pensées de tous ceux qui dirigent la destinée de l’humanité. Il connaît leurs intentions et leurs idées. Si elles plaisent à Dieu, le Roi du monde les favorisera de son aide invisible; si elles déplaisent à Dieu, le Roi provoquera leur échec. Ce pouvoir est donné à Agarttha par la Science mystérieuse d’OM. Le roi est fautif, à lui de rétablir l’ordre. Il frappe lui-même le grand tambour; il met tout son monde en bataille, tous les vassaux de quatre coins cardinaux forment le carré jusqu’à ce que la Vertu royale soit restaurée en force…

 

Le plus impitoyable combat que mène le "Mensonge" est contre la royauté et le sacerdoce. En effet, le renversement de la royauté entraîne la destruction des hommes et de l’ordre traditionnel. Ce combat réunit dans une même orientation le monde visible et invisible, le macrocosme et le microcosme. Le roi qui durant son règne mène à bien cette lutte difficile et périlleuse ne fait qu’un avec le Souverain Céleste.

 

Nous terminerons cette présentation des caractéristiques de la nouvelle élite du monde en observant que le Congolais qui s’est identifié au "Cavalier qui monte le Cheval de l’Apocalypse" et s’appelle Ebale Mbonge a créé un sacerdoce qui manipule des "puissances" de guérison spirituelle ayant certaines similitudes avec celles attribuées au Roi du monde par M. Ossendowski.

 

Ces puissances de "parapsychologie appliquée" dont ledit Cavalier qui monte le Cheval Blanc est le seul dépositaire, ont elles-mêmes été obtenues par lui en un lieu qui s’appelle Bikoro (dans la Province de Mbandaka en République Démocratique du Congo ex-Zaïre au bord du Lac Ntomba), endroit qu’il a présenté à son sacerdoce et au monde comme le Centre de l'Univers. Bikoro est-il le vrai nom d’Agarttha ?"

 

Sur le site "Emeraude", déjà cité, on nous explique que "Un Maître Ascensionné est une âme incarnée qui, à la suite de nombreuses incarnations, a réussie à se connecter à sa Divinité et à redevenir souveraine. En réalisant son Ascension, l'âme se sort du cycle des réincarnations sur ce plan de la troisième dimension, pour poursuivre son évolution en des niveaux de compréhension beaucoup plus élevés: exemple: Le Christ, Bouddha, Confucius, les Saints, les Prophètes etc.. Aujourd'hui en ce moment crucial pour l'humanité, il est possible de réaliser l'Ascension pour tout être qui part à la découverte de son Soi-Supérieur." Ce site présente même des illustrations de ces "Maîtres Ascensionnés", réalisées par des artistes médiums…On y retrouve donc Jésus (que de nombreux "Travailleurs de la Lumière" appellent par son nom énergétique: "Sananda", ou "Jésus-Sananda", puisque Jésus n'était que le nom de l'une de ses incarnations terrestres…), et Marie ("Maître Ascensionné relié au Temple de la Résurrection au royaume éthérique d'Israël/Palestine"), ces deux références indispensables au christianisme, mais aussi l'incontournable comte de Saint Germain ("Maître Ascensionné relié au Temple de la Liberté en Transylvannie"), le Gautama-Bouddha ("Maître Ascensionné relié au Temple de la Hiérarchie Spirituelle, Shambala, royaume éthérique situé dans le désert de Gobi"), Confucius, El Morya (présenté ici comme le "Maître Ascensionné relié au Temple de la Volonté de Dieu, à Darjeeling en Inde"), etc..

 

Du syncrétisme à l'attaque en règle des fondements même de la religion chrétienne, les recettes restent toujours les mêmes… Ces absurdités aussi prétentieuses que puériles pourrait prêter à sourire, si elles ne rencontraient pas un succès phénoménal auprès d'une population avide de connaissance, de pouvoir, et de cette "liberté d'être" qui lui est toujours promise…

 

"Si vous demeurez dans ma Parole, vous êtes vraiment mes disciples et vous connaîtrez la vérité et la vérité vous libèrera." (Jean 8, 31-31)

 

Visions sur Jésus

Les révélations sont obtenues par clairvoyance, par lien médiumnique avec de grands maîtres cachés, voir par consultation de la mémoire de l'Univers (mémoire Akashique). Jésus y devient tour à tour un Initié, une Entité surhumaine, un Maître de sagesse, l'Instructeur suprême, un Guide missionné par des hiérarchies supérieures, un Avatar du Principe divin, un Emissaire céleste, etc. Tout est permis, pourvu qu'il ne soit plus le Fils unique de Dieu, le Dieu Tout-Puissant manifesté dans la chair…

 

H.P. Blavatsky (1831-1891), déjà citée, accède ainsi par voie télépathique à la mémoire de l'Univers. Elle en livre ses conclusions dans "La Doctrine secrète". La crucifixion y est ramenée par exemple au rang d'un rite initiatique venu d'Égypte, et dont la signification reste avant tout symbolique. Pas question de croire en un Jésus "Sauveur", puisque l'homme n'a pas de "péché". La divinité de Jésus est également nié. Elle écrit ainsi dans "La clé de la Théosophie" (chap. "Les enseignements fondamentaux de la Théosophie"):"Nous rejetons la notion d'un Dieu personnel, ou d'un Dieu en dehors du cosmos et ayant un aspect humain qui n'est qu'une gigantesque ombre de l'homme, et même pas de l'homme sous sa forme la plus favorable. Nous déclarons que le Dieu de la théologie n'est qu'un amas de contradictions et d'impossibilités contraires à toute logique. Nous n'aurons donc rien à faire avec lui. (…) A nos yeux, l'homme intérieur est le seul Dieu que nous puissions connaître. Comment cela pourrait-il être autrement ?".

 

Alice Bailey détaille les "initiations" de Jésus dans De Bethléem au Calvaire (enseignement reçu du "Maître Ascensionné Djwal Kuhl"), publié en 1937.
 

Selon cet "enseignement", elle peut affirmer que le Christ avait atteint "un degré de développement spirituel qui avait fait de lui le Chef de la Hiérarchie spirituelle, le promoteur du Royaume de Dieu sur Terre, le Maître des Maîtres et l'Instructeur des Anges et des hommes. L'unité de sa conscience avec le plan divin était absolue." Toute sa vie n'avait d'autre but que la réalisation de ce plan sur la terre. Le Christ serait aujourd'hui le chef de la Hiérarchie spirituelle qui dirige actuellement les destinées de notre terre: "Autour de lui, dans le Haut Lieu où il réside sur terre, sont rassemblés, en ce moment, ses Grands Disciples, les Maîtres de la Sagesse et tous les Fils de Dieu libérés qui au cours des ages ont passé des ténèbres à la lumière, de l'irréel au Réel, de la mort à l'immortalité. Les représentants et les fondateurs de toutes les religions du monde attendent en ce lieu de pouvoir révéler, sous sa direction, à tous ceux qui aujourd'hui luttent dans la tourmente du monde et cherchent à en résoudre la crise, qu'ils ne luttent pas seuls. La grande succession Apostolique des Connaisseurs de Dieu est prête aujourd'hui pour une activité renouvelée. Bouddha lui-même se tient derrière le Christ, reconnaissant humblement l'œuvre divine que ce dernier est sur le point d'accomplir. L'entière lignée spirituelle des Fils de Dieu est en attente et en préparation. La Hiérarchie spirituelle attend."

 

"A ceci reconnaissez l'Esprit de Dieu: tout esprit qui confesse Jésus Christ venu dans la chair est de Dieu; et tout esprit qui ne confesse pas Jésus n'est pas de Dieu; c'est là l'esprit de l'Antichrist." (Jean 4, 2-3)

 

Écoutons également Samuaël Aun Weor (Víctor Manuel Gómez Rodríguez, 1917-1977). Il est le fondateur du mouvement Gnostique, et adepte de la grande Fraternité Blanche Universelle fondée en 1947 par Omraam Mikhaël Aïvanhov (1899–1986), qui a pour mission de "livrer à l'humanité l'authentique message que la Loge blanche adresse au genre humain pour la nouvelle ère du Verseau" – ère qui s'est ouverte selon l'auteur le 4 février 1962. Il révèle dans une interview accordée à une radio mexicaine en 1977 que "La Pistis Sophia contient les enseignements que Jésus de Nazareth a donnés à ses disciples sur le Mont des Olives. Tout le papyrus est écrit en copte et dans le fond, il est merveilleux. Actuellement, nous sommes précisément au travail pour dévoiler et expliquer, clairement, le papyrus cité. Je suis sûr qu'il sera salutaire pour l'ensemble du monde chrétien, parce qu'il connaîtra mieux les mots du Maître."
 

Au cours d'une autre interview accordée la même année, il déclare: "Il est écrit qu'au Golgotha Jésus a dit: "Heli, Heli, Lamah Zabactani". Les juifs s'interrogèrent, "Que dit-il ? Peut-être appelle-t-il Elie ou l'un des prophètes... voyons si Elie viendra pour le sauver" (tandis qu'ils riaient de lui). Les juifs n'ont pas compris la signification de cette expression. Ce n'était ni de l'Hébreu, ni du Sanscrit, ni du Tibétain. Cependant, n'importe quel écolier Maya du Guatemala serait capable de le traduire immédiatement. La phrase signifie - pour tout Maya de Yucatan ou du Guatemala: "maintenant je puis plonger dans la splendeur de ta présence..." Jésus de Nazareth a parlé la langue Maya. Évidemment la langue Maya vient d'Atlantis. Avant que ce grand continent ne soit submergé dans les profondeurs de l'océan, la race Maya s'était répandue de l'est à l'ouest de ce monde. Les Mayas ont colonisé le Tibet et l'Égypte, et nous en avons le témoignage dans l'alphabet de Naga-Maya des Tibétains et dans les pyramides égyptiennes. C'est ainsi que l'est et l'ouest ont hérité des vastes connaissances des Atlantes."

 

Et à la question: "Il y a une théorie qui avance que Jésus Christ pourraient avoir été instruit et formé par les Esséniens. Qu'est-ce qui rendrait cette théorie valide ?", Samuaël Aun Weor répond: "Ce qui s'est produit, c'est que ces écrits citent le Maître de Justice, qui a existé environ cinq siècles avant J.C., et les rapports du Maître de Justice avec le Jésus historique (notre Grand Maître Jésus, le Christ) ont été mal interprétés. Nous devons également comprendre que ce Maître de Justice cité par les Esséniens n'est pas nécessairement une "figure historique". Voyons-le comme un prototype psychologique-individuel des êtres humains. Dans cette perspective, il ne devrait y avoir aucun autre confusion. Il est également évident que l'Être Supérieur de chaque créature humaine, selon les traditions antiques qui ont été perdues dans l'épouvantable nuit de tous les âges, est Christique d'une grande manière. C'est une grande honte que ces enseignements et ces études aient été perdus. C'est la raison pour laquelle cette race humaine est tombée ainsi. Aucun doute qu'actuellement, le Christ est vu comme une figure historique, au lieu de le transposer comme le Prototype de la Perfection Humaine en chacun de nous."

 

Et à propos de la réincarnation: "La Réincarnation signifie: "la descente de la Divinité en l'Homme." La répétition de cet événement est avec précision cela - La Réincarnation. J'ajouterai: l'Incarnation est la descente de la Divinité en l'Homme. Quand cet événement se répète, cela s'appelle La Réincarnation. Ceci implique que la réincarnation n'est possible que pour les hommes qui se sont réalisés pleinement: des hommes comme Jésus de Nazareth, Buddha, Hermes Trimégiste, Quetzacoalt, etc.."

 

David Spangler, directeur de l'"Initiative Planétaire" (organisation associée à l'O.N.U.), co-directeur pendant trois ans de la Fondation Findhorn en Écosse, et souvent cité lorsqu'il est question du New-Age, affirme de son côté (dans son livre "Révélation: Naissance du Nouvel Age") que "Le Christ est distinct de Jésus dans lequel il s'incarna comme il le fit en Bouddha, en Krisna, en Rama et en Mithra.". La "conscience de Christ" ne serait ainsi descendue sur Jésus que pendant son ministère public… Cette affirmation est aujourd'hui partagée par un grand nombre d'écrivains, de "thérapeutes" et de gourous du New-Age. Et les affirmations suivantes, attribuées à ce même auteur, ont de quoi faire réfléchir: "Le Christ est la même force que Lucifer, quoiqu'il agisse en apparence dans le sens contraire" ("Reflections on the Christ", Farres, Ecosse - Lecture Series, 1976, p. 40) "Lucifer agit en chacun de nous, pour nous conduire à l'état de l'intégralité. Tandis que nous entrons dans une nouvelle ère, l'ère de l'intégralité de l'homme, chacun de nous parviendra au point que j'appellerai celui de l'initiation luciférienne. C'est la porte d'entrée particulière que l'individu doit traverser pour pénétrer pleinement dans la présence de sa propre lumière et de sa propre intégralité." "Personne ne pourra entrer dans le Nouvel Ordre Mondial, à moins qu'il ou qu'elle ait fait allégeance à Lucifer. Personne ne pourra entrer dans le Nouvel Age sans avoir subi une initiation luciférienne."

 

"Qui est le menteur, sinon celui qui nie que Jésus soit le Christ ? Le voilà l'Antichrist ! Il nie le Père et le Fils." (1 Jean 2, 22)

 

On trouve dans le livre "La Médiumnité: réalité intime et personnelle" de André De Ladurantaye et Francine Ouellet (Editions Marie-Lakshmi Inc.), une communication "télépathique" de "Lumière de l'Être" reçue par l'auteur le 9 avril 1997, "Lumière de l'Etre" s'étant "incarnée" en Jésus il y a deux mille ans, qui explique le sens de sa mission: "Ma venue sur Terre a eu pour objet spécifique d'indiquer à toutes les âmes le chemin de l'Intériorité et d'aider à combattre le voile de l'illusion. Vous êtes des multitudes, en ces temps de changements profondément intérieurs, à vous éveiller aux fruits de mon travail spirituel en ressentant l'appel de votre Christ intérieur."Un tel renversement de la mission du Christ telle qu'elle est présentée dans les Évangiles ne laisse que peu de doutes quant à l'origine d'un tel message… "Je suis Christ. Je suis vous et vous êtes Christ. Ne vous cherchez plus ailleurs qu'en vous. Ne vous cherchez plus ailleurs qu'au cœur même de la Lumière de l'Être. Dans plusieurs incarnations dans la matière, Je suis venu et revenu réaliser la Fusion avec le Père." Divinisation de l'homme, réincarnation, fusion dans la Divinité, notions habituelles à la prosodie des nouvelles "révélations" !

 

"La réalisation de votre Christ intérieur est soumise aux mêmes Lois Divines: la loi de l'Intégration. Le Christ est le chemin, la voie de l'intérieur. Il conduit le Fils de l'Homme vers le Fils de Dieu. Par l'infusion de mes Énergies et celles des Êtres de Lumière sur la planète en ce moment, l'humanité est aidée à faire le rapprochement de tous ces concepts qu'elle a vécus au cours des derniers siècles et surtout depuis les dernières décennies en une seule et unique réalité: la Réalité Christique." En refusant l'altérité, l'adepte du New-Age n'est plus appelé à un relation d'amour avec son Créateur, ni même avec le Fils, mais en quelque sorte avec lui-même: l'adepte est Dieu, pourvu qu'il se découvre tel: "La permission que vous vous donnez de vous accueillir dans tout ce que vous êtes est le véritable sens de l'Amour du Christ." lit-on plus loin !

 

Sur le site internet d'Amédée Louis-Fernand, il est aussi question de Jésus. Ici encore, l'Église catholique en prend pour son grade avec d’autres églises: "Le dogme rigide de l'Église Catholique s'est construit à partir de nombreuses erreurs, tout comme les doctrines de bien des Églises. L'Homme a une double nature. L'une mortelle, son corps, son intellect, son égo... L'autre est immortelle, c'est l'étincelle de Dieu qui existe en chaque être humain et que certains appellent le Soi, d'autres le Bouddha ou le Christ. [notez cet "aspiration" dans les doctrines hindouistes de la révélation chrétienne, qui n'a guère évolué depuis H.P. Blavatsky…] Jésus n'était pas le Christ et il ne l'a jamais été tel que la plupart d'entre vous le croient. Jésus était le Fils de l'Homme. Quand Il a fait le choix volontaire de laisser émerger le Christ en Lui, alors Il est devenu Jésus-Christ, le Fils de Dieu. [cette conception de l'incarnation du Christ en Jésus au cours de sa vie terrestre est presque banale aujourd'hui, tant elle est répandue dans de nombreux mouvements New-Age…] De même le Christ n'a jamais été Jésus, mais Il s'est révélé en Lui par la volonté de sacrifice de Jésus. Car le Christ en vérité est en chacun de nous ! Le Christ est la divinité qui réside en l'Homme ! [ou encore le "Soi", comme il sera dit plus loin. Le message est clair: l'homme est Dieu, il n'appartient qu'à lui de le découvrir.] Jésus a accompli ce que chaque être humain peut et doit réaliser à son tour. Oui je vous le dis, Jésus était. Le Christ quant à Lui, est, et demeurera toujours. N'attendez pas le retour de Jésus Il ne reviendra jamais. La nature de la matière, du corps, est temporelle. Seul l'Esprit est immortel. L'âme de Jésus a continué à évoluer dans l'amour du Christ, dans l'amour de Dieu. C'est pour cela, je vous le dis, chacun d'entre vous est potentiellement le Christ, c'est à dire une pulsion de Dieu, une étincelle d'Amour. Mais il faut préalablement effectuer son chemin de croix et ensuite crucifier son égo afin de ressusciter, et ainsi révéler le Christ en nous. Le Christ qui est chacun de nous." Il y aurait évidemment beaucoup à dire de cette logorrhée, qui manque pour le moins de sérénité dans le propos, sérénité qui est pourtant l'un des attributs des "sages", de ceux qui sont parvenus à "l'éveil"… Le but recherché reste le même: détruire les références chrétiennes, et en particulier l'image de la Parole de fait chair, né miraculeusement par la Vierge Marie, mort pour le salut de ses élus, et ressuscité en ayant vaincu la mort. Puisque nous serions tous des "Christ" en puissance, pourquoi nous attacherions-nous à ce Jésus qui nous est tellement semblable …?

 

Les autres affirmations n'ont rien d'original. On retrouve les habituels "les Maîtres éminents que sont Krishna, Bouddha, Mahomet, Jésus, ... sont Un. C'est la même Voix qui parle à travers Eux, en adoptant simplement un langage différent selon les lieux et les époques pour pouvoir Se faire entendre de tous." et autres "parmi les Initiés, certains, dont ceux énumérés ci-dessus, sont des Maîtres d'exception. Entendez par là qu'ils ont pour chemin de vie de diffuser le Message du Père, d'Allah, de la Conscience Universelle, du Principe Créateur, de Brahman, de Dieu..." Fouchtri fouchtra, mettons tout dans un même sac et agitons fort, il en ressort toujours la même salade…

 

"C'est que beaucoup de séducteurs se sont répandus dans le monde, qui ne confessent pas Jésus Christ venu dans la chair. Voilà bien le Séducteur, l'Antichrist. Ayez les yeux sur vous, pour ne pas perdre le fruit de vos travaux, mais recevoir au contraire une pleine récompense. Quiconque va plus avant et ne demeure pas dans la doctrine du Christ ne possède pas Dieu. Celui qui demeure dans la doctrine, c'est lui qui possède et le Père et le Fils. Si quelqu'un vient à vous sans apporter cette doctrine, ne le recevez pas chez vous et abstenez-vous de le saluer. Celui qui le salue participe à ses œuvres mauvaises." (2 Jean 7-11)

 

Robert Ambelain (1907-1998) a sans doute dans ce domaine atteint un summum dans son livre "Jésus ou le mortel secret des Templiers". Bien que ne se rattachant pas au mouvement New-Age, signalons tout de même que c'est en s'appuyant sur des connaissances supérieures "indiscutables", il décrit Jésus comme étant le fils de Marie de Magdala et de Judas (chef zélote notoire) ayant six frères (dont Thomas, son jumeau, comme son nom l'indique), affirme qu'il n'est pas né à Bethléem, qu'il n'a jamais vécu à Nazareth, qu'il a étudié la magie et la kabbale, qu'il se conduit comme un véritable brigand se livrant au pillage, au vol et au meurtre, qu'il est l'auteur de l'Apocalypse… etc., etc.

 

Notons enfin que l'A.M.O.R.C. - Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix fondé en 1909 par Harvey Spencer Lewis (1889-1944) - précise lui aussi que "d’un point de vue rosicrucien, Jésus fait partie des Maîtres qui se sont incarnés à des époques différentes pour guider l’humanité et donner une impulsion à son évolution spirituelle, comme le firent Moïse, Bouddha et Mahomet, pour ne citer que les plus connus. Il ne fait pas l’objet d’un culte particulier dans les enseignements de l’Ordre. Il n’est pas non plus présenté comme étant le Fils unique de Dieu ou comme étant Dieu Lui-même. Cela dit, tout Rosicrucien est libre de le considérer ainsi, notamment s’il est de religion chrétienne. D’après les enseignements de l’A.M.O.R.C., Jésus fut membre de la communauté essénienne établie à Qumrân, en Israël. Comme le confirme la découverte en 1945 des «Manuscrits de la Mer Morte», les Esséniens étaient des mystiques de très haut niveau. On sait également qu’ils consacraient beaucoup de temps à guérir les malades. Il n’est donc pas étonnant que Jésus lui-même fût connu pour ses nombreuses guérisons."… Et l'on se rend bien compte que l'essentiel pour tous ces mouvements, est de ne considérer Jésus que sous l'aspect de son humanité, ce qui, dans le domaine de la littérature également, d'Ernest Renan à Jacques Duquesne, reste la constante de tout esprit qui s'élève contre les religions chrétiennes en général, et catholique en particulier… Signalons que l'A.M.O.R.C. est une organisation répertoriée comme une secte dans le Rapport n°1687 de la Commission Parlementaire du 10 juin 1999. Ceux qui souhaiteraient en savoir plus sur cette organisme consulteront avec intérêt la page "L'Hérésie Rosicrucienne", hébergée sur le site de Philippe Allard.

 

William Booth, fondateur de l'Armée du Salut, écrivait à la fin du XIX° siècle: "Le plus grand danger du vingtième siècle sera une religion sans Saint-Esprit, des chrétiens sans Christ, le pardon sans repentance, le salut sans nouvelle naissance, la politique sans Dieu et un ciel sans enfer."
Et Albert Schweitzer ajoutait au début du XX° siècle: "Chaque époque trouve ses propres idées qui se voient reflétées en Jésus; chaque personne en particulier se crée un Jésus à l'image de sa propre personnalité…."

 

"« Mais pour vous, leur dit-il, qui suis-je ? » Simon Pierre répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » En réponse, Jésus lui dit : « Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car cette révélation t'est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux »." (Mat 16, 15-17)

 

Un nouveau Messie:
Maitreya  

Maitreya n'est pas le premier à se présenter comme étant le Christ en personne revenu sur terre. Souvenons-nous de ces deux exemples étonnants qui ont marqué le XX° siècle:

 

George Roux (1903-1981) tout d'abord, qui affirma publiquement en 1954 qu'il était une nouvelle incarnation du Christ, et qui fonda l'Eglise Chrétienne Universelle. Il est connu aujourd'hui sous le nom de "Christ de Montfavet", nom de la commune du sud de la France où il résidait. Ses théories sont contenues dans les trois ouvrages qu'il a publié en 1950-51: "Journal d'un guérisseur", "Paroles du guérisseur", et "Mission divine". On y apprend que Jésus n'était pas le fils de Dieu, mais un guérisseur parmi beaucoup d'autres, que les Évangiles relèvent de la légende, que le péché originel n'existe pas, que la fin du monde interviendra le 1er janvier 1980 au plus tard, etc.. Notons tout de même que Georges Roux se présenta aux élections législatives du 2 janvier 1956, en proposant que Dieu devienne le chef du gouvernement, et en promettant une place au Paradis aux bons électeurs, et qu'il recueilli environ 10.000 voix dans six départements ! L'Alliance Universelle fondée à sa mort par ses deux filles pour perpétuer le mouvement compte aujourd'hui encore près de 1000 membres en France, et 2000 en dehors (Europe, Etats-Unis, Afrique)…

 

Gilbert Bourdin (1923-1998) est sans doute plus célèbre encore. Fondateur de L’Ordre des Chevaliers du Lotus d’Or dans les années 1960, il émigre avec ses proches en 1970 sur le site de la Baume de Castellane dans les Alpes de Haute-Provence, où il bâtit le "Mandarom Shambhasalem", gigantesque construction à sa démesure… Au cours des années 1980, il commence une lutte sans merci contre les "démons": armés de pistolets en plastique, lui et ses adeptes traquent les "atlantes" et les "lémuriens"… Christine Amory, chercheuse au CNRS et présidente du Vajra triomphant, reconnaît avoir participé à ces "combats". Selon elle, la paix relative qui règne dans le monde tient à "l'acquis" des combats de Gilbert Bourdin contre les "égrégors de pensée négative"… En 1981, le gourou fait construire une statue haute de 22 mètres, celle du "Bouddha Maitreya", "synthèse des énergies spirituelles de l’Orient", puis en 1987 la statue du "Christ Cosmique", qui "réunit en elle les énergies de l’Occident mystique". D'autres statues, temples et mosquées suivront sur l'emplacement du Mandarom. Enfin le 22 août 1990, sous le nom d’Hamsah Manarah, il ceint successivement les "sept couronnes des visages de Dieu" ainsi que la tiare du "Grand Pontife du Diamant Cosmique" et se proclame le plus sérieusement du monde devant les caméras de télévision "Messie Cosmo-planétaire". Une statue de 33 mètres de haut a été édifiée en un temps record, à sa propre gloire,"Messie de synthèse entre le Christ, Bouddha et le prophète". Gilbert Bourdin affirme être la réincarnation tout à la fois de Pythagore, de Jésus, de Mahomet et de Napoléon. Accusé de viol sur mineure, il passe quelques jours en prison en 1995. Le 30 juillet 1998, la statue et son socle (soit quelque 2 000 tonnes de béton et d'acier) sont frappés d'un jugement ordonnant leur démolition par le tribunal de Digne, démolition qui aura finalement lieu en 2001. Ils sont encore nombreux aujourd'hui à défendre l'Aumisme, cette religion nouvelle fondée par Gilbert Bourdin, qu'il expliquait lui-même ainsi: "L'étude approfondie des grandes religions, nous persuade aisément qu'elles sont Une par leur essence. Nous considérons notre haut lieu consacré à la prière, à la méditation, comme un Temple de la Religion Universelle, comme un havre pour le pèlerin de l'Absolu, à qui l’on réclame pour tout passeport, ces simples mots en lettres de feu sur le cœur: Amour, charité, sincérité, humilité, discernement spirituel." Notons au passage que le symbole de "l'Hexamide" attaché à l'Aumisme porte les six couleurs de l'arc-en-ciel… O tempora ! O mores… !

 

Venons-en maintenant à Maitreya. Selon le Mahâyânâ de la philosophie bouddhiste, Maitreya est le prochain Bouddha que connaîtra l'humanité: sauveur du monde, qu'il restaurera une dernière fois. Son culte est familier au monde bouddhique. Selon le New-Age, il est bien autre chose, et beaucoup plus que cela…

 

Le site Partage International en est le propagateur en France. Voir aussi le site "Domaine du Réseau Tara Canada (Québec) - L'Emergence de Maitreya".

 

Voici quelques extraits des messages délivrés par Maitreya, tels qu'ils sont diffusés sur les sites ci-dessus: A la date du 6 septembre 1977, il déclare: "Mon arrivée est accomplie, ma manifestation, complète. Je suis réellement dans le monde. Bientôt me connaîtrez-vous. Peut-être me suivrez-vous et m'aimerez-vous. Mon amour coule à jamais à travers vous tous. Et cet amour que j'ai pour l'humanité entière m'amène ici. Mes frères et sœurs, mon retour dans le monde est un signal que le nouvel âge, comme vous l'appelez, est commencé. [...] Mes enfants, mes amis, je suis peut-être venu plus tôt que vous ne m'attendiez. Mais il y a tellement à faire, tellement à changer dans le monde. Des hommes ont faim et meurent; plusieurs souffrent inutilement. Je viens changer tout cela. Je viens vous montrer le chemin à prendre ensemble vers une vie plus simple, plus saine et plus heureuse. Non plus homme contre homme, nation contre nation, mais ensemble, en frères, irons-nous vers l'avenir, vers la contrée nouvelle. Et ceux qui y sont prêts verront le visage du Père." (Message n°1)
La perfidie de tels propos saute aux yeux. Maitreya se présente comme unique Sauveur de l'humanité, et présente un chemin qui seul permettra de voir le Père…

 

"« Du lieu où je vais, vous savez le chemin ». Thomas lui dit: « Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment saurions-nous le chemin ? » Jésus leur dit: « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi. »" (Jean 14, 4-6)

 

Puis il se relie aux Maîtres de Sagesse, qui ont rencontré un tel succès depuis les écrits de H.P. Blavatsky. Le 15 septembre 1977, il affirme: "Mes Frères, les Maîtres de la Sagesse, doivent effectuer leur retour collectif dans le monde; en tant que leur Maître, en tant que l'un d'eux, je fais de même. [...] Je viens aussi pour vous indiquer la voie qui mène à Dieu, la voie du retour à votre Source.[...] Le premier groupe de mes Maîtres de Sagesse est déjà parmi vous, et bientôt les connaîtrez-vous. Aidez-les dans leur travail. Sachez aussi que par vous ils construisent le nouvel âge. Laissez-les vous guider, vous montrer le chemin." (Message n°2)

 

"Entrez par la porte étroite. Large, en effet, et spacieux est le chemin qui mène à la perdition, et il y en a beaucoup qui s'y engagent; mais étroite est la porte et resserré le chemin qui mène à la Vie, et il y en est peu qui le trouvent." (Mt 7, 13-14)

 

Le 29 septembre 1977, tout en proclamant la fin des anciennes traditions, il se positionne en chef d'une armée de lumière, qui donnera le jour au nouvel âge promis… Mais de quelle lumière s'agit-il ? Rappelons que Lucifer signifie "Porteur de la Lumière"… "Ma venue signifie la fin de l'ancien ordre des choses. Tout ce qui est inutile et qui ne sert plus la cause de l'homme peut maintenant être abandonné. [...] Paré de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel, resplendissant de la Lumière de Dieu, l'homme apparaîtra un jour dans sa divinité. Cela, je vous le promets. [...] Plusieurs m'écouteront, mais pas tous. Néanmoins, le succès de mon armée de Lumière est assuré. Plusieurs me verront bientôt et ne me reconnaîtront point. Plusieurs me verront bientôt et me reconnaîtront. Ce sont les miens.Soyez l'un d'eux." (Message n°4)

 

Le 14 février 1979: "Je fais donc solennellement appel à vous, mes chers amis, pour faire connaître la nouvelle de ma présence parmi vous, aplanissant ainsi le chemin devant moi. Mes fardeaux sont assurément très lourds. Ils pourraient cependant être allégés par votre travail. Je compte sur vous pour agir et me suivre. Ensemble, nous compléterons le Plan." (Message n°61)

 

Et voilà le message du Christ Jésus véritablement inversé:
"Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes. Oui, mon joug est aisé et mon fardeau léger." (Mt 11, 28-30)

 

Là où Jésus propose à l'homme qui ploie sous le fardeau un soulagement, Satan demande à l'homme de le soulager de son fardeau à lui… Et quant au "Plan" dont il est question ici, quel est-il sinon celui qu'il a poursuivi depuis sa première révolte: "J'escaladerai les cieux, au-dessus des étoiles de Dieu j'élèverai mon trône, je siègerai sur la montagne de l'Assemblée, aux confins du septentrion. Je monterai au sommet des nuages, je m'égalerai au Très-Haut" (Ésaie 14, 13-14)

 

Maitreya ne cachera d'ailleurs pas le but ultime de ce "Plan". Quelques temps plus tard, il déclare: "Le but de Maitreya est de montrer à l'homme qu'il n'a plus besoin d'avoir peur, que toute la lumière et la vérité résident dans son cœur, et que, lorsque ce simple fait est connu, l'homme devient Dieu." (Message n°98)

 

"Parce que ton cœur s'est enorgueilli, tu as dit: "Je suis un dieu, j'habite une demeure divine..." Alors que tu es un homme et non un dieu, tu te fais un cœur semblable au cœur de Dieu." (Ez 28, 2)

 

Benjamin Creme, dans son livre "Maitreya, le Christ du Nouvel Âge", explicite ainsi le retour de ce nouveau "sauveur": "Lorsqu'on parle du retour de Maitreya, il faut bien garder présent à l'esprit que l'image est symbolique car jamais Maitreya n'a quitté la terre. Lorsqu'il a dit adieu à ses disciples. il leur a promis de rester avec eux jusqu'à la fin du cycle. Comme il partit, de même il reviendra, "sur les nuées du ciel". Pour certains, cette affirmation est une allusion à l'incarnation progressive du Christ dans les éthers denses de la terre. Bien entendu, il n'a jamais été question d'un Christ s'élevant dans un nuage ou une nuée pour disparaître à la vue de ses disciples, car en fait, c'est le nuage qui le rendit invisible lorsqu'il s'éleva sur un plan que désormais seuls quelques rares adeptes pouvaient franchir. Les archives de la G.F.B. [Grande Fraternité Blanche] mentionnent la prophétie biblique du Christ revenant par les airs en ces termes: "Ces mots ont davantage de sens aujourd'hui que lorsqu'ils furent écrits il y a presque 2000 ans, car ce conflit mondial est éminemment aérien"."

 

"Prenez garde qu'on ne vous abuse. Car il en viendra beaucoup sous mon nom, qui diront: "C'est moi le Christ", et ils abuseront bien des gens…" (Mat 24, 5)

 

Le couple Daniel Meurois – Anne Givaudan rapporte en 1982 dans "Par l'esprit du Soleil" cet appel du "Christ Cosmique": "Vos religions explosent, par-delà les limites de leurs dogmes. Vous vous laisserez entraîner dans la Danse Divine, recevant une incroyable vibration de vérité et d'amour. Ouvrez-vous ! Ceux qui s'accordent aux nouvelles fréquences vibratoires verront leur vie devenir un émerveillement plus grand de jour en jour. Je suis le Christ. Prenez et buvez, car ceci est mon sang. Le temps est venu, acceptez les présents que j'apporte. N'encombrez pas votre chemin de rituels ! Bientôt les médias proclameront: Réjouissez-vous, réjouissez-vous ! Le Seigneur est arrivé !"

 

"Alors si quelqu'un vous dit: "Voici : le Christ est ici !" ou bien : "Il est là !", n'en croyez rien. Il surgira en effet, des faux Christs et des faux prophètes, qui produiront de grands signes et des prodiges, au point d'abuser, s'il était possible, même les élus. Voici que je vous ai prévenus." (Mat 24, 23-25)

 

Pour clore ce chapitre, n'omettons pas Saï Baba, déjà cité. Sathya Sai Baba est né à Puttaparthi, petit village de l'Inde du Sud, le 23 novembre 1926. Le 29 octobre 1940, à l'âge de 14 ans, il déclare à sa famille et aux gens de son village qu'il portera désormais le nom de Sai Baba, et qu'il a pour mission de régénérer la spiritualité de l'humanité en enseignant les plus hauts principes de vérité, d'action juste, de paix et d'amour divin et en montrant comment les appliquer. Il explique de façon plus détaillée cette "mission" dans une lettre qu'il envoie à son frère en 1947: "J'ai une tâche bien précise, celle de protéger l'humanité tout entière et de garantir à tous une vie pleine de félicité. J'ai fait un serment, celui de reconduire tous ceux qui se sont éloignés du droit chemin dans le bon et de les sauver. Je suis très attaché à ce travail que j'aime: éliminer les souffrances des pauvres et leur faire don de tout ce qui leur manque." Vaste et beau programme !

 

Mieux encore: on apprend sur l'un des nombreux sites qui lui sont consacrés (http://perso.wanadoo.fr/revue.shakti/saibaba.htm) qu'il"émerveille le monde par des miracles quotidiens (guérisons spectaculaires, matérialisation de bijoux, de vibhuti, de lingams, etc... dont peuvent témoigner des milliers de personnes). Il a fondé des écoles, une université, un hôpital... Il a maintenant un million d'adeptes dans le monde." Un nouveau saint en ce monde ? Grattons donc un peu le vernis…
Sur ce même site internet, il est également dit qu'"Il a annoncé qu'il resterait sur Terre jusqu'à l'âge de 95 ans, et qu'en 2030, la 3ème incarnation se ferait sous le nom de Prema (Prema veut dire amour en sanskrit), en précisant qui seraient le père et la mère."... Vous avez dit "3° incarnation" ?

 

Saï Baba se présente en effet comme une des incarnations du "Seigneur" (discours de Saï Baba du 23 novembre 1968) : "Je M'incarne d'ère en ère pour protéger les hommes vertueux, pour détruire ceux qui se complaisent dans le Mal, pour établir la Moralité et la Vertu sur une assise ferme. A chaque fois qu'asanthi (le désordre) règne de part le monde, le Seigneur s'incarne et prend forme humaine de façon à indiquer à l'humanité le chemin de la Paix. De nos jours, les conflits et la discorde détruisent la Paix et l'Unité tant dans les familles que dans les écoles, tant dans le domaine religieux que social, et toutes les nations sont en crise. Les saints et les sages ont attendu avec impatience l'Avènement du Seigneur, les saddhus (sages) ont prié avec ferveur, et Je suis venu. Dans aucun de Mes discours Je ne fais allusion à Sai Baba, bien que comme Avatar (*), Je porte ce nom. En fait, Je n'apprécie pas le moins du monde que l'on fasse des différences entres les diverses apparences du Seigneur, telles que Sai, Rama, Krishna. Jamais non plus, Je n'ai dit que l'une de ces incarnations était supérieure à l'autre. Continuez donc à rendre hommage à la forme de Dieu que vous avez choisie, selon les rites qui vous sont familiers, et vous vous rendrez compte que vous vous rapprochez de Moi. Car tous les noms et toutes les formes sont les miennes. Aucun besoin de changer la forme qui vous séduit le plus pour en adopter une autre après M'avoir vu et entendu."
Eloquent ! Est-il besoin d'ajouter un commentaire ?

 

(*) : Dans l'hindouisme, un Avatar est une incarnation divine qui prend naissance dans un corps humain qui possède, de part sa nature, les facultés d'omnipotence, d'omniprésence et d'omniscience.

 

Les Anges  

En ce début du XXI° siècle, l'homme redécouvre l'existence de l'Ange gardien. Voilà qui est bien ! Mais ce retour des Anges sur le devant de la scène mène à de nombreux excès, preuve parmi d'autres la prolifération d'écrits publiés aujourd'hui sur ce thème: l'ésotérisme, le spiritisme et l'illuminisme accaparent une grande part de ce nouveau marché... Comme le rappellent les Editions Bénédictines :

 

" En ce domaine, la fragilité humaine, les superstitions, le monde et ses illusions, les pièges de l'Ennemi font merveille et ... désillusion ! " (*)
" Méfiez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous déguisés en brebis,
mais au-dedans sont des loups rapaces. C'est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. " Matthieu 7, 15-16.

 

Les mouvements New Age tentent de désacraliser ces Esprits célestes, à commencer par nos Anges gardiens auxquels ils attribuent un nom, fonction de notre date de naissance. Ajoutons à cela un rituel fait de parfums et de couleurs choisis pour les invoquer, et l'on aura compris qu'ils deviennent alors de simples esprits évolués, prêts à obéir à nos moindres caprices.

 

Le Livre d'Hénoch, bien connu du Nouvel Âge, apocryphe célèbre d'après l'Exil, dans une section datant probablement du II° siècle av. J.-C., fixe ainsi le nom et la fonction des Archanges, selon un procédé qui consiste à joindre le suffixe " El " (la divinité) à une racine désignant la fonction ou la qualité angélique. Voici le passage en question:

 

" Voici les noms des saints Anges qui veillent: Uriel (ou Ouriel), l'un des saints Anges, celui du monde et du tartare; Raphaël, l'un des saints Anges, celui des âmes des hommes; Raguel (ou Ragouel), l'un des saints Anges, qui tire vengeance du monde des luminaires;Michaël (ou Mikaël, ou Michel), l'un des saints Anges, préposé aux meilleurs des hommes, à la garde du peuple; Saraqiel (ou Sariel), l'un des saints Anges, préposé aux esprits des enfants des hommes qui pèchent contre les Esprits; Gabriel, l'un des saints Anges, préposé au paradis, aux dragons et aux Chérubins; Remiel, l'un des saints anges, que Dieu a préposé sur les ressuscités. Ces Archanges ce sont les sept noms ". Livre d'Hénoch, traduit sur le texte éthiopien, chap. 20, 1-8, Paris, Letouzey et Ainé, 1906.

 

Dans ce même Livre, un autre Archange figure dans la liste des " Quatre Anges du Seigneur des Esprits ", Phanuel: "… Après cela je demandai à l'Ange de paix qui marchait avec moi et me montrait tout ce qui est caché : " Quels sont ces quatre visages, que j'ai vus et dont j'ai entendu et écrit la parole ? " Et il me dit: " Le premier est le miséricordieux et le très patient Michaël; le second qui est préposé à toutes les maladies et à toutes les blessures des enfants des hommes, est Raphaël ; le troisième, qui est préposé à toute force, est Gabriel; et le quatrième, qui préside au repentir, pour l'espoir de ceux qui hériteront la vie éternelle, son nom est Phanuel. " Ce sont là les quatre Anges du Seigneur des Esprits, et les quatre voix que j'ai entendues en ces jours." Livre d'Hénoch, chap. 40, op. cité.

 

A noter que l'on trouve également en ce Livre d'Hénoch les anges des quatre saisons, l'ange en forme de soleil, l'ange préposé aux choses cachées, l'ange chargé d'apaiser les dissensions entre les chérubins, mais également les anges gardiens des soixante-dix nations, les quinze mille anges diurnes et huit mille anges nocturnes attelés au char solaire… et bien d'autres encore.

 

Prenant appui sur des textes rattachés aux traditions cabalistiques, quelques sites proposent un tableau très précis de 72 noms d'Anges, qui se partageraient les 360° du zodiaque par petite tranche de 5° (72x5=360).
Respectant l'ordre des 9 hiérarchies angéliques (Séraphins - Chérubins - Trônes - Dominations - Puissances - Vertus - Principautés - Archanges - Anges) et commençant au signe du Bélier (21 mars), 8 noms d'Anges sont ainsi attribués par catégorie (9x8=72), chacun de ces noms étant relié à une période de "temps" couvrant 4 à 6 jours. Reste à savoir combien d’anges ont met sur la pointe d’une aiguille…

 

Bible trafiquée
Églises mortes  

Nombre de "révélations" reçues par les Maîtres à penser du Nouvel Age laissent entendre que les textes Bibliques, et particulièrement les Évangiles ont été trafiqués volontairement par l'Église.

 

Samuaël Aun Weor (1917-1977), déjà cité, affirme (dans "Le Livre jaune") que "nous, les gnostiques, nous sommes les seuls à posséder les textes grecs originaux des saintes Ecritures, à l'intérieur de notre sainte Eglise gnostique. La Bible est le livre sacré des gnostiques et seuls les gnostiques peuvent la comprendre. La Bible luthérienne est fondée sur les travaux de saint Jérôme qui, se conformant aux ordres qu'il avait reçus du pape Damase 1°, a dû arranger les choses pour les accommoder aux intérêts du catholicisme romain…"

 

Annie Besant (1847-1933), qui a succédé à Henry Steel Olcott à la tête de la Société de Théosophie en 1907, conseillée par un ex-ecclésiastique anglican du nom de Leadbeater (1854-1934), présente un jeune adolescent Hindou, Krishnamurti (1895-1986) comme le nouveau Messie. "Christ" pour les Occidentaux, Bodhisattwa "Maitreya" pour les Orientaux, il est l'Instructeur Mondial qui rassemblera toutes les religions en une seule: voilà ce qui a été enseigné à Annie Besant par les Maîtres Invisibles. Krishnamurti mettra fin lui-même à cette imposture, en rejetant la Société de Théosophie et ce personnage qu'on lui a collé sur le dos, prêchant dès lors une Théosophie "réformée", qui lui vaudra d'acquérir une réputation internationale. Il compte encore aujourd'hui de nombreux adeptes. L'essentiel de son enseignement est contenu dans sa déclaration de 1929, où il affirme que "la Vérité est un pays sans chemin". En 1980, il redit à propos de cette Vérité : "Aucune organisation, aucune foi, nul dogme, prêtre ou rituel, nulle connaissance philosophique ou technique de psychologie ne peuvent y conduire l'homme. Il lui faut la trouver dans le miroir de la relation, par la compréhension du contenu de son propre esprit, par l'observation et non par l'analyse intellectuelle ou la dissection introspective."Rejet des religions établies, des Textes Sacrés, des dogmes et des rituels… La Vérité se trouve en l'homme. Eileen Caddy et Paolo Coelho n'affirment rien d'autre aujourd'hui, lorsqu'ils appellent à écouter notre "voix intérieure"…

 

"Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi." (Jean 14, 6)

 

Concernant la vie de Jésus telle que rapportée dans les Évangiles, Annie Besant déclare, suite aux "révélations" qu'elle a reçu concernant sa "véritable" vie: "Quel Évangile grandiose, auprès de celui de notre époque ! En présence de l'idéal majestueux du christianisme ésotérique, la doctrine exotérique des églises semble bien étroite et bien vide." Etroite, sans doute, comme "la porte qui mène à la vie" (Mat 13, 14) … et vide de toute prétention à un "savoir" supérieur… "Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l'avoir révélé aux tout-petits." (Mat 11, 25). Signalons à cette occasion sa première rencontre "physique" avec son Maître, telle qu'elle la relate dans son Autobiographie: "Pendant l'été de 1889, j'obtins ma première preuve directe. C'était à Fontainebleau. Je couchais seule dans une petite chambre. Tout à coup je m'éveillai, tressaillant. L'atmosphère autour de moi était comme un océan de vagues électriques, et alors apparut la glorieuse forme astrale du maître invisible à mes yeux matériels…" Illusion ? Hallucination ? Quoi qu'il en soit, cet "océan de vagues électrique" fait pour le moins penser à une intervention "daimonique", pour reprendre l'expression de Jules Blois – c'est-à-dire l'intervention d'une intelligence invisible neutre, selon la théorie néoplatonicienne - et au pire à une intervention relevant de la démonologie…

 

Alice Bailey (1880-1949), déjà citée, qui se consacre essentiellement au retour du Messie (pas Jésus évidemment), écrit en 1948 dans "Le Retour du Christ": "L'Église du Christ s'est d'ailleurs rendue tristement célèbre et inefficace par l'étroitesse de ses dogmes, par ses erreurs d'interprétations, son cléricalisme pompeux, son autorité illégitime, ses biens matériels et sa prédication d'un Christ mort. […]L'Eglise est aujourd'hui le tombeau du Christ, et la pierre de la théologie a été roulée devant la porte du sépulcre."

 

On lit de même dans "Vision du Nazaréen" (écrit anonyme, "enseignement" transmis par communication télépathique): "Les hommes ont voulu faire moi un Dieu et se sont querellés à mon sujet… On m'a confondu moi, l'homme, avec l'état christique qui est destiné à tous et non à moi seul et dont je voulais montrer le chemin. L'état christique est l'union avec l'unique conscience divine, celle que j'appelle Père…Les Grands Êtres décidèrent que les peuples de l'Occident se développeraient sur le sentier de l'action, tandis que les peuples de l'Orient trouveraient la Vérité sur le sentier de la contemplation et de la quiétude d'esprit. C'est pour enseigner l'union très heureuse de ces deux sentiers que je naquis en Palestine…"

 

Ces "révélations" vous paraissent loufoques ? Elles remportant pourtant un immense succès, et ces ouvrages se vendent à des centaines de milliers d'exemplaires… Sans doute pourrions-nous prendre pour notre compte ces lignes adressées par l'apôtre Paul à l'église de Corinthe: "J'ai bien peur qu'à l'exemple d'Eve, que le serpent à dupée par son astuce, vos pensées ne se corrompent en s'écartant de la simplicité envers le Christ. Si le premier venu en effet prêche un autre Jésus que celui que nous avons prêché, s'il s'agit de recevoir un Esprit différent de celui que vous avez reçu, ou un Évangile différent de celui que vous avez accueilli, vous le supportez fort bien"… (2 Cor 11, 3-4)

 

Christian Kerboul, dans "L'Homme du Verseau" écrit: "L'histoire n'a pas de sens immanent que Dieu lui aurait imprimé. C'est à l'homme qu'il revient de lui donner un sens et une signification. Il faut un grand renouvellement: c'est bien d'un homme nouveau que nous préparons la naissance. La civilisation occidentale et le christianisme sont en état de divorce objectif. L'homme occidental ne peut plus accepter un monde créé une fois pour toute et menacé à tout moment d'une fin apocalyptique: il faut au contrairequ'intervienne une recréation, qu'un nouveau cycle cosmique commence." Appel à la rébellion devant Dieu… qui rappelle étrangement le mythe d’une rébellion beaucoup plus ancienne, qui vit la chute d'une myriade d'Anges, à la suite de celui qui les avait entraîné, lui qui avait pour nom "Porte Lumière": Lucifer…

 

David Spangler, le célèbre gourou du New-Age, n'a-t-il pas déclaré: "Lorsque nous entrerons dans l'âge nouveau, chacun de nous atteindra l'initiation luciférienne" ?

 

Faut-il rappeler que pour le chrétien, Jésus, le Christ, est vraiment Dieu et vraiment Homme, Dieu parfait, Homme parfait ?

 

La constante de ces révélations reste la même pour tous. Henri de Lubac la définit (dans "Entretien autour de Vatican II") comme "une tentative de détourner le sens profond de la révélation chrétienne vers une connaissance secrète sublime, intégrale, réservée à une élite, laquelle aurait seule capacité d'interpréter la signification cachée de l'Évangile. Le présupposé des gnostique est toujours le même, quoi que n'apparaissant pas toujours dès l'abord: ce qui est dit dans la Bible et dans la tradition commune n'exprimerait pas, au fond, la foi en un Dieu transcendant, qui intervient dans notre monde, mais la découverte de l'homme. Les mystères chrétiens ne seraient qu'un revêtement symbolique, pure superstition tant qu'on n'en pénètre pas le sens qu'ils traduisent pour les esprits faibles. C'est là le plus subtil et le plus profond athéisme, l'inverse de l'attitude propre à l'incarnation, et d'abord à un sain réalisme, qui est d'humilité."

 

Rejet du péché
Inutilité du Salut 

Selon ces doctrines du Nouvel Age, l'homme serait parfait, divin par nature, et donc "autosuffisant". Il n'a plus besoin d'être "sauvé". Jésus n'est plus le Sauveur.

 

Le deuxième "Manifeste humaniste" déclare tout de go: "Aucune divinité ne nous sauvera: nous devons nous sauver nous-mêmes." Voilà qui est clair… Pour l'adepte du New-Age, le salut s'obtient par l'accumulation des expériences mystiques, et les purifications intérieures obtenues par la pratique des techniques de méditation (yoga, mantras…). Il s'agit d'un "auto-salut", en lequel Dieu n'a évidemment pas sa place.

 

"C'est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu ; il ne vient pas des œuvres, car nul ne doit pouvoir se glorifier." (Ep 2, 8-9)

 

Au V° siècle, un moine breton du nom de Pélage enseignait que le pouvoir de la volonté est illimité, qu'il n’est pas besoin d'une grâce divine, et que l'homme peut se sauver par ses seules forces. Cette hérésie – le pélagianisme – fut notamment combattue par saint Augustin. Cela n'a pas empêché Jean-Jacques Rousseau de reprendre ces idées, ni le Nouvel Age de les faire siennes…

 

"Aujourd'hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur." (Lc 2, 11)

" Le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu." (Lc 19, 10)

"C'est vraiment lui le Sauveur du monde." (Jn 4, 42)

 

La Parole de Dieu s'est fait chair pour sauver les siens:
"Je suis venu jeter un feu sur la terre, et comme je voudrais que déjà il fût allumé ! Je dois être baptisé d'un baptême, et quelle n'est pas mon angoisse jusqu'à ce qu'il soit consommé !" (12, 49)

 

L'Evangile de Jean affirme à plusieurs reprises l'importance de cette heure:
"Personne ne se saisit de lui, parce que son heure n'était pas encore venue." (Jn 8, 20)

"Voici venue l'heure où doit être glorifié le Fils de l'homme." (Jn 12, 23)

"Maintenant mon âme est troublée. Et que dire ? Père, sauve-moi de cette heure ! Mais c'est pour cela que je suis venu à cette heure. Père, glorifie ton nom !" (Jn 12, 27-28)

"Avant la fête de la Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde vers le Père…" (Jn 13, 1)

"Père, l'heure est venue : glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie…" (Jn 17, 1)

 

Et le Christ lui-même annonce par trois fois sa Passion à venir:
1. "A dater de ce jour, Jésus commença de montrer à ses disciples qu'il lui fallait s'en aller à Jérusalem, y souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être tué et, le troisième jour, ressusciter." (Mat 16, 21 – Marc 8, 31 – Luc 9, 22)

2. "Le Fils de l'homme va être livré aux mains des hommes, et ils le tueront, et, le troisième jour, il ressuscitera." (Mat 17, 22 – Marc 9, 30 – Luc 9, 44)

3. "Voici que nous montons à Jérusalem, et le Fils de l'homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes; ils le condamneront à mort et le livreront aux païens pour être bafoué, flagellé et mis en croix; et le troisième jour, il ressuscitera." (Mat 20, 17 – Marc 10, 32-34 – Luc 18, 31-33)

 

Rejet de la Croix

Pour les gnostiques, la vie du Messie elle-même ne garde comme seule valeur que celle d'un modèle d'un chemin initiatique, qui ne peut être suivi que par une minorité d'êtres suffisamment "évolués" (entendre "qui ont vécu un nombre suffisant d'incarnations").

 

Benjamin Creme écrit dans les premières pages de son livre "Le Retour du Christ et les Maîtres de Sagesse" ("The Reappearance of the Christ and the Masters of Wisdom", Hollywood, Tara Center, 1980), que le christianisme orthodoxe présente "une image du Christ qu'une majorité de personnes réfléchies ne peut pas accepter aujourd'hui, à savoir le seul et unique Fils de Dieu, sacrifié par le Père qui l'aimait, afin de sauver l'humanité des conséquences de ses péchés. C'est un sacrifice sanglant issu tout droit de la dispensation juive, passée et usée." Le salut par la Croix, folie pour les païens !

 

Samuaël Aun Weor, déjà cité, écrit à ce sujet: "Tout ce drame du Calvaire doit être vécu à l'intérieur du plan astral, lorsque le troisième degré du pouvoir du Feu a été complété… L'événement du Golgotha dans notre corps astral convertit ce corps en un Nazaréen vivant, plein de pouvoir et de gloire. C'est pourquoi nous disons dans notre rituel: Je crois au Fils, le Crestos cosmique, la puissante Médiation astrale qui relie notre personnalité physique à l'immanence suprême du Père solaire…"

 

Rappelons donc une fois encore les paroles de l'apôtre Paul: "Nous, nous prêchons un Messie ("Messiah" en hébreu = "Christ" en grec = "oint de Dieu") crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens, mais pour ceux qui sont appelés, tant Juifs que Grecs, il est Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu. Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes." (1 Co 1, 23-25)…

 

Maladie
&
auto-guérison 

De nombreux centres new-age proposent aujourd'hui des techniques "ancestrales" de guérison. Les termes et les méthodes proposées varient, mais il demeure une constante: ce n'est jamais Dieu qui guérit, mais le malade qui s'auto-guérit, qui se guérit lui-même. N'oublions pas la philosophie de base: puisqu'il en a le pouvoir, il n'a pas besoin de Dieu, et peut donc très bien se passer de Lui.

 

"Hors de moi vous ne pouvez rien faire" (Jean 15, 5)

"Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils" (Jean 14, 13).

 

Passons tout d'abord rapidement en revue quelques stages ainsi proposés, aux personnes "en difficulté". L'appel au client tourne toujours sur le même principe. Quelques données empruntées au site "Spiritsoleil" – dont le nom même ("l'esprit du soleil") ne laisse aucun doute quant à son appartenance à ce mouvement – serviront ici d'exemple.

 

Un "Atelier Thérapeutique" tout d'abord: "Vous êtes angoissé(e), souvent stressé(e), fatigué(e) ? Vous n'arrivez pas à vous réaliser, à concrétiser vos rêves ? Vous répétez des situations douloureuses ?..." : voilà de quoi interpeller du monde… Pour quelle solution ? "M. T. (thérapeute psychocorporel) vous propose une piste de réponse par la méthode du Rebirth (respiration dirigée calme et profonde, qui -en état de relaxation- permet de mettre en conscience l'origine de vos maux et de vos émotions refoulées pour les transformer et devenir acteur de votre vie) et de la Relaxation (qui vous permet d'accéder à vos ressources et vous apprend à être à l'écoute de votre corps pour un mieux être)." L'écoute de soi qui induit le mieux-être… Sous-entendu: à force de n'écouter que les autres, on va très mal. Quant à la respiration profonde qui "met en conscience" les émotions refoulées, voilà qui aurait fait sourire Freud lui-même… Ce que ce site ne précise pas, c'est que la technique du "Rebirth" cherche à atteindre l'expérience respiratoire de la naissance, expérience qui peut induire d'après le Dr Bernard Auriol "divers phénomènes émotionnels de type souvent extrêmement archaïque, comme des colères de nourrisson, des cris, des larmes, des mouvements de succion des lèvres, un sommeil impérieux, certains états plus ou moins stuporeux, des phénomènes hallucinatoires ou hallucinosiques, etc.", avant que ne soient ressenties des "impressions souvent intenses de bonheur, de joie, de paix, de détente, de lumière, d'abolition du temps..." Entre hallucinations et délires, on voit à quels dangers ces pratiques peuvent mener !

 

D'autres stages sont proposés sur ce site, tels: - les "Soirées naturistes", avec "relaxation aquatique en eau chaude" (les thermes Romains avaient du bon !); - la "Tantra-Rencontre", "approche originale et synthétique du développement personnel." … "A tous ceuxqui veulent découvrir le Tantra dans son aspect initiatique, ceux qui souffrent, qui sont "mal dans leur peau" ou qui veulent résoudre une difficulté personnelle sur le plan affectif ou relationnel, surmonter une épreuve, trouver une aide dans une situation dont ils n'arrivent pas à se sortir seuls." On remarquera le même ratissage vis-à-vis des êtres supposés en détresse, proie idéale pour ce type de stage, dont le prix – bien sûr – n'est jamais affiché;


- "Devenons "fous"": "Pour retrouver l’enthousiasme !" affirme l'auteur de ces lignes, qui oublie (mais l'a-t-il jamais su ?) que l'enthousiasme trouve sa racine en Dieu: ce terme vient du mot grec "Théos" = Dieu, et "Enthousiasesthai" signifie littéralement être possédé de Dieu, et par suite, inspiré de lui. "Voici venu le temps de rire de tout et de rien, Spécialité des clowns et de ceux qui veulent trouver dans l’humour de soi un début de solution à la morosité et au stress." Ne croyez pas que ce soit simple: il est proposé ici 2 niveaux de stage, initiation et perfectionnement ! Si cela vous fait rire, c'est bien, vous n'en avez donc pas besoin. Plus sérieusement, il serait bon de s'interroger sur les conséquences de cette incitation à rire "de tout et de rien": où peut-elle mener, sinon à une indifférence grandissante pour tous les maux qui couvrent la terre et déchirent les âmes de nos frères ? Et l'on en revient au constat accablant de cet égocentrisme forcené, qui se part des "couleurs" du bien-être et de la joie ! Aussi faut-il considérer que cette pratique «de rire de tout et de rien» se retrouve au sein des mouvements Pentecôtistes et Charismatiques où elle est désigné comme «un saint rire» par ceux qui en sont possédés. - ""L'Art-Gens" La relation à l'argent": "S'enrichir par l'expérience" est-il annoncé ici... Ces petits maîtres dès "spiritualité nouvelle" s'acoquineraient-ils avec Mamon ? L'on aura remarqué le jeu de mot pseudo-lacanien (l'art-gens), dont le ridicule n'égale que la prétention à "faire sérieux" ! Le descriptif se poursuit ainsi : "Au cours de cette "Initiation" (le mot qui fait toujours mouche !), une série de jeux vous permettra de découvrir et démultiplier vos choix possibles et ceci dans différentes dimensions et sur différents niveaux de notre expérience individuelle et collective de l'argent. Qui plus est, en fin de ce premier séminaire, vous aurez quelques premiers éléments fondamentaux pour un début de mise en pratique." Pour le moins obscure, cette présentation est sans doute suffisamment alléchante pour attirer quelques pauvres âmes confrontées à des difficultés financières… - "Création de talismans", beaucoup plus direct et explicite que le précédent: "Vous apprendrez à les faire pour l'amour, l'argent, la chance et la protection."… A quand un stage intitulé "Devenez Mage en trois leçons", ou une adaptation pour les enfants: "Réveille l'Harry Potter qui est en toi !" ? - "Ecole de Thot - Médecine Holistique" – Passons sur les références du titre à l'Egypte ancienne, rien que de très classique, pour remarquer que là encore il s'agit d'une initiation avec "quatre niveaux de formation, correspondants à quatre niveaux de conscience, [qui] révèlent le talent de chacun à transformer sa vie pour devenir qui il est vraiment." Suit une citation qui ne mange pas de pain, histoire d'inclure le mot "alchimie" dans la présentation, citation destinée à éveiller l'appétit d'esprits en mal de "connaissances": "Tout ce qui est en bas est comme en haut, Tout ce qui est en haut est comme en bas" (Une loi alchimique de base)"… Rien n'indique bien sûr que le responsable de ce stage ait approfondi l'alchimie au-delà de cette "base", mais qu'importe: c'est ce que l'on appelle jeter de la poudre aux yeux…!


- "L'Eveil du Corps de Lumière" – "Pourquoi je suis allergique ?" – "Les Bols Tibétains" – "Harmonisation Energétique de vos 7 Corps Subtils" – "Sortir hors de son corps: la voie royale vers l'Éveil"... sont d'autres intitulés de stages ou formations qui balayent ainsi un large éventail, susceptible de répondre aux demandes éclectiques des clients potentiels.

 

Mais ce site ne détient pas le monopole de ces stages et formations New-Age, qui sont animés par une multitude de "Maîtres" qui se sont fait une spécialité dans l'invention de nouvelles sciences du "bien-être". L'on découvre ainsi au détour d'un site ou d'une revue spécialisée, des stages de "Tantra chamanique", de "Psychothérapie transpersonnelle", ou de "Kinésiologie", des formations telle que "Comment devenir biomagnétiseur" ("chacun de vous a en lui tous les pouvoirs" !), ces guérisseurs à mains nues affirmant sans complexe que "le don n'existe pas, ça s'apprend"

 

"Tout don excellent, toute donation parfaite vient d'en haut et descend du Père des lumières…" (Jc 1, 17)

"Qu'as-tu que tu n'aies reçu ? Et si tu l'as reçu, pourquoi te glorifier comme si tu ne l'avais reçu ?" (1 Cor 4, 7)

 

Vous pourrez apprendre aussi "l'Art du Chi" sur le site "Devenez Biomagnétiseur", suivre une formation de "Praticien Ayurvédique" àL'institut Européen d'Etudes Védiques, apprendre "l'astro-homéopathie" chez un naturopathe, que ses études ont amené à la conclusion évidente que "Astrologie = Homeopathie = Numérologie. On pourrait y rajouter + acupuncture + graphologie + kaballe + mythologie + tarot", ou encore chez Euronature – Instituts de Formation des médecines douces, découvrir en vrac l’hydrologie, la phytologie, la Chirologie, les reflexothérapies, l'héliothérapie, la chromatologie … On pourrait citer encore la kinésiologie, l'iridologie, la biothérapie, l'agrobiologie, la morphopsychologie, l'auriculothérapie… Ce dernier site a au moins le mérite de proposer une définition extrêmement claire de la naturopathie, qui admet y lit-on "dans sa conception Philosophique l’existence d’un principe vital intelligent, la "Nature Médicatrice" ou force vitale intelligente et auto-guérisseuse. C’est ce principe qui préside au devenir sanitaire de l’être humain tant que celui-ci ne transgresse pas les grandes lois biologiques." Voilà sans doute la solution à proposer aux millions d'êtres humains qui souffrent de malnutrition en ce monde, qui feraient donc bien de retrouver le chemin de leur "Nature médiatrice" avant qu'il ne soit trop tard… Ah, que la pensée de l'homme peut s'enfler d'orgueil, lorsque le corps est repu !

 

Revenons-en à la maladie et à la guérison vue par le Nouvel Age. Spécialisés dans les techniques du Reiki (terme japonais qui signifie "Énergie universelle de vie", désignant aujourd'hui une "méthode de guérison par l'imposition des mains, tout comme nous voyons dans de nombreuses sectes chrétiennes extatiques"), de nombreux sites abordent ainsi le thème de la maladie et de la guérison. Outre le fait que le Reiki est particulièrement recommandé par les "Maîtres" qui le pratiquent contre le stress, l'insomnie, la migraine et la fatigue, il est censé également favoriser "la croissance personnelle et la paix intérieure"... Pas d'erreur, nous surfons bien sur la vague new-age.

 

L'un de ces sites (Reiki-libre.net) nous apprend que "Les enfants de la civilisation MU étaient initiés dès l'âge de 7 ans à cette méthode de guérison. Ce sont eux qui ont transmis le savoir au peuples de l'actuelle Inde et du Tibet." Rappelons-nous: plus c'est ancien, et plus ça marche !


Notons également que nombre de ces sites internet ne manquent pas de préciser que le fondateur de cet "art sacré" retrouvé, le Dr Mikao Usui, était un religieux "chrétien" japonais... histoire de ratisser large, vous l'aurez compris.

 

L'initiation (le mot qui attire les foules !) est scindée en trois niveaux (remarquez le choix du vocabulaire employé): "Au premier niveau, l'adepte reçoit quatre initiations (transmissions d'énergie), ouvrant ainsi et à tout jamais le canal à travers duquel l'énergie Reiki circule. On y apprend aussi la technique d'imposition des mains et de transmission du Reiki.


Au deuxième niveau, l'adepte reçoit une autre initiation. Trois symboles sacrés lui sont également enseignés. Ainsi, le praticien dispose d'une plus grande puissance de transmission. De plus, on y apprend comment transmettre le Reiki à distance. L'initiation à ces symboles s'avère obligatoire afin qu'un praticien Reiki puisse les utiliser. Le troisième niveau est celui à atteindre pour devenir maître. Ce niveau permet d'initier les adeptes au Reiki." 
"Canal", "énergie", "puissance", "transmission à distance", on retrouve là le vocabulaire habituel du new-age. Ce que ces sites avouent moins facilement, c'est le prix demandé pour ces initiations… Un ancien adepte, François Perrin, en témoigne sur son site internet.

 

Les "symboles sacrés" délivrés au deuxième niveau ayant été révélés au grand public par Diane Stein dans son livre "Reiki Essentiel", il a fallu trouver aux "Maîtres" enseignants d'autres astuces pour justifier l'élévation dans l'initiation, et… son coût exorbitant. De nouvelles "branches" Reiki ont ainsi été créées ("Usui", Karuna", "Chirurgie Energétique", etc.), et un Maître plus astucieux que les autres, William H Rand, a déposé en 1995 un copyright sur de nouveaux symboles, se mettant ainsi à l'abri de toute divulgation intempestive… Notez tout de même qu'il ne les a pas sortis de sa poche tel un magicien: "Il s'agit en fait de symboles découverts par Dr Usui et qui n'étaient pas donnés jusqu'à aujourd'hui, car le niveau de conscience des initiés reiki n'était pas suffisamment élevé pour accepter cette nouvelle énergie." Les initiés reiki ont donc fait de grands progrès en l'espace d'un siècle, et ils ont suffisamment "élevé leur niveau de conscience"… Mais jusqu'où iront-ils ?

 

Sur le site Reiki-libre.net cité plus haut, vous apprendrez également que le Reiki karuna est "la force puissante de tous les êtres éclairés qui travaillent afin d'amener la paix et l'harmonie sur la terre. Ces êtres nous envoient continuellement une quantité illimitée d'énergie, mais nous ne sommes pas tous réceptifs." … D'où la nécessité de rejoindre rapidement ces stages d'initiation, pour ne pas laisser se perdre ces ondes bienfaisantes ! Nous retrouvons ici la notion de guide spirituel, ces "Maîtres Invisibles" chargés de nous guider sur la voie de l'élévation… Vous apprendrez aussi que le Reiki karuna "agit aussi sur la libération des blocages inconscients et karmiques." Tout de même, plus vite on en aura fini avec nos réincarnations, et mieux ce sera…! Vous apprendrez enfin que "en pratiquant le Reiki karuna, les initiés ont souvent des contacts avec leurs guides, anges ou moi supérieur, et sentent la présence d'autres êtres de lumière." Assimiler notre Ange gardien avec le "moi supérieur" est également un élément que l'on retrouve assez souvent dans la littérature new-age. Remarquez bien que pour "ressentir" cela, il faut déjà être "initié"… Vite, vite, inscrivons-nous…

 

Pour le Reiki comme pour les techniques de méditation, l'on trouve sur internet un certain nombre de sites où sont présentés côte à côte - comme s'ils étaient semblables, ou du moins complémentaires – références catholiques et références typiquement New-Age. Par exemple, sur ce site où l'on trouve des citations d'Edgar Cayce à côté de celles de Mère Teresa et du Padre Pio, site dont le but recherché est "de vous permettre de mieux connaître cette remarquable technique curative qu'est le Reiki et de vous présenter différentes méthodes qui peuvent vous aider à retrouver un équilibre personnel." Vous y apprendrez ainsi à la rubrique "Prière" que "La foi est la croyance sans limite que ce que l'on demande est déjà servi... [une espèce de super méthode Coué !] La foi n'a rien à voir avec la croyance en un Dieu particulier. Tout ce qui vit dans l'Univers est composé de l'énergie de vie divine et répond à des principes de lois de créativité. La foi met en œuvre une loi. La pensée met l'énergie de création en action. L'émotion lui donne vie. [...] Dieu est une force de vie intelligente de création incommensurable. Il a établi des règles, des lois de réaction qui mettent en route la création. C'est vous et uniquement vous qui, en réglant l'intensité de votre désir, mettez ou non en activité le résultat de votre demande." Autrement dit, celui qui n'est pas "exaucé" de sa prière, est celui qui a mal "réglé" son désir… Pauvre de lui ! La page des citations est plus explicite encore, puisque l'on y trouve aux côtés de Carlos Castaneda ("Peu importe le chemin: tous les chemins se valent. L'important est de suivre un chemin qui a du cœur"), ces citations qui nous ramènent tout droit à l'égocentrisme si caractéristique du Nouvel Age: "C'est un inestimable bien de s'appartenir à soi-même" (Sénèque), et "Il n'y a qu'une réussite: pouvoir vivre comme on l'entend" (Darlington Morley, 1890-1957, romancier, poète et essayiste américain)… Paolo Cuelho n'a décidemment rien inventé !

 

"Demandez et l'on vous donnera… car quiconque demande, reçoit… Si vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est dans les cieux en donnera-t-il de bonnes à ceux qui l'en prient !" (Mat 7, 7-11 – Luc 11, 9-13)

 

La "Chirurgie énergétique" est plus surprenante encore, puisque les Maîtres qui l'enseignent affirment pouvoir guérir non seulement les inévitables dépressions (quel proie intéressante que le déprimé !), les migraines, hernies discales, cicatrices douloureuses, fibromes, kystes, etc., mais encore des douleurs dues à de vieilles blessures ou opérations, telles que fractures ou hématomes, … et bien d'autres encore ! Qu'est-elle et d'où vient-elle ? "Nous trouvons là les bases d'une chirurgie micro vibratoire du futur, à moins qu'il ne s'agisse d'une redécouverte des bases d'une science énergétique oubliée depuis des millénaires, gardée secrètement par quelques initiés !! Les fameux guérisseurs Philippins. En Inde, vous pouvez trouver des grands sages qui pratiquent de la même façon, mais qui ne se font pas forcément connaître." Un lointain passé et l'Orient restent la référence suprême en matière de "technique" new-age: la "Chirurgie Energétique" n'échappe donc pas à la règle. Il est fait ici référence aux "guérisseurs Philippins", ces guérisseurs à mains nues qui ont fait l'objet de maints reportages télévisés et d'articles de presse. Il s'agit pour eux de "Chirurgie psychique", portée à la connaissance du public dès 1958 par deux journalistes américains, Ormond et Mac Gill. Nous ne détaillerons pas cette approche de la "guérison", qui sort du cadre de ce dossier, et qui mériterait à elle seule une étude à part entière…

 

Restons dans le domaine de l'énergie, avec la méthode de l'Energie Universelle, prônée par l'IHUERI (Institute for Human and Universal Energy Research Inc.), institut fondé aux Etats-Unis en 1991 par Dang Minh Luong (né en 1942 au Viêt-Nam) et Vien T. Phan (traducteur en américain et en français des textes de Luong). Ce dernier se présente comme l'héritier spirituel de Dasira Narada(1846-1924) - lui-même fondateur à Ceylan de l'Ecole spirituelle de l'énergie universelle - et envoyé sur terre pour compléter"l'œuvre ratée de Bouddha et de Jésus", c'est-à-dire unifier toutes les religions... Quelle est donc cette méthode, développée par Maître Dang, alias Narada III ? Elle consiste à "injecter de l'énergie universelle dans l'organisme du patient pour neutraliser son état d'affection, en débloquant les canaux d'énergie." On accède à ces canaux d'énergie par les sept "chakras" du corps humain, qui doivent donc être ouverts. Et c'est précisément parce que "les chakras se sont fermés que l'humanité a régressé, et qu'elle s'enfonce chaque jour de plus en plus profondément dans le Mal, le matérialisme, la compétition, le meurtre, les guerres." Heureusement, la méthode de Luong"contribuera à la guérison de l'humanité dans la nouvelle ère." Vaste programme ! Et Luong promet ainsi de tout guérir, non seulement le diabète, l'hypertension, les maladies mentales, les douleurs rhumatismales, les problèmes gynécologiques, etc., mais aussi le cancer et le sida…

 

En 1993, Luong a déplacé son quartier général à Bruxelles, où il a fondé l'Institut européen de recherche de l'énergie universelle. IHUERI-France est devenu HUE-France. En 1994 a été créée la S.C. Spiritualité Humanité Yoga (S.H.Y.), destinée à "l'enseignement, la recherche et le développement des potentialités humaines et spirituelles liées notamment au Yoga de l'Énergie Universelle." Il y aurait aujourd'hui plus de 20.000 adeptes de ce mouvement dans le monde, qui est particulièrement bien implanté en France…

 

Anne Givaudan se réfère également aux guérisseurs philippins, lorsqu'elle parle de "Chirurgie éthérique", méthode thérapeutique qu'elle pratique conjointement avec la médecine "essénienne", cette dernière retrouvée au cours de "recherches à travers les annales akashiques". Elle déclare ainsi dans une interview accordée à "L'Ame et le Cœur" (voir la rubrique "La Presse des Thérapies"): "nous avons revécu et retranscrit une vie qui s’est déroulée à l’époque des esséniens et de Jésus, où nous avions été initiés l’un et l’autre [avec Daniel Meurois] à la lecture des auras, au voyage astral et aux soins. Il nous restait à compléter notre vie présente en retrouvant les thérapies. Beaucoup d’esséniens avaient la réputation d’être de grands thérapeutes. Ils tenaient leur science des médecins égyptiens qui eux-mêmes la tenaient d’autres civilisations très anciennes et disparues comme celle de l’Atlantide." Nous retrouvons cette référence à un passé lointain et mystérieux, gage de sérieux et de réussite… du moins en matière d'attrait pour les clients potentiels, qu'ils soient acquéreurs de livres et/ou participants aux stages proposés sur le site ! Mais l'Atlantide, c'est encore trop peu… Anne Givaudan précise donc dans une autre interview (publiée dans le Magazine Nexus n°15, juillet-août 2001 – cf. le site Essania): "Les Esséniens avaient reçu leurs enseignements des thérapeutes d'Egypte qui eux-mêmes les tenaient de l'époque de l'Atlantide, ...des Hommes de Sagesse Atlantes qui avaient été eux-mêmes enseignés par des êtres de la planète Vénus." Tenterons-nous une surenchère ? Qui dit mieux ? … Sirius à ma droite ? … Andromède à ma gauche ? …

 

Pour ce qui est de l'origine de nos maladies, Anne Givaudan nous l'explique, tout est clair: "Chez les Esséniens, la maladie n'était jamais considérée comme une ennemie. Elle était le signal pour indiquer que quelque chose n'allait plus entre les différents niveaux de l'Etre.Lorsqu'il n'y a plus accord entre nos pensées, nos actes et nos paroles, il se passe en nous une fissure, une baisse d'immunité qui laisse la porte ouverte à ce qui par la suite, générera nos maux des plus légers aux plus lourds." Pauvres chrétiens de tous les âges, qui ont souffert le martyre en ignorant ce déséquilibre intérieur, cause de tous leurs maux… "C'est en fait dans notre façon de recevoir, de comprendre ce qui nous arrive (évènements ou rencontres) que tout se joue, l'événement en lui-même est neutre, il s'avère une simple expérience mais il prend une forme, une couleur, une pensée, une émotion selon l'angle sous lequel nous allons le regarder. C'est de là, de cette simple façon de recevoir la vie que tout dépend. Sans doute est-ce pour cela que les grands courants de pensée prônent des façons de prendre la vie avec détachement et sérénité..." Surtout, ne nous laissons pas toucher par la douleur de l'autre: la compassion (cum patire = souffrir avec) n'est ici même plus de mise !


Et l'efficacité des soins, direz-vous ? Elle dépend du malade, et seulement de lui: "La question de croyance n'a rien à voir avec l'efficacité de ces soins, pourtant le thérapeute n'a rien à proposer. C'est au malade de faire la démarche, de demander de l'aide et non à celui qui soigne. L'essentiel est que le "malade" ou plutôt "le patient" sache que c'est lui qui est à l'origine de son problème et personne d'autre." Voilà qui a le mérite d'être clair… Et Anne Givaudan d'ajouter: "Même si dans un premier temps, cette approche semble culpabilisante: "Comment, vous prétendez que c'est moi qui suis à l'origine de mon cancer !..." Cela permet à l'intéressé dereprendre son "pouvoir" de ne pas se laisser embarquer n'importe où et n'importe comment comme une victime vers l'abattoir. Si notre façon de comprendre, d'appréhender un événement peut nous rendre malade, cela signifie aussi que nous avons en nous le pouvoir de dénouer, de changer, de transformer cette vision sur ce qui nous détruit pour en effacer les traces." Et nous revoilà bien au centre même du new-age: apologie de la volonté propre, qui détient en potentialité tous les pouvoirs… : je veux, donc je peux. A l'opposé de l'abandon à la volonté divine, prônée par Jésus !

 

Amédée Louis-Fernand, auteur de "Résurrection", affirme d'entrée que "La Résurrection de la femme, de l'homme, doit avoir lieu de leur vivant sur cette Terre. Chacun devra un jour effectuer son chemin de croix pour accéder au prochain stade de Vie, celui de la Conscience." Au moins, l'on sait où l'on met les pieds ! Ce "guérisseur intuitif et thérapeute d'exception" tel que nous le présente son site internet croit lui en la Consciensothérapie. "Seul l'éveil de la conscience permet d'aboutir à la seule guérison authentique."Auteur de cette méthode de guérison, Amédée souhaite qu'avec elle "nous puissions grâce à notre transformation personnelle vivre l'éveil de notre conscience et devenir les acteurs de notre propre guérison, et trouver ainsi la sérénité et les réponses aux questions essentielles de la vie." Vaste programme… où l'on retrouve bien sûr cette constante de l'homme centré sur lui-même.

 

Mentionnons encore les "Groupes de prière" fondés par Maguy Lebrun (plus de 300 groupes en France, une vingtaine en Suisse romande). Chaque groupe est constitué de dix à quinze personnes; chacun invoque sa divinité, après quoi, en appelant les "esprits guides", on passe à l'imposition des mains pour la guérison physique et spirituelle…

 

Avec tout cela, l'on est en droit de se demander ce que sera la médecine de demain, et si tous les praticiens "traditionnels" ne se retrouveront pas au chômage. Et bien, c'est précisément ce que prédit Omraam Mikhaël Aïvanhov (1899-1986), le fondateur de laFraternité Blanche Universelle, dont nous avons déjà parlé. La "FBU" est une école initiatique qui défend deux théories: d'une part un "héliocentrisme christique" (le Christ, prince cosmique, vit dans le soleil - or primordial - le centre universel de toutes les religions: "Il est temps maintenant de se tourner vers le principe universel qui est l'origine de toutes les religions, et de déchiffrer le symbole de cette religion universelle: le soleil."), et d'autre part l'habituelle croyance en la réincarnation et en la loi de causalité (karma). Selon la FBU, Mikhaël Aïvanhov est le 19° Grand Maître de l’humanité, après Krishna, Bouddha, Zoroastre, Moïse, Jésus et quelques autres…

 

Lors d'une conférence donnée à Toulouse en 1970, et rapportée par le journal "L'Avenir de la médecine", ce "grand maître" annonce:


"Comment sera la médecine dans l'avenir ? Je vous l'ai dit: en chômage, parce que je peux proposer à l'Etat un moyen de faire chômer tous les docteurs. Comment ? C'est très simple. Je lui demanderai un endroit que je choisirai moi-même, un endroit vaste et très beau. Là, je ferai construire des bâtiments dont je choisirai aussi les formes et les couleurs. Il y aura des fleurs, des peintures, des statues, etc., et ce sera un endroit où les femmes enceintes seront logées et nourries gratuitement pendant neuf mois. Tout leur sera facilité. Elles entendront des conférences, des concerts, et elles feront un travail spirituel. Bien sûr, leurs maris viendront les voir et eux aussi entendront des conférences. Voilà le moyen de mettre au monde des enfants qui ne seront jamais malades ! [...] Si les enfants sont malades ou criminels, c'est parce que les parents ne savent pas comment les mettre au monde. Si les jeunes filles et les jeunes garçons lisaient ce que j'ai dit, il y a trente ans, sur les mystères de la galvanoplastie, ils verraient comment ce processus de la galvanoplastie se répète, en réalité, dans tous les domaines et en particulier dans celui de la gestation des enfants. Ils comprendraient où se trouvent, dans la femme enceinte, la solution métallique, l'anode, la cathode, le moule en gutta percha, etc., et ils sauraient comment ils peuvent obtenir des enfants magnifiques [...]. Oui, quand je vois comment l'Etat dépense inutilement des milliards pour des cliniques, des prisons, des tribunaux, je me dis que, s'il se décide à économiser, je peux supprimer tout cela; parce qu'il n'y aura plus de malades, il n'y aura plus de criminels... Alors, dites-moi maintenant, si ce n'est pas scientifique. Il n'y a rien de plus scientifique que ce que je viens de vous dire." Vous ne connaissez pas la galvanoplastie spirituelle ? O.M. Aïvanhov nous apprend (in "La Nouvelle Terre") que c'est à elle que l'humanité devra son salut: "La mère connaissant la loi de galvanoplastie décide de l'utiliser pour mettre son enfant au monde. Dès qu'elle a reçu le germe dans son sein (la cathode), elle place dans sa tête (l'anode) une lame d'or, c'est-à-dire l'idéal le plus sublime. La circulation s'établit et le sang qui parcourt le corps apporte au germe le métal supérieur. L'enfant grandit enveloppé de ces vêtements d'or et, quand il est robuste, capable de vaincre les difficultés, les maladies, les influences nocives." Tout est beaucoup plus clair…! La FBU compte aujourd'hui 2000 (!) adeptes en France, notamment à Sèvres et dans le sud de la France, mais est également présent dans plus de 30 pays, dont la Belgique, la Suisse, et le Canada…

 

Le domaine artistique

Exploitant le filon commercial que représentait potentiellement la fascination de l'homme pour l'inexpliqué et le mystère, nombre d'auteurs et de maisons de productions ont depuis longtemps investi dans ce domaine. Toutefois, les productions de ces vingt dernières années affichent de tels points communs, qu'il devient aisé de les rattacher au mouvement New-Age.

 

Dans le domaine de la littérature – et en dehors bien évidemment des ouvrages affichant ouvertement leur appartenance à ce mouvement – nous signalerons simplement quelques exemples significatifs. Le succès rencontré par "La prophétie des Andes", vendu à plusieurs millions d'exemplaires à travers le monde, est phénoménal. Ce livre propose rien de moins qu'une "révélation" nouvelle, qui aurait été tenue cachée jusqu'à nos jours…


Les ouvrages écrits par Stephen King, qui sont tous devenus des succès de librairie, tant aux États-Unis que dans notre pays, s'appuient tous sur le même schéma: pouvoirs surnaturels, phénomènes inexpliqués, etc.


Plus récemment, "L'Alchimiste" de Paolo Coelho, déjà cité, a fait un triomphe en librairie. Ressorti de cartons poussiéreux par la maison d'édition après plusieurs années de sommeil (les éditeurs savent sentir le sens du vent…), ce livre détaille par le menu la quête spirituelle d'un jeune berger. Soupe ésotérico-magique émaillée de citations des Évangiles, cette quête commence devant une église en ruine (le symbole est clair…) et aboutit à la découverte d'un trésor, véritable coffre rempli de pièces d'or, monnaie sonnante et trébuchante, qui fait la joie du héros… Pour le reste, les citations que nous avons proposées précédemment suffisent à en donner la couleur générale.

 

"Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur" (Mat 6, 21).

 

Concernant la production cinématographique et télévisuelle, les exemples abondent. Les exemples des séries télévisées comme "X-Files", "Charmed", "Buffy" ou "Dark Angel" sont assez significatifs. Venus des Etats-Unis – où est né le mouvement New-Age - ils ont tout comme lui rapidement atteint notre continent. Tous exploitent jusqu'à la corde le créneau de l'inexpliqué et des pouvoirs magiques: sorcellerie, magie, voyance… Au cinéma, le scénario du film "Le 5° élément" – film qui a connu un succès considérable - s'appuie sur un double argument, profondément simpliste: le Mal absolu, extérieur à la terre, est capable de la détruire, et le Bien absolu, tout aussi éloigné de la terre, est là pour la sauver. Je passerai sur l'image du "Mal", gigantesque boule de magma en fusion (les peurs ancestrales restent les mêmes !), pour préciser comment Luc Besson, réalisateur de ce film, voit le Bien absolu: il est "l'Être suprême, chargé de répandre la vie dans tous les univers", parle une langue parlée depuis la nuit des temps, et prend corps sur notre terre sous la forme… d'une jeune femme, qui traversera la totalité du film dans des tenues vestimentaires pour le moins suggestives, et… ne sait pas ce que c'est que l'amour ! C'est donc un terrien qui sera dans ce domaine son "initiateur"… Que dire d'une telle inversion de la Vérité révélée, que penser de l'identité du véritable inspirateur de ce film ? Le doute est-il possible ? Notons que c'est ce même réalisateur qui est l'auteur du "Grand Bleu", devenu un film culte pour tous les adeptes du Nouvel Age.

 

Mais pour être plus efficace, ces doctrines doivent toucher aussi les enfants. Comment s'étonner dès lors du succès remporté par des ouvrages tels qu'"Harry Potter", qui prônent l'initiation aux techniques de sorcellerie et de magie, pour obtenir des pouvoirs "surnaturels" ? Les éditions pour le monde entier des quatre volumes de cette série ont atteint les 175 millions d'exemplaires ! Nous sommes loin de la naïve fée Carabosse, et des combats à l'épée du bon chevalier contre le dragon… Il y a dans cette littérature destinée aux enfants un danger évident, qui ne semble pourtant pas inquiéter des parents mal informés, ou désintéressés de l'avenir spirituel de leur progéniture…

 

Le développement du formidable marché que représente la fête d'Halloween en est un autre exemple. Marché juteux pour les commerçants, cette fête célébrée la veille de la Toussaint, transforme les enfants en sorcières, monstres et squelettes. "Avec Halloween, on imite les défunts, et leurs fantômes reviennent chez nous pour nous faire peur et nous menacer de la mort; à la Toussaint, au contraire, nous attestons que nos défunts sont des vivants, et que nous sommes promis à les rejoindre dans la cité de Dieu" écrivait Mgr Hippolyte Simon, évêque de Clermont-Ferrand, dans son livre "Vers une France païenne ?" (Cana éditions, 1999). Nous retrouvons ici cette inversion des valeurs chrétiennes, déjà signalée à plusieurs reprises. Dans le même ordre d'idée, les cours de récréation de nos écoles ont été envahies par les "Pokemon", venus tout droit du Japon. Pokemon est l'abréviation de "Pocket monster", ce qui signifie "Monstre de poche". Tous ces animaux bizarres portent de manière déguisée des noms de démons… Comment un chrétien pourrait-il affirmer que tout cela est sans importance…? Qu'il faut bien que les enfants s'amusent…? Oublierons-nous que Satan est le singe de Dieu ? Que les âmes de nos enfants sont les plus fragiles, qu'elles sont celles que nous devons protéger et défendre en priorité? Et qu'elles sont des proies enviées par celui qui a juré leur perte ? N'avons-nous pas le devoir de protéger leur cœur, leurs yeux, leur âme et de les faire grandir en Dieu ?

 

"Si quelqu'un doit scandaliser l'un de ces petits qui croient en moi, il serait préférable pour lui de se voir suspendre autour du cou une de ces meules que tournent les ânes et d'être englouti en pleine mer." (Mat 18, 6)

"Jusqu'à quand clocherez-vous des deux jarrets ? Si YHWH est Dieu, suivez-le; si c'est Baal, suivez-le" (1 Roi 18, 21)

"Je te propose la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie, pour que toi et ta postérité vous viviez, aimant YHWH ton Dieu, écoutant sa voix, t'attachant à lui ; car là est ta vie…" (Dt 30, 19-20)

 

L'on peut aussi s'interroger sur la fonction sociale de telles fêtes organisées, et au-delà, sur leur conséquence directe sur notre vie intérieure, comme le fait Damien Le Guay dans son livre "La face cachée d'Halloween" (Le Cerf): "Le néo-paganisme, avec ses rites, ses sorcières et ses cultes, implique une certaine "métaphysique" de la fatalité. "Nous n'y pouvons rien. C'est ainsi." Le christianisme, lui, qui vient évangéliser le vieux fond de paganisme de tout un chacun, en appelle toujours à la liberté des individus. L'enjeu implicite est de taille: sommes-nous soumis à des forces anonymes ou libres d'aimer un Dieu personnel ?

 

Depuis une quinzaine d'années, beaucoup de fêtes artificielles se sont glissées dans notre calendrier. Philippe Murray attribue cette nouveauté au "partifestif" qui tendrait à imposer un certain amusement forcé. Déjà Bernanos, en son temps, s'insurgeait à l'idée de "gaver d'optimisme un monde désespéré". Toutes ces fêtes tendent à nous gaver d'un optimisme de convenance, vide de sens et plein de réjouissances creuses. Alors, quand la confiance diminue et le désarroi augmente, la fête, sorte de sédatif social, prend de plus en plus d'importance. Il faut combler le vide, le remplir ! Aujourd'hui, par une sorte de dérive, les fêtes se célèbrent elles-mêmes. Que fêtons-nous ? Rien. Tout est prétexte, tout est occasion pourvu que l'ennui disparaisse. Cette festivité tyrannique est, d'une certaine manière, une conspiration contre la vie intérieure. Faut-il avoir, ainsi, peur de se retrouver seul avec soi-même ou, au contraire, oser prendre le risque de la belle solitude ?"

 

Conclusion
Osons notre foi ! 

"L'Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, certains renieront leur foi pour s'attacher à des esprits trompeurs et à des doctrines diaboliques, séduits par des menteurs hypocrites marqués au fer rouge dans leur conscience." (1 Tim 4, 1-2)

 

"Voici que mon retour est proche, et j'apporte avec moi le salaire que je vais payer à chacun, en proportion de son travail. Je suis l'Alpha et l'Oméga, le Premier et le Dernier, le Principe et la Fin. Heureux ceux qui lavent leurs robes; ils pourront disposer de l'arbre de Vie, et pénétrer dans la Cité, par les portes. Dehors, les chiens, les sorciers, les impurs, les assassins, les idolâtres et tous ceux qui se plaisent à faire le mal !" (Ap. 22, 12-15)

 

Au-delà de l'aspect lucratif que représente pour tous les gourous de ce mouvement l'édition et l'organisation des stages et autres séminaires, on ne peut exclure l'origine démoniaque de nombre de phénomènes attachés au New-Age, comme à son origine même.

 

Alors osons dire les risques et les dangers des idées véhiculées par le Nouvel Age, aux antipodes de la loi d'Amour évangélique. Osons dénoncer la fausse tolérance de ce mouvement, qui n'aspire qu'à voir disparaître le christianisme et l'Eglise.

http://levigilant.com/documents/nouvel_age.html#bk12

 La ruse ne date pas d'hier reprenant la phrase de la genèse "Vous serez comme des dieux" sans cesse martelée par les gourous nuageux que la lumière de la vérité chassera comme le vent chasse le mauvais temps.  Rjames

une autre précision et non des moindres ce n'est pas le serpent qui trompa le premier homme mais l'esprit qu'il cacha a l'interieur de lui et il servit de véhicule pour le faire passer dans l'eden sans que le gardien du seuil ne le détecta  cet invisible qui se transforme en fumée était satan le génie ,une scène qui parle de ce gardien du seuil se trouve dans thor ou ils utilisent la même ruse pour envahir le royaume convoité ,ce film raconte la rébellion en fait de satan contre dieu ,le héros au marteau ne servant que de diversion ........en faisant porter le chapeau a un pauvre reptile sans libre arbitre et sans cervelle  çà évite de révéler la vraie nature des créatures qui peuplaient la terre avant les hommes ........

14 mai 2015

Mensonges & illusions sur l’ascension

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Plusieurs faux prophètes s’élèveront, et ils séduiront beaucoup de gens ».
(Matt 24/11)



L’Ascension représente l’évolution de la conscience sur Terre comme dans tout l’Univers et dans tous les plans de réalité. L‘évolution de conscience est une loi qui accompagne toutes les formes de vie et particulièrement la vie humaine. Dans l’Univers, tout est vibration et tout est évolution./>L’Ascension de l’humain est une évolution intérieure de l’être qui intègre son corps de Lumière et réalise son unification et son passage vers un état supra-conscient l’amenant à sa réalisation. C’est l’état que Jésus a atteint à la fin de sa vie et également un état qui a été manifesté par le Bouddha. C’est l’état à venir de tout ceux qui auront travaillé à résoudre leurs blessures et leur karma par un intense travail qui peut prendre un nombre incalculable de vies si l’on parle en nombre de vies incarnées ou alors de nombreux siècles successifs tant en incarnations que désincarnations.

L’Ascension est reprise dans les principales religions monothéistes dont l’Islam avec l’Ascension de Mahomet (voyage nocturne ou isrâ’ et échelle de l’Ascension avec l’ange Gabriel ou mi’râj) et le christianisme. La source historique de l’Ascension de Jésus est l’évangile de Saint Luc.

Mais plus récemment, l’Ascension a été abondamment reprise dans les thèses New Age, par le calendrier Maya qui annonce une fin de cycle sur 2012 c’est-à-dire le passage de l’ère du Poisson à l’ère du Verseau, et rien d’autre ; tout autre thèse serait fantasmagorique et par de nombreux spiritualistes dans le monde. Le thème « Ascension » représente seulement 64 millions d’occurrences sur google et reste très loin derrière « 2012 » avec 2,2 milliards d’occurrences ce qui signifie en terme analytique que le monde est en attente passive de miracle externe sans concours actif individuel. 2012 est associé à l’apocalypse : 93 millions de liens.Le développement des thèses New Age autour de 2012 a créé un véritable égrégore d’impostures produisant des effets contraires au but initial, par le biais de nouvelles superstitions basées sur des informations incorrectement interprétées des évangiles ou des canalisations erronées issues de l’astral.La multiplication des canalisations, des livres, des films et l’activisme de nombreux spiritualistes nourrit en permanence la confusion et l’égarement à des fins fourbes de profit personnel

2011 (et non 2012) est en réalité une année charnière marquée par l’établissement de la Terre dans la nouvelle ère du Verseau, borne temporelle décisive tant pour l’Ascension individuelle que collective.

La théorie du rêve

La théorie du rêve ou la croyance que la réalité vécue n’est qu’illusion ou rêve est très usitée chez certains chefs de file et, de façon irresponsable, tend à maintenir certains groupes dans une indolence ou une astralité de très basse fréquence.

La mécanique quantique et les théories New Age ont propagé l’idée que notre réalité n’était qu’une illusion ou un rêve. Partant de là, les théories véhiculées minimisent le travail réel à faire sur soi pour changer.

Nous vivons bien sur un plan de réalité et chaque plan de réalité est lié à un niveau de conscience avec les filtres ou opacités qui lui correspondent.

La confusion avec le rêve ou l’illusion revient à dénier ce qui est et comment prétendre à progresser au delà si la base n’est pas appréhendée. Ceci revient à sauter dans le vide.

Le risque est de fuir son propre plan de réalité et de ne pas aller à l’essentiel c’est à dire le travail à faire sur soi pour évoluer en conscience.

L’illusion est mal comprise. Chaque plan de conscience a un sens en soi. La réalité d’un plan de conscience correspond à une pyramide à degrés et on ne monte qu’une marche à la fois.

Evoluer en conscience implique une présence forte dans la réalité initiale et non une fuite, un transfert ou une projection dans un plan de réalité factice crée par l’imagination. Ainsi, comme dans le film « 
Inception », le spiritualiste se perd dans un univers imaginaire et choisit de fuir la réalité vraie.

Le mensonge majeur est de se croire arrivé en haut de l’affiche et de se livrer « en pâture » ainsi à son propre démon

Beaucoup de spiritualistes s’auto persuadent d’avoir franchi l’essentiel du chemin pour être, en se fiant à leur ressenti et au pouvoir qu’ils se confèrent. Or un ressenti est toujours relatif à la maturité de la conscience et en général surévalué selon leur orgueil.

Ce leurre est le plus grand piège de l’orgueil qui soit et il se manifeste à la mesure de l’orgueil non résolu donc aux blessures qui tendent à nourrir cet orgueil et à induire une confusion intérieure entre l’ego et l’âme.

C’est une superstition nourrie par l’orgueil et la torpeur qu’il crée en occultant toute vision de l’esprit. L’aveuglement est d’autant plus fort que l’orgueil s’appuie sur des ressentis factices qui endorment et laissent croire qu’il y a un miracle.

Le film « 
En toute bonne foi, êtes-vous prêt pour un miracle ?» démontre que le vrai miracle provient de l’authenticité et non des tours de passe-passe, pourtant spectaculaires, faits pour séduire un public déjà conquis à sa cause.

Beaucoup de spiritualistes, de médiums et de guérisseurs autovalident leurs prétendus pouvoirs et les justifient par leur supposée ancienneté (
« il étaient réalisés à leur naissance », « petits déjà ils avaient déjà des dons de clairvoyance… », « des guides très élevés, des archanges ou des anges leurs parlent depuis de nombreuses années ») à des fins cachées de profit financier.

Ce faisant, ils se montrent dans leurs faiblesses, leur orgueil et leur 
terrestritude (attachement au terrestre, vanité, fatuité…) car cet argument est typique d’une séduction qui plaît beaucoup à un auditoire qui se berce lui-même dans tous les affres de la trahison.

Le temps terrestre n’a aucune valeur pour le monde spirituel.

Pour le monde spirituel, la vraie valeur n’attend pas le nombre des années ni le nombre des productions matérielles ou d’ouvrages ni l’ancienneté du pignon sur rue, ni la richesse ostentatoire matérialiste.

Les véritables Maîtres sont les plus silencieux et les plus discrets et ne sont pas tapageurs, ils ne racolent pas les foules et évitent la propagande et le prosélytisme.

Méfions-nous de ceux qui usent d’arguments racoleurs et qui font beaucoup de bruit et jouent d’
arguments matières pour faire valoir leur niveau spirituel. C’est ainsi que de nombreux « faux-prophètes » seront dans les années à venir démasqués comme cela a été annoncé dans les évangiles & chuteront brutalement de leur branlant piédestal.

Il leur est d’ailleurs réservé à leur passage dans l’au delà un accueil à la mesure de leur trahison.

Ainsi l’ego arrive à se déguiser en l’âme et il manipule intérieurement ceux qui croient être guéris ou qui pensent avoir évolué et qui drainent dans leur sillage des âmes faibles, fragiles et en détresse.

Sans guidance, beaucoup tomberont en illustrant la célèbre citation « 
les premiers seront les derniers » car aujourd’hui, sur la planète seulement une vingtaine de personnes ont intégré leur JE SUIS et les autres en sont très loin, n’en déplaise aux diseurs de Bonaventure … !

A ce propos, imaginer que ces vingt là ne se trouvent qu’en France ou encore en Inde ou chez des 
célébrités du paysage spirituel est un leurre de plus.

Ainsi, se croire arrivé est une fiction qui conduira beaucoup de spiritualistes à stagner ou à chuter dans les pièges de leur propre ego.

Comme dans cette chanson : « 
je me voyais déjà en haut de l’affiche » Aznavourhttp://www.youtube.com/watch?v=MCDMCLwosIc&feature=related

Les 
auto-starisés du spirituel constituent les faux prophètes et par définition un faux prophète ne peut pas accepter ni comprendre qu’il est dans le mensonge puisqu’il se croit au dessus du lot, et ses principales problématiques sont le mensonge à lui-même, l’humiliation et la trahison. Beaucoup de ceux là ont saisi la spiritualité comme un tremplin pour prendre une revanche sur leur vie, qui, au départ, se présentait misérable.

La seule voie possible est celle de l’humilité et celle-ci ne peut se feindre aux yeux des guides & du monde spirituel.

L’humilité est la plus belle marque de la conscience supérieure sur terre or tous les signaux de notre société faussent sa reconnaissance car actuellement, dans ce monde, les constructions, représentations, communications et échanges sont encore basés sur l’orgueil, la vanité, la suffisance, déguisé sous une forme de fausse sagesse et zénitude & qui atteint son comble avec l’expression faussement angélique du New Age.

Cette fausse certitude d’être avancé et évolué est à la base de la gigantesque duperie sur l’Ascension car elle est très répandue voire très majoritaire.

Rares sont ceux aujourd’hui qui ont dépassé les pièges et atteint cette humilité que Jésus et ses apôtres ont incarné.

L’orgueil est partout sous une forme travestie, où beaucoup de gogos se font arnaquer comme des abeilles attirées par le miel, et transparaît dans les exemples fournis ici : marketing spirituel, éloge de l’apocalypse ou illusions 2012, sujétion psychologique, théorie du complot, décrets de pensées positive utilisés à tort et à travers en toute superficialité comme des recettes de pensée magique, apologie exclusive des Maîtres orientaux ou des 
mères orientales et débordements du channeling…

Les mensonges véhiculés sur l’Ascension

Alors que la loi de l’attraction fait les choux gras d’un marketing spirituel prêt à tous les stratagèmes pour séduire et se financer sur le dos des faibles en détresse sous couvert d’un idéal factice & fallacieux d’Ascension, il en résulte paradoxalement des effets contraires, véritables freins et poisons à la progression de l’évolution de conscience, et nouveaux attachements à la matière.

Comment s’explique ce paradoxe alors que beaucoup d’intentions émises sont louables au départ ?

Un premier point d’information, fourni par Arabelle, est important : la part de la population dotée d’un niveau d’ouverture de conscience sur terre représente approximativement 5 %.

Toutefois, la moitié de cette population crée, dans cette « pensée magique » faussement positive ou/et contestataire, des égrégores de négativité très importants qui retardent l’Ascension planétaire.

Parmi ces égrégores, l’on peut citer de nombreuses superstitions autour de l’apocalypse, de 2012 et de la fin du monde. Une grande partie des égrégores est alimenté par la jalousie, la séduction, la médisance, le mépris, la perfidie et le mensonge.

Quand l’on évoque le mensonge, il s’agit en premier lieu du mensonge à soi-même (Saint-Alexandre : 
http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/page-principale/2011/07/25/retour-de-la-meditation-du-17-juillet-2011/ ).
Une surestimation des facultés, un orgueil sans bornes, un sens grandiose de leur propre importance, et un fonctionnement manipulateur par « subjugation » sont au centre du fonctionnement de la plupart de ces spiritualistes par « défaut » & qui exploitent leur auditoire en s’imposant sur le devant la scène par des tours de passe-passe, jeux d’apparences, ou mielleux chants de sirènes où le monde qu’ils proposent devient idéal, angélique, parfait, lisse et miraculeux, à l’exemple de leur vie privée prétendent-ils, et dont ils se gargarisent pour s’enrichir davantage, tant matériellement que dans le lustre de leur reconnaissance personnelle & pour étoffer leur prestige personnel.

Ce qui est chose facile dans un monde où le marasme ambiant fait loi.

Souvent d’ailleurs, ces individus égocentrés drainent une fracture affective d’enfance très lourde, non résolue en profondeur mais grossièrement compensée par la fascination qu’ils exercent sur leur public (à identiques blessures…) ; fascination facilement mise en place par le biais des thèmes variés de leurs petites réussites personnelles dont ils sont friands, ou encore d’emprunts théoriques indûment tétés à d’autres, intellectuellement compris et remaniés pour la circonstance et leur but de profit personnel.

Grâce à leur talent de comédien(ne), ils savent, avec grand art, 
monter en épingle le moindre de leur succès aussi banal soit-il pour envoûter un auditoire charmé, et attirer le chaland, et le rallier à leur cause.

Chaland, lui-même, en totale résonance & transfert.

Cette orgueil masqué derrière des apparences 
peace and love voit le principal protagoniste piégé lui-même dans sa névrose, et emprisonne les candidats postulants à l’évolution dans une prison dorée où lui seul est le geôlier.

Dans la catégorie des balivernes vendues par ces marchands de rêves :

  • Le fauteuil de l’ascension

(http://www.fauteuildelumiereAscensionnelle.com/web_acappella1/index.html), commercialisé auprès de spiritualistes pour Ascensionner plus facilement sans aucun travail sur soi. Le fauteuil en question crée une sensation énergétique d’évolution y compris avec des ressentis forts amenant le client à se croire plus évolué avec des témoignages détaillés sur une impression de sensations réalistes. Il est l’exemple même de la pensée magique au même titre que de nombreux objets ou cristaux vendus à des prix prohibitifs.

En énergétique, ce phénomène peut être comparé à une overdose ou un shoot qui donne l’impression à celui qui la pratique d’évoluer et de changer alors qu’en réalité il est temporairement extrait de sa réalité 3D vers une fuite dans l’astral avec désancrage, décentrage et perte d’alignement allant même jusqu’à la possession par des entités négatives.

Ces shoots énergétiques, pris comme des doses de drogue et à des coûts comparables, sont bien connus que ce soit avec l’Ayahuasca, l’Iboga, l’activation de l’ADN, le fauteuil de l’Ascension y compris les formes de deeskhas, perçus comme des outils d’accélération vibratoire. Il s’agit de sensations transitoires qui traduisent un déséquilibre dont origine et cause sont des fuites en astral.

L’effet peut être exactement l’inverse de celui qui était visé au départ car toute faiblesse non réglée agit en élastique comme un choc de retour et le résultat peut être très désagréable à vivre et lourd de conséquences.

Loin d’élever les consciences, ces shoots énergétiques ont des effets négatifs en nourrissant l’orgueil par l’oubli temporaire des faiblesses non résolues plutôt que d’élever l’humilité.

Le point commun de ces outils est la croyance que seule l’énergie permet d’évoluer : l’Ascension est perçue comme vibratoire et physique et est interprétée par le mental suivant une évolution linéaire et accessible à ceux qui y mettent le prix (faire son marché pour l’Ascension coûterait ainsi suivant quelques sites internet connus de 75 € jusqu’à 3500 € avec voyages initiatiques vers d’autres continents).

En réalité, l’évolution de conscience est intérieure et elle dépend d’une triple action indissociable de la spiritualité, de la psychologie et de l’énergie. Cette action passe obligatoirement par une cohérence et une mise en pratique de la pensée, des paroles et des actes. Le triangle du chemin de l’éveil extrait du dossier d’Arabelle sur le Chemin de l’Eveil (
http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/dossiers/dossier-arabelle.html) est sacré (schéma ci-dessous).

Tirer l’évolution vers un ou même deux axes du triangle amène donc un déséquilibre qui ne fait que retarder l’épanouissement de chacun.



Il n’est donc pas envisageable « d’Ascensionner » si la base du travail n’a pas été effectuée dans d’autres vies incarnées et à fortiori dans cette dernière avec un véritable travail sur soi & non pas des « recettes de cuisine »

L’Ascension est le résultat d’un travail permanent sur soi dans l’harmonie corps, âme et esprit et non la conséquence d’une pensée magique.

L’attente de vaisseaux de sauvetage et les peurs de l’apocalypse

Le point commun d’une partie des concepts New Age se base sur une Ascension collective décisive sur l’Ascension individuelle. Cette thèse, reprise par beaucoup de spiritualistes, y compris ceux qui s’appuient sur 2012, apporte un soulagement à tous ceux qui s’évitent ou qui minimisent le travail sur soi.

Le thème des vaisseaux de l’Ascension est repris par la célèbre série « 
Stargate », par les vaisseaux extraterrestres, les vaisseaux de l’Ashtar command avec l’illusion que l’Ascension peut-être accompagnée par des vaisseaux extérieurs représentant une possibilité d’aide. Le thème constitue un égrégore d’illusion très important.



Les peurs de l’apocalypse forment des superstitions importantes qui agissent comme des justifications que le danger est extérieur et que l’on n’a pas le choix puisque les difficultés sont le résultat de l’action humaine. Ces peurs sont largement relayées par l’ensemble des médias, notamment par les films, les livres, la façon de traiter les informations dans les médias, les politiques, les religions et internet.



Cette fuite de responsabilité, nourrie par des croyances, crée un retard et nourrit une forme d’orgueil qui forme un piège difficile à éviter pour ceux qui baignent dans l’illusion. Les égrégores d’orgueil, liés à tous ceux qui sont en fuite face à eux-mêmes, sont des freins à l’Ascension collective.

« By using these marketing secrets you will make more money doing what you love without compromising your value» (ouvrage destiné à fournir des secrets pour gagner de l’argent en faisant ce que vous aimez sans trahir votre valeur)

Le marketing spirituel 

Face au mal-être général, s’est installé un marketing spirituel voire
management spirituel de grande envergure qu’une recherche sur Google permet facilement de découvrir.

Le terme 
merchandising spirituel est même repris par certains avec comme exemples des sites utilisant des techniques de communication très marketing et basé sur l’affect des jeunes et des produits dérivés autour d’une activité spirituelle portant sur des lois divines, sur l’Ascension et 2012. Le marketing spirituel concerne également le courant « peace and love » qui semble, à première vue, inoffensif.

Les thèmes de bien-être, relaxation, développement personnel, transformation intérieure ont fait des émules et ont créé un véritable marché concurrentiel (un comble… !) dans le monde.

En 2008, un site d’une spiritualiste est sorti avec une approche marketing et merchandising spirituel par la mise en avant de photos à caractère privé y compris en petite tenue. L’argument du site (dixit l’auteur contacté) était que le marketing spirituel était l’outil de cette époque et qu’il fallait toucher la jeunesse avec un style qui pourrait les attirer…. !

Basée principalement sur la séduction, l’ensorcellement & la fascination (blessure de trahison), le site et le merchandising spirituel ont eu un véritable succès commercial au point que l’égrégore créé par ce type de site agit à la façon d’un envoûtement sur les personnes faibles, captées par l’intimité offerte au public.

La cible type est une personne dépendante (blessure d’abandon), désabusée voire déprimée qui vient trouver des compensations que sa vie de souffrances ne lui offre pas.

L’autre facette de marketing est la recherche de crédibilité en citant quantité de diplômes terrestres et de titres, universitaires ou plus ou moins reconnus et liés aux médecines douces. Cette crédibilité, à l’instar du commerce, puise des arguments dans les sciences, les pseudo-sciences, la métaphysique ou des connaissances non vérifiables.

Les arguments, que l’on trouve également dans les bons ouvrages de marketing, y sont les mêmes :

  • choc de l’image (photos, présentation visuelle et charte graphique)
  • boutique de vente ou achats de livres et autres produits dérivés.
  • nouveauté sur des thèmes ou idées le plus possibles originales mais superficielles, à caractère de fond de pseudo « pensée positive »
  • informations à caractère crédible et séducteur (théorie, concepts)
  • style doux, accueillant, chaleureux attrayant et sécurisant (textes, poésies…)
  • produits ou services variés et adaptés à toutes les bourses comme au supermarché (produits d’appel, produits de prestige, vaches à lait, produits vedettes, produits tactiques et produits d’avenir pour garantir la pérennité de l’entreprise)
  • positionnement marketing comme Maître, Mère, expert, spécialiste, référence sur des thèmes novateurs.
  • spectacle public avec arguments de conviction, observation fine du public, contact physique créant des réactions d’extase, fascination et emprise psychologique.


On remarque ainsi que les Forces noires sont représentée ici par la séduction, l’avoir et l’orgueil.

C’est le démon qui se fait passer pour un ange ou le loup dans la bergerie. L’analyse des mots clés sur un simple site est toujours révélatrice de cette stratégie. L’ego et la manipulation s’appuient sur des égrégores noirs de l’astral qui s’accrochent aux failles des participants.

Exemples de mots clés lus sur les sites qui font plaisir à ceux qui les proposent tout en augmentant leurs bénéfices financiers : « 
les anges me parlent », «enseignée par les anges », « uni dans sa conscience» , « réalisé », de haute fréquence vibratoire »……et/ou liste de diplômes et de titres pompeux terrestres allant de certificats en médecine douce, pratiques des énergies et titres universitaires de doctorats, thèses d’état… cautions garantes de leur crédibilité.

Les défenseurs & abuseurs du marketing spirituel affirment s’appuyer sur des valeurs saines alors que leur objectif mesquin est d’accroître leurs avoirs par n’importe quel moyen. (y compris des dons ou souscriptions diverses pour faire fleurir leur « petite entreprise »)

Et leur assemblée est aveugle et se contente 
de se faire plumer en échange de quelques miettes de plaisir ponctuel, de discours infantilisants, de solutions de vie en kit, (retrouvons notre enfant intérieur !….), ou autres pseudo miracles dont ils s’enorgueillissent & qu’ils s’attribuent ! qui court-circuitent l’analyse rationnelle & le sens critique des individus en ayant largement recours à l’émotionnel & au sensitif, & maintenant son public dans l’ignorance et la bêtise ou simplement de le formater à sa superficielle & sirupeuse image car le spiritueux de cet acabit sait y faire pour vous donner l’impression du partage, et exercer sa sournoise influence.

Le partage, cependant, est très superficiel et de très courte durée & ne se base que sur l’image externe renvoyée par l’émetteur et enjolivée, selon les souffrances du récepteur et ses attentes non répondues, ses frustrations individuelles, donc sont des mirages.

L’image, dans tous les sens du terme, est d’ailleurs minutieusement 
travaillée pour coller aux codes oniriques du sujet en quête de spirituel.

Ce qui est sûr c’est que ces derniers(es) sont des hommes, des femmes d’affaires hors pair…! et dont le sujet “spiritualité” et toutes ses garnitures artificielles et captivantes pour les plus ignorants, les plus faibles et souffrants cautionne leurs malfaçons, contraires à l’éthique

N’y a t’il pas là une contradiction et un contrôle tout-puissant lié à la blessure de trahison ?

La manipulation mentale ou sujétion psychologique ou capture des âmes

La stratégie communément utilisée par les experts 
en illusion spirituelle est la capture des âmes par des individus aux intentions malveillantes en recherche de bénéfices de tout ordre : recherche de reconnaissance, fascination sur le nombre, voire suggestion de gourous, attirance du pouvoir et recherche de bénéfices matériels en utilisant des tarifs élevés.

La sujétion psychologique manipulatrice s’appuie sur le désir et le consentement de la victime (dépendante// abandon).

Il n’y a donc pas de pression psychique à proprement parler mais juste une stratégie égotique basée sur l’attraction d’ego à ego par effet miroir en lien avec un karma non résolu.

L’adepte se positionne dans un choix librement consenti mais se place malgré lui ou non dans une manipulation extrêmement perverse car difficile à percevoir car se nourrit de ses faiblesses.

La sujétion psychologique est courante pour les partisans des pratiques énergétiques (pour les enseignants n’ayant pas travaillé sur eux) et de nombreux spiritualistes.

On la retrouve dans toutes les sectes et dans les pratiques qui mettent l’accent sur 2012 et toutes ses fantaisies. Elle s’appuie dans tous les cas sur la fragilité psychologique des personnes y compris chez ceux qui ont une pratique énergétique et spirituelle.

Des psychologues reconnus 
ayant pignon sur rue ou autres thérapeutes issus des domaines qui se disent proches de la spiritualité et abusant de leur succès pratiquent eux aussi allègrement la séduction et la consommation sexuelle

La manipulation mentale est très fréquente chez les spiritualistes qui ne se sont pas donnés les moyens de travailler sur eux en profondeur, c’est à dire la très grande majorité malgré les affirmations contraires.

Il est toutefois très difficile pour un néophyte ou 
un initié entrant de discerner quel est le véritable niveau de conscience de l’enseignant. Il est notable de constater que les faux prophètessont très majoritaires dans tous les domaines.

La manipulation mentale désigne l’ensemble des tentatives obscures ou occultes de fausser ou orienter la perception de la réalité d’un interlocuteur en usant d’un rapport de pouvoir, de séduction, de suggestion, de persuasion de soumission non volontaire ou consentie.

En psychothérapie, la forme de manipulation la plus courante est : les faux souvenirs induits.

La manipulation s’appuie alors sur le manque d’estime de soi, la souffrance de l’abandon, la victimisation, la peur, la dévalorisation, le mal-être et en général toutes les émotions négatives et le karma non résolu.

Cette manipulation est d’autant plus facile qu’elle se fonde sur un mimétisme des nombreuses formes de manipulations sociales ce qui induit en erreur les adeptes (voir dossier spécial sur les peurs collectives : 
http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/dossier-special-le-chemin-de-la-peur-collective/ ). La compétitivité qui est au cœur des sociétés actuelles ne s‘acquiert qu’au prix de l’aliénation des individus.

Les outils de manipulation sont tellement nombreux qu’une liste complète serait exhaustive :

  • La flatterie pour séduire (utilisée à la fois par le spiritualiste mais aussi par le stagiaire qui cherche à progresser en estime de l’autre en flattant leur enseignant).
  • La séduction par les mots (approches peace and love avec des mots séducteurs répétitifs comme amour, ange, cœur, paix…), les compliments et une douceur d’apparence (le démon se cache sous la forme d’un ange).
  • La séduction par les gestes : multiplication du toucher, accolades, embrassades, gestes de fusion, bisous…
  • La séduction par les apparences : vêtements, décoration, multiplication des rituels, démonstration publiques…
  • L’utilisation d’un jargon réserver aux initiés pour séduire, créer volontairement un fossé avec l’auditoire afin de générer une confiance basée sur les croyances (ex : théories autour du calendrier Maya).
  • L’utilisation de termes pseudo-scientifiques pour rassurer et séduire un public naïf en pleine découverte (notamment autour de l’ADN, d’une pseudo connaissance de la sexualité sacrée, calendrier Maya, magnétisme, …).


La théorie du complot

Très en vogue dans le New Age et soutenue par Internet, le complot a été à la source de nombreux scandales liés en général au pouvoir (DSK, crises économiques, guerres, pollutions en tout genre, radioactivité, institutions financières ou organisation mondiale).

De nombreux mails circulent dans les milieux 
branchés en prétendant offrir une vérité en dénonçant des complots fomentés par des sources obscures.

Sur un plan ésotérique, le complot rejoint également les thèses apocalyptiques avec 
les invasions de gris, de reptiliensen allant jusqu’à des catastrophes (ex : Nibiru) où des méchants voudraient détruire la planète.

Le point commun de ces approches est de voir le mal à l’extérieur de soi et de communiquer sur des catastrophes imminentes pour asservir le public par la peur.

Les tenants de ces thèses sont à la fois emprunts de naïveté, de peurs et de colère non résolue. La théorie s’appuie donc 
sur les forces noires reliées. En se positionnant en victimes, elles laissent vacantes la place du bourreau pour poursuivre le jeu de dualité victime/bourreau avec parfois l’intervention de sauveurs (ex : Ashtar command).

Les sites ésoteriques rattachés à cette théorie sont nombreux et contribuent à freiner l’Ascension. L’ésotérisme s’est peu à peu corrompu et a beaucoup perdu de crédibilité au cours des dernières années, jusqu’à perdre totalement ses lettres de noblesse d’origine et devenir totalement impur & souillé.

La sagesse authentique, symbolisée par le Maître Omraam Mikhael Aïvanhov, en titre en Occident, reste heureusement très éloignée de toutes ces thèses fantaisistes fortement influencées par les forces noires de l’astral.

Beaucoup de spiritueux tentent maladroitement de s’en inspirer mais ne font pas le poids du fait d’un travail insuffisant sur leur nature inférieure.

La théorie du contre 

Proche de la théorie du complot ou associée à elle, 
la théorie du contre s’appuie sur le mode de réaction de l’enfant rebelle ou des colères non résolues en soi.

La théorie 
du contre s’arc-boute sur des blessures qui créent la révolte, provoquent la colère jusqu’à la haine. Comme les autres approches, ceux qui expriment cette attitude sont piégés dans l’illusion de leurs limitations non résolues.

Le contre est varié : contre la religion, contre la société, contre la politique, contre le capitalisme, contre le New Age, contre Dieu….

Le contre exprime la colère & conteste ; c’est l’enfant rebelle qui n’a pas lâché prise et qui se trouve des ennemis.

Le contre nourrit l’orgueil en se prévalant d’une supériorité sur l’autre qui est jugé décadent ou limité.

Cette tendance est à relier aux approches alter-mondialistes, anticapitalistes, antilibérales et anarchistes. Elle exprime une lutte interne chez ceux qui défendent les thèses 
du contre, en projetant à l’extérieur leur combat intérieur, ce qui leur semble plus confortable, mais évitant et refoulé certainement.

Elle participe au transfert du « contre soi « à celui de « contre l’autre » ou « contre le système ».

Cette tendance a marqué le mouvement spiritualiste en imputant aux conditionnements religieux
tout le mal et en déclarant une apostasie ouverte, la négation totalitaire des textes sacrés de la Bible, du Coran et de la Torah (thèse reprise par un spiritualiste connu).

La théorie
 du contre n’est donc que le reflet d’un conflit intérieur non résolu où la colère se dissimule en nourrissant un ego qui continue à garder le pouvoir loin du lâcher prise et du détachement. Elle déplace le problème plus que de le résoudre.



La théorie de l’Ascension sans avoir à travailler sur soi

Le comble de l’absurde est atteint avec ceux qui affirment que la préparation à l’Ascension est devenue inutile. Cette théorie s’appuie sur le fait que les énergies en présence sont sources de transformation et suffisent à évoluer en conscience.

Affirmant que l’Ascension est en cours et imminente, les adeptes de ces concepts offrent en parallèle des outils ou des formations rapides pour mieux s’épanouir en se basant sur les énergies et une approche pseudo-spirituelle. La psychologie est soigneusement écartée de ces approches car jugée inutile par ces pratiquants.

Cette théorie est reliée en psychologie à la blessure de rejet : fuite de soi, évitement en refusant le travail sur soi qui est perçu comme inutile et à éviter.

Proposée par certains spiritualistes connus, elle amène les personnes à stagner voire à régresser. Elle ouvre la voie 
aux forces noires en créant une faille illusoire majeure. Les conséquences sont voisines des approches précédentes.



Maîtres orientaux et mères orientales

Les emprunts aux traditions asiatiques constituent des stratégies courantes pour se crédibiliser en Occident en s’étayant sur des traditions que l’on cherche à transposer en France.

La notion de 
Maître est un sujet difficile en Occident car le terme est utilisé avec des connotations ambiguës et contradictoires. Il est fréquemment utilisé par des occidentaux, plus prompts à l’orgueil.

On retrouve également l’approche orientale transposée en occident (avec des termes comme 
amma, ma qui remplacent les termes de saintes en se rapprochant de la mère et de la mère divine). Ainsi certaines spiritualistes se décrètent mères occidentales en s’appuyant sur un orgueil féminin non travaillé tout comme Maître pour l’orgueil masculin.

Certains s’affirment 
Maîtres et le terme a été banalisé avec l’usage des pratiques énergétiques. Par exemple en Reiki dans une acceptation qui ne traduit pas le terme japonais correspondant « Sensei » plus proche d’enseignant mais avec une plus grande notion de respect. Même le terme anglais « master » n’a pas la même connotation qu’en français.

A l’opposé les véritables Maîtres sont ignorés ou contestés par l’opinion occidentale. L’exemple du Maître Omraam Mikhaël Aïvanhov qui a vécu en France au 20
ème siècle montre toute la difficulté d’un véritable Maître, digne de ce nom, dans sa vie entière, à s’imposer dans un environnement hostile à cette notion. L’œuvre de O.M.A indique sans aucun doute possible qu’il a été un Maître essentiel.

C’est au retour d’un voyage en Inde en 1960 qu’il a été enfin reconnu après être passé par de grandes épreuves (prison de 1948 à 1951 sur de fausses accusations).

Faute de reconnaissance des Maîtres en France, beaucoup de spiritualistes se sont tournés vers des Maîtres orientaux ou des 
mères. En Inde, la reconnaissance du Maître est culturelle et les Maîtres et mères spirituelles abondent. Mais là aussi, les abus liés à l’ego sont fréquents bien que de véritables Maîtres hommes ou femmes y soient incarnés.

Cette tendance est devenue un phénomène de mode lorsque des sages indiens se sont tournés vers l’occident. La notion de Maître a donc été assimilée à tort à des cultures extérieures et cet engouement a été également très fort dans le bouddhisme.

Il existe donc une forme de détournement des enseignements occidentaux au profit d’une spiritualité plus orientale, absolument peu transposable dans notre culture.

Les dérives par rapport à l’illusion de 2012 restent toutefois très inégales. La confusion instaurée
par les forces noires fait que les véritables Maîtres sont généralement ignorés. Ces exceptionnels Maîtres sont présents en Occident mais ils travaillent dans le silence et dans l’amour et leur force est la simplicité et l’humilité à l’image du Maître Aïvanhov.

Le Maître véritable n’est pas celui qui compte de nombreux disciples mais celui qui révèle le plus de Maîtres et cela se fait dans la plus grande discrétion.

Ce ne sont donc pas ceux qui font du bruit ou qui sont les plus connus dans les médias qui sont les véritables Maîtres. L’expérience amènera 
les faux prophètes à se démasquer et les Maîtres authentiques à œuvrer pour la foi et la paix dans la simplicité et l’humilité.

Les dérives des channels

Les nombreuses ouvertures de portails vibratoires depuis 1998 ont accru les facilités de canalisation laissant croire à beaucoup que ce qu’ils captaient étaient la vérité. Or, tant que l’ego n’est pas dissous, les canalisations s’accrochent sur les faiblesses des channels et déforment considérablement les réceptions de messages tout en favorisant l’influence du mental du récepteur dont l’interférence peut être majoritaire.

Dans sa lettre n°20, Arabelle nous indique que : « Et c’est ainsi que toutes les canalisations, en Vérité très polluées en négativités astrales 
(environ de 60 à 98% en général, et 80% en moyenne pour la majorité) par leurs émetteurs & les récepteurs, ont séduit …. Que dis je…ont ensorcelé …et envoûtent encore un abondant lectorat en carence de berceuses & le maintient ainsi dans une narcose certaine. »

Avec une forte médiatisation (notamment livres et conférences), les channels ont contribué à nourrir des égrégores d’illusion en alimentant des informations inexactes et factices et surtout en incitant les spiritualistes à s’éviter et à négliger le véritable travail en profondeur sur eux.

Les dégâts sont importants car l’ensemble des dérives décrites dans cet article ont été, peu ou prou, favorisées par l’influence des canalisations ou autres messages fantaisistes crus enseignants & issus pour l’essentiel de l’astral pollué et du mental de leur auteur.

Les paroles, les musiques planantes et l’encens voire les massages ou produits divers ne suffisent pas pour évoluer en conscience. Tout cela crée l’illusion que l’Ascension est facile et accessible par la pensée magique. La société de consommation a donné l’impression que l’on pouvait réaliser les changements avec facilité et avec peu d’efforts. Or le travail demandé à chacun est important et demande un engagement profond dans sa vie !

Rien ne peut changer tant que l’on n’a pas changé dans la vie de chaque jour dans ses pensées, ses paroles et ses actes. Cela ne se décrète pas mais se met en mouvement par l’action responsable et demande de grands changements dans sa vie.

Le refus du principe d’éveil et d’Ascension

Les multiples pièges dans lesquels sont tombés de nombreux spiritualistes et candidats à l’Ascension en croyant atteindre l’éveil ont eu tendance à discréditer le véritable travail sur soi et les authentiques approches sur l’Eveil en général.

Les dégâts liés 
aux shoots énergétiques et aux délires & dérives ésotériques de tout bord ont fourni des arguments de poids à ceux qui s’opposent au principe même d’Eveil et qui remettent en cause l’ouverture de conscience du monde.

Ainsi une revue s’est construite sur « la destruction des mythes de l’éveil et du supramental » :
www.inconnaissance.com en niant les travaux en psychologie, psychiatrie et métaphysique liés à l’éveil. On retrouve encore dans cette approche le déni du travail sur soi (blessure de rejet, refoulement et recherche de reconnaissance par tous les moyens).

D’un point de vue psychologique, la posture d’opposition « contestataire » et « destructrice » nourrit l’orgueil en s’appuyant sur des émotions non résolues de colères et de rages. Les arguments intellectuels y abondent & servent à verrouiller un ego, et accentuer les fragilités psychiques, dans des justifications fleurie d’alibis qui ne font que servir le second maître.

Ainsi, le processus d’autoverrouillage de l’ego crée une nouvelle réalité pour l’individu qui s’enferme dans ses convictions contre le principe même d’éveil qui devient l’ennemi à abattre.

Cette confusion obéit à un ego soumis à des troubles psychopathologiques qui peuvent aller de la perversité narcissique à des symptômes schizophréniques qui conduisent certains individus à créer une emprise sur les autres en affirmant leur négation, leur refus et leur colère & leur toute puissance.

Cette emprise est finalement à rapprocher de celles des gourous et des spiritualistes en recherche de reconnaissance. Son dénominateur commun est toujours l’orgueil accompagné de ses peurs et d’une fragilité aux forces noires de l’astral.

La psyché est sous influence de l’astral de transition et donc d’entités négatives et d’égrégores qui s’accrochent à toutes les faiblesses des humains. La période actuelle et les prochaines années verront de plus en plus d’influences des forces ténébreuses sur les hommes du fait des frictions vibratoires et d’un ego mis à l’épreuve sous la pression de la Lumière.

A défaut de faire le choix du changement, d’aucuns stagneront ou régresseront par autoverrouillage de l’ego (lire le dossier d’Arabelle sur l’éveil : 
http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/dossiers/dossier-arabelle.html , pages 21 et 22, 30 à 32, 35 et 36).

On peut donc s’interroger sur les peurs profondes et inconscientes qui alimentent le refus de l’éveil. La peur de la Lumière reste fondamentalement au centre de ces blocages.

Les difficultés entre 2011 et 2018

La période vibratoire actuelle s’étend de 2008 à 2020 et au delà avec une instabilité maximale de 2011 à 2018, période au cours de laquelle des instabilités vibratoires sont prévisibles à tous les niveaux.

En effet, nous allons connaître de nombreuses ouvertures de portails vibratoires avec leurs conséquences prévisibles (explications dans la conférence d’Arabelle : 
http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/acces-a-la-conference/ ) avec des résistances de l’ego.

L’instabilité de l’ego, la peur de la folie et l’enfermement dans ses illusions de souffrances sont illustrés par cette musique où le second maître, petit moi, prend le pouvoir en soi :

http://www.youtube.com/watch?v=ncE2_2HkaxI

Les sept années qui viennent vont amener des instabilités liées aux dérèglements créés par l’homme. En 2011, nous rentrons dans un véritable compte à rebours qui correspond à une période de sept années difficiles sur le plan vibratoire.

Cette difficulté sera exacerbée par les frictions des énergies célestes et terrestres pour atteindre en 2018 
un point de rupture symbolisé vraisemblablement par les trois jours d’obscuritéannoncés par les prophéties depuis 2000 ans.

Les instabilités vibratoires vont s’appuyer sur les fragilités de l’ego avec un sentiment de mal être pour tous ceux qui restent accrochés à la matière.

Les difficultés avec l’astral de transition où l’on rencontre les entités (âmes errantes), les égrégores et forme pensées seront d’autant plus marquées que l’ego sera en résistance. Il faut donc s’attendre à une augmentation des déséquilibres sur le plan psychique et mental qui culmineront lors 
des trois jours d’obscurité.



La borne du 21 décembre 2011 (et non 2012) correspond au passage dans l’ère du Verseau, passage précédé et suivi d’instabilités, notamment jusqu’en 2018, date probable 
pour les trois jours d’obscurité.

Les faux prophètes seront confrontés à la réalité des évènements planétaires et les hommes seront amenés à faire des choix de plus en plus décisifs pour leur évolution de conscience.

Les sources de vérité

L’Ascension est une évolution individuelle et collective faisant partie des lois de l’évolution universelle. Elle fait partie du travail que chacun fait pour évoluer dans sa vie mais une vie ne suffit pas pour réaliser l’éveil. Il est donc essentiel d’apprendre l’humilité pour évoluer et d’accepter son ignorance. Comme le dit cette chanson, que votre soleil éclaircisse l’ombre !

http://www.dailymotion.com/video/x1459_sinsemilia-tout-le-bonheur-du-monde_news

La période actuelle marque un changement mais elle n’est qu’un passage préparatoire pour une ère qui va demander de 2 à 3 siècles pour s’installer avec autant d’incarnations nécessaires pour ceux qui ne sont pas encore prêts à changer.

Beaucoup ont voulu s’éviter des efforts et du travail en pensant que l’Ascension était à leur portée immédiate ou qu’elle serait provoquée par l’extérieur. 2012 a été pour certains l’occasion de croire que l’extérieur allait leur fournir une transformation spontanée.

Une aparté à propos d’Arabelle…Par son travail dans la vie au quotidien, elle nous montre un exemple de chemin spirituel totalement exemplaire & je lui porte 
un coup de chapeau. Chacune de ses lettres est écrite d’une façon illustrée et pratique car elle a intégré tout ce qu’elle écrit et rien n’est théorique dans ses écrits (http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/les-lettres-darabelle/), j’en témoigne.

Lettres par ailleurs copiées par des spiritueux peu scrupuleux.

La Vérité fait peur car elle amène à devoir regarder en face toutes nos faiblesses et nos insuffisances et cela n’est pas facile à vivre.

La société d’aujourd’hui ne nous a pas préparé à travailler sur nous. Bien au contraire, elle entretient de nombreuses croyances qui s’opposent à la sagesse et à la foi et induisent la paresse et la facilité.

Il est donc essentiel 
de remettre les pendules à l’heure et d’aller à l’intérieur de soi pour recherche la vérité essentielle à l’être et à l’évolution de conscience.

C’est un engagement, une responsabilité et une volonté forte qui sont primordiales pour avancer et non des bêtises ineptes qui tendent à nous faire croire que le chemin est facile et accessible en faisant un minimum d’efforts.

L’Ascension est le résultat d’un travail constant sans complaisance avec soi. Elle se vit au quotidien dans l’autonomie de l’être.


Au service de la Lumière
Philippe

http://www.en-esprit-et-en-verite.fr/

8 mai 2015

ENIGMES DU GRAND PORTAIL DE ND DE PARIS

 

 

canalblog7

 

portail central de Notre-Dame de Paris, Jugement dernier, façade occidentale [Eugène Atget, 1905, Gallica]


 


 

Introduction

 

Il ne fait aucun doute que ce texte soit, en partie, à la base du Mystère des Cathédrales, que Fulcanelli nous a laissé, avec les deux tomes des Demeures philosophales. Au Moyen Âge, il était naturel d'utiliser l'image pour enseigner la foule : actes de foi, les cathédrales gothiques furent aussi des livres de pierre. On lira avec profit sur ce sujet : Le Croire et le Voir ; l'art des cathédrales (XIIe-XVe siècle) de Roland Recht [Gallimard, 1999]. L'idée qu'un symbolisme s'y cache est ancienne. En 1640, un gentilhomme de Chartres, Esprit Gobineau de Montluisant, fit imprimer le texte que nous présentons [réédité par Cl. d'Ygé in Nouvelle Assemblée des Philosophes, Paris, 1954]. Ses thèmes semblent avoir été repris par Fulcanelli et E. Canseliet. Citons à ce sujet L. Girardin [l'Alchimie, Culture, Art, Loisir, Paris, 1972] :

 


FIGURE I
(façade)

 

Le soubassement du pilier central du portail principal de Notre-Dame de Paris offre une série de médaillons où l'on reconnaît les sciences médiévales qui composaient le Trivium et le Quadrivium (les deux cycles des études de l'époque). A la place d'honneur, une femme, la tête couronnée de nuées, présente un livre ouvert qui masque en partie un livre fermé. Devant elle, une échelle à neuf barreaux. Fulcanelli précise que cette curieuse figure représente l'Alchimie. Voire ! L'image correspond trait pour trait à la description symbolique de la philosophie donnée par le patrice romain Boèce au VIe siècle de notre ère. Les neuf barreaux de cette échelle des Sages sont les neuf degrés qu'il faut gravir dans d'étude pour arriver à la connaissance totale. On peut tout concilier en remarquant que l'alchimie est une philosophie générale de la nature, mais, prenons garde, ne laissons pas l'imagination trop galoper...

 

On réussit pourtant à intégrer ce symbolisme général à l'alchimie à partir du moment où l'on a compris que ces tableaux de pierre ne constituent que des prétextes ; nous ne faisons pas autrement dans la section des blasons alchimiques : il est évident que les blasons que nous présentons n'ont -au sens propre du terme- rien à voir avec l'alchimie ; au sens figuré et donc hermétique, il en va autrement et c'est à l'artiste qu'il convient d'orienter le sens général à donner à ces hiéroglyphes spirituels. Girardin écrit encore :

 

Le Mystère des Cathédrales commente savamment la série de vingt quatre médaillons situés sur les soubassements du même portail central, à droite et à gauche de l'entrée monumentale. On se doit d'admirer ces considérations érudites tout en remarqant que ces médaillons représentent les Vertus à la rangée supérieure et les Vices à la rangée inférieure. On reconnaît entre autres, la Force : un chevalier armé de pied en cap présentant un lion sur son écu, et la Lâcheté : un homme d'arme jetant son épée et fuyant devant un lièvre. L'Humilité est une femme dont l'écu est timbré d'une colombe [Fulcanelli y voit un corbeau] et l'Orgueil, un homme qui tombe de cheval. Ces dernières interprétations se justifient en feuilletant le carnet de notes d'un maître d'oeuvre du XIIIe siècle, Villard de Honnecourt [ici, Girardin se réfère à une note qui n'apparaît pas sur la page ; aussi allons-nous donner quelques renseignements sur ce maître-imagier]. Parmi les nombreux croquis jetés pêle-mêle, on retrouve le cavalier mis à bas de sa monture avec la légende : Orgueil, cy comme im trébuche, et la femme à la colombe désignée par le mot : Humilité [...] [op. cit.]

 

Sur Villard de Honnecourt, nous ne saurions mieux conseiller au lecteur qu'un lien vers la bnf qui consacre à l'imagier un dossier complète à l'adresse suivante :
http://classes.bnf.fr/villard/pres/index.htm

 

 

Pour en revenit au texte d'Esprit Gobineau de Montluisant - qui va nous servir de « pré texte pour évoquer les médaillons du Mystère de Cathédrales - il parle d'alchimie spéculative et l'étudiant doit déjà avoir étudié les textes avant de pouvoir s'orienter dans ce dédale. Signalons-lui l'importance que revêtent les signes du zodiaque, tout particulièrement ceux du Bélier où se manifeste le bourgeonnement, du Taureau où les plantes fleurissent et où la vie prend possession de la matière et des Gémeaux où la fécondation est la manifestation de la tendance à l'expansion de la matière. C'est ensuite le calice ou coupe qui doit retenir l'attention de l'étudiant. Pour détourner la difficulté, nous donnons cette image qui permettra de mieux saisir l'importance du symbole et le texte qui suit, tiré de notre section sur les blasons alchimiques.

 

Ainsi, nous comprenons peu à peu que le sujet des Sages, qui n'est autre que de la Terre, fait l'objet de multiples allégories ; certaines sont voulues et ont une fonction hermétique qui les démarquent nettement des mythes et des légendes ; d'autres ne sont manifestement pas désignées en clair comme relevant d'une signifiance hermétique ou alchimique mais peuvent renvoyer à des archétypes. Ces archétypes peuvent faire l'objet d'une interprétation ; c'est à l'artiste de décider que tel ou tel sujet revêt des « couleurs» hermétiques. Il ne faut donc pas s'étonner des jugements hâtifs émis par ceux qui n'ont pas su lire les ouvrages de Fulcanelli ou d'E. Canseliet. Nos auteurs n'ont pris les livres ou les tableaux de pierre ou de bois sculpté que comme prétextes à leur propos ; l'imagination, une volonté de partage de la connaissance, un désir de rigueur esthétique et scientifique, le respect dû au silence imposé, voila les qualités qu'entre toutes, ils manifestèrent à la perfection. Ils surent, en un mot, faire l'oeuvre par le seul Mercure.
C'est l'Annonciation qui constitue l'allégorie classique de l'attaque de la prima materia par le 1er agent. Nous trouvons néanmoins un vitrail de Saint-Ouen de Rouen qui déroge à la règle traditionnelle et qui va nous permettre de poursuivre [...] notre étude. Les quatre-feuilles sont très répandus dans les cathédrales gothiques et romanes et selon Fulcanelli, l'hiéroglyphe de la première matière est circonscrit par l'un d'entre eux. Voici ce qu'en dit E. Canseliet :
 

 

"Ce diable jaune qu'un chevalier semble prier, est de portée plus étendue, grâce aux vives couleurs du verre qui est dû à la prudence de Guillaume de Paris. Au demeurant, plutôt que Baphomet, c'est maître Pierre du Coignet qui est représenté et de qui il est parlé dans Le Mystère des Cathédrales, en relation avec le vaisseau argotique et somptueux."


FIGURE II
(détail des vitraux que sertissent, à l'ouest, les nervures de la rosace de Notre-Dame de Paris : le premier sujet)

Nous trouvons dans le quatre-feuille un cercle contenant une coupe que surmonte une croix : c'est une variation sur le thème du cercle crucifère. Le résultat de la séparation initiale est représenté par ce diable jaune et la prière du chevalier évoque quelque filtration ou tamisage nécessaire pour séparer radicalement la Terre de l'eau, ce que nous avons détaillé plus haut en abordant les mystères de l'agriculture céleste. Quant au quatre-feuille, la couleur verte atteste de sa parenté mercurielle et la coupe crucifère symbolise les travaux du 2ème oeuvre, par lesquels on prépare le Mercure. La coupe est  décrite par Fulcanelli, aux DM, I, p.381 quand il parle des :
 

"...chercheurs qui ont, avec succès, surmonté les premiers obstacles et puisé l'eau vive de l'antique Fontaine, [et qui] possèdent une clef capable d'ouvrir les portes du laboratoire hermétique."

avec en annexe, la note 1 :
 

"Cette clef était donnée aux néophytes par la cérémonie du Cratère qui consacrait la première initiation dans les mystères du culte dionysiaque."
 

 

Esprit Gobineau de Montluisant décrit l'un des trois portails de la façade principale Ouest, qui offre au regard :  le portail central encore appelé portail des Jugements.

 


FIGURE III
(portail central)

 

Le portail central est relatif au Jugement dernier. Au linteau, on assiste à la résurrection des morts, au son de l'olifant. Ceux-ci, rois, soldats ou autres, sortent vêtus de leur tombeau et restent vêtus même lorsqu'ils se dirigent vers l'enfer (alors que les damnés sont très souvent nus, comme à Autun, Bourges...). Au registre inférieur, l'archange St Michel pèse les âmes, au centre, tandis que le diable triche de façon éhontée. A gauche, les élus lèvent le visage vers le Christ qui trône au-dessus d'eux. A droite, un diable pousse les damnés, enserrés dans une corde, vers une gueule d'enfer. Au registre supérieur, un Christ en majesté est entouré d'anges portant les instruments de la Passion et des intercesseurs habituels, la Vierge et Saint Jean. Au trumeau, on trouve un Beau Dieu. Sur les socles, on peut voir 6 des sept arts et la philosophie (cf. L'art religieux du XIIIe siècle selon Emile Mâle). Ci-dessous, la philosophie.

 


FIGURE IV
(la Philosophie, détail)

 

Il saute aux yeux de l'étudiant, même peu averti de l'alchimie, qu'il s'agit là d'un des emblèmes majeurs de l'Art sacré, sur lequel se sont longuement appesantis Fulcanelli et son disciple, E. Canseliet. L'apparition donne à voir les deux côtés de la science d'Hermès : le côté exotérique : c'est le livre ouvert ; le côté ésotérique : c'est le livre fermé. Ou si l'on préfère, pour employer un langage qui ressortit plus directement à la cabale hermétique : respectivement, le laboratoire et l'oratoire. Nous avons eu l'occasion d'écrire ailleurs qu'une gravure reprenait, à très peu près, le symbolisme de cette allégorie majeure [De Hans Vredemann de Vries, in Amphitheatrum sapientiae aeternae, Henri Kunrath, 1609]. Nous n'avons rien à ajouter aux commentaires lumineux des deux alchimistes du XXe siècle. Nous signalerons néanmoins au lecteur l'intérêt que présentent : les nuées, au-dessus de la tête de la déesse, qui voilent la rosée de mai, chère à Altus, auteur présumé du Mutus Liber. L'échelle de sapience, dont le symbolisme se trouve détaillé dans les fragments commentés des Douze Clefs de Philoosphie, attribuées à Basile Valentin. Le sceptre ou bourdon du pèlerin, jamais éloigné de la mérelle de Compostelle [sur l'explication générale de son symbolisme, cf. Mémoire sur le Métamorphisme des roches d'Achille Delesse]. Des bas-reliefs de ce fameux portail central avaient fait l'objet d'un commentaire, dû à Marcel Aubert [Bulletin monumental / publ. par la Société française d'archéologie pour la conservation et la description des monuments historiques 1913. 1. Vol. 77 - T. 77 ]. Les voici.
 
 

 

QUATRE BAS-RELIEFS DU GRAND PORTAIL DE NOTRE-DAME DE PARIS

 

Les contreforts de Ia porte du Jugement dernier à Notre-Dame de Paris sont ornés de quatre bas-reliefs incrustés dans la pierre à la suite des médaillons des Vertus et des
Vices, auxquels ils ne se rattachent ni par leur composition ni par leur facture

 

[Ces quatre bas-reliefs ont la même hauteur qur ceux de la série des Vertus et des Vices, mais ils sont plus étroits. Peut-être avaient-ils été destinés primitivement à orner les piédroits de la porte, ou même les faces des contreforts, suivant un système qui deviendra fréquent dans la seconde moitié du XIIIe siècle et au XIVe siècle.] :

 

ils paraissent antérieurs de quelques années et ont du être exécutés au début du XIIIe
siècle. Ils sont d'un très beau style et rappellent, par la noblesse des attitudes, la grandeur des traits, malheureusement sauvagement bûchés, l'harmonie du costume, les plus beaux bas-reliefs antiques. Ces quatre bas-reliefs ont depuis longtemps excité la sagacité des iconographes, et le sens de l'un d'entre eux ne nous apparaît pas encore très nettement. Au XVIe siècle, les hermétistes les interprétaient à leur façon : Job, que
l'on voit sur l'un d'eux, serait la pierre philosophale qui passe par les épreuves les plus diverses avant d'acquérir les vertus finales. Abraham, figuré sur un autre, serait l'artisan. Isaac la matière dans le creuset, et l'ange l'instrument de la transformation. Un corbeau de pierre aurait t-il fixé sur le lieu où sont enterrés trois rayons de soleil qui deviendront or au bout de mille ans et diamant au bout de trois mille ans. Pendant la Révolution, l'astronome Dupuis défendit et sauva ces bas-reliefs en expliquant qu'ils faisaient partie de tout un système astronomique qu'il déchiffrait sur les sculptures du grand portail. La scène que représente le bas-relief supérieur de droite est facile à expliquer : c'est l'épisode du Sacrifice d'Abraham. Abraham, debout devant l'autel, lève

 

 

 


Job

Abraham

Cadmus

Nemrod

 

 

 

FIGURE V
(quatre bas-reliefs du grand portail de Notre-Dame de Paris  - clichés Alain Mauranne)

 

 

 

le bras pour sacrifier son fils. Le petit Isaac, qui était agenouillé sur l'autel, n'est plus visible aujourdhui. Un ange, descendant du ciel, arrête le bras du patriarche. En bas, à gauche, apparaît, entre un arbuste et les fagots destinés au sacrifice, le bélier qui servira d'holocauste. Sur le bas-relief situé au-dessous figure un guerrier armé de pied en cap, couvert d'une longue cotte, éperonné, casqué d'un heaume conique, et portant l'écu triangulaire du début du XIIIe siècle. Il se dresse au sommet d'une tour crénelée
et lance contre le soleil, dont on voit les rayons en haut à gauche, un javelot : derrière lui est une petite tourelle surmontée d'un dôme, sans doute, couronnement de l'escalier
de la tour. Ce personnage est Nemrod; son nom même signifie « révolte ». et la Bible (Gen., X. 9) dit de lui :

 

« Il fut un violent chasseur contre le Seigneur

 

[L'abbé Fillion, dans son commentaire de la Sainte Bible, t. I, p.52, montre qu'il faut traduire « lifne Elohim » par « contre le Seigneur » et non « devant le Seigneur »] :

 

Strabon, dans sa Glose ordinaire, est encore plus explicite [« Nemrod, qui ultra naturam cœlum penetrare voluit. Significat diabolum qui ait :  Ascundam super astra cœli ». Nemrod, secundum josephum... fuit auctor aedificandae turris quae taugeret cœlum ». Saint Isidore de Séville (Sancti Isidori allegoriae quaedam sacrae scripturae, dans Migne, t. 83, col. 103), dit aussi : « Nemrod gigas diaboli typum expressit qui superbo appetitu culmen divinae celsitudinis appetivit, diceus : ascendam super altitudinem nubium et ero similis altissimo ». V. de Guilhermy, qui a montré le premier, dans son Itinéraire archéologique de Paris (1855, p. 46-48), qu'il fallait voir dans le guerrier ici représente Nemrod, attribuait, d'accord avec Didron, à l'influence du Coran, le choix fait par l'artiste de Nemrod, comme symbole de l'orgueil et de l'impiété. Le Coran n'insiste pas particulièrement sur le caractère de Nemrod, et nous pensons que les commentateurs de la Bible font assez ressortir son type d'impie et d'athée.].

 

Nemrod, dans un accès d'orgueil et d'impiété, lance, du haut de la tour qu'il avait voulu faire élever jusqu'au ciel, un javelot contre l'astre de Dieu. En pendant, de l'autre côté de la porte, sont deux autres bas-reliefs disposés comme les premiers, celui du haut, dans un cadre rectangulaire, celui du bas sous une arcade à plein cintre. La scène du haut, d'un très beau style, représente la Dérision de Job. Suivant le récit de la Bible, Job est assis sur un fumier: il est presque nu, un lambeau d'étoffe tombe de ses épaules et ceint ses reins : il lève les yeux vers le ciel et croise les bras sur la poitrine en signe de soumission ; des vers, représentés avec un réalisme qui étonne presque à l'époque, où a été sculpté ce bas-relief, rongent son corps (Job, II, 7-8). Devant lui, sa femme, conseillère de révolte:

 

« Vous demeurez dans votre simplicité ! lui crie-t-elle. Maudissez Dieu et mourez.» (Job, II. 9)

 

Le saint homme Job répond par un acte de soumission à la volonté du Seigneur :

 

« Ses trois amis qui avaient appris les maux qui lui étaient arrivés étaient venus chacun de leur pays. Eliphaz de Théman, Baldad de Suba et Sophar de Naamath. Car ils s'étaient concertés pour venir le voir ensemble et le consoler. Et ayant levé les yeux. ils ne le reconnurent pas. et ils pleurèrent a haute voix, déchirèrent leurs vêtements et jetèrent de la poussière en l'air au-dessus de leur tête. » (Job, II.11-12).

 

Le bas-relief de Notre-Dame est l'illustration littérale du texte de la Bible. Cette scène a d'ailleurs été très souvent représentée au moyen âge, aussi bien au portail des
cathédrales que dans les vitraux et les miniatures des manuscrits. Parfois même, comme au portail de la Calende, à Rouen, l'histoire de la Dérision de Job occupe plusieurs bas-reliefs: on le voit un sur un tas de fumier, puis vêtu, injurié par sa femme, et, dans un troisième bas-relief, visité par ses amis. La scène sculptée sous le bas-relief de Job est beaucoup plus difficile à identifier. C'est un homme debout, les jambes nues. — elles sont très détériorées, mais il semble qu'elles étaient croisées. — vêtu d'une tunique largement fendue et d'un manteau drapé sur l'épaule gauche. Il incline la tête en avant et lève le bras droit: la main droite, brisée, était sans doute ouverte: de la gauche, il s'appuie sur un grand bâton, qui est peut-être une lance. A terre, près de lui, sont un arc et deux flèches: devant lui coule un ruisseau qui descend d'un petit monticule couronné par deux arbres; sur les branches du plus haut est un oiseau. Telle est, aussi précise que le permet le mauvais état de conservation, la description de cette scène, encore très énigmatique. Les auteurs anciens, comme Gueffier dans sa Description historique des curiosités de l'église de Paris (Paris, 1763, p. 211), ne mentionnent pas ce bas-relief. Didron, le premier, a cherché a l'identifier, ou du moins à en donner le sens [Histoire de l'art en France par les monuments. La statuaire au XIIIe siècle, dans la Revue de Paris, 1836, t. XXXI, p. 339]. Il voit dans nos quatre bas-reliefs des représentations historiques des Vices et des Vertus, à côté des représentations allégoriques : sous Abraham, symbolisant l'obéissance, est un révolté qui lance un javelot contre Dieu : sous Job, symbole de la patience et de la confiance en Dieu, est la représentation de la défiance : un homme fort et armé tremble au bruit d'un ruisseau et au croassement d'un corbeau. De Guilhermy [op. cité, p. 46-48] décrit le bas-relief et avoue que toute explication lui échappe ; il se fait l'écho d'une hypothèse qui a été souvent répétée depuis mais qui est inacceptable : il faudrait voir ici Job contemplant les ravages des torrents débordés sur ses terres. Plus récemment, M. Enlart a donné de cette scène une explication très intéressante mais qui ne ma paraît pas pouvoir être acceptée. Décrivant les bas-reliefs des portails de la cathédrale d'Auxerre du début du XIVe siècle

 

[congrès d'Avallon 1907, p. 614-616 - le bas-relief d'Auxerre est plus endommagé peut-être que celui de Paris, il nous montre le même personnage, tourné en sens inverse, s'appuyant, dans une pose pleine de noblesse, sur une lance dont on distingue très nettement le fer. Son long manteau vole au vent, ses jambes sont croisées, il paraît considérer vers la gauche un monticule couronné d'un arbuste. Nous avons cherché mais en vain, dans d'autres ensembles relatifs à l'Histoire de l'Enfant prodigue, la figuration du même personnage ].

 

M. Enlart trouve au milieu des scènes de l'Histoire de l'Enfant prodigue trois médaillons où sont figurés la femme aux serpents qui est la concupiscence. Job qui, comme l'Enfant prodigue, a recouvré sa condition première après de grandes tribulations, enfin un personnage présentant avec celui qui nous occupe ici les plus grandes ressemblances et que M. Enlart identifie avec David. David, s'appuyant sur sa houlette et vêtu du costume de berger dans lequel il était arrivé au camp de Saül, choisit cinq pierres polies dans le torrent et s'avance vers Goliath. La Bible décrit en effet ainsi la scène (Reg., XVII, 30-40) : David vient de refuser l'épée que Saül lui avait donnée :

 

« il prend le bâton qu'il avait toujours à la main, choisit dans le torrent cinq pierres très polies et les met dans sa pannetière de berger et tenant à la main sa fronde, il marche contre le Philistin. ».

 

Ce qui rend cette hypothèse impensable, c'est la présence aux pieds de notre personnage, non d'une fronde, mais d'un arc, que l'on distingue très nettement, et de deux flèches, dont on voit les extrémités empennées et les encoches. Malgré de
longues recherches dans la Bible et dans ses Commentaires du moyen Age, dans les manuscrits illustrés et dans les représentations peintes et sculptées, je n'ai pu retrouver
l'explication de cette scène. La présence de l'arc et des flèches, qui ne s'explique pas dans l'hypothèse de David allant combattre Goliath, fait écarter d'autres hypothèses
auxquelles on pourrait songer, comme celle de Moïse devant le buisson, tenant le bâton qui, sur son ordre, se changera en serpent, sur le bord du torrent dont l'eau deviendra du sang, ou celle du prophète Elie se nourrissant de l'eau du torrent de Carish et du pain que lui apporte un corbeau. Si ces bas-reliefs, au lieu d'être visiblement réemployés, se trouvaient en place, nous admettrions volontiers la thèse de Didron, qui voyait au-dessous de la représentation biblique d'une vertu, la représentation historique ou simplement en action du vice correspondant. Mais rien ne nous prouve que le bas-relief qui se trouve sous la scène de la Dérision de Job soit bien celui qui, dans la pensée du clerc qui a ordonné ce portail, devait être à cette place. Dans le Bréviaire de Charles ler [Bibl. nat., ms. lat. 1052, fol. 217.— M. Mâle, dans son beau livre sur l'art religieux de la fin du moyen âge en France, a montré tout l'intérêt de ce manuscrit.], où nous trouvons les représentations bibliques et historiques des Vertus et des Vices, c'est Judas, symbole du désespoir, qui figure en face de Job, symbole de l'espérance. Il nous a paru intéressant de publier ces quatre bas-reliefs encore assez peu connus, curieux par les problèmes iconographiques qu'ils soulèvent. Ce sont un des rares essais au XIIIe siècle de figuration des vertus « en action », suivant l'expression de M. Mâle. Tandis que partout à cette époque. au portail de nos cathédrales, les vertus sont représentées sous la figure allégorique d'une femme portant un écu timbré d'un attribut, nous voyons ici des représentations vécues des vertus.

 

Marcel AUBERT.

 


 
 
 

 

Commentaires : il n'aura pas échappé à l'étudiant, lecteur du Mystère des Cathédrales, du non moins mystérieux Fulcanelli, que deux de ces bas-reliefs ont été commentés par le plus grand alchimiste du XXe siècle : sur la figure V, il s'agit des deux bas-reliefs du bas. Les deux bas-reliefs du haut n'ont point été analysés par Fulcanelli. Si l'on adopte un point de vue purement historique, en se référant à la Bible, il est hors de doute que l'interprétation « exotérique » de M. Aubert est exacte. Le mot exotérique est mis entre guillemets à escient. Il est bien clair que, se rapportant à un haut fait de religion, on ne saurait gloser de manière rationnelle là-dessus. Cela étant entendu, nous pouvons néanmoins inférer qu'une interprétation alternative est possible, si l'on adopte les préceptes de la doctrine hermétique. Aussi peut-on voir dans le bas-relief de gauche Cadmos dévoilant la fontaine de jouvence, après qu'il ait triomphé du dragon [ou du serpent Python] en sorte d'avoir accès à l'eau vive qui est de toute nécessité pour l'Artiste. Il est assez extraordinaire - mais ô combien significatif dans le sens d'une interprétation hermétique « coulant de source » pour ainsi dire - que le corbeau soit nommé à cet endroit. Tant il est vrai que cette eau vive est le signe, pour l'Artiste, de l'animation de son Mercure et, partant, de la fin de la phase de putréfaction, « l'oeuvre au noir » pour citer le roman de Marguerite Yourcenar. Nous convenons qu'une telle interprétation est, pour ainsi dire, contre nature. Mais nous avons toujours dit - suivant en cela les préceptes de Fulcanelli - que toute demeure, toute sculpture, etc. présentant des traits conduisant à une possible interprétation hermétique, pouvait constituer un prétexte, ce qui, bien sûr, est le cas des deux bas-reliefs qui nous occupent. Quant au bas-relief de droite, nous avons eu l'occasion de l'aanlyser dans la section du rébus de saint Grégoire-en-Vièvre. Quant à celui de la Dérision de Job [bas-relief du haut, à gauche], il se présente comme une parodie des Rois Mages allant au chevet du Christ, déposé dans sa litière de paille, pratiquement dans le fumier. Les Rois Mages sont ici représentés par Eliphaz, Baldad et Sophar, la figure christique étant incarnée en Job. Quant au bas-relief, en haut et à droite, M. Aubert nous dit qu'il représente le sacrifice d'Abraham. Comment intégrer le patriarche biblique dans le symbolisme du grand oeuvre ? Nous retiendrons ici ces paroles de saint Paul : « contra spem in spem credidit » que l'on peut traduire par « pour une aventure sans espoir, il puisa l'espoir dans sa foi » ou bien « quand il n'y avait plus d'espérance, sa foi lui donna l'espoir », d'où cete conclusion lapidaire « contre tout espoir, il crut à l'espérance ». A quoi nous pouvons rajouter cette maxime tirée de l'Île Mystérieuse, roman génial de Jules Verne - mais maxime qui serait attribuée à Ockam - « il ne sert à rien d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer ». En somme, en lisière ou en bordure, pourrait-on dire, du symbolisme propre à l'alchimie, avons-nous là un message qui s'adresse à l'Artiste...Les deux autres bas-reliefs ne posent pas de problème :  celui du bas, à gauche,

 


FIGURE VI

 

on peut en trouver une représentation semblable sur l'un des caissons de la galerie hermétique du château de Dampierre-sur-Boutonne : le soleil darde ses rayons sur l'oeuf des philosophes ; à Paris, c'est l'Artiste qui protège l'athanor des ardeurs des rayons. S'agit-il de l'avertissement classique des alchimistes qui conseillent de modérer le feu, faute de quoi on courrait le risque de brûler les fleurs ? S'agit-il d'une allégorie sur le feu sacré qu'il faut savoir maîtriser ? Ou encore sur la manière de capter le rayon igné qui constitue le Soufre rouge, sublimé dans le Mercure ? Nous n'en saurons pas plus. Le bas-relief de gauche est superposable à l'allégorie de Cadmus, qui, après avoir tué le serpent Python [ou le dragon], fonde la ville de Thèbes là où le sabot de son cheval laisse jaillir une source d'eau pure : c'est cette représentation que nous voyons ici, l'eau pure jaillissant du chêne que l'on aperçoit à droite du bas-relief, réplique semblable à l'une des figures du Livre d'Abraham Juif.

 

Cet article de M. Aubert nous a permis d'observer le fait suivant, au demeurant bien connu, qu'un tableau lapidaire peut aisément voir son sens détourné de mille manières selon l'observateur, mais qu'il existe des bornes au-delà desquelles le sens tombe pour ainsi dire de lui-même : nous venons de le voir pour le bas-relief représentant le sacrifice d'Abraham où il n'est pratiquement pas possible de définir une approche hermétique. Tel n'est plus le cas d'autres bas-reliefs du grand pilier de Notre-Dame de Paris, qui ont fait l'objet d'une étude approfondie de Fulcanelli, dans le premier tome de sa trilogie : il s'agit, bien sûr, du Mystère des Cathédrales. Loin de nous le besoin de revenir sur les planches de l'ouvrage pour les réinterpréter. Non. Nous en avons donné quelques-unes dans les sections du site, pour servir le propos. Mais il est évident que Fulcanelli a dû s'inspirer du traité d'Esprit Gobineau de Montluisant, et, dès lors, il paraît intéressant de chercher en quoi les médaillons des Vices et des Vertus ont pu déterminer, chez Fulcanelli, l'approche qui fut sienne dans le Mystère des Cathédrales. Nous ne pourrons, ici, que renvoyer le lecteur à un site remarquable, sur l'art religieux au XIIIe siècle, résumé simplifié du livre d'Emile Mâle : L'art religieux au XIIIe siècle, Etude sur les origines de l'iconographie du Moyen Age et sur ses sources d'inspiration (Armand Colin, 1948). Voici, quoi qu'il en soit, quelques réflexions sur cet ouvrage. Et aussi d'un autre ouvrage, consacré à l'art religieux au XIIe siècle. Ces deux recensions forment une introduction à l'oeuvre d'Emile Mâle dont il faut regretter que l'on ne trouve pas encore sur le serveur Gallica de la bnf la première édition de l'Art religieux au XIIIe siècle. Cette introduction est précieuse pour l'étudiant en hermétisme et alchimie et permet de réaliser la liaison entre les vieux sculpteurs, bâtisseurs de cathédrales d'une part et les alchimistes du XXe siècle, qui, par delà l'oeuvre d'Esprit Gobineau de Montluisant, s'employèrent à trouver dans ces tableaux et ces livres muets lapidaires, l'inspiration de leurs singulières réflexions. Nous voici à présent en mesure de donner quelques précisions sur la signification exotérique des Vices et des Vertus représentés sur les médaillons du portail central de Notre-Dame.
 

 

Les Vices et les Vertus de Notre-Dame de Paris

 

Nous ne saurions mieux faire que suivre l'enseignement du Speculum majus de Vincent de Beauvais pour débuter l'étude des médaillons de Notre-Dame de Paris. Vincent de Beauvais que nous avons rencontré à de multiples reprises dans nos sections [Donum Dei ; Idée alchimique, I, II ; Char Triomphal de l'Antimoine ; Chevreul critique de Hoefer, I ; Chimie des Anciens, I, II ; Miroir d'alchimie ; prima materia ; Atalanta fugiens, XLII ; Nouvelle Lumière Chymique ; Mercure]

 


FIGURE VII
Quatrième tome du Speculum majus de Vincent de Beauvais,
éd. de 1624, Bibliothèque nationale de France

 

Le Speculum majus, ouvrage de Vincent de Beauvais, est un condensé des savoirs de l'époque. L'œuvre est divisée en quatre parties, appelées miroirs :
          - le miroir de la nature : les chapitres de cette partie suivent l'ordre des jours de la création. Ils comprennent l'énumération et la description de tous les éléments de la nature, en terminant par l'homme.
          - le miroir de la science : il raconte l'histoire de la Chute et présente la science comme une des voies de rédemption. Les sept arts sont considérés comme autant de dons du Saint Esprit. Toutes les connaissances scientifiques sont passées en revue.
          - le miroir moral : il présente une classification des vices et des vertus (d'après Saint Thomas d'Aquin)
          - le miroir historique : il présente l'histoire de l'Eglise, le reste n'étant évoqué qu'épisodiquement.

 

C'est selon cette répartition en quatre chapitres que les auteurs du site consacré à l'Art religieux au XIIIe siècle se sont donnés pour tâche d'étudier l'iconographie du Moyen Âge. Sans reprendre exactement leurs propos, nous ajouterons surtout plusieurs remarques :

 

- sur le miroir de la nature, les animaux se voient attribuer une valeur symbolique forte. C'est l'évidence :  le bestiaire hermétique est d'une grande importance [cf. par exemple, la volière alchimique, analysée dans la page du Poème du Phénix]. Mais, la nature peut être envisagée de façon encore plus large, en particulier la géologie appliquée à l'hermétisme : que le lecteur se rapporte au Bergbüchlein [commenté par Daubrée] ; à la Révélation de la teinture des métaux [Bernard Le Trévisan] ; au Traité des Choses naturelles et surnaturelles [attribué à Basile Valentin] ; à la Philosophie Naturelle restituée [Jean d'Espagnet]. On peut encore y annexer le Typus Mundi.

 

- sur le miroir de la science : « L'homme peut se relever de sa chute par la science » (Vincent de Beauvais).

 

Tout comme le travail manuel affranchit des nécessités du corps, la science affranchit de l'ignorance qui empoisonne l'esprit. Le travail est très présent dans les vitraux, où sont représentés tous les métiers artisanaux, et également dans les voussures et les soubassements de portail, où les travaux agricoles sont souvent mêlés aux signes du zodiaque. La science, quant à elle, est incarnée par les sept arts, qui se composent d'un trivium (grammaire, rhétorique, dialectique) et d'un quadrivium (arithmétique, géométrie, astronomie et musique). La philosophie est considérée comme la mère de tous les arts. Les différents arts sont souvent représentées sous forme de jeunes femmes dotées d'instruments symboliques. On les trouve, par exemple, aux portails de Chartres et de Laon.

 

Note : les photographies des médaillons sont tirés du site http://architecture.relig.free.fr/ ; nous tenons à remercier les auteurs [Elisabeth et Vincent Trouvé] de leur permission d'insérer sur cette page ces images des bas-reliefs qui donnent une nouvelle jeunesse au Mystère des Cathédrales, s'il est possible...

 

1)- la grammaire :

 


FIGURE VIII
(la grammaire)

 

L'image montre une femme avec une férule et deux enfants à ses pieds : nous y trouvons l'équivalent de la sapience à laquelle l'Artiste doit parvenir afin de préparer ses matières ; sous ce rapport, les deux enfants pourraient figurer Apollon et Artémis. Il s'agit à tout le moins d'apprendre à manier le Verbe : ce qui, en terme de cabale se traduit par un mot : l'humour. Qui ne sait pas ce qu'est l'humour bien tempéré ne sera jamais au fait de l'Art Sacré. C'est-à-dire, qui ne connaît la vertu essentielle et roborrative du mot ESPRIT. De là à jouer sur les mots, il n'y a qu'un pas que l'on ne peut franchir si l'on n'a pas compris la SUBTILITE des textes alchimiques. Subtilité qui permet d'en comprendre le VERBE. Et comme chacun sait, le VERBE s'est fait TERRE. Nous ne saurions mieux résumer la pensée véhiculée par l'Art d'Hermès.

 

2)- la dialectique

 


FIGURE IX
(la dialectique)

 

Représentée comme une femme avec un serpent (parfois remplacés par un scorpion), on ne saurait mieux concevoir les échanges d'énergie qui se produisent au sein du Mercure, et qu'en termes de chimie moderne on qualifie d'oxydo-réduction, là où les Anciens s'employaient à faire des magistères : Newton lui-même s'exprimait ainsi :

 

« Le 18 mai, j'ai perfectionné la solution idéale. C'est-à-dire que deux sels égaux portent Saturne. Ensuite il porte la pierre et joint le malléable Jupiter, donne également * [sel ammoniac sophique] et ce dans de telles proportions que Jupiter s'empare du sceptre. ensuite l'aigle élève Jupiter...» (Keynes, MS 3975, p.122 - cité dans Dobbs)

 

A l'évidence, nous assistons à des phénomènes de médiation, ce que Hermès ne désavoue point dans sa Table d'Emeraude [où il faut lire, dans le texte : mediatione et non pas meditation. Notez que seuls Fulcanelli et F. Hoefer donnent la version correste du texte]. Et l'agent de la médiation par excellence est le serpent, manifestation de l'esprit corrompu par l'âme [d'où le scorpion].

 

3)- la rhétorique

 


FIGURE X
(la rhétorique, Chartres, cathédrale)

 

Il n'existe point de bas-relief représentant cet art à Notre-Dame de Paris. La Rhétorique emblématisée par Cicéron est parfois dotée d'un faisceau de lances et d'un bouclier, parfois simplement d'un stylet et d'une tablette de cire. On voit d'habitude une femme faisant un geste oratoire. Seul peut-être, Heinrich Schütz paraît s'être approprié ce qu'on pourrait nommer la Rhétorique des Dieux. Ainsi, dans les Psalmen Davids (1619), il affirme qu'il a écrit ces psaumes en stylo recitativo, auparavant presque inconnu en Allemagne. Schütz fait allusion au strict principe rhétorique qui gouverne son style choral. S'appuyant, avec grande imagination, sur le rythme de la parole, il parvient à un rythme musical discontinu fréquemment interrompu par des cadences et des effets d'écho, réalisant ainsi ce que seul Haydn oserait plus tard : introduire une asymétrie et une instabilité radicales dans le tissu musical. Cela est d'autant plus remarquable, s'agissant de la monodie. Il n'est point besoin de beaucoup d'imagination pour faire voir l'analogie avec le pricnipe formel qui doit guider l'Artiste dans le magistère, qualifié par tant de maître d'art de la musique ; mais nous y reviendrons en abordant directement cet art par un exemple des plus révélateurs. Par la rhétorique, nous complétons le trivium, où s'exprime le ternaire alchimique.

 

4)- l'arithmétique

 


FIGURE XI
(l'arithmétique, Chartres, cathédrale)

 

Là encore, point de bas-relief la représentant à Paris. L'Arithmétique telle qu'elle est représentée dans les manuscrits carolingiens dévide entre ses doigts une corde à boules, évocation de la bouillonnante dextérité des doigts computateurs de l'arithmétique.

 

5)- la géométrie

 


FIGURE XII
(la géométrie)

 

La Géométrie tient souvent à la fois le compas et la sphère car elle est la soeur de l'Astronomie. Elle peut être munie d'un bâton rappelant sans doute le roseau d'or avec lequel dans l'Apocalypse Jean mesure le temple et l'ange la Nouvelle Jérusalem. Celle que l'on voit à Paris tient une tablette. Point n'est besoin d'insister sur l'importance de la géométrie dans le magistère. A cet égard, le lecteur n'aura qu'à consulter l'Atalanta fugiens, cap. XXI où toutes précisions sont données. Quant au compas, un chapitre spécial lui est consacré dans notre page sur Fontenay-Le-Comte.

 

6)- l'astronomie

 


FIGURE XIII
(l'astronomie, Chartres, cathédrale)

 

L'Astronomie ou l'Astrologie dont le modèle est Ptolémée rappelle l'importance des horoscopes et évoque l'ascendant des astres sur la formation de l'amour et de la haine. Elle peut tenir un cadran solaire, un astrolabe ou une sphère armillaire et contempler la giration des astres autour de la planète Terre. Voici ce qu'en termes exotériques l'on dit d'habitude de l'astronomie ; mais l'importance hermétique de l'astronomie est considérable pour l'étudiant en alchimie : le lecteur consultera ici notre humide radical métallique, notre zodiaque alchimique et les nombreux renvois aux constellations et aux décans qui parsèment le commentaire de l'Atalanta fugiens. 7)- la musique


FIGURE XIV
(la musique)

La Musique illustrée par Pythagore, inventeur du nombre d'or, est évidemment le plus souvent munie d'un instrument de musique (harpe, lyre ou cythare) et s'affaire à monter la gamme en frappant des clochettes avec un marteau. On se souviendra aussi d'un grand vieillard que nous présente Fulcanelli dans le Mystère des Cathédrales, qui n'est autre que le Mercure. Voyez ce que nous avons dit supra des rapports entre la musique et la rhétorique qui lui est congénère. Comme musicien alchimique, on pourrait encore évoquer les figures de Monteverdi et de Varèse. Sur Monteverdi, cet extrait :

« Curieusement, Monteverdi, esprit lucide s'il en fut, va prendre goût [...] aux expériences alchimiques. Pour s'amuser, concède-t-il, et " tout en affichant (pour la forme) un certain scepticisme ". Et cependant, les faits sont là : jusque dans les années heureuses de la période vénitienne, le musicien se livrera au patient travail de l'adepte, faisant chauffer en les mêlant les principes du soufre, du mercure et du sel dans l'athanor, sans en espérer autre chose que le plaisir du jeu avec l'insolite [...] » [Monteverdi, Roger Tellart, Fayard, 1997]

et sur Varèse :
 

Cette aura magique a pris son origine dans les termes qu'il emploie volontiers, et dans la citation de Paracelse qu'il inscrivit en exergue de sa partition d'Arcana : " Une étoile existe, plus haut que tout le reste. Celle-ci est l'étoile de l'Apocalypse. La deuxième est celle de l'ascendant. La troisième est celle des éléments, qui sont quatre, il y a donc six étoiles établies. Outre celles-ci, il y a encore une autre étoile l'imagination, qui donne naissance à une nouvelle étoile et à un nouveau ciel. " Varèse s'est pourtant expliqué sur la portée de cette épigraphe : Cette phrase équivaut à une dédicace, elle fait de mon poème symphonique un certain hommage à celui qui l'a écrite, mais elle ne l'a pas inspiré, et l'oeuvre n'en est pas le commentaire. Il exposa sa pensée au New Mexical Sentinel : L'art ne prend pas naissance dans la raison. C'est le trésor enfoui dans l'inconscient, cet inconscient qui a plus de compréhension que n'en a notre lucidité. Dans l'art, un excès de raison est mortel. La beauté ne provient pas d'une formule. C'est l'imagination qui donne la forme aux rêves. Attiré par les alchimistes de la Renaissance, il reconnut : j'ai surtout lu Paracelse. Il étudia les principes de l'astronomie hermétique, en tira des applications musicales qui stimulaient son imagination. Il médita sur les préceptes de la médecine de Paracelse, sur l'association, la dissociation et la coagulation, à propos de laquelle il me cita l'Acoustical Terminology : " La coagulation des ultrasons est le départ de petites particules dans de plus larges agrégats par l'action des ondes d'ultrasons. " Ce fut surtout la transmutation des éléments qui le retint : il soumit une cellule ou un agglomérat à différentes tensions, à des décalages de rythmes, à différentes fonctions de gravitation (attirance et lourdeur), à différentes dynamiques. Il ne chercha ni a développer ni a les insformer : il voulut transmuer. Varèse fut dès sa jeunesse un fervent de Léonard de Vinci et Kepler le passionnait : il pressent tout, comme Léonard de Vinci. Il réfléchissait sur les marges d'erreurs que Kepler essayait d'intégrer dans une sécurité mathématique et qu'il tentait d'expliquer sans savoir prouver pourquoi elles existaient. Varèse cultivait ces marges d'erreur, de liberté plus exactement, qui empêchent la contrainte et donnent la vie. II répétait que pour lui la musique était un art-science comme dans le Quadrivium du Moyen Age, ou elle figurait parmi les arts de raison, avec l'arithmétique, la géométrie et l'astronomie. [Varèse, Odile Vivier, Solfèges, Seuil, 1973]

Nous témoignons ici de la justesse absolue des vues de Varèse. Comme Beethoven l'affirmait, la musique est plus haute que toute sagesse et que toute philosophie : elle les comprend toutes et permet à l'esprit d'accéder en conscience au cosmos.

La représentation de la philosophie est plus complexe. A Laon, on la trouve représentée assise, la tête dans les nuages, une échelle appuyée contre la poitrine. Cette image correspond à la description qu'en fait Boèce dans la Consolation philosophique. L'échelle est ce qui permet d'aller des éléments inférieurs vers les éléments supérieurs. A Sens, la philosophie est tout aussi grave mais l'échelle est remplacée par un simple sceptre. Nous avons vu l'image de la philosophie de Notre-Dame de Paris, supra.

- sur le miroir moral : c'est là qu'interviennent les médaillons des Vices et des Vertus.

1)- la prudence


FIGURE XV
(la prudence - le Mercure philosophique)

Nous voici placés au seuil de la sapience alchimique, avec ces médaillons qui ont constitué la matière même et le prétexte de Fulcanelli, dans le premier tome [le Mystère des Cathédrales, Pauvert, 1924] de sa trilogie. Combien de fois les alchimistes ne nous ont-ils pas avertis que sans prudence, l'Artiste n'arriverait à rien ? Ne souhaitant pas ici faire des redites inutiles, nous conseillerons au lecteur de visiter la section des Gardes du Corps où les Vertus se trouvent analysées. Il est certain que l'image du fixe et du volatil sont l'indice clair du Mercure préparé et sublimé. Ce bas-relief forme la planche VII des Mystères et représente le Mercure philosophique. Nous en sommes bien d'accord. Nous ajouterons que l'image la plus fidèle de ce Mercure philosophique est formée par le signe zodiacal des Gémeaux, identique d'ailleurs - au plan spirituel - avec la figure I du Livre d'Abraham Juif dont Fulcanelli a montré qu'il était mythique. Fulcanelli écrit :

« C'est là ce " ver empoisonné qui infecte tout par son venin ", dont parle l'Ancienne Guerre des Chevaliers. » [Mystère, p. 104]

Ajoutons que ce « ver empoisonné » désigne d'habitude le premier état du Mercure et qu'Artephius le nomme dans son Livre Secret  le « vinaigre très aigre » . Voilà la transition toute trouvée avec l'image de la folie :

2)- la folie


FIGURE XVI
(la folie - origine et résultat de la pierre)

Au lieu qu'ici, comme nous venons de le dire, c'est la folie qui se trouve représentée : il s'agit de l'image du premier Mercure, celui dont Fulcanelli nous dit qu'il est le « fou de l'oeuvre ». On le représente souvent torsadé et contourné, un peu comme dans les Ripley's scrowls, cf. les Douze Portes. Nous en avaons surtout parlé à la section sur Fontenay, quand on l'a comparé au pyrophore de Homberg ou de Gay-Lussac. Voilà quelques notes de Fulcanelli sur la planche XIX :

« Au second médaillon, l'Initiateur nous présente d'une main un miroir, tandis que de l'autre il élève la corne d'Amalthée ; à ses côtés, se voit l'Arbre de Vie. Le miroir symbolise le début de l'ouvrage, l'Arbre de Vie en marque la fin, et la corne d'abondance le résultat. » [Mystères, p. 124]

Bien lapidaire dans son explication, le maître de Paris se montrera plus généreux dans la description de ce miroir, en citant Moras de Respour ; voici un extrait que na pas donné Fulcanelli, pourtant bien plus explicite, sinon exotérique, que celui qu'il donne :

Cette cendre minérale a en soi tout ce qui est nécessaire aux Curieux, ceux qui l'ont connue, ont eu la matière, dont on la tire, en grande recommandation, et de crainte qu'on sut qui elle était, ils lui ont imposé plusieurs noms, comme de Lunaire, d'herbe Saturnienne, et autres. Quelques uns l'ont comparée à la Salamandre, à cause qu'elle vit dans le feu ; Ils ne l'ont jamais mieux dépeinte que parlant du Phénix qui renaît de ses cendres: d'autres l'ont nommée Lucifer ou Porte lumière, Vénus engendrée de l'écume de la Mer, parce qu'on la tire en écumant. On l'a nomme Dragon, à cause qu'elle brûle comme Salpêtre ; Aigle, parce que l'on en tire l'Armoniac mercuriel, ils ont dit, que c'est le Roi, d'autant qu'il est le plus considéré entre eux ; et le Lion, à cause de sa grande force. Ils disent que c'est l'âme métallique, à cause qu'elle vivifie tous les Métaux, et qu'elle est corps, parce qu'elle corporifie les esprits. Mais communément entre les Philosophes, elle est entendue par Miroir de l'art, à cause que c'est principalement par elle, que l'on a appris la composition des Métaux dans les veines de la Terre [...]
Rares Expériences sur l'Esprit minéral, Paris, Langlois et Barbin, 1668

Plusieurs arcanes se trouvent entrelacées dans ce texte, mais en fin il y est question, en somme, d'un sel infusible. La pratique de l'oeuvre montre qu'il n'existe que trois sels infusibles, dont l'un est générique et résulte d'une transformation au lieu que les deux autres sont spécifiques ; le sel infusible protéiforme est ce que les anciens chimistes appelaient la chaux métallique : et il y a autant de chaux que de métaux [sept pour rester dans la pure tradition hermétique, cf. l'humide radical métallique]. Le second sel - la Salamandre -  est celui que De Respour nomme la Lunaire et qui est confondue, dans presque tous les textes, avec le premier Mercure ; aussi la nomme-t-on plus justement le « suc de la Lunaire ». C'est elle que l'on appelle encore « pierre et non pierre » et que certains ont identifié au nostoc [Mystères, p. 171 ; cf. Atalanta, XXXVII]. Il se trouve que cette substance, décrite par Pline, possède des traits communs avec une autre pierre que l'on nomme la pierre de Jésus ou pierre spéculaire ; leur racine est semblable et peut très facilement être préparée en laboratoire : il suffit d'un vitriol préparé, d'un sel que l'on trouve chez les riches aussi bien que chez les pauvres [surtout à la campagne : ne dit-on pas du fou que : « son esprit bat la campagne » ? C'est là un petit trait d'humour où se signale un important point de science], également préparé et d'un feu médiocre. Quant au phénix, ultime état du Rebis revivifié, il résulte de la réincrudation de ces substances salines. La résurrection du phénix est sous la dépendance de ce Lucifer ou porte lumière comme l'écrit si justement De Respour, Fulcanelli le nommant christophore [Mystères, p. 186] et ayant emprunté à Offerus ses traits pour désigner le crusojoroV. Quant à l'Armoniac mercuriel, il ne correspond point à notre chlorhydrate mais - comme l'a vu Berthelot dans la Chimie des Anciens - à une sorte de sel fossile. Il est appelé là encore de bien des manières selon les Adeptes, les uns le nommant le sel ammoniac, d'autres le sel harmoniac, etc. Sa principale qualité semble être de donner un peu de liant à la Salamandre, pour l'empêcher de s'échapper du feu : au 4ème degré de feu, c'est-à-dire vers 1300°C, la salamandre, au dire de Marc-Antoine Gaudin, devient d'un coup fluide comme de l'eau et se vaporise instantanément. Quant à l'âme métallique, il faut y voir le facteur qui rend compte de la viscosité des métaux lorsqu'on leur impose le calorique et le même quand, au bout d'un certain temps [c'est la période où l'oeuvre est comparée à un travail de femme - quenouille - ou à un jeu d'enfant - yo-yo, bilboquet -] de va-et-vient, la cristallisation finit par s'opérer dans la masse saline. Ce facteur - comburant - est en raison directe de la présence d'un agent carburant que les Sages ont nommé le Lait de Vierge et sans lequel l'accroissement de la Pierre ne serait pas possible : c'est la corne d'Amalthée [cf. Atalanta, XLVII pour une description et des notes complémentaires]. L'Arbre de Vie est l'Arbori Solare dont nous parlons à la section Fontenay.

3)- la foi


FIGURE XVII
(la foi - les quatre éléments et les deux natures)

L'alchimiste errant ne trouvera son chemin dans le labyrinthe de Salomon que muni du fil d'Ariane : c'est ce qui constitue sa foi à proprement parler. Sur la foi, consultez la Chrysopée du Seigneur, un apocryphe attribué à Ramon Lull. Sachez que l'Artiste en quête de son Mercure sera guidé par une étoile, celle qui apparaît sur le médaillon de Notre-Dame et que, cet astre, à l'instar de celui qui guida les Mages d'Orient, le conduira dans une étable où il verra un enfant emmailloté de langes qui aura la forme de notre BasileuV. Certains l'ont comparé au sel de Pierre, d'autres au sel gemme. Dans ce dernier cas, ils l'ont nommé le sel harmoniac dont le rapport avec notre chlorhydrate est du même genre que celui qui existe entre le vif-argent vulgaire et l'hydrargyre philosophique. Ce bas-relief est la planche XI du Mystère. Fulcanelli se trompe en la nommant la Philosophie [nous avons vu supra qu'il s'agit de la figure IV où l'imagier a inscrit l'échelle de la sapience et deux livres] ou bien alors c'est par cabale qu'il veut ainsi désigner la Foi érigée en forme de doctrine hermétique. Fulcanelli décrit le médaillon comme une monade : la croix y désigne le quaternaire des éléments mais il faut avoir des yeux de lyncée pour distinguer le disque lunaire, dont il nous dit qu'il est martelé. On croirait un astre quelconque et rien ne vient affirmer la conjecture du grand Adepte. Le lecteur verra avec profit là-dessus les dessins de la Monade Hiéroglyphique de John Dee car l'Adepte parisien s'étend peu sur la Foi alorsque la croix forme l'un des symboles les plus fascinants de l'oeuvre.

4)- l'idolâtrie


FIGURE XVIII
(l'idolâtrie - le sujet des Sages)

Aussi voilà qui peut expliquer - du même rapport que la folie, qui lui fait pendant - la fausse foi du souffleur qui n'aura pas su trouver le fil d'Ariane que nous évoquons plus haut. Il croira à des miroirs trompeurs, au reflet de Narcisse et se complaira dans « mille brouilleries » pour reprendre l'heureuse expression de Nicolas Flamel [Fig. Hiér.] Il croira au rapport de l'Art sacré avec les cultes infernaux, les cérémonies d'initiation où l'esprit se dissout plus qu'il n'est sublimé ; il succombera aux mystères orphiques dans ce qu'ils ont de plus vulgaire et ce sont les plus viles métamorphoses qu'il accomplira dans son creuset. Il est étrange de voir Fulcanelli comparant l'Idolâtrie au médaillon représentant la Folie, mais cette étrangeté est du même rapport, en musique, que celui qui existe entre l'accord consonnant et l'accord dissonnant : ils sont complémentaires. Ainsi :

« L'Adepte s'y retrouve, mains jointes, dans l'attitude de la prière, et semble adresser des actions de grâces à la Nature, figurée sous les raits d'un buste féminin que reflète un miroir. Nous reconnaissons là l'hiéroglyphe du sujet des Sages, miroir dans lequel " on voit toute la nature à découvert ". » [Mystère, p. 128]

La prière est une indication sur le Soufre [soufre, c'est-à-dire sulfure ou sulfate], à cause de l'assonance qeion - qeioV [soufre - Dieu]. Combien de fois les alchimistes nous ont-ils dit qu'il fallait implorer Dieu pour réaliser l'oeuvre, en affirmant - c'est une constante dans les texte - que celui-ci était un « don de Dieu » ? Mais, si le Christ a souffert la Passion, Fulcanelli demande à l'impétrant une autre action de grâce, qui est celui de « potasser pour l'X». Que l'on voit dans cet X une croix ansée ou la croix du Christ, après tout peu importe car nul n'a dit que l'alchimie était réservée aux Chrétiens, quand bien même il est évident que l'oeuvre, à partir du Moyen Âge, s'est pour ainsi dire nourri de la figure christique, en même temps qu'elle nourrissait d'ailleurs la musique [cf. le Visage du Christ dans la musique baroque, Jean-François Labie, Fayard, 1992].
 

5)- la charité


FIGURE XIX
(la charité - préparation du dissolvant universel)

Fulcanelli écrit :

« un homme expose l'image du Bélier et tient de la dextre un objet qu'il est malheureusement impossible de déterminer aujourd'hui. Est-ce un minéral, un fragment d'attribut...? »

Il est bien difficile de répondre à cette question. On sait que le Bélier, comme bien des signes zodiacaux, a une nature double : il répond à Ariès et à Arès. Le premier nous signale le signe du Printemps, époque canonique où il convient de débuter les travaux, mais qui doit s'entendre au figuré. Car les deux premiers signes du zodiaque, qui sont respectivement les lieux d'exaltation du Soleil et de la Lune, répondent aux deux principaux composés du Mercure : un vitriol et un sel contenant, sous une forme quelconque, de l'alkali fixe. Si l'on applique, maintenant, les règles de la cabale, voici ce qu'on peut dire du « fragment d'attribut » : en grec, un attribut s'énonce : idion ou oikeion. Remarquons que Fulcanelli fait référence à un fragment. Or, dans les deux cas, le mot se termine par ion, c'est-à-dire la fleur, la violette. Violette noire ou d'un bleu sombre. Il n'est pas besoin d'en dire plus puisque nous avons déjà, en maintes pages de ce site, fait voir toute l'importance que prenait, dans le magistère, la sphère de la violette, chère à E. Canseliet. Voyons maintenant la racine oike : elle se réfère à un objet qui habite ou qui demeure dans sa maison : on peut y voir la materia prima qui tient sa résidence ou son gîte « es cavernes de la terre » pour reprendre une expression quasi idiomatique d'alchimie. Et nous pouvons y voir la « maison de l'or », c'est-à-dire le christophore par lequel s'exprime la Toyson d'or de Salomon Trismosin. C'est aussi la Toyson des Argonautes : leur histoire est d'une grande proximité par rapport à l'oeuvre, ainsi que l'a bien montré Dom Pernety dans ses Fables Egyptiennes et Grecques. Ainsi voyons-nous que par « fragment d'attribut », Fulcanelli entend nous parler du Soufre dissous dans le Mercure [ion] et du Corps de la Pierre [oike]. La charité enseigne ainsi, pour l'alchimiste, comment le Soufre tend la main au Sel. Voilà le message que l'alchimiste tenait ici à faire valoir. Ce bas-relief correspond à la planche IX du Mystère. On peut rajouter cette note de Pernety :

« les Adeptes disent qu'ils tirent leur acier du ventre d'Ariès, et ils appellent aussi cet acier leur aimant » [Dictionnaire Mytho-hermétique]

Sur un commentaire de ce rébus, voyez la section Matière.

6)- l'avarice


FIGURE XX
(l'avarice - le régime de Saturne)

L'image montre un personnage exténué qui s'appuie sans doute pour se reposer d'une marche trop longue dans le désert. C'est l'allégorie de l'Artiste qui a perdu son fil d'Ariane ; mais quel rapport avec l'avarice ? En grec, jilocrhmatia : amour de l'argent littéralement. Saisit-on le rapport ? L'attention est attirée par le cousinage hermétique entre la Lune et l'argent ; on sait que la Lune, a nulle autre pareille peut-être, est versatile et plurielle dans ses rapports au grand-oeuvre. Est-elle prise dans son premier quartier, on sait qu'il est question du Mercure. Est-elle prise en son dernier quartier, alors, il s'agit du Sel ou du suc de la Lunaire pour être plus précis. C'est donc d'un rapport au Mercure, à l'Esprit, qu'il s'agit ici. Et quel est ce rapport ? De nous faire valoir que l'Eau permanente des Sages ne saurait être éternelle et qu'il vient un moment où elle doit commencer à se sublimer, faute de quoi l'Artiste oeuvrera dans le désert et finira par dessécher sa Pierre, à force de l'abreuver. Ou si l'on préfère, l'Esprit doit libérer l'Âme pour qu'elle descende dans le Corps, opération qui fait l'objet du sens hermétique des signes du Sagittaire et du Scorpion. Mais Fulcanelli ne semble pas de cet avis, puisqu'il intule la planche XXII du Mystère le Régime de Saturne, avec ce commentaire :

« Un vieillard transi de froid, et courbé sous l'arc du médaillon suivant, s'appuie, las et défaillant, sur un bloc de pierre ; une sorte emanchon enveloppe sa main gauche. » [Mystère, p. 128]

Le commentaire qui suit ne laisse pas d'étonner et de se demander si Fulcanelli était envieux et charitable, lorsqu'il précise :

« Il est facile de reconnaître ici la première phase du second oeuvre, alors que le Rebis hermétique, enfermé au centre de l'Athanor, souffre la dislocation de ses parties et end à se mortifier [...] C'est le règne de Saturne qui va paraître, emblème de la dissolution radicale » [idem]

Voilà qui laisse perplexe. Comment le Rebis pourrait-il se disloquer alors même qu'il n'a pas encore pris forme ? Car qui dit Rebis dit forcément union même si elle n'est pas radicale [c'est alors le terme d'Airain qui est employé]. Et l'on ne voit pas que le Rebis, constitué, doive à nouveau être désuni car l'évolution est continuelle. Que par contre il soit question de la mort prochaine du Mercurius senex qui doit laisser place à plus jeune que soi, certes ; aussi est-ce dans cette acception que nous ferons correspondre le texte, manifestement et exceptionnellement envieux, de Fulcanelli. Quant au règne de Saturne, il renvoie au Règne de Saturne transformé en siècle d'or, l'autre titre de l'apocryphe d'Huginus à Barma, un grand classique. C'est la suite de la citation qui permet cette conjecture :

« [...] Je suis vieil, débile et malade, lui fait dire Basile Valentin ; pour cette cause, je suis enfermé dans une fosse [...] » [ibid.]

Il s'agit d'une citation incomplète d'un des chapitres de l'Azoth :

« Je suis le vieil homme débile & malade, mon surnom est Dragon. Pour cette cause je suis enfermé dans une fosse, afin que je sois récompensé de la Couronne Royale, & que j’enrichisse ma famille, étant en particulier lieu serviteur fugitif. Mais après ces choses nous posséderons tous les trésors du Royaume, le feu me tourmente grandement, & la mort rompt ma chair & mes os jusqu’à ce que six semaines passent » [Azoth, Opération du mystère philosophique]

Comment Fulcaneli a-t-il pu mettre les traits du Rebis sur ce vieil homme, lorsque la citation, complétée, permet de montrer que son surnom est Dragon ? Et que de surcroît, il vienne à dire qu'il est le « serviteur fugitif » ? La seule explication possible, qui permettrait d'inclure le Rebis serait de faire de ce vieil homme, non pas le Rebis mais le Compost [mixte Rebis - Mercure] mais de toute façon cela n'irait pas dans le sens où l'interprète l'Adepte, puisqu'il s'agit d'une dissolution ; on peut en dernier recours ajouter que Le Breton a vu quatre dissolutions dans l'oeuvre [Les Clefs de la Philosophie spagyrique, Paris, Jombert, 1722] et qu'il ne serait pas impossible de voir dans la dissipation finale du Mercure [qui doit mourir à la fin de l'oeuvre] l'ultime dissolution, mais qui n'a rien à voir avec la putréfaction, alors que Fulcanelli parle de « [...] la décomposition et de la couleur noire » dont le symbolisme s'inscrit au début de la Grande Coction, en sa phase humide, au lieu qu'ici nous sommes à la phase d'assation.
 

7)- la patience


FIGURE XXI
(la patience - le Soufre philosophique)

Que n'avons-nous pas parlé du « sel de patience » que l'Artiste doit nécessairement connaître avant de se livrer aux travaux de la Grande Coction ? Les textes disent que l'Artiste doit user de prudence et de patience pour amadouer le vieux dragon dont le feu est caché, sous les cendres métalliques, c'est-à-dire dont la ponticité élémentaire a été
maîtrisée lorsque l'alchimiste y a joint les deux colombes qui volent sans ailes dans la forêt de Diane [ Introïtus ]. Nous avons eu l'occasion de montrer dans d'autres sections que le mot patience [karteria] renvoyait à la force d'âme, ce qui suffit à indiquer son sens hermétique. Fulcanelli voit dans ce bas-relief - correspondant à la planche XVII du Mystère - le Soufre philosophique : on y distingue un taureau et voici ses commentaires :

« Comme figure de pratique, le taureau et le boeuf étaient consacrés au soleil, de même que la vache l'est à la lune, il figure le Soufre, principe mâle, puisque le soleil est dit métaphoriquement, par Hermès, le Père de la pierre [...] le soleil et la lune [...] désignent les natures primitives contraires, avant leur conjonction, natures que l'Art extrait de mixtes imparfaits. » [Myst., p. 122]

Toutefois, le taureau a toujours désigné la Lune, qui s'y trouve exalté et où Vénus possède l'une de ses maîtrises [cf. là-dessus le zodiaque alchimique et l'humide radical métallique]. Par ailleurs, l'une des vaches les plus connues en mythologie, Io, désigne à la fois le début du mot ion et du mot ioV, c'est-à-dire la violette et le venin : or, ces deux mots sont relatifs au Soufre et non au Mercure, stricto sensu [les appellations vulgaires sont : la rouille et le vert-de-gris]. Ce thème se trouve entièrement développé dans l'Atalanta, XXXII.

8)- la colère


FIGURE XXII
(la colère)

C'est la marque d'un Mercure dont la ponticité est excessive. Cet excès peut être dû soit à une quantité de calorique trop important - les Artistes disent alors que l'on « brûle les fleurs » ; soit à des proportions mal définies dans la composition du dissolvant. Ce médaillon n'a pas été commenté par Fulcanelli. La colère [orgh], c'est l'agitation intérieure qui gonfle l'âme. Voyez ici la Chrysopée du Seigneur, apocryphe attribué à Ramon Lull. Il semble que l'on observe dans ce bas-relief, à gauche Zeus muni de son foudre, et à droite un pèlerin, mais ce tableau lapidaire a subi l'injure du temps. On peut associer à la colère la tempête que l'on observe comme blason de l'un des décans de la Vierge, le 2ème décan. Son symbolisme a été analysé dans l'Atalanta, XLVII.

9)- la persévérance
 
 

 


FIGURE XXIII
(la persévérance - l'athanor et la pierre)

Nous n'avons cessé de l'évoquer ; c'est l'un des plus grands arcanes de l'oeuvre : savoir tenir son Mercure en forme d'eau minérale. Liparew : le Mercure doit donc s'attacher au Soufre, à la teinture, en manière de supplique pressante. C'est pourquoi les textes exhortent l'impétrant à prier avec insistance. D'autres textes insistent sur la graisse du vent mercuriel [liparwV : avec de la graisse, mais aussi : avec ténacité ou persévérance], notamment les Figures Hiéroglyphiques, le Donum Dei et l'Atalanta fugiens. Fulcanelli voit, dans la planche XII du Mystère :

« [...] une coupe longitudinale de l'Athanor et l'appreillage interne destiné à supporter l'oeuf philosophique ; de la main droite, le personnage tient une pierre » [Myst., p. 115]

Là encore, l'usure du temps ne laisse plus voir grand'chose du subtil mécanisme que décrit l'Adepte. Le lecteur verra, au livre de la Clef du Secret des Secrets de Nicolas de Valois une fort belle coupe de l'athanor. Fulcanelli s'en tient là ; il aurait pu ajouter que cette pierre contractait peut-être quelque rapport avec la pierre noire de Pessinonte et que le personnage de la planche XXIII n'est autre qu'une autre version de Cybèle; et que l'image de l'athanor et de son appareil n'est autre que le résumé, le Mixte lapidaire pourrait-on dire, des deux lions qui flanquent le char de la déesse d'Asie Mineure. Le buis, consacré à Cybèle et à Hadès, représente le symbole de la persévérance, cf. Aureum Seculum Redivivum de Mynsicht.

10)- l'inconstance


FIGURE XXIV
(l'inconstance - l'Entrée du Sanctuaire )


 

L'examen du septième médaillon de Notre-Dame de Paris donne à Fulcanelli l'occasion de nous dévoiler le sens précis de la réincrudation :

« [Le vieillard]...vient d'arracher le vélum qui en dérobait l'entrée [au Palais Fermé du Roy] aux regards profanes. C'est le premier pas accompli dans la pratique, la découverte de l'agent capable d'opérer la réduction du corps fixe, de le réincruder, selon l'expression reçue, en une forme analogue à celle de sa prime substance. »

Cette citation se rapporte à l'opération qui consiste à dissoudre les « métaux morts », c'est-à-dire les chaux métalliques des anciens chimistes dans un fondant approprié ; c'est l'agent ou artifice secret qu'évoque Fulcanelli quand il parle de conjoindre les extrémités du vaisseau de nature. Or, ce vaisseau, il nous est présenté à la figure XXIII, dans le médaillon central : c'est l'athanor philosophique. Mais le mystère - au sens propre du terme - reste entier, qui a déterminé Fulcanelli à poser une identité entre l'inconstance et ce vieillard. En voici la clef : l'inconstance, en grec, se dit abebaioV et a valeur d'une chose non fixe, mobile et par suite, inconstante. C'est donc le volatil qui est nommé ici et le procédé secret dont parle l'Adepte parisien va précisément être de transformer une chose non fixe en chose fixe. Mais cela doit s'entendre d'une matière qui est dans un état visqueux ou liquide. C'est donc bien de la « réduction du corps fixe » dont parle Fulcanelli et le vellum que l'on voit choir au pied gauche du vieillard est semblable à une tête : c'est donc d'un caput mortuum qu'il s'agit. Ce bas-relief est numéroté comme la planche XXIV du Mystère. On voit que Fulcanelli lui a donné un titre dont le rapport avec l'Entrée du Sanctuaire est rien moins que certain. L'un de ses commentaires pourra peut-être nous aider à mieux percevoir ce rapport qui se dérobe :

« En effet, le vieillard, que les textes identifient à Saturne, - lequel, dit-on, dévorait ses enfants, - était jadis peint en vert, tandis que l'intérieur du Palais offrait une coloration pourpre. » [Myst., p. 129]

Voilà qui est déjà plus clair. Mais alors, ce médaillon présente des traits congénères à celui de l'avarice [le régime de Saturne - planche XXII du Mystère] ; l'inconstance se manifeste ici comme la dissolution définitive - par sublimation - du dissolvant. Toutefois, la note de Fulcanelli nous permet d'en déduire que le Lion vert est bien le premier état du Mercure, c'est-à-dire le « vinaigre très aigre » d'Artephius. Et que la coloration pourpre résulte de ce que le Lion rouge [qui correspond alors au Compost] est poussée à la couleur purpurine au 4ème degré de feu. Mais en quoi est-il question « d'entrée dans le sanctuaire », c'est-à-dire de l'Entrée désormais ouverte au Palais fermé du Roi [Introïtus, Philalèthe] ? C'est que l'Artiste rusé a amalgamé l'agent de dissolution avec sa propre dissolution, c'est-à-dire la sublimation terminale. Il est clair, en effet, que l'Entrée fermée au Palais du Roi ne peut être ouverte que par la clef qui donne accès au dissolvant : c'est l'objet du 2ème oeuvre en entier. Ce dissolvant, dans son premier état, s'apparente à un char muni de deux taureaux ou de deux lions ; il nécessite un frein, un mors, permettant de tempérer son acrimonie. Celui-ci nous est procuré par les deux colombes de Diane qui, seules, peuvent tempérer l'ardeur du dragon écailleux. Ces colombes - les deux Soufres - le transforment en Mercure animé, c'est-à-dire dompté : dès lors, nous sommes dans le Palais du Roi. La sortie se trouve du côté où le Mercure trouve son exitus, c'est-à-dire dans sa chambre mortuaire, dans son gisant ; le lecteur trouvera dans les Gardes du Corps des explications à cet égard.

11)- la chasteté


FIGURE XXV
(la chasteté - la salamndre - Calcination)

Ce sont des substances dépurées que l'Artiste doit manipuler, qui ont été réduites par le feu, qui en a conservé la quintessence : d'où cette image de salamandre. C'est un sel fixe qui est évoqué par la chasteté [kaqarothV] : il peut s'agir de l'alkali fixe [l'un des constituants du Mercure], soit de la terre de l'alun [le Corps de la Pierre, appelé Arsenic par Geber et principe Sel depuis Paracelse]. Le sens de ce bas-relief est donc - pour une fois - d'une pure clarté. Il figure sur la planche VIII du Mystère. Voyons le commentaire que Fulcanelli nous a concocté pour la circonstance :

« Ce lézard fabuleux ne désigne pas autre chose que le sel central [...] que les Anciens ont nommé Semence métallique. » [Myst., p. 105]

Sel central, voilà qui ne pose guère de problème. Mais « semence métallique », Diable ! Fulcanelli prévient l'étudiant que'il s'agit là d'une expression spagyrique - il parle de la calcination et non de la semence métallique - et assure que les vieux auteurs n'ont eu en vue que leur agent occulte, désigné expressément comme le « feu secret » dont la forme géénrale appelle la comparaison avec une mer plutôt qu'avec un feu. C'est sur deux pages que l'Adepte s'étend sur cette notion de feu igné qu'il nomme « eau ardente » et que d'aucuns ont cru traduire par « eau-de-vie ». Il est certain que le Ciel philosophique de Frédéric Ulstade contient des descriptions approfondies des distillations par lesquelles on prépare l'eau-de-vie ; mais on ne trouvera point de note touchant au dissolvant qui n'en est pas moins une certaine eau-de-vie, à sa manière. Cette substance protéiforme a ceci d'étonnant qu'elle procure la mort avant de redonner la vie et les alchimistes ont symbolisé ces extrêmes sous les dehors du corbeau [Atalanta, XLIII] et du phénix [De ave phoenice]. Ces deux oiseaux occupent une part importante de la volière hermétique... Mais revenons à notre semence métallique. Quelle est l'idée qui occupe l'esprit de l'Adepte ? D'abord, observons en premier lieu que l'origine de cette semence est le dragon écailleux. Car l'Artiste n'en dispose point : il lui faut l'infuser d'une manière quelconque dans le Mercure, disposé en son état primitif. Et que cette semence soit d'abord pourrie [cf. Basile Valentin, Douze Clefs de Philosophie]. Nous avons, au début de notre quête, postulé que cette semence était représentée par la résine de l'or alchimique. Cette conjecture est-elle probable ? En quoi se rapproche-t-elle de la résine de l'or, c'est-à-dire, en un mot, du christophore ? Répondre à ces questions,  c'est, du même coup, toucher au plus haut mystère de l'oeuvre. Car la semence métallique est faite du grain d'or dont les multiplications ultérieures sont tributaires. Or, le principe de Raison est inconciliable avec cette idée « baroque » de multiplication assimilé au principe de la « multiplication des pains», l'un des Miracles qu'ont signalés les Evangiles. La seule hypothèse conciliable avec cette idée serait celle d'une enzyme dont on sait qu'elle peut déclencher une réaction chimique ad libitum tout en étant régénérée. Or, rien ne permet - hormis quelques expériences de Sainte Claire Deville faites sur l'esprit de sel - de fonder en hypothèse raisonnable une telle conjecture. Ajoutons que la majorité des traités d'alchimie font allusion - et ce assez directement - à cette multiplication. Incapable de pouvoir résoudre cette énigme, nous pouvons en revanche nous faire une idée de la façon dont cette semence sera capté par l'Aimant des Sages.
 

12)- la luxure


FIGURE XXVI
(la luxure - la Connaissance des poids)

La luxure prend ici le sens de démesure, ce qui est indiqué par la balance. Aselgeia : impudence, insolence et, plus généralement, de moeurs dissolues. Tel est le sens ésotérique dégagé par cette figure. Quant à la signification exotérique, elle est claire. Les alchimistes, bien avant Lavoisier, avaient eu la notion intuitive du poids des éléments qu'ils devaient faire entrer dans leur Mixte, c'est-à-dire leur Airain, état premier du Rebis. Non seulement, ils avaient eu cette prescience, mais encore ils avaient eu l'intuition que la combinaison de leurs éléments ne pouvait intervenir qu'en de certains termes ; par là ils faisaient le distinguo entre ce qu'ils appelaient le « poids de l'art et le poids de nature ». Cette image de la balance est omniprésente dans l'iconographie alchimique, à commencer par la figure de Thémis ou celle de l'archange Gabriel, vainqueur du dragon écailleux. Fulcanelli nomme ce médaillon la Connaissance des poids [planche XX]. On peut citer ce passage :

« L'auteur des Aphorismes Basiliens, ou Canons Hermétiques de l'Esprit et de l'Âme, écrit au Canon XVI : " Nous commençons notre oeuvre hermétique par la conjonction des trois principes préparés sous une certaine proportion, laquelle consiste au poids du corps, qui doit égaler l'esprit et l'âme presque de sa moitié. " » [Myst., p. 125]

Ces Aphorismes Basiliens sont une oeuvre rare [imprimés, nous dit en note E. Canseliet, à la suite des Oeuvres tant Médicinales que Chymiques, du R.P. de Castaigne, Paris, de la Nove, 1681]. Comme convenu, le poids de l'Âme est de beaucoup inférieur au poids du Corps.

13)- la concorde


FIGURE XXVII
(la concorde - les matériaux nécessaires à l'élaboration du dissolvant)

Pour Fulcanelli, voilà une figure qui résume la liste des matériaux du dissolvant. Nous savons que cette planche, tenue par la déesse, ne peut être que du bois dont était fait le vaisseau des argonautes : les fameux chênes parlants de l'oracle de Dodonne. Ce bas-relief fait l'objet de la planche XIV du Mystère, p. 80. C'est pour Fulcanelli l'occasion de citer la Clef du Cabinet Hermétique, d'un auteur anonyme :

« L'eau dont nous nous servons [...] est une eau qui renferme toutes les vertus du ciel et de la terre [...] » [Myst., p. 118]

Il s'agit, à l'évidence, de l'eau minérale et métallique qui constitue la fontaine de jouvence, bain des astres de la Fontaine du Trévisan, fontaine du Rosaire des Philosophes. Fulcanelli ajoute des réflexions qui ont trait davantage au Soufre dissous qu'au Mercure :

« La racine de nos corps est en l'air, disent les Sages, et leurs chefs en terre. » [idem]

14)- la discorde


FIGURE XXVIII
(la discorde - la Dissolution. Combat des deux Natures)

Et voici ce qui représente peut-être le sommet de l'interprétation ésotérique des bas-reliefs de Notre-Dame par l'alchimiste parisien tout de même qu'un chef d'oeuvre de l'art lapidaire des imagiers du Moyen Âge. Là encore, ce bas-relef a été présenté plusieurs fois ; il nous suffira donc de dire que nous tenons là les deux extrémités du vaisseau de nature, irréductibles ennemis qu'il suffira d'unir par le truchement de deux substances présentes, en puissance, dans le pot de terre que l'on voit entre les pieds du personnage de gauche et dans la pierre que l'on voit tomber entre les deux personnages. Comme l'écrit Fulcanelli - cf. Atalanta fugiens, XXXV - :

« Il n'est guère possible d'écrire avec plus de clarté ni de simplicité l'action de l'eau pontique sur la matière grave, et ce médaillon fait grand honneur au maître qui l'a conçu. » [Myst., p. 131]

La matière du pot, de l'argile, est de celle dont on extrait le Corps de la Pierre quoiqu'il se présente un autre minéral, dans la nature, d'où l'on peut l'extraire plus aisément. Et la pierre est de celle dont on extrait le sel qui formera notre eau minérale, comme l'affirme avec véhémence Alexandre Sethon :

« Notre matière paraît aux yeux de tout le monde, et elle n'est pas connue. Ô notre Ciel ! Ô notre Eau ! Ô notre Mercure ! Ô notre Sel nitre , qui êtes dans la mer du monde ! Ô notre Végétable ! Ô notre
Soufre fixe et volatil ! Ô tête morte ou fèces de notre mer ! Eau qui ne mouille point, sans laquelle
personne au monde ne peut vivre, et sans laquelle il ne naît et ne s'engendre rien en toute la Terre ! » [Nouvelle Lumière Chymique, Chapitre XI De la pratique et composition de la Pierre ou Teinture Physique, selon l'Art]

Et l'on ne saurait être plus clair, sauf à passer des bornes que Fulcanelli, tenu par le secret, n'a pas cru bon de transgresser. Ce bas-relief est disposé sur la planche XXV du Mystère.

15)- la force


FIGURE XXIX
(la force - le Corps fixe)

C'est le lion qui se trouve désigné. Emblème majeur de l'oeuvre, c'est à de multiples reprises que nous avons parlé du lion vert et du lion rouge.Voyez l'Atalanta fugiens et le zodiaque alchimique. Que l'on comprenne bien ici que l'épée et le casque sont les attributs de l'homme armé. La chanson profane L’Homme armé, dont on attribue la paternité à Busnois [précepteur du futur Charles le Téméraire, dernier duc de Bourgogne], compte parmi les plus célèbres de la fin du Moyen Âge, au point que plus de quarante messes s’en inspirèrent. Cet engouement provient-il de sa possible origine bourguignonne en liaison avec l’ordre de la Toison d’or, d’une réminiscence des Croisades, ou encore d’une évocation cachée de Longin, le soldat romain qui transperça le flanc du Christ ? Aucune de ces hypothèses n’apporte d’éclairage satisfaisant sur les destinées d’une pièce dont le texte même reste énigmatique : « L’homme armé doit on doubter - On a fait partout crier - Que chacun se viegne armer - d’un haubregon de fer. » La coïncidence est assez extraordinaire, de ce que tant la toison de l'or [notre christophore] que la couleur qui sourd de la poitrine du Christ soit de la même couleur : blanche. Sur la Force, voyez les Gardes du Corps. Le bas-relief occupe la planche XV du Mystère. Voici une citation que donne Fulcanelli sur ce lion :

« [...] C'est ce qui a engagé Basile Valentin à donner ce conseil : " Dissous et nourris le vray Lion du sang du Lion vert, car le sang fixe du Lion rouge est fait du sang volatil du vert, parquoy ils sont tous deux d'une mesme nature ". » [Myst., p. 121]

L'attention est attirée par l'évolution d'un processus où la même matière est manifestement amenée à un degré supérieur de dépuration ; nous sommes ici au régime de Vénus ou de Mars.

16)- la lâcheté


FIGURE XXX
(la lâcheté)

Ce bas-relief n'a pas été interprété par Fulcanelli et c'est bien dommage. Comment en effet expliquer qu'un simple lapin [lepus] mette en fuite un chevalier [on voit l'épée tomber derrière lui] ? Et que signifie cet oiseau qui ressemble à un rapace, perché sur l'arbre ? Il n'aura pas échappé au cabaliste que le mot lepus puisse être rapproché de lupus, c'est-à-dire le loup ; voilà déjà qui se rapproche de l'Art sacré. En quoi ? Nous laisserons au lecteur le soin de chercher lui-même le rapport dans la section des Principes, à propos du commentaire d'E. Canseliet sur le jardin de la villa Palombara à Rome [Deux Logis Alchimiques, Pauvert, 1978]. C'est d'une fuite qu'il est question ici, c'est-à-dire d'une dissolution ou d'une volatilisation ; or, un mot suffit à lier ces deux opérations : sublimation. Notez que Fulcanelli reviendra sur cette « gueule de loup » lors de l'examen de la cheminée alchimique du château de Fontenay-Le-Comte.

17)- l'espérance
 
 

 


FIGURE XXXI
(l'espérance - l'Evolution - Couleurs et Régimes du Grand oeuvre)

C'est une allusion à l'un des deux aspects que prend la planète Vénus, lors du crépuscule vespéral, où les Anciens la nommaient Hesperus. Elle signale à l'Artiste que l'oeuvre progresse bien et que la Grande Coction est déjà bien entamée. ElpiV : l'Espérance [Spes]. On sait que ce fut le seul don des dieux qui ne s'échappa point de la boîte de Pandore, le seul qui fut fixe. Aussi les alchimistes lui ont-ils consacrés une maxime : « Spes mea in agno » qui fait partie du titre de la Philosophie Naturelle Restituée de Jean d'Espagnet [il s'agit de l'anagramme de son nom] dont on ne dira jamais assez toute l'importance, tant au plan de la science hermétique qu'au plan de l'histoire, puisque Philalèthe lui doit beaucoup [cf. Oeuvre Secret d'Hermès]. On voit ainsi que l'Espérance est en fait un clin d'oeil à l'agneau ou, si l'on préfère, au Bélier. Il s'agit de la planche X du Mystère. Avec ces remarques du maître :

« L'Evolution succède et montre l'oriflamme aux trois pennons, triplicité des Couleurs de l'Oeuvre, que l'on retrouve décrites dans tous les ouvrages classiques. » [Myst., p. 107]

Fulcanelli s'étend ensuite sur 7 pages dans la description et l'interprétation des couleurs. Il suffira de donner cet extrait, qui montre comment relier l'hermétisme et l'histoire la plus reculée du genre humain :

« En Chaldée, les Ziguras, qui furent ordinairement des tours à trois étages, et à la catégorie desquelles appartenait la fameuse Tour de Babel, sont revêtues de trois couleurs : noir, blanche et rouge-pourpre. » [Myst., p. 111]

Les couleurs de l'oeuvre sont l'une des énigmes les plus épuisantes dans la quête que l'impétrant aura à mener dans son parcours hermétique. Mais enfin, il est possible d'y voir des correspondances relativement simples. Ainsi peut-on poser que le noir est la couleur de la TERRE, c'est-à-dire de la cendre, notamment celle des métaux et celle de l'alkali fixe. C'est pourquoi la première couleur qui se révèle à l'Artiste au début de l'oeuvre est celle de la putréfaction [mais bien sûr il ne s'agit pas du début, c'est-à-dire de la reconnaissance des matières premières, mais bien du début de la Grande Coction, au 3ème oeuvre]. Vient ensuite le blanc : c'est par tradition la couleur de ce qui est pur ; il s'agit donc d'une couleur qui apparaît - en esprit - après qu'un certain travail aura été mené à bien avec nos cendres minérales et métalliques. Cette couleur blanche est celle de l'AIR et indique que les subtances sont dans un état sublimé [ce qui ne veut pas dire aérien].  Enfin, le rouge-rubis : c'est la couleur de la consécration, de la royauté, celle par laquelle l'Artiste parvient à l'Adeptat.

18)- le désespoir
 
 

 


FIGURE XXXII
(le désespoir)


 

La logique - qui n'est nullement incompatible avec la cabale hermétique bien tempérée - voudrait que l'on voit dans ce bas-relief le premier état de la planète Vénus, au crépuscule du matin : Lucifer. Du coup, nous voici au début de l'oeuvre [nous voulons parler bien sûr du 3ème oeuvre, c'est-à-dire de la Grande Coction] et en une époque où la matière prend cet aspect visqueux particulier qui nous a valu les Ripley's Scrowles ou le FOU du tarot. Aponoia : absence de raison, emportement...Ce bas-relief est évidemment congénère de celui consacré à la FOLIE. Voilà une indication sur le premier état du Mercure. Observez le double caractère de ce premier Mercure : il est à la fois incontrôlé et indolent [aponoV]. C'est-à-dire qu'il est mou, au lieu que le Mercure animé doit être en forme d'eau minérale, et au vrai, fluide comme de l'eau à l'instar d'un bon fondant. C'est-à-dire qu'il est amorphe, le but de la Grande coction étant d'en faire apparaître [stilbw] le BasileuV étoilé et cristallin. Cette figure n'a pas été interprétée par Fulcanelli.

19)- l'humilité
 
 

 


FIGURE XXXIII
(l'humilité - le Corbeau - Putréfaction)

La Patience est l'échelle des Philosophes, et l’Humilité est la porte de leur Jardin. [ paroles rapportées dans les Douze Clefs de Basile Valentin ; c'est l'une des phrases les plus empruntes de poésie de la littérature alchimique ] Le bas-relief montre un corbeau. Sait-on que  l'améthyste - que les Evêques portent - est le symbole de l'humilité parce qu'elle est de la couleur de la violette ? Revoyez ce que nous avons dit plus haut au sujet du « fragment d'attribut ». Complétez par tous les passages où nous parlons de la violette, de la rouille et de la grenade : la transition du corbeau au coq n'aura plus de secret pour vous et de plus, vous comprendrez en quoi la noix de galle, associée au chêne, se rapproche de cet objet curieux qu'examinait Fulcanelli en nous disant que, de forme lenticulaire, il est blanc sur une face, noire sur l'autre et violet dans sa cassure. Voilà nommé le Soufre rouge ou teinture de la Pierre. Mais il s'agit là d'un raccourci trop rapide. Revenons à ce que nous dit Fulcanelli sur ce corbeau, qui orne la planche VI du Mystère :

« Selon Le Breton, " il y a quatre putréfactions dans l'Oeuvre philosophique. La première, dans la première séparation ; la seconde, dans la première conjonction ; la troisième, dans la seconde conjonction, qui se fait de l'eau peusante avec son sel ; la quatrième, enfin, dans la fixation du soulphre. Dans chacune de ces putréfactions, la noirceur arrive. " » [Myst., p. 101]

Nous avons déjà plusieurs fois cité Le Breton, qui semble un auteur important. On voit que la première putréfaction correspond à la préparation de l'Arcanum duplicatum : la terre noire tombe au fond de la cornue cependant que l'aqua sicca se sublime dans le récipient ; elle se situe donc au 2ème oeuvre [où la voie humide est exclusive]. La seconde survient au tout début du 3ème oeuvre et représente la noirceur « classique », celle que décrivent tous les traités. La troisième pose davantage de problème : « qui se fait de l'eau pesante avec son sel ». L'image qui nous vient immédiatement à l'esprit, c'est Latone accouchant à Délos d'Artémis ; d'une certaine façon il s'agit bien d'une séparation qui procède d'une parturition. Encore est-elle incomplète ; elle sera achevée par la quatrième putréfaction, qui consiste en la fixation du Soufre au Sel ; Latone accouche d'Apollon et Artémis lui sert de parèdre. On devine que la « noirceur » est purement une image éidétique. De combien de souffleurs a-t-elle donc abusé ? A tout cela, nous ajouterons que l'arcane représenté dans l'écu que nous présente l'Humilité garde une partie de son mystère ; en effet, nous avons vu que Villard de Hennecourt [XIIIe siècle] y voyait une colombe et Fulcanelli un corbeau...Comment arriver à concilier les eux visions, l'une « positive » émanant d'un maître imagier, l'autre « spéculative » émanant d'un maître hermétiste ? Voici ce qu'on peut en dire : le voyage des Argonautes est très lié, on le sait, aux mystères orphiques et à l'alchimie ; ce n'est certes pas une légende alchimique, mais les hermétistes, Dom Pernety y a beaucoup travaillé dans ses Fables Egyptiennes et Grecques, ont su y déceler des intentions en direction de l'Art sacré. Dans cette légende, on sait qu'à un moment Eurystée, au passage des roches cyanées ou Symplegades, va déclencher l'ouverrture du barrage formé par ces roches, grâce au lacher de deux colombes ; notez que cette scène intervient à la sortie du Pont-Euxin [la Mer Noire]. le décors est posé : le Pont-Euxin n'est autre que le symbole de la dissolution des matières et le lacher de colombes, la sortie de cette phase. Si l'on en revient à l'alchimie, on sait que l'hiéroglyphe du corbeau définit la phase de putréfaction, la noirceur ; cette « noirceur » est le fait de l'action du dissolvant des Sages ? Mais sur quoi ? Il ne saurait s'agir d'une « auto-dissolution » qui n'aurait aucun sens...Philalèthe, exceptionnellement, va venir à notre secours : il nous indique en effet [Introïtus, VI] que deux colombes que l'on a trouvées dans la fôret de la vierge Diane suffisent à calmer l'acrimonie et la ponticité du disolvant : et il ne peut faire de doute que ces deux colombes ne sont autres que les deux Soufres : Soufre rouge ou teinture de la Pierre ; Soufre blanc, c'est-à-dire son Corps.

20)- l'orgueil


FIGURE XXXIV
(l'orgueil - la Cohobation)


 

Ce bas-relief est célèbre pour ceux qui s'intéressent à l'alchimie car Fulcanelli le décrit comme représentant l'un des plus grands mystères de l'oeuvre : la cohobation. C'est peut-être Tripied, dans son Vitriol Philosophique, qui s'est le plus approché de la solution du problème ; mais alors il faut voir cette opération au 1er oeuvre, c'est-à-dire lors de la phase de préparation des matières, chapitre sur lequel les alchimistes sont presque tous muets.

« un cavalier désarçonné se cramponnant à la crinière d'un cheval fougueux. Cette allégorie a trait à l'extraction des parties fixes, centrales et pures, par les volatiles ou éthérées dans la dissolution philosophique. »

Voilà ce que nous en dit Fulcanelli, p. 123 du Mystère des Cathédrales. Il peut s'agir aussi d'opérations à type de convection...Si nous devions rapprocher ce bas-relief d'une légende mythologique, c'est au char de Phaéton que nous penserions immédiatement. Voyez cette fable dans notre humide radical métallique. Formant la planche XVIII du Mystère, l'arcane ne se laisse pas facilement domestiquer, à l'instar du cheval fougueux qui manque de faire choir son cavalier. Nous devons renoncer à l'image d'une cohobation classique en cornue pour ne plus penser qu'au principe de cette opération : la concentration d'une substance. C'est ce qu'enseigne le maître :

« L'absorption du fixe par le volatil s'effectue lentement et avec peine. Pour y réussir, il faut employer beaucoup de patience et de persévérance et réitérer souvent l'affusion de l'eau sur la terre, de l'esprit sur le corps. » [Myst., p. 123]

Mesure-t-on le degré de cabale de ces quelques lignes ? La patience - si l'on s'en tient à la terminologie de Fulcanelli - correspond à la figure XXII : c'est le Soufre philosophique [ou planche XVII du Mystère]. Quant à la persévérance, selon le même principe, c'est la figure XXIII ou l'Athanor et la Pierre [planche XII du Mystère]. Et nous avons vu que cette dernière figure était rigoureusement superposable au char de Cybèle, qui tient sa pierre noire et est flanquée d'Atalante et d'Hippoménès [cf. Atalanta fugiens]. Nous tenons là les éléments du vase de nature et la cohobation correspond à la période d'instabilité, dont nous avons déjà parlé, où la cristalisation de la matière commence d'opérer. Quant à la peine, elle peut, par cabale phonétique, renvoyer à la teinture de la Pierre, c'est-à-dire au Soufre rouge ; en effet, la peine se dit en latin poena [peine, tourment, souffrance] mais la peine a une autre acception : distiller [sudo] ; elle renvoie ausi à aerugo [cupidité qui ronge le coeur : rouille de cuivre et par aerumna à peines, misère, épreuve].
 

21)- l'obéissance


FIGURE XXXV
(l'obéissance- Conjonction du Soufre et du Mercure)

Fulcanelli évoque - à la planche XIII du Mystère -  le griffon, incarnation, si l'on peut dire, des Harpyes : la légende leur donna l'apparence de monstres épouvantables. Leur corps de vautour, leur bec et leurs ongles crochus, l'odeur infecte qui les accompagnent sont autant de représentations de monstres impossibles à rassasier.

« Le monstre mythologique dont la tête et la poitrine sont celles de l'aigle, et qui emprunte au lion le reste du corps, initie l'investigateur aux qualités contraires qu'il faut nécessairement assembler dans la matière philosophale. »

Sur l'art et la manière de réaliser cette étrange parturition, voyez notre commentaire de l'Atalanta fugiens. Quoi qu'il en soit, le griffon, par l'intermédiaire de ces pattes arrières contracte également des rapports avec le dragon. Notez aussi que tant le lion, que le coq ou le héron, ainsi que le griffon expriment la vigilance. Quant à la griffe, onux, elle peut renvoyer à l'onyx, pierre précieuse ou à un coquillage rosé [mérelle et soufre, par cabale]. Les Grecs en faisaient le gardien de trésors [toute la mythologie a employé ce symbolisme ; Wagner, dans Siegfried, emploie un dragon, Fafner, qui garde l'or des Nibelungen et l'anneau magique d'Alberich] et la monture d'Apollon. Autrement dit, nous devons voir dans ce griffon l'équivalent strict de Latone. Aussi bien sommes-nous d'accord avec Fulcanelli lorsqu'il écrit :

« Nous trouvons en cette image l'hiéroglyphe de la première conjonction, laquelle ne s'opère que peu à peu, au fur et à mesure de ce labeur pénible et fastidieux que les Philosophes ont appelé leurs aigles. » [Myst., p. 115]

On s'est beaucoup penché sur cette énigme des Aigles de Philalèthe, en particulier dans la section Matière. Cette première conjonction, en accord avec les vues de Le Breton, correspond donc à la noirceur traditionnelle. On comprend en quoi l'Obéissance est de concert avec ce griffon auquel d'ailleurs Fulcanelli aurait pu donner son nom, plus commun, d'Airain.

22)- la désobéissance

Ce bas-relief n'a pas été examiné par Fulcanelli mais on peut en deviner la raison quand on voit les ravages que sept siècles de rafale ont imposé sur cette partie du grand portail de Notre-Dame.


FIGURE XXXVI
(la désobéissance)

Doit-on voir dans le personnage de droite le départ de l'enfant prodigue ? Il faudrait donc voir le père à gauche. Le sens hermétique du médaillon serait laors superposable aux gravures du De Lapide Philosophorum de Lambsprinck : on peut voir dans l'une, le Fils s'éloigner du Père, accompagné au sommet d'une montagne par le conducteur ; et dans l'autre, le Fils redescendu dans le Palais du Roi, son Père et près à être dévoré par lui. C'est une parabole sur le Mercure, la sublimation du Soufre et la réincrudation.
 

23)- la douceur


FIGURE XXXVII
(la douceur- l'union du Fixe et du Volatil)

Aussi bizarre que cela puisse paraître, Fulcanelli voit un « coq - renard » dans le médaillon de la douceur [planche XVI du Mystère]. C'est une chimère dans les deux sens du terme. Voici comment l'Adepte voit cette figure :

« C'est ce superbe manteau avec le Sel des Astres, dit [Basile], qui suit ce soulfre céleste, gardé soigneusement de peur qu'il ne se gaste, et les faict voller comme un oyseau, tant qu'il sera besoin, et le coq mangera le renard, et se noyera et estouffera dans l'eau, puis, reprenant vie par le feu, sera (afin de jouer chacu leur tour) dévoré par le renard. » [Myst., p. 122]

Fulcanelli donne une citation se rapportant à la Clef III des Douze clefs de Basile. L'Adepte attire l'attention sur la devise favorite des alchimistes « Solve et Coagula » qui exprime entièrement le moyen et le but de l'oeuvre. C'est cette extraction du Soufre rouge que l'Adepte compare à ce monstre hybride tenant à la fois du coq et du renard. Notez que l'allégorie sera mieux conçue et analysée lorsque Fulcanelli examinera le portail central de la cathédrale d'Amiens [Mystère, planche XXV].

24)- la dureté


FIGURE XXXVIII
(la dureté - la Reine terrasse le Mercure, Servus Fugitivus)

La dureté se situe à la planche XXI de l'ouvrage de Fulcanelli. C'est l'une des figures les plus énigmatiques des Vices et des Vertus. Le commentaire qu'en donne l'Adepte est particulièrement subtil : il évoque la voie du « mercure commun » pris comme « vif-argent vulgaire » :

« Une reine, assise sur un trône, renverse d'un coup de pied le valet qui, une coupe à la main, vient lui offrir ses services. » [Myst., p. 126-127]

On ne pourra comprendre l'allégorie si l'on n'a pas lu la Clavicule de Ramon Lull. Car Fulcanelli joue ici sur une cabale spirituelle entre les expressions mercure vulgaire et mercure commun, autrement dit il veut parler ici du premier Mercure, encore appelé Mercure des philosophes, différent du Mercure philosophique. Dès lors, tout ce qu'il dit du « vif-argent vulgaire » doit être pris dans un sens charitable. C'est à cette occasion qu'il cite un opuscule très rare de Sabine Stuart de Chevalier : Discours philosophique sur les Trois Principes, ou la clef du Sanctuaire philosophique [Paris, Quillau, 1781]. Et qu'il complète l'extrait qu'il en donne par ce commentaire :

« Le servus fugitivus dont nous avons besoin est une eau minérale et métallique, solide, cassante, ayant l'aspect d'une pierre et de liquéfaction très aisée. C'est cette eau coagulée sous forme de masse pierreuse qui est l'Alkaest et le Disssolvant universel [...] » [Myst., p. 127]

Le lecteur trouvera dans les sections du Mercure, de l'Arcanum duplicatum, dans l'humide radical métallique et dans la réincrudation de quoi faire le tour du problème.

Nous avons terminé l'étude des médaillons les plus importants de Notre-Dame de Paris, en revisitant ce livre, tant extraordinaire, plein de poésie et d'érudition, de l'un des plus célèbres alchimistes du XXe siècle : Fulcanelli. D'autres médaillons, appartenant à d'autres demeures philosophales, attendent d'être dépoussiérés et revisités à leur tour. Cette section étant déjà démesurée, nous réserverons donc peut-être un jour, une section spéciale qui s'attachera à l'étude des derniers tableaux lapidaires de Notre-Dame de Paris, qui est loin d'avoir livré tous ses secrets et à l'étude de ceux de la cathédrale d'Amiens, suivant en cela le plan du Mystère des Cathédrales.
 

L'ART RELIGIEUX DU XIIIe SIÈCLE EN FRANCE. ETUDE SUR L'ICONOGRAPHIE DU MOYEN AGE ET SUR SES SOURCES D'INSPIRATION, par Emile Mâle. Paris, Armand Colin, in-4°, 468 p. et fig.

Il n'est jamais trop tard pour rendre compte d'un bon livre, surtout quand une seconde édition en consacre toute la valeur. M. Mâle, qui avait fait paraître la première édition de son excellent ouvrage en 1808, s'est attaché à le perfectionner en y ajoutant de nouvelles remarques iconographiques, mais il est regrettable que son éditeur ne se
soit pas imposé les sacrifices nécessaires pour l'illustration qu'il était facile de puiser dans la précieuse collection de M. Martin-Sabon. Comme le sous-titre l'indique beaucoup mieux que le titre, le livre de M. Mâle est une étude d'ensemble sur
l'iconographie des portails et des vitraux de nos grandes cathédrales gothiques. Il a donc eu raison de débuter par l'exposé des caractères de l'iconographie du moyen âge et de la méthode à suivre pour l'interpréter. On était trop porté à chercher dans la Légende dorée l'unique explication d'une foule de scènes sculptées ou peintes parles artistes. M. Mâle, qui a mis en relief la valeur de la grande encyclopédie de Vincent de Beauvais, connue sous le nom de Speculum majus, et qui lui a emprunté les grandes divisions de son ouvrage, restitue à Martianus Capella, grammairien du Ve siècle, et à Honorius, évêque d'Autun au XIIe siècle, auteur du Speculum ecclesiae et de l'Elucidarium, la place qui leur revient dans les sources de l'inspiration iconographique. Les premiers chapitres sont consacrés à l'étude des animaux symboliques, des bestiaires, des calendriers, des sept arts libéraux, des vertus et des vices. L'auteur, qui s'élève avec raison contre l'exagération du symbolisme, étudie parallèlement les sources et les représentations figurées en comparant les unes aux autres les sculptures des grandes églises gothiques. Si les artistes du moyen âge avaient une grande liberté d'interprétation, leurs œuvres dérivent cependant de la même inspiration. D'ailleurs l'influence du clergé sur le programme imposé aux sculpteurs et aux peintres verriers les obligeait à rester fidèles aux traditions conservées dans les ateliers. L'interprétation symbolique de la Bible et ses origines a fourni à M. Mâle l'occasion d'expliquer beaucoup de scènes peintes sur les vitraux de Bourges, de Chartres et du Mans et de donner la clef des scènes sculptées dans les voussures du portail nord de la façade de Notre-Dame de Laon où le sculpteur s'est inspiré d'un sermon d'Honorius. Les figures et les attributs des patriarches, des prophètes et des rois de Juda que l'auteur identifie avec les personnages des galeries de Notre-Dame de Paris, d'Amiens, de Reims et


FIGURE XXXIX
(portail de Notre-Dame, Bourges - détail ; cliché Alain Mauranne)

de Chartres sont étudiés avec le plus grand soin ainsi que les scènes de la vie du Christ et les paraboles. Abordant ensuite les traditions légendaires sur l'ancien et le nouveau Testament et sur la Vierge qui ont leur source dans les Evangiles apocryphes, l'auteur commente l'histoire de Théophile et montre l'influence exercée dans les ateliers par la Vitu Christi de Ludovic le Chartreux et le De gloria martyrum de Grégoire de Tours, ce qui lui permet d'expliquer les scènes de plusieurs vitraux de la cathédrale du Mans Les caractéristiques des saillis et la Légende dorée, l'influence des pèlerinages sur la popularité des saints, l'influence des donateurs et des corporations méritaient un chapitre spécial où M. Mâle a fait d'ingénieuses observations sur l'interprétation artistique de l'oeuvre célèbre de Jacques de Voragine. Les artistes du moyen âge avaient un médiocre souci des grands hommes de l'antiquité, mais ils ont représenté parfois la belle Campaspe à cheval sur Aristote et Virgile dans la corbeille. M. Mâle prouve que la seule sibylle reproduite au XIIIe siècle fut la sibylle Erythrée, parce que saint Augustin lui attribuait les fameux vers acrostiches sur le jugement dernier. Il montre ensuite les erreurs commises par Montfaucon et d'autres archéologues qui ont cru reconnaître des rois de France dans des statues qui représentent en réalité des personnages bibliques ete siècle, conservé à la Bibliothèque nationale, sur l'inspiration des artistes du moyen âge, qui ont copié la bote à sept têtes, la femme nimbée d'étoiles qui remet son enfant à un ange, l'apparition divine qui porte une épée dans sa bouche. Enfin, dans une conclusion dont la forme littéraire est un véritable modèle, il a montré la physionomie de nos grandes cathédrales en prouvant que les artistes étaient les interprètes dociles du clergé qui réglait l'ordonnance des sujets. Cette théorie est absolument conforme à la vérité, comme notre confrère M. Mortel l'a prouvé, avec documents à l'appui, dans un article du Bulletin Monumental de 1902. De même, M. Mâle rectifie encore une fois la théorie de Viollet-le-Duc sur l'esprit de révolte des artistes laïques du XIIIe siècle contre l'art théocratique de l'époque romane, et il ajoute de nouveaux arguments à la savante réfutation de notre confrère M. Anthyme Saint-Paul. Il définit la cathédrale une oeuvre de foi et d'amour, et il découvre dans Notre-Dame de Chartres la pensée même du moyen âge devenue visible. On ne saurait mieux dire. Écrit dans un style élégant et précis, l'ouvrage de M. Mâle sera le véritable vade-mecum des archéologues qui veulent étudier l'iconographie du XIIIe siècle, en comprendre les sujets et en retrouver les sources dans les monuments écrits do la littérature, dans les livres saints, dans les légendaires, mais la grande valeur du texte forme un contraste trop frappant avec la rareté des illustrations qui auraient dû être plus nombreuses et plus soignées. Il est impossible d'expliquer l'iconographie du moyen âge avec 127 figures, mais chacun sait que les éditeurs n'ont pas sur ce point les mômes idées que les archéologues.
 
 

E. LEFEVRE-PONTALlS.


 
 

L'ART RELIGIEUX DU XIIe SIECLE EN FRANCE, ETUDE SUR LES ORIGINES DE L'ICONOGRAPHIE DU MOYEN AGE, par Emile Mâle.  Paris, A Colin, 1922, in 4°, IV-459 p et 253 fig.

Quand on cherche a se rendre compte des difficultés que dut aborder M Mâle pour résoudre les nombreux problèmes qui se présentent dans son livre, on a l'impression que ses deux premiers ouvrages sur le XIIIe siècle et sur la fin du moyen âge étaient tâche facile à côté de celui-là. C'est qu'ici M. Mâle a dû rechercher les sources lointaines auxquelles ont puisé nos artistes romans qui voulaient décorer leurs églises de scènes religieuses Avec ce don de la clarté qu il possède au plus haut point, il a mis en bonne lumière celte question des origines de notre art roman. Selon lui, l'antiquité classique, l'art gallo romain, l'art des catacombes de la Rome chrétienne, n'ont eu qu'une action très restreinte sur l'art chrétien de notre pays au XIIe siècle et il confirme d'une manière définitive l'opinion des archéologues de notre temps suivant laquelle c'est à l'Orient chrétien que les artistes romans allèrent demander presque tous leurs modèles Mais dans l'art qu'on appelle oriental d'un terme trop général, il distingue, avec beaucoup de finesse, l'art chrétien des villes grecques d'Orient désigne souvent par un abus de langage sous le nom d'art hellénistique et l'art chrétien syrien. Ainsi l'on trouve en même temps l'empreinte, d'une part des églises d'Alexandrie, d'Antioche et d'Ephèse, d'autre part celle de l'art des églises de Jérusalem et des églises de Syrie, de Palestine et de Mésopotamie auquel M. Mâle rattache les œuvres des monastères coptes d'Egypte et celles des églises de Cappadoce. C'est donc d'un art chrétien très ancien des IVe, Ve et VIe siècles que nos artistes firent des emprunts il en résulte que la place considérable que l'on faisait jusqu'ici à l'art byzantin, à l'art de Constantinople des IXe, Xe et XIe siècles, était beaucoup trop importante. Certes, nos artistes puisèrent à cette source, mais moins fréquemment qu'on ne l'a cru. Avant l'éclosion de l'art byzantin, la Gaule mérovingienne et carolingienne avait déjà reçu de l'Orient des manuscrits
enluminés et c'est là que les artistes avaient cherché des inspirations, leurs successeurs jusqu'au XIIe siècle vécurent de ce vieux fonds. Nous ne pourrons analyser tous les chapitres de l'ouvrage de M. Mâle dans lequel on retrouve cette langue harmonieuse, sobre et précise, où l'on devine une note d'émotion mêlée parfois d'enthousiasme qui rend si captivante la lecture de ses livres. Ceux qui suivent avec intérêt tout ce qu'il publie connaissaient déjà certaines des idées émises dans ce volume par plusieurs articles parus ces dernières années dans la Revue de Paris, la Revue de l'art ancien et moderne et la Gazette des Beaux-Arts. L'auteur, après avoir fait connaître tout ce que l'art médiéval de nos pays devait à l'art chrétien d'Orient, étudie quelle part d'originalité nos artistes romans ont pu apporter dans leurs compositions, quelles inspirations leur sont venues, quels sentiments les ont guidés pour leur faire créer des
œuvres nouvelles dont tantôt la puissance et la gravité, tantôt la délicatesse et la grâce provoquent encore notre étonnement et notre admiration. Il nous montre successivement comment l'iconographie s'est enrichie par la liturgie et par les drames liturgiques, par les textes théologiques, par l'influence d'hommes tels que Suger qui
joignant l'érudition au goût des arts fit, pour orner magnifiquement sa basilique de Saint-Denis, venir de tous les pays des artistes réputés, décida lui-même quelles scènes allégoriques seraient représentées et composa les distiques destinés à expliquer ces scènes. Ainsi c'est après Suger, après l'exécution des œuvres merveilleuses de Saint-Denis, qu'un symbolisme savant se répandit dans l'iconographie, symbolisme dont les grands ateliers du nord de la Loire tels que Chartres et Le Mans firent leur profit. Dans la suite, ces ateliers exercèrent sur d'autres régions, notamment sur le cloître se trouvent de nombreux chapiteaux et certains de ses piliers sont décorés de grands panneaux au nombre de dix dont chacun est orné d'un personnage en bas relief. Une chronique de la fin du XIVe siècle nous dit que le magnifique portail dont le tympan contient les figures du Christ en majesté et des vingt quatre vieillards de l'Apocalypse
fut érigé par le même abbé qui mourut en 1115. Ce tympan que l'on voulait jusqu'ici dater d'une époque plus avancée du XIIe siècle est le plus ancien monument de sculpture monumentale que nous possédions. Le portail de Beaulieu (Corrèze) a de grands traits de ressemblance avec celui de Moissac dont il fut inspiré sans aucun doute. Suger raconte lui-même qu'il fit venir de très loin pour la décoration de sa basilique des artistes nombreux. Vöge avait émis l'opinion que parmi ces artistes se trouvaient des sculpteurs du Languedoc. Une découverte de M. Mâle vient fortifier cette hypothèse. Le tympan de Saint-Denis, moins restauré qu'on ne l'a cru, est orné d'une scène du Jugement dernier qui présente une ressemblance frappante avec le Jugement dernier du tympan de Beaulieu. Ainsi trois phases se précisent dans l'évolution de la statuaire pendant la première moitié du XIIe siècle. Tmidi de la France, leur influence dont la trace persistera pendant tout le XIIIe siècle. Le culte des saints contribua aussi à l'enrichissement de l'iconographie dont on constate que la variété s'accroît davantage à mesure qu'on avance dans le XIIe siècle : chaque province ayant ses dévotions particulières, les artistes représentaient plus volontiers dans telle région les scènes de la vie des saints qui y étaient plus spécialement vénérés. Les pèlerinages, les grandes routes de Rome, de Compostelle et de Terre-Sainte amenèrent de nombreux échanges d'influences
artistiques entre des régions très éloignées, tant en ce qui concerne l'architecture que les arts mineurs. Enfin les Ordres monastiques, Cluny surtout, eurent une part considérable dans le développement et l'expansion des arts. Nous avons dit rapidement comment M. Mâle avait résolu le problème des origines de l'iconographie a l'époque romane et comment il avait montré l'importance de l'apport personnel de nos artistes dans l'enrichissement de cette iconographie. M. Mâle a encore abordé deux questions qui sont intimement liées ensemble. L'une d'elles consiste à rechercher dans quelle province de notre pays s'élabora la renaissance de la sculpture romane et dans
quelles régions dans la suite elle se développa progressivement. L'autre question a pour objet d'établir comment les sculpteurs de la fin du XIe siècle retrouvèrent un art disparu depuis plus de quatre siècles, dont la technique avait été complètement oubliée dans nos pays et quels furent les modèles dont ils s'inspirèrent. Pour M. Mâle la réponse au premier probleme est la suivante : c'est à Toulouse et à Moissac qu'est réapparu l'art de la sculpture dans la pierre. Une inscription nous apprend que le cloître de Moissac fut construit en l'an 1100, du temps de l'abbé Anquetil ; dans ce Toulouse et Moissac avant 1115, puis Beaulieu, puis Saint-Denis vers 1135. Suivant M. Mâle, l'oeuvre de Saint-Denis eut un retentissement considérable. Suger venait de créer cette merveille que fut le portail gothique avec son tympan décoré d'une grande scène bien ordonnée, ses voussures
chargées de personnages faisant cortège à cette scène, ses piédroits et ses colonnes où s'adossaient des statues, qui semblaient accueillir le visiteur prêt a pénétrer dans l'église. Le type était fixé définitivement et pendant longtemps on ne s'éloigna guère de ce modèle. Les artistes d'Ile de rrance l'imitèrent a l'envi puis ceux de régions plus éloignées Le Comte de Lasteyrie dans un brillant exposé sur l'évolution de la sculpture romane avait à grands traits dessiné la courbe de cette évolution qui, partant du sud-ouest, montait vers l'Ile-de-Françe et redescendait vers la Provence. M. Mâle n'a pas modifié ce tracé; il en a au contraire confirmé l'exactitude en donnant des précisions nouvelles, en montrant les principales étapes suivies par les artistes
languedociens, en exposant comment un nouveau centre d'influence s'était formé ensuite, dans le nord, grâce au merveilleux monument élevé par Suger. En suivant l'exposé de M. Mâle, ses démonstrations qui paraissent si satisfaisantes pour l'esprit, on a l'impression que tout s'éclaire, que tout se simplifie et que les déductions s'enchaînent à merveille. Mais à la réflexion on se demande si les arguments présentés sont aussi probants que le pense l'auteur, s'il n'apporte pas quelquefois d'une manière trop absolue des affirmations dans des questions où les témoignages sont si rares, où tant de monuments font défaut qui seraient indispensables pour emporter la conviction. Toutefois il nous paraît que la thèse si séduisante de M. Mâle doit être retenue dans ses grandes lignes. Nous ne ferons que deux observations qui n'ont d'ailleurs nullement pour but d'infirmer l'ensemble de sa théorie. Tout d'abord nous ne croyons pas que le portail de Moissac appartienne à la date que M. Mâle lui assigne. Dans un mémoire écrit
avant la publication du livre de M. Mâle et qui doit paraître dans le Bulletin archéologique nous exposions les raisons qui nous faisaient considérer que les grands bas-reliefs du cloître et sans doute une partie de ses chapiteaux dataient de l'abbatiat d'Anquetil (1085-1115). L'inscription gravée en 1100 sur un des piliers atteste qu'on travaillait alors dans le cloître. Une preuve aussi formelle n'existe pas pour le portail dont les sculptures sont d'ailleurs d'un art infiniment plus avancé que les bas-reliefs du cloître. Le seul témoignage que nous possédions est celui d'Aimery de Peyrac, abbé de Moissac de 1377 à 1406, qui rédigea la chronique de l'abbaye. Les anciennes oeuvres


FIGURE XL
(portail de Moissac, XIe siècle)

d'art conservées à Moissac et dans ses prieurés intéressaient vivement l'abbé Aimery
qui en parle comme en parlerait un archéologue de nos jours mais avec moins de prudence et sans aucun discernement. Il s'improvise successivement critique d'art, épigraphiste et philologue, et il se montre aussi ignorant dans l'une ou l'autre de ces matières. Ses observations lui font attribuer à telle époque tel monument en s'appuyant sur les comparaisons tout à fait sans valeur : parlant de l'inscription du cloître gravée du temps de l'abbé Anquetil, il nous dit qu'une autre inscription se trouve dans l'église qui rappelle une consécration faite en 1063 et trouvant les caractères épigraphiques semblables, il suppose que l'abbé Anquetil fit aussi graver cette inscription. Mais nous avons observé sur place que les deux inscriptions présentent des différences de caractères notables et ne peuvent appartenir à la même époque. C'est une comparaison aussi dénuée de fondement qui fit attribuer par Aimery de Peyrac la décoration du portail à l'abbé Anquetil. Il avait remarqué que des imbrications ornaient certaines faces les piliers du cloître non décorées de bas-reliefs et que ces imbrications se retrouvaient sur le trumeau du portail ; puis faisant un rapprochement entre le nom d'Ansquitilius qu'il appelle Asquilinus et le mot latin squilla qui désigne une espèce de poisson il déclare que c'est Anquetil qui fit graver ces imbrications semblables à des écailles de poisson, pour rappeler son nom. Or l'on sait que ce décorHistoire de l'Art, M. André Michel qui attribue le merveilleux tympan de Moissac au successeur d'Anquetil, l'abbé Roger (1115-1131) dont la statue fut placée en haut de ce portail, sans doute pour commémorer son oeuvre.
Notre seconde observation sera la suivante : Suger aurait au portail de Saint-Denis groupé trois éléments essentiels dont la réunion devait faire le portail gothique : un tympan orné d'une grande scène religieuse, telle que celle du Jugement dernier dont le modèle venait du Languedoc, des voussures chargées de personnages en union avec cette scène, semblables aux sculptures dont les artistes du Poitou et de la Saintonge chargeaient les voussures de leurs portails. Enfin le troisième élément, les statues-colonnes, serait une création de Suger. Or, rien ne prouve que les statues-
colonnes de Saint-Denis datent du temps de Suger et il n'est pas absolument démontré non plus qu'elles aient été les premières à orner un portail. Il serait surprenant qu'on eût composé du premier coup un ensemble de cette importance. Suger qui parle des portes de bronze placées à l'entrée de sa basilique et des scènes qui y étaient représentées ne dit rien de ces statues du portail. Il semble que s'il avait entièrement créé cet étrange décor il en aurait fait mention. A notre sentiment, l'idée de placer des statues devant les colonnes d'un portail, de les allonger, de les étirer pour qu'elles fassent corps avec ces colonnes sans en dépasser l'épaisseur est venue progressivement, insensiblement. Ces statues ont leur origine dans des bas-reliefs de petite dimension superposés sur les montants des portails comme ceux des églises lombardes, dans les figurines placées les unes au-dessus des autres et gravées, plutôt que sculptées, qui ornent les colonnettes du portail des Orfèvres à Saint-Jacques de Compostelle, enfin dans des statuettes fixées contre des colonnes comme les statuettes de Saint-Ouentin-lès-Beauvais (Musée de Beauvais). Le bas-relief s'est accentué pour deven'r une statue ; la statuette s'est allongée pour avoir la taille de la colonne. Une autre question posée par M. Mâle avait pour but d'établir comment les premiers sculpteurs romans avaient retrouvé leur technique, à quel art en honneur alors ils avaient demandé des modèles. La réponse de M. Mâle nous paraît trop absolue et trop exclusive. C'est, selon lui, la miniature qui a joué presque uniquement le rôle
d'initiatrice pour les premiers sculpteurs romans. Il le dit d'une façon très précise :

« La miniature a joué un rôle décisif. Elle explique à la fois l'aspect tourmenté de notre sculpture naissante et le caractère profondément traditionnel de notre iconographie... »

Et plus loin:

«Cet art (de la statuaire) comment les artistes l'ont-ils retrouvé ? Tel est le problème qu'on a, sans grand succès jusqu'à présent, essayé de résoudre. On a rappelé que le culte des reliques avait pris, dès le Xe siècle, dans la France méridionale une forme singulière : ...on les plaçait à l'intérieur d'une statue de bois revêtue d'or... L'apparition de ces statues à la fin de l'âge carolingien est un fait intéressant...
Mais je n'en suis pas moins convaincu que ces effigies hiératiques... n'ont eu aucune influence sur la naissance du grand art monumental. Car ce n'est pas sous la forme de la statue que la sculpture a reparu, mais sous la forme du bas-relief. Il se passera bien des années avant que l'on rencontre; en France une image détachée du mur... S'il en est ainsi, il est clair qu'il ne faut pas aller demander aux statues reliquaires du plateau central le secret des origines de la sculpture. Ce secret est ailleurs. Je voudrais montrer ici qu'à Moissac, aussi bien qu'en Auvergne, en Bourgogne ou en Provence, le bas-relief n'a guère été à l'origine qu'une transposition de la miniature... »

« Plusieurs singularités de notre sculpture primitive, les étoffes collées au corps, les plis concentriques sur la poitrine et les genoux... ne peuvent s'expliquer que par l'imitation de la miniature... qui a donné à la sculpture du XIIe siècle quelque chose de tourmenté, de calligraphique... La miniature ne fut pourtant pas le modèle unique. Nous verrons que les dessins des étoffes persanes, byzantines, arabes furent également imités... Nous devinons d'autres modèles encore. Il se peut que les ivoires qui donnaient le relief aient été parfois consultés. Il semble d'autre part que les petits bas-reliefs taillés à plat sur les dalles encastrées dans les murs perpétuent une ancienne tradition... Tous ces modèles n'en doivent pas moins rester au second plan : pour nos sculpteurs la vraie source d'inspiration fut la miniature. .»

Si les sculpteurs cherchaient dans les manuscrits le secret de la forme humaine, il est bien évident qu'ils leur empruntaient aussi les types sacrés et les dispositions des scènes religieuses. Ainsi selon M. Mâle c'est presque exclusivement dans les miniatures, tant pour les scènes à représenter que pour l'exécution même des figures dans la pierre, que les sculpteurs romans cherchèrent des modèles. Nous ne partageons pas cette opinion les sculpteurs romans firent, dans des proportions très différentes, il est vrai, des emprunts à tous les arts IIs s'inspirèrent non seulement des manuscrits et des tissus orientaux, comme M. Mâle l'a très bien observé, mais aussi des peintures murales et des mosaïques. Quelques-uns même copièrent des bijoux barbares, telle cette pierre de Glanfeuil ornée d'un oiseau ou ce chapiteau de la crypte de Saint-Bénigne de Dijon, où l'on voit un perroquet semblable à ceux des fibules mérovingiennes, telles ces têtes de taureau fréquentes dans les modillons normands et qui rappellent aussi certaines fibules. Ils imitèrent assurément des modèles gallo romains et en particulier des sarcophages Les sculptures du tombeau du XIe siècle de
saint Agilbert à Jouarre, celles de la table d'autel de Saint Sernin de Toulouse (vers 1096), celles du tympan de Saint Ursin de Bourges, celles du tombeau de Saint-Hilaire (Aude) (XIIe siècle) sont inspirées de modèles gallo romains. Deux des personnages sculptés dans les grands bas-reliets du déambulatoire de Saint Sernin de Toulouse,
qui apparaissent drapés dans leur toge ne sont-ils pas imités de quelque statue d'orateur rencontrée dans les ruines du forum d'une ville de Gaule ? Ce n'est pas dans les manuscrits que les artistes cherchèrent l'idée de colonnes toises telles que celles du portail d'AvaIlon. N'avaient-ils pas sous les yeux des colonnes semblables à celles de Notre-Dame de la Daurade de Toulouse dont quelques unes sont parvenues jusqu'à


FIGURE XLI
(le baiser de Judas, cliché Bernard Delorme - Notre-Dame de la Daurade, Toulouse)

nous ? Ce n'est pas aux manuscrits mais aux sarcophages que les sculpteurs ont pris ces imbrications que l'on trouve à Moissac et à Toulouse. II faut constater qu'ici, comme en bien d'autres circonstances, miniaturistes et sculpteurs ont puisé à la même source.
Il faut également faire place aux influences réciproques, aux échanges qui ont pu se faire d'un art à l'autre. Les anges soutenant une gloire ronde, dans laquelle se trouve
une figure divine, qui ornent d'une façon si gracieuse des tailloirs au cloître de Moissac et au cloître de Tarragone et qu'on rencontre aussi sur le linteau de la porte nord de Saint-Michel de Pavie se retrouvent, sur des ivoires, ils sont un souvenir des antiques génies ailés supportant un cartouche. Bien des thèmes décoratifs en honneur chez les sculpteurs romans ont été empruntés à la grammaire ornementale gallo-romaine
Ce n'est pas la pourtant que nos artistes prirent principalement leurs modèles ; il faut prendre garde que ces débutants qui tentaient de faire revivre un art abandonné depuis plus de quatre siècles, avaient à retrouver le relief et qu'à cette époque, d'autres artistes utilisant d'autres matières que la pierre savaient exécuter des figures en relief. Nous voulons parler des fondeurs et des orfèvres ; c'est surtout à ceux-ci que nos premiers sculpteurs demandèrent des leçons. M. Mâle refuse toute influence dans la renaissance de la sculpture à ces statues de bois revêtues de feuilles de métal, a ces « majestés d'or » qui étaient en honneur en Auvergne au Xe et au XIe siècle et dont M. Louis Bréhier a montré tout l'intérêt qu'elles présentaient pour l'archéologie. Il croit trouver un argument absolu pour nier cette influence dans ce fait que ces « majestés » étaient des statues et que les premiers sculpteurs ne s'enhardirent tout d'abord qu'à exécuter des bas-reliefs. Mais n'est-il pas logique de penser qu'ils imitèrent les bas-reliefs qu'ils pouvaient voir exécuter de leur temps ? Pendant tous les siècles du moyen âge on sculpta des figures de petite dimension dans l'ivoire. M. Mâle concède bien que les objets d'ivoire, notamment les coffrets musulmans d'Espagne du Xe et du XIe siècle, purent jouer leur rôle, mais il ne fait aucune allusion à l'art de la fonte, aux arts d'orfèvrerie qui ne cessèrent jamais d'être pratiqués, aux portes de bronze ornées de nombreuses scènes, telles que celles d'Hildesheim du début du XIe siècle, aux couvertures d'évangéliaires, aux reliquaires de formes variées, aux châsses rehaussées de figures de métal, aux ciboria, aux devants d'autel et aux tombeaux que l'on couvrait de plaques d'argent ou d'or ornées de personnages en haut relief et d'assez grande dimension. Les monuments de ce genre qui ont été conservés sont très rares : à toute époque on les fit fondre pour tirer parti des métaux précieux dont ils étaient composés. Mais les textes viennent dans une certaine mesure suppléer l'absence des monuments ; quand on parcourt les chroniques du VIIIe au XIIe siècle on est stupéfait de voir la richesse inouïe des trésors d'orfèvrerie que possédaient certaines églises au moyen âge. Il n'était pas d'abbaye importante au début de l'époque romane qui n'eût ses châsses et son parement d'autel ornés de figures d'argent ou d'or repoussé. Une place importante était faite d'ailleurs aux arts du métal dans le célèbre ouvrage du moine Théophile qui explique en détail les méthodes à suivre pour fondre le bronze ou pour exécuter des reliefs d'argent ou d'or par le procédé du repoussé et les terminer par la ciselure. De cette profusion d'oeuvres d'orfèvrerie que les chroniques nous font connaître, quelques magnifiques exemples nous restent ; tels sont le parement d'autel de Saint-Ambroise de Milan (IXe siècle), et le devant d'autel de la cathédrale de
Bâle exécuté vers 1020 et conservé aujourd'hui au musée de Cluny ; des dessins du XVIIe et du XVIIIe siècle nous ont gardé aussi de quelques monuments célèbres un souvenir plus précis que celui auquel peut prétendre une description. Ces témoins suffisent pour nous donner une preuve certaine des emprunts qu'ont faits les sculpteurs aux monuments d'orfèvrerie. L'imitation est parfois si évidente qu'on peut se demander si certains orfèvres comme aussi certains ivoiriers ne s'improvisèrent pas sculpteurs sur pierre. Certaines sculptures ont des reliefs peu accusés qui font penser aux figures obtenues dans le métal par le procédé .du repoussé : telles sont entre cent autres le Christ de Saint-Amour-Bellevue (Saône-et-Loire), les Anges placés aux écoinçons du portail de Notre-Dame d'Etampes et certaines figures tourmentées de la Porte Mié -

geville à Saint-Sernin de Toulouse ; d'autres telles que les figures des tympans de Saint-Sauveur de Nevers et de Champagne (Ardèche) paraissent coulées dans le bronze, tandis que le tympan de Pompierre (Vosges) avec le curieux encadrement d'entrelacs de son linteau paraît copié sur un coffret d'ivoire. Dans nos sculptures romanes le dessin des figures, les plis des vêtements collés au corps et le bas
des robes semblant soulevé par le vent ne sont pas nécessairement l'imitation des procédés de la calligraphie ; qu'on jette un coup d'œil sur l'autel de Bâle, on apercevra ces plis collés au corps sur tous les personnages et l'on remarquera le retroussis au bas de la robe du Christ. Si l'on vient aux détails on trouvera imitées dans la pierre les pâtes de verre qui encadrent les bas-reliefs de métal sur les couvertures d'évangéliaires et, chose plus curieuse encore, les sculpteurs ont parfois imité d'une façon si scrupuleuse leurs modèles d'orfèvrerie qu'on rencontre des inscriptions qui, au lieu d'être gravées, ont leurs lettres en relief semblables à celles qui se trouvent en repoussé sur les feuilles de métal des reliquaires ou sur des plaques de bronze
bas-relief à Saint-Sernin de Toulouse avec l'inscription sanctus Saturninus, tympans de Marcillac (Lot) et de Mervilliers( Eure-et-Loir). Les sculpteurs ont emprunté parfois aux monuments d'orfèvrerie la composition de leurs scènes. Les textes nous décrivent des devants d'autel d'or où l'on voyait le Christ en majesté accompagné des quatre animaux et parfois des Apôtres disposés sous la gloire du Christ ou à ses côtés sur plusieurs registres. Les mêmes figures se retrouvent avec une semblable ordonnance sur nos tympans. Celui de Carennac (Lot) nous en fournit un remarquable exemple. La disposition d'une série d'arcades en plein cintre reposant sur des colonnettes et abritant chacune un personnage assis ou debout que l'on rencontre si souvent sur nos plus vieilles sculptures romanes (linteaux de Saint-Genis-des-Fontaines, de Saint-André de Sorède), du plus ancien portail de Charlieu, de Châteauneuf (Saône-et-Loire), puis plus tard linteaux des portails des cathédrales du Mans, de Bourges, de l'église Saint-Loup-de-Naud), est imitée des ivoires, des châsses (châsse du trésor de la cathédrale de Cividale, Xe siècle), et des devants d'autel (autel d'or de
la cathédrale de Bâle). Nos artistes allèrent plus loin : ils s'inspirèrent de ces modèles
pour décorer des façades entières d'églises et il semble que certaines façades d'églises de l'Ouest en particulier soient une réplique magnifiquement développée de quelque parement d'autel. Telles sont les façades des églises de Pérignac (Charente-Inférieure), de Notre-Dame la Grande de Poitiers, et de la cathédrale d'Angoulême avec leurs séries d'arcades encadrant chacune un personnage. S'il nous reste bien peu de vestiges de ces parements d'autel d'argent ou d'or, si nombreux à l'époque romane, nous pouvons nous rendre compte de ce qu'ils étaient par les répliques de ces monuments d'orfèvrerie qu'on fabriquait économiquement en bois sculpté ou simplement en couvrant une pièce de bois de peintures et en encadrant
celles-ci d'ornements de plâtre ou de stuc formant un faible relief. Les Musées de Vich et de Barcelone conservent deux importantes collections de ces antependia dont M. Folch, le très distingué Directeur des Musées de Barcelone, publiera prochainement les reproductions en y joignant une étude sur l'industrie de ces intéressants monuments
catalans et sur ce procédé qui consistait à faire des encadrements en relief avec de la « pasta» appliquée à l'aide d'un cornet. L'un des antependia du musée de Vich était orné, lorsqu'il était intact, de douze figurines de bois, dont cinq subsistent, représentant les Apôtres debout sous douze arcades placées sur deux rangs ; au milieu se trouve le Christ en majesté dans une gloire ovale que flanquaient les quatre animaux. Les devants d'autel chargés de figures de métal n'eurent pas seulement des répliques de bois sculpté : dans la suite on exécuta des autels qui étaient ornés de bas-reliefs de pierre faits à leur imitation. Les autels d'Airvault (Deux-Sèvres) et d'Avenas (Rhône) en sont des exemples. Le beau tombeau de Saint-Junien (Haute-Vienne) qui est orné de bas-reliefs de pierre représentant le Christ en majesté, la Vierge avec l'Enfant dans une gloire et les Vieillards de l'Apocalypse rappelle les antependia que nous décrivent les textes ; il rappelle aussi d'ailleurs certains tombeaux qui étaient complètement recouverts de feuilles de métal ornées de bas-reliefs tels que ceux de saint Riquier dans l'abbaye consacrée à ce saint et de saint Benoît à Fleury-sur-Loire. Nos premiers sculpteurs durent avoir quelquefois également sous les yeux des surfaces sculptées de même apparence et presque de même dimension que les tympans qu'ils allaient décorer: nous voulons parier des ciboria portant sur leurs arcades des pignons verticaux
couverts de figures en relief. Pendant les siècles qui précédèrent immédiatement le XIIe siècle, si les artistes ne se hasardèrent pas à sculpter des images dans la pierre il semble qu'ils aient quelquefois tenté d'utiliser des matières plus tendres telles que le plâtre, le stuc et la terre cuite. Les figures de stuc de Disentis (Grisons) qui paraissent dater du VIIIe siècle en sont un témoignage. Des ciboria de même aspect que ceux de Saint-Ambroise de Milan et de San Pietro al Monte sopra Civate avaient dû être ornés de figures de stuc ou de terre cuite à côté de monuments plus riches sur les frontons desquels on appliquait des reliefs d'argent doré. La ressemblance d'une des faces de
ces ciboria avec un tympan sculpté est frappante. Ces quelques observations, sur lesquelles nous nous proposons de revenir prochainement, suffisent pour montrer l'importance que purent avoir dans la renaissance de la sculpture les arts où le relief
était pratiqué. C'est surtout en imitant des modèles d'orfèvrerie et d'ivoire que les sculpteurs cherchèrent à retrouver le secret de leur art. Le rôle de la miniature n'en fut pas moins considérable : c'est à elle qu'est dû l'enrichissement de l'iconographie religieuse au XIIe siècle. Les sculpteurs et les verriers trouvèrent dans les images des
manuscrits une source abondante de sujets ; ils ne se firent pas faute d'y chercher l'indication des scènes qu'ils voulaient reproduire. M. Mâle l'a montré d'une façon tout à fait convaincante. En lisant Ies pages de son livre ou bien souvent il avait à déplorer
la disparition de précieux monuments, nous avons pensé aux lignes émouvantes qu'il écrivait après l'incendie de la cathédrale de Reims en septembre 1914 :

« Quand la France apprit que la cathédrale de Reims était en flammes, disait-il, tous les cœurs se serrèrent... le monde entier s'émut de ce crime : on sentit qu'une étoile avait pâli, que la beauté avait diminué sur la terre. »

A côté des monuments de notre pays mutilés par le temps, l'ignorance et la haine, il en est beaucoup d'autres qui subsistent et qu'on néglige trop souvent de contempler. Le livre de M. Mâle contribuera à les taire mieux connaître et à les faire aimer, car il a mis non seulement son érudition profonde mais aussi son cœur au service de cette œuvre qui est le résultat de trente années d'efforts.

Paul DESCHAMPS.


 

Voici à présent un exposé sur la représentation des Saints dans l'art du Moyen Âge. Il n'aura pas échappé à l'étudiant que les alchimistes ont très souvent fait appel aux saints dans leurs allégories, le présent traité d'Esprit Gobineau de Montluisant étant ici des plus révélateurs. Il paraissait donc intéressant de faire le point sur la représentation de ces saints, vers le XIIe et le XIIIe siècle. C'est directement en compagnie d'Emile Mâle que nous effectuerons ce trajet.
 

LES PREMIÈRES REPRÉSENTATIONS DES SAINTS DANS L'ART DU MOYEN AGE

En France, les images des saints commencent à apparaître dans l'art monumental du XIIe siècle. Elles sont rares encore et ce n'est qu'avec une certaine réserve qu'elles s'introduisent dans l'église; elles n'en sont que plus curieuses, et il y a un vif intérêt à surprendre à ses origines cette glorification des saints par l'art. Au XIIe siècle, les saints se montrent rarement dans les portails qui sont laissés au Christ et aux apôtres; mais ils sont souvent célébrés ailleurs. On les voit représentés aux chapiteaux de l'église et du cloître; on les voit peints aux murs du sanctuaire. Les orfèvres, les émailleurs racontaient leur histoire sur des châsses ou ciselaient leurs bustes pour les autels. Quelques verrières déjà leur étaient consacrées. Mais de tant d'oeuvres il ne reste aujourd'hui que des débris : les cloîtres et leurs chapiteaux historiés ont été détruits, les
fresques effacées, les Vitraux brisés, les châsses fondues. Nos pertes ont été immenses, car l'art du XIIe siècle a été beaucoup plus éprouvé par le temps et les révolutions que l'art du XIIIe, et c'est au milieu de ces ruines qu'il faut aller chercher quelques souvenirs du passé. Pourtant quand on parcourt la France, en interrogeant les pierres, on retrouve encore ça et là, avec un singulier plaisir, quelques-uns des chapitres de notre vieille histoire religieuse. Dans plusieurs de nos provinces, l'art a conservé le souvenir des saints qui les illustrèrent : premiers apôtres de la foi, martyrs, évêques, solitaires de la montagne ou de la forêt. Car ce ne sont pas les saints connus de la chrétienté tout entière que représentent le plus volontiers nos artistes du XIIe siècle, mais les saints provinciaux, les saints locaux : de là l'intérêt de ces images qui ont pour nous le charme d'une flore indigène. Cette histoire, d'ailleurs, n'est bien souvent qu'une légende. Il y eut à diverses époques, mais surtout au XIe siècle, un
grand travail de création poétique, qui donna à la vie de plusieurs de nos saints l'intérêt d'un roman. On fit aborder en France plusieurs personnages illustres de l'Évangile auxquels on prêta des aventures nouvelles. On multiplia les miracles. Il se créa une sorte d'épopée chrétienne comparable aux Chansons de gestes qui naissaient alors. Le génie de cet âge héroïque et avide de merveilles s'exprima à la fois par la légende latine et par le poème français. Le saint et le héros, ces deux exemplaires supérieurs de l'humanité, furent célébrés avec la même ferveur. Si donc ces récits ne nous
apprennent rien sur les saints qu'ils veulent glorifier, ils nous apprennent beaucoup sur le moyen âge lui-même. Il nous apparaît là avec son profond idéalisme, son ascétisme, son dédain du réel, son inébranlable conviction que la foi est la plus grande force de ce monde. Ces légendes, aussi poétiques parfois que les inventions de l'épopée, eurent de bien autres conséquences : elles créèrent des pèlerinages, elles firent surgir des églises, elles les peuplèrent d'œuvres d'art, elles mirent en mouvement des millions d'hommes. Elles furent pour une foule d'âmes une consolation et une espérance; elles leur laissèrent entrevoir dès ce monde le règne de Dieu. Commençons par le Midi languedocien, le pays de nos plus anciens sculpteurs, ce voyage en France à la recherche des saints. Toulouse avait conservé un profond souvenir de son premier


FIGURE XLII
(porte Miègeville - église saint Sernin, Toulouse)

[site consulté : http://pmaude.free.fr/Sernin/presentation.htm - tympan sculpté, occupé par un thème unique, celui de l'Ascension. Cette oeuvre a justement été placée au rang des chefs d'oeuvre de la sculpture romane. Au centre, le Christ, debout, les mains levées, la tête tournée vers le ciel, est dérobé à la vue de ses disciples par les nuées; deux anges l'aident à s'élever, tandis que quatre autres l'acclament. Sur le linteau, les douze apôtres gardent leur visages tournés vers le ciel; aux extrémités, deux anges leur rappellent que l'Ascension est aussi la promesse du Retour et du Royaume éternel.]

apôtre, de ce Saturninus qui avait refusé l'encens aux dieux de Rome : un taureau furieux l'avait traîné ensanglanté sur les marches du Capitule. Enseveli hors des murs, saint Saturnin, ou, comme disait le peuple, saint Sernin, avait fait naître une ville nouvelle autour de son tombeau. La colossale église Saint-Sernin, la plus grande des églises romanes, est le monument du héros. Mais on est surpris aujourd'hui, quand on visite l'église, de n'y rencontrer aucune oeuvre d'art ancienne qui rappelle son souvenir. Il n'en était pas ainsi autrefois : le pèlerin qui arrivait devant le portail occidental était accueilli par un bas-relief du XIIe siècle, représentant le martyr debout avec le taureau sous ses pieds. Mais déjà la légende avait déformé l'histoire. Aux Actes de saint Sernin, si sobres et d'un caractère si antique, des épisodes nouveaux étaient venus s'ajouter. On racontait qu'il avait baptisé Austris, la fille d'Antoninus, gouverneur de
Toulouse, qui, dans la légende nouvelle, est devenu un roi. Austris était lépreuse : saint Sernin la guérit en la plongeant dans la piscine baptismale. On voyait donc, au portail de l'église, un groupe représentant la jeune princesse baptisée par saint Sernin. Un autre bas-relief montrait le persécuteur de l'apôtre, le roi Antoninus assis sur son trône. Ces oeuvres, qu'on peut imaginer fines et nerveuses, comme toute la sculpture toulousaine du XIIe siècle, ont disparu sans laisser de trace et ne nous sont connues que par une ancienne description. A l'autre bout de la ville, la cathédrale Saint-Étienne perpétuait de son côté le souvenir du premier évêque de Toulouse. Dans le cloître des chanoines, un des plus anciens sanctuaires de l'art français, misérablement détruit en 1813, des statues du XIIe siècle s'adossaient aux piliers : c'étaient celles de saint Pierre, de saint Sernin, de saint Exupère et d'un diacre. Saint Sernin était placé près de saint Pierre, parce que suivant la tradition qui avait prévalu alors, l'apôtre de Toulouse avait reçu sa mission du premier des papes : Ecce Saturninus quem miserat ordo latinus, disait l'inscription : « Voici saint Sernin envoyé par l'église latine. » Toulouse se donnait donc comme la fille spirituelle de Rome. Saint Sernin était le héros de la foi, saint Exupère, un de ses premiers successeurs, était le héros de la charité. En un temps de disette, il avait vendu tous les ornements de l'église, et même le calice et la patène, pour nourrir les pauvres. L'artiste de Toulouse l'avait représenté un calice à la main; c'était le calice de verre qui avait remplacé le calice d'argent; près de lui, un diacre portait une patène d'osier tressé : sainte pauvreté des temps antiques qui touchait les coeurs. Ainsi l'art naissant avait voulu éterniser la mémoire des deux plus grands saints de Toulouse : on les y cherche vainement aujourd'hui. Mais ce qu'on ne trouve plus à Toulouse, on le voit ailleurs, car la gloire de saint Sernin rayonnait au loin. Entre Carcassonne et l'ancien évêché d'Alet s'élève, cachée au fond d'une vallée, l'ancienne abbaye de Saint-Hilaire. Ici, un précieux monument du passé nous a été fidèlement conservé. Un sarcophage du XIIe siècle, sculpté sur toutes ses faces, raconte le martyre de saint Sernin. On le voit saisi par les païens au moment où il annonce l'Évangile. Puis il est attaché au
taureau qu'un bourreau excite de l'aiguillon : des bêtes au visage presque humain grimacent autour du saint et semblent incarner la férocité du vieux monde, pendant que deux femmes contemplent le martyr avec attendrissement. Ce sont les deux vierges saintes, « les saintes puelles », qui vont l'ensevelir, celles-là mêmes qu'on honorait sur la route de Carcassonne à Toulouse, au Mas-Saintes-Puelles. Bien loin de Saint-Hilaire, de l'autre côté de Toulouse, le cloître de Moissac célèbre lui aussi la gloire de saint Sernin : un chapiteau lui est consacré. Le juge assis sur son siège vient de condamner


FIGURE XLIII
(sarcophage, ancienne abbaye de saint Hilaire)

[de cete scène, l'hermétiste retiendra qu'elle s'apparente à une autre où la légende affirme que Zéthos et Amphion tuèrent Lycos, fils de Cadmos, et attachèrent son épouse, Dircé, par les cheveux aux cornes d'un taureau sauvage qui la traîna sur les rochers jusqu'à ce que mort s'ensuive. On ajoute qu'Amphion fut tué par les traits justiciers d'Apollon et d'Artémis pour avoir insulté leur mère, Léto, cf. rébus de saint Grégoire-sur-Vièvre]

l'apôtre, et déjà il a été attaché aux cornes du taureau. Le Capitole est représenté sous l'aspect d'une haute tour à étages : elle fait penser à la forteresse qui dominait Toulouse au moyen âge, à ce château narbonnais qu'on attribuait aux Romains. Sur une autre face du chapiteau, la main de Dieu sort du ciel pour recueillir l'âme du martyr. Il subsiste donc encore, on le voit, quelques-unes des œuvres que l'art du Midi avait consacrées à saint Sernin. Si nous descendons la Garonne vers Bordeaux, nous pénétrons dans une province où régnaient d'autres saints. L'Agenais était le domaine de sainte Foy, de saint Caprais, de saint Vincent, martyrs de la grande persécution de Dioclétien. La jeune sainte Foy amenée devant le gouverneur romain refusa de sacrifier; c'est pourquoi elle fut étendue sur un gril de fer rouge puis décapitée. Le courage de cette enfant de douze ans inspira des remords au pasteur du troupeau, à saint Caprais, qui s'était réfugié dans une grotte de la montagne. Il assistait de loin au combat de la sainte et voyait, dit la légende, des anges tenant une couronne au-dessus de sa tête. Il se présenta donc résolument au gouverneur, se proclama chrétien et livra sa tête au bourreau. Quant à saint Vincent, dont une légende tardive fait le successeur de saint Caprais, il voulut mettre fin au culte de Belenus, et il arrêta la roue enflammée, symbole du soleil, que l'on faisait descendre chaque année sur la pente de la colline. Traîné devant le magistrat romain, il fut battu de verges et décapité. On s'attendrait à rencontrer à Agen, au lieu même du martyre de sainte Foy, quelque belle oeuvre de la sculpture romane consacrée à la jeune sainte; mais au XIe siècle, ses reliques, convoitées depuis longtemps comme un trésor sans prix, furent dérobées par un moine de Conques et emportées dans les montagnes du Rouergue. C'est Conques qui va
devenir désormais le centre du culte de sainte Foy et nous allons l'y retrouver tout à l'heure. Agen ne nous montre plus aujourd'hui qu'un chapiteau consacre à saint Caprais dans l'église qui lui est dédiée. Le saint est décapité devant le gouverneur romain, Dacien; une inscription désigne chaque personnage par son nom : Dacianus, miles, sanctas Caprasius, et un vers latin indique le rôle de chacun : Praecipit, occidit, moritur, cœlestia scandit. Dacien est là pour ordonner, le soldat pour tuer, saint Caprais pour mourir. L'art n'oublia pas non plus saint Vincent. Ses reliques furent longtemps conservées dans la ville gallo-romaine de Pompejac, qui devint le Mas d'Agenais; un magnifique sarcophage du Ve siècle, qu'on y voit encore, passe pour avoir été son tombeau. Or, dans l'église du Mas, un chapiteau roman représente un martyr à genoux décapité par la main du bourreau. Aucune inscription n'accompagne la scène, mais,
en ce lieu, elle ne saurait représenter autre chose que la mort de saint Vincent. Ses reliques, il est vrai, n'étaient plus alors au Mas : elles avaient été transportées à Conques, à l'époque des incursions normandes; toutefois, le souvenir de saint Vincent était demeuré vivant au Mas d'Agenais et son culte continuait à y être célébré.
Au temps des rois wisigoths, Euric et Alaric, la Gascogne eut une nouvelle génération de martyrs. Les Wisigoths étaient ariens et persécutaient les catholiques qu'ils obligeaient à se convertir à leur symbole sous peine de mort. Les vieux livres liturgiques et les légendes populaires perpétuèrent le souvenir de quelques-uns de ces martyrs. Un des plus fameux fut saint Maurin, jeune apôtre qui, loin de dissimuler sa foi, la proclamait sur la place publique de Lectoure. Il fut décapité sur l'ordre du roi Alaric, et la tradition rapportait qu'on l'avait vu porter sa tête jusqu'à la fontaine Militane. Les artistes n'auraient peut-être jamais illustré sa mémoire, s'il ne s'était fondé aux confins de l'Agenais et du Quercy une abbaye sous son nom. L'église de Saint-Maurin (Lot-et-
Garonne) n'est plus aujourd'hui qu'une ruine, mais deux de ses colonnes sont encore couronnées de deux beaux chapiteaux romans où l'on retrouve le style de Toulouse et de Moissac. Sur l'un d'eux, un martyr porte sa tête dans ses mains; une chrétienne, inclinée devant lui, s'apprête à recevoir sa tête sur un voile. Le vocable de l'église, dédiée à Saint-Maurin, ne permet pas d'hésiter sur le sens de la scène. Voilà à peu près tout ce que nous offre cette vaste région du Midi. Elle a dû être autrefois incomparablement plus riche en images de saints; la grande école toulousaine y
avait sans aucun doute prodigué ses chefs-d'oeuvre, mais le temps ne les a pas respectés. Aucun pays n'a été, au XIIe siècle, plus fécond que la belle plaine qui se déroule dans la lumière jusqu'aux Pyrénées, sorte de Lombardie de la France, mais
aucun pays n'a été plus souvent dévasté. La guerre des Albigeois, la guerre de Cent ans, les guerres de religion y ont accumulé tant de ruines, que l'on admire qu'il y reste encore quelques témoignages de ce qu'a été le génie du Midi. II faut aller jusqu'aux Pyrénées pour retrouver les saints. Ces poétiques montagnes eurent leur légende dorée : elles eurent leurs martyrs, leurs vieux évêques, leurs ermites. Plusieurs sans doute furent célébrés par l'art, mais bien peu de ces oeuvres subsistent aujourd'hui.
A l'entrée des vallées pyrénéennes, à Foix, une abbaye, jadis célèbre, portait le nom d'un martyr de la persécution arienne, saint Volusien. Son église a été à presque entièrement. refaite et son cloître roman complètement détruit. Un hasard pourtant nous a rendu un de ses chapiteaux historiés. Ce chapiteau est fort intéressant, car il nous raconte justement un épisode de l'histoire de saint Volusien. Volusien, évêque de
Tours, était le sujet d'Alaric, roi des Wisigoths, dont le vaste royaume s'étendait jusqu'à la Loire. Soupçonné de favoriser les desseins de Clovis, qui préparait une expédition contre les ariens du Midi, il fut, sur l'ordre d'Alaric, arraché à son siège de Tours et conduit à Toulouse. A Toulouse, il fut traité comme un malfaiteur, on lui lia les mains et on l'emmena vers l'Espagne. Mais, en arrivant au pied des montagnes, les soldats
qui le conduisaient lui ordonnèrent de s'agenouiller dans un champ et lui tranchèrent la tête. Le chapiteau nous montre Volusien, les mains liées et la corde au cou, entraîné par ses bourreaux. On ne voit pas sa mort, ni les frênes qui poussèrent miraculeusement sur le lieu de son supplice, mais on voit la vengeance du ciel. L'autre face du chapiteau, en effet, représente l'armée victorieuse de Clovis assiégeant Toulouse; plus loin, la ville est prise et les vainqueurs en démolissent les murs. Ce précieux monument, est conservé au Musée de Foix, et il mérite de l'être, car Foix est une création des reliques de saint Volusien : la ville est née autour du monastère qui gardait le tombeau du martyr. En entrant dans la montagne, on voit s'élever au-dessus
de la vallée de Luchon une église romane dédiée à saint Aventin. Les chapiteaux du portail retracent son histoire. Saint Aventin est un ermite du VIIIe siècle qui vivait dans
la solitude sans autre société que celle des ours de la forêt. Parfois il quittait sa cabane pour enseigner l'évangile aux montagnards, toujours attachés à leurs anciens dieux : tous l'entouraient de respect. Mais les Arabes, qui parcouraient alors le Midi, entendirent parler de ce propagateur de la foi chrétienne. Ils se mirent à sa recherche et quand ils eurent découvert sa retraite, ils s'emparèrent de lui et lui tranchèrent la tête. Les chapiteaux racontent la naissance, la vie et la mort du saint ermite; comme beaucoup d'autres saints, il est représenté portant sa tête dans ses mains. A l'abside,
un bas-relief nous montre le taureau qui retrouva le tombeau de saint Aventin dont on avait perdu le souvenir. Puissance de l'art chrétien ! Une église, accrochée au rocher, perpétue depuis près de huit cents ans la mémoire d'un pauvre ermite inconnu. C'est dans une région voisine de Luchon que s'élève, au sommet d'une acropole, la cathédrale de Saint-Bertrand-de-Comminges. Elle est du XIVe siècle, mais le portail et
le rude clocher qui le domine sont du XIIIe. Un beau tympan de l'école toulousaine représente l'Adoration des Mages; à l'extrémité de ce tympan, derrière la Vierge, un


FIGURE XLIV
(église saint Bertrand-de-Comminges; tympan)

évêque fait face au spectateur : il lève la main droite pour bénir et tient la crosse de la main gauche. Quel est ce mystérieux personnage introduit par l'artiste dans une scène sacrée ? Les archéologues ont nommé à tout hasard saint Sernin; pourtant, en ce lieu, un autre nom s'impose au souvenir. C'est à la fin du XIe siècle, en effet, que le petit-fils des comtes de Toulouse, l'évêque saint Bertrand, releva de ses ruines la ville antique
de Lugdunum Convenarum, devenue une solitude; il rappela les habitants, rebâtit l'église et fit fleurir le désert. Il fut le second fondateur de la cité qui prit son nom. On ne saurait douter que ce grand évêque  auquel par surcroît on attribuait le don des miracles  n'ait été représenté au portail de sa cathédrale. Saint Bertrand mourut en 1123. Son image dut être sculptée peu d'années après sa mort, dans un temps où son souvenir était encore vivant dans toutes les mémoires. Elle est certainement antérieure à 1179, date de la canonisation du saint, car il est représenté sans nimbe. Cette effigie
d'un grand homme qui n'était pas encore un saint, est fort intéressante; il a fallu un vif mouvement d'enthousiasme pour qu'on ait osé représenter un contemporain, un homme que tous avaient connu, à côté de la Vierge et des rois Mages. Ces hautes Pyrénées n'étaient pas alors une barrière entre la France et l'Espagne. Les saints français étaient vénérés dans l'Espagne du nord, les saints espagnols dans la France du midi. Il est curieux de retrouver ça et là des traces de ce culte que les églises méridionales avaient voué aux saints d'au delà des monts. Un chapiteau du cloître de Moissac représente le martyre des trois saints de Tarragone, Fructueux, Augure et Euloge. Ces illustres chrétiens du IIIe siècle, célébrés par saint Augustin et par Prudence, sont représentés avec le costume du XIIe. L'évêque Fructueux porte la crosse et la mitre; les diacres
Auguste et Euloge ont la dalmatique et le manipule. Le proconsul Aemilianus, gouverneur de la Tarraconaise, est assis sur son trône, et il a près de lui, comme un baron féodal, un joueur de rote. C'est le moment où s'échangent entre AEmilianus et Fructueux les paroles célèbres. « Je suis évêque du Christ, dit Fructueux.  Dis que tu l'as été », répond AEmiIianus et il l'envoie au supplice avec ses deux compagnons. Une autre face du chapiteau montre les trois saints en prière au milieu de leur bûcher, et plus loin, les anges emportant leur âme au .ciel dans une gloire. La présence dans l'abbaye de Moissac de quelque insigne relique des martyrs de Tarragone explique sans doute pourquoi les moines voulurent avoir sans cesse sous les yeux leur histoire. Des reliques retrouvées, il y a quelques années, dans l'autel de l'église de Valcabrère (Haute-Garonne) ont fait deviner les noms de trois des statues qui en ornent le portail :
elles représentent le diacre saint Étienne et deux saints espagnols, saint Just et saint Pasteur. C'étaient deux écoliers de Complutum, qui s'appela plus tard Alcala de Henares; au temps de la persécution de Dioclétien, ils comparurent devant le préfet Dacien qui les fit battre de verges et mettre à mort. Prudence a célébré leur courage. L'artiste connaissait fort bien leur histoire, car il s'est efforcé de leur donner un air de
jeunesse; au-dessus de leur tête, des chapiteaux racontent leur martyre; un des saints est attaché a un arbre pour être flagellé, l'autre est décapité. Dans le cloître de marbre d'EIne [Pyrénées-Orientales], non loin de la grande route romaine qui -conduisait en Espagne, on ne s'étonne pas de rencontrer une sainte espagnole; un des chapiteaux
représente le martyre de sainte Eulalie, patronne de la cathédrale d'Elne. La jeune sainte de Mérida était déjà célèbre en France, puisque le plus ancien de nos poèmes en langue romane lui est consacré. Voilà à peu près tout ce qui subsiste dans le Sud-Ouest des œuvres que le XIIe siècle avait consacrées aux saints de la France méridionale et de l'Espagne.

II

En pénétrant dans l'Aquitaine, nous entrons dans le royaume de saint Martial. Saint Martial fut vénéré de bonne heure comme l'apôtre du Limousin, mais jusqu'au XIe siècle, on sut peu de chose de son histoire. C'est alors que fut écrite sa merveilleuse légende. On l'attribua à saint Aurélien, le premier de ses successeurs, cet Aurélien dont la chapelle s'élève aujourd'hui au milieu de la rue des Bouchers, à Limoges. Ce récit s'embellit encore, et il se forma, autour de saint Martial, tout un cycle de poétiques légendes. Il ne fut plus un simple missionnaire, il devint un contemporain, un disciple du Christ; tout enfant il avait entendu sa parole. C'est de lui que le Christ avait dit : « Quiconque ne ressemble pas à cet enfant n'entrera pas dans le royaume des cieux. » II avait assisté à la multiplication des pains, au lavement des pieds, à la Cène. Plus tard, il avait accompagné saint Pierre à Rome. Saint Pierre lui donna son bâton et l'envoya évangéliser la Gaule; avec ce fameux bâton, qui fut longtemps conservé dans l'église Saint-Seurin de Bordeaux, saint Martial ressuscitait les morts. Il entra en conquérant dans l'Aquitaine : partout où il passait, une église naissait. Il fut le fondateur non seulement de l'église de Limoges, mais de celles de Bourges, de Poitiers, de Saintes, de Bordeaux, de Cahors, de Tulle, de Rodez, d'Aurillac, de Mende, du Puy. Les premiers évêques de ces villes, qu'on en avait cru les apôtres, n'étaient que ses disciples. De poétiques personnages accompagnent saint Martial. Il était venu en Gaule, - disait-on, - avec sainte Véronique, qui avait essuyé la face du Sauveur sur le chemin du Calvaire, et avec saint Amateur, que l'on confondra plus tard avec le Zachée de l'Évangile, ce Zachée, à qui le Christ avait parlé. Véronique et Amateur qui avaient
vu, qui avaient entendu le Verbe ne purent se résigner à vivre dans la société des hommes; ils s'enfermèrent tous les deux dans la solitude. Saint Amateur se retira dans la profonde vallée où s'éleva plus tard le sanctuaire de Rocamadour; quant à Véronique elle bâtit son ermitage dans le désert de Soulac, au bord de l'Océan. La légende nous montre encore auprès de saint Martial une jeune vierge, sainte Valérie. Elle appartenait à une des plus illustres familles du pays des Lémovices, et était fiancée au proconsul romain; mais elle avait entendu saint Martial et reçu le baptême : elle aspirait à la perfection. Elle refusa d'épouser le proconsul qui dans sa colère la fit mettre à mort. Un centurion lui trancha la tête; la sainte la prit dans ses mains et alla la présenter à saint Martial qui célébrait la messe dans l'église de Limoges. Les visiteurs du palais des papes d'Avignon connaissent les délicieuses fresques de Matteo de Viterbe, où l'on voit se dérouler toute cette histoire de saint Martial sous un ciel d'azur. Il ne faut pas attendre du XIIe siècle des oeuvres d'un charme aussi pénétrant. D'ailleurs, saint Martial, qui a tenu tant de place dans l'imagination des hommes du XIIe siècle, n'a laissé que peu de traces dans l'art de ce temps. Beaucoup d'oeuvres, sans aucun doute, ont disparu. La grande église abbatiale de Limoges, où s'élevait son tombeau, cette fameuse église Saint-Martial, qui attirait tant de pèlerins, fut détruite, avec toutes ses oeuvres d'art, au temps de la Révolution : perte irréparable pour l'iconographie de saint Martial. La fresque y racontait-elle sa légende ? On peut le croire, car, dans l'église qui précéda celle-là, on pouvait voir, au témoignage d'Adhémar de Chabannes, des
peintures murales qui retraçaient sa vie. Dès la fin du Xe siècle, un moine orfèvre de l'abbaye, avait fait pour l'autel une statue d'or de saint Martial qui le représentait assis, bénissant de la main droite, et portant le livre de la main gauche. Il est probable que dans beaucoup d'églises qui se glorifiaient devoir été fondées par saint Martial, on voyait quelque oeuvre d'art rappelant son apostolat. A Toulouse, la légende allait jusqu'à associer saint Martial à saint Sernin dans la prédication de l'Évangile; c'est pourquoi, au portail de l'église Saint-Sernin, saint Martial était représenté; sa statue répondait à celle de saint Sernin et près d'elle on lisait cette inscription : Hic socius socio subvenit auxilio. Ainsi au témoignage même des clercs de Toulouse, gardiens du tombeau de saint Sernin, leur saint patron avait été secondé dans son oeuvre par le grand saint Martial, disciple du Seigneur. A l'autre extrémité de l'Aquitaine, aux confins du Berry,
on voit encore dans l'église romane de Méobecq (Indre) une peinture murale du XIIe siècle qui représente saint Martial. Les moines de Méobecq, en effet, racontaient que saint Martial, dans ses voyages évangéliques, était venu jusque-là. Il subsiste probablement plus d'une oeuvre du XIIe siècle, où nous ne savons plus aujourd'hui reconnaître saint Martial. A la façade de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers, on voit,
sous des arcatures, à côté des douze apôtres, deux évêques : il est probable que l'un d'eux est saint Martial, fondateur, suivant la légende, de l'église de Poitiers, et presque égal en dignité aux apôtres. Quelques œuvres de la fin du XIIe siècle nous offrent les
plus anciennes représentations de la légende de saint Martial : ce sont des châsses émaillées provenant des ateliers de Limoges. Sur l'une d'elles [Collection Marlin-Leroy, t. I. PI. XV. Le fond vermiculé, les costumes, le style indiquent le XIIe siècle.], saint Martial ressemble à


FIGURE XLV
(bible de saint Martial)

un apôtre, et comme les apôtres, il a les pieds nus  privilège exceptionnel et signe de sa haute mission. Il porte à la main le fameux bâton : il lui suffit de le présenter à un possédé aux cheveux hérissés, pour qu'aussitôt le démon s'échappe par sa bouche.
Ce miracle frappa d'admiration sainte Valérie et la disposa à recevoir le baptême. Sur l'autre face de la châsse, en effet, elle s'agenouille devant saint Martial qui la bénit; mais déjà le proconsul ordonne au bourreau de la mettre à mort. Une autre châsse du même temps représente le centurion conduisant sainte Valérie au supplice [Ancienne colleclion Soltykoff, voir Rupin, l'oeuvre de Limoges, p. 403.]. La jeune sainte porte encore la robe collante aux manches démesurées des plus anciennes statues de Chartres. Le bourreau lui tranche la tête, mais elle la prend dans ses mains, et va la présenter à saint Martial qui célèbre la messe; un ange vole au-dessus d'elle, et, par un charmant artifice, la tête de l'ange tient la place de la tête de la sainte. Sainte Valérie est ici l'héroïne que
célèbre l'artiste, et c'est sans aucun doute une de ses reliques que contenait la châsse.
Sainte Valérie, en effet, fut presque aussi populaire que saint Martial lui-même. Quand les comtes de Poitiers venaient se faire sacrer ducs d'Aquitaine à Limoges, l'évêque leur présentait la couronne et l'épée, puis le doyen du chapitre leur mettait au doigt l'anneau de sainte Valérie : c'étaient les fiançailles du duc et de l'église d'Aquitaine dont Valérie était le plus pur symbole. C'est pourquoi les oeuvres d'art qui la représentent, - trop rares aujourd'hui, - nous touchent comme une poétique image du passé. Non loin de Bellac, l'antique église Saint-Pierre-de-la-Trémouille conserve quelques restes d'une fresque du XIIe siècle; deux saintes apparaissent encore dont on peut lire les noms : ce sont sainte Valérie et sainte Radegonde [Voir un dessin de la fresque dans le Bullet. de la Société des antiq. de l'Ouest, 1912, p. 633.]. La légende dorée du Poitou s'unit là à celle du Limousin. Le monastère de Chambon-sur-Voueyze (Creuse), à l'extrémité de la Marche, fut un des foyers du culte de sainte Valérie. Il possédait une partie de ses reliques, mais le charmant buste d'argent qui les contient aujourd'hui ne remonte qu'au XVe siècle : il représente la jeune martyre avec une couronne et un riche collier. Dans la vieille église romane de Chambon, aucune des oeuvres qui furent consacrées au XIIe siècle à sainte Valérie ne s'est conservée; mais ce qu'on ne voit plus à Chambon, on le voit un peu plus loin dans l'église abbatiale d'Ébreuil en Bourbonnais. Dans la tribune,
une peinture murale du XIIe siècle représente, à côté du martyre de saint Pancrace, dont l'église avait sans doute quelque relique, le martyre de sainte Valérie. C'est ici la limite où s'arrêtait la gloire de la sainte. Les autres compagnons de saint Martial, saint Amateur et sainte Véronique, célèbres dès le XIIe siècle, ont inspiré des oeuvres d'art que le temps a presque complètement détruites. Rocamadour, trop souvent saccagé, ne nous montre plus le fondateur du sanctuaire, saint Amateur, que le peuple appe-
lait saint Amadour; mais on y voit encore la Vierge de bois, recouverte jadis de plaques d'argent, qu'on disait faite de sa main [ Elle ne remonte pas plus haut que le XIIIe siècle. Revue de l'art chrétien, 1892, p. 7 et suiv]. Un monastère s'éleva à Soulac, près du tombeau de sainte Véronique. L'église qui contenait les reliques de la sainte s'appelait Notre-Dame-de-la-Fin-des-Terres : on était là en effet à une des extrémités du monde, au bord de l'inconnu. Un vaste désert de sables, et la rumeur lointaine du grand Océan, alors sans limites, donnaient au lieu une religieuse beauté. La dune, poussée par le vent, envahit peu à peu le monastère et finit par le recouvrir. En 1860, des fouilles
firent reparaître l'église romane qui sortit de son linceul de sable, comme un temple de la Haute-Egypte. On remarqua alors deux chapiteaux qui décoraient l'entrée de la chapelle dédiée jadis à sainte Véronique : l'un représente un tombeau, l'autre des pèlerins debout des deux côtés d'un autel, sur lequel repose une châsse. Ce sont, suivant toutes les vraisemblances, le tombeau et la châsse de sainte Véronique qui
attiraient tant de pèlerins à Soulac. C'est ainsi que du Bourbonnais à l'Océan, du Berry à Toulouse a rayonné la légende de saint Martial et de ses compagnons. Le centre de l'ancienne Aquitaine, avec ses vallées profondes et ses rivières rapides a toutes les beautés d'une nature primitive, mais c'est un pays de granit, où la pierre résiste au travail du ciseau. Aussi n'est-ce pas par les sculpteurs que les saints y furent célébrés, mais par les orfèvres. Dès la fin du Xe siècle, plusieurs églises d'Aquitaine avaient des images d'or, d'argent, ou de cuivre de leurs saints patrons, images qui étaient en même temps des reliquaires. Écoutons l'écolâtre d'Angers, Bernard, qui parcourut le Plateau Central dans les premières années du XIe siècle.

« Jusqu'ici, dit-il, il me semblait que les saints ne devaient recevoir d'autres honneurs que ceux du dessin ou de la peinture : il me semblait absurde et impie de leur élever des statues. Mais tel n'est pas le sentiment des habitants de l'Auvergne, du Rouergue, de la région toulousaine et des pays voisins. Chez eux, c'est une antique habitude que chaque église possède une statue de son patron. Suivant les ressources de l'église, cette statue est d'or, d'argent, ou d'un métal moins précieux; on y enferme le chef, ou quelque insigne relique du saint [Liber miracul. sanctae Fidis, publié par l'abbé Bouillet, Lib. I, cap. XIII.]. »

Ainsi, l'homme du Nord, en entrant dans le Midi, découvrait une autre France. Bernard nous a fait connaître quelques-unes de ces statues. Au synode de Rodez, on en avait apporté plusieurs sur la prairie aux portes de la ville; chacune d'elles s'abritait sous une tente et elles formaient une assemblée plus imposante que celle des évêques. C'était « la majesté d'or » de saint Marins, patron de l'abbaye de Vabres, en Rouergue, « la majesté d'or » de saint Amand, deuxième évêque de Rodez, « la majesté d'or » de sainte Foy de Conques, et, enfin, près de la châsse d'or de saint Sernin, « la majesté d'or » de la Vierge. En descendant vers le Midi, Bernard avait déjà rencontré « la majesté » de saint
Géraud, ce jeune chevalier devenu moine, qui avait donné son nom à la grande abbaye d'Aurillac. Mais il ne semble pas avoir vu « la majesté » de saint Martial, dans l'abbaye de Limoges. Il subsiste encore aujourd'hui quelques-unes de ces étranges statues. La « majesté» de sainte Foy est toujours à Conques, comme au temps de l'écolâtre Bernard, mais on ne reconnaît guère dans cette idole dorée la jeune martyre d'Agen dont nous avons raconté l'histoire. La sainte, assise sur son trône, étincelle d'or et de pierreries; elle porte une couronne fermée d'une forme très antique; de longues boucles d'oreilles
pendent sur ses épaules; de chaque main elle tient délicatement, entre deux doigts, deux petits tubes où l'on mettait des fleurs; de beaux camées antiques sont incrustés ça et là, dans le métal de sa robe. Ne pouvant la faire belle l'artiste l'avait faite si riche, qu'elle inspirait un religieux effroi; mais il y avait autour d'elle une auréole de miracles plus éclatante encore que le rayonnement de l'or. Un fléau dévastait-il les environs, un différend s'élevait-il entre deux villes, un baron disputait-il à l'abbaye un de ses domaines, aussitôt la statue de la sainte sortait du sanctuaire. Elle était portée
par un cheval choisi, dont le pas était très doux. Autour d'elle, de jeunes clercs faisaient retentir des cymbales et résonner des cors d'ivoire. Elle s'avançait avec majesté, comme jadis la Magna Mater, au temps où ces montagnes étaient païennes. Partout où elle passait elle rétablissait la concorde, faisait régner la paix; les miracles éclataient si
nombreux qu'à peine les moines avaient-ils le temps de les écrire. La sainte se plaisait surtout à délivrer les prisonniers ; au portail de Conques on la voit prosternée devant la main de Dieu : elle prie sans aucun doute pour les captifs, car des fers sont suspendus en ex-voto derrière elle. La statue de sainte Foy fut portée bien au delà des limites du Rouergue; on la vit en Auvergne et dans le pays albigeois. On lui dressait tous les soirs une tente, et sur la tente on élevait un berceau de verdure. Combien il est heureux que « la majesté » de sainte Foy se soit conservée intacte à travers tant de siècles ! Comme ce bloc d'or nous illumine le haut moyen âge ! Comme il nous fait comprendre ce qu'il y avait de mystérieux et de redoutable dans le pouvoir du saint ! La statue de sainte Foy est unique de richesse : il subsiste dans ces régions deux autres images de saints qui sont plus simples et un peu moins anciennes. L'une se conserve dans l'église du Monastier, antique abbaye, perdue dans les solitudes du Velay. C'est une statue à mi-corps, faite de plaques d'argent, relevée de cabochons : elle représente un saint aux yeux saillants, au nom farouche, saint Chaffre. Chaffre est la forme populaire de Theofredus. Saint Chaffre est un martyr du temps de l'invasion sarrasine. Abbé du Monastier, il donna à ses moines l'ordre de s'enfuir et resta seul en face des Arabes. Battu de verges, il fut laissé mourant dans son église, mais le lendemain, se soutenant à peine, il se présenta, au milieu d'une fête, devant les imans, et commença à leur
prouver qu'ils n'adoraient pas le vrai Dieu : ses bourreaux l'achevèrent. Comme celle de sainte Foy, la statue de saint Chaffre contenait des reliques qui la rendaient plus


FIGURE XLVI
(saint Chaffre)

vénérable. La statue de saint Chaffre est peut-être du XIe siècle; celle de saint Baudime, déjà plus savante, doit être du XIIe.  Elle se conserve dans l'église de Saint-Nectaire, et perpétue le souvenir d'un des premiers missionnaires de la foi en
Auvergne. C'est une statue à mi-corps, comme celle de saint Chaffre; elle n'est pas en argent, mais en cuivre repoussé, ciselé et doré. La chevelure est faite de boucles parallèles, comme celles d'une tête grecque archaïque; les yeux d'ivoire, à la prunelle de corne, donnent à l'apôtre un regard sévère qui intimide. Ces œuvres encore éloignées de la vie prêtent aux saints une majesté lointaine, les entourent de mystère :
elles répondent à merveille aux sentiments qu'évoquait alors la sainteté. Ces statues reliquaires, nombreuses jadis dans les provinces montagneuses du centre de la France, semblent être l'œuvre d'artiste monastiques. Il y avait à Conques un atelier d'orfèvrerie, et c'est probablement dans l'abbaye même que la statue de sainte Foy a été faite au Xe siècle. Mais vers le milieu du XIIe siècle, les ateliers de Limoges
commencent à prendre la première place. C'est Limoges qui va avoir la charge de célébrer les saints de l'Aquitaine et bientôt d'une partie de la chrétienté; alors commence à Limoges cette longue liturgie de plusieurs siècles en l'honneur des saints, qui s'exprime par le cuivre et l'émail. Les monuments de l'orfèvrerie limousine du XIIe siècle sont rares aujourd'hui. On voyait, avant la Révolution, dans la fameuse abbaye de Grandmont, un des chefs-d'œuvre de l'école, une châsse émaillée, qui contenait les reliques de saint Étienne de Muret, le fondateur de l'ordre. Toute la vie du saint y était racontée. Saint Étienne, né en Auvergne, à Thiers, appartenait au Limousin par ses vertus : c'est, en effet, dans la forêt de Muret, près de Limoges, qu'il avait vécu. Il était naturel qu'il fût célébré par les émailleurs limousins. Une plaque d'émail du XIIe siècle, aujourd'hui au musée de Cluny, est très probablement un débris de la châsse de Grandmont. Saint Étienne de Muret, qui avait fait un pèlerinage à Bari, voit le grand saint du lieu, saint Nicolas, lui apparaître : une inscription en français du sud de la Loire explique la scène. La vie du saint se continuait, racontée dans tous ses détails. On devait voir comment saint Étienne de Muret, au moment où il se consacra à la solitude, mit un anneau à son doigt, et plaça sur sa tête l'acte de renoncement qu'il venait d'écrire : « Ce sera, dit-il, mon bouclier au jour de ma mort. » Ce génie symbolique était en parfaite harmonie avec l'art du XIIe siècle. Nous avons déjà parlé des châsses où saint Martial et sainte Valérie sont célébrés. Il subsiste encore une magnifique châsse de la seconde partie du XIIe siècle consacrée à la gloire d'un saint du centre de la France par les émailleurs limousins; elle contient les reliques de saint Calmin et se conserve dans
l'église de Mozat, près de Riom. Saint Calmin, qui fut au VIIe siècle gouverneur de l'Auvergne, du Velay et du Gévaudan, descendait de Calminius, l'ami de Sidoine Apollinaire. Un voyage à Lérins lui fit vivement sentir la beauté de la vie monastique. Il ne fut peut-être jamais moine, mais il fonda des monastères, en Velay d'abord, à Calminiacum, puis dans le Limousin, à Tulle, enfin en Auvergne, à Mozat. Sa femme, sainte Namadie prenait sa part de ses travaux et l'aidait de ses conseils. C'est pourquoi un des émaux nous montre les deux époux faisant construire Calminiacum, qui s'appellera plus tard le Monastier : c'est l'abbaye qu'illustrera saint Chaffre. On les voit ensuite faisant élever le monastère de Tulle, puis celui de Mozat; des maçons préparent le mortier, montent à l'échelle. L'abbaye n'est pas encore terminée, mais déjà l'église est construite et le calice est sur l'autel : la maison de Dieu a donc été faite avant celle des moines. Leur œuvre achevée, Calmin et Namadie meurent saintement; leur âme s'élève dans une auréole et la main de Dieu sort du ciel. Cette œuvre magnifique avive nos regrets. Combien de châsses semblables ont disparu, au temps où ces trésors,
arrachés du sanctuaire, se vendaient au poids du cuivre et devenaient des chaudrons ! Les quelques monuments de ce genre qui subsistent sont du XIIIe siècle ou des siècles suivants. Parfois, au milieu des bruyères et des blés noirs en fleurs du Limousin, on rencontre, dans une église de village, une châsse émaillée qui raconte l'histoire de saint Dulcide, de saint Psalmet, de l'ermite saint Viance. Parfois, un buste reliquaire représente le grave saint Étienne de Muret, l'esclave saint Théau, racheté par saint Éloi, et orfèvre comme son maître, l'abbé saint Yriex et l'exquise sainte Fortunade. Nous respirons un instant tout le parfum de passé, et il y a beaucoup de fastueux chefs-d'œuvre qui nous touchent moins que ces humbles merveilles.

III

Dans l'immense domaine de saint Martial, le Poitou occupait une place à part; il avait eu, en effet, au IVe siècle, un des saints les plus illustres de la chrétienté : saint Hilaire.
Celui-là était un saint authentique que la légende osa à peine effleurer, il n'avait pas vécu dans le crépuscule des temps mérovingiens, mais dans ce IVe siècle qu'éclaire encore la lumière antique. D'abord païen, marié avant d'être évêque, il avait été, une fois devenu chrétien, un des plus vaillants défenseurs de l'orthodoxie contre l'arianisme. Ses livres,  dit saint Jérôme,  avaient la force irrésistible du Rhône. Exilé en Orient par un empereur arien, il y étudia les ouvrages d'Origène et fit connaître à l'Église des Gaules l'exégèse allégorique des Alexandrins. Un tel saint était-il bien selon le coeur des pèlerins du XIIe siècle qui, passant par Poitiers pour aller à Saint-Jacques-
de-Compostelle, s'arrêtaient à son tombeau? On en pourrait douter, si on ne savait que de nombreuses merveilles avaient mairfesté le pouvoir du saint après sa mort et lui avaient créé une légende. C'est au-dessus du tombeau de saint Hilaire qu'apparut cette colonne de feu qui guida Clovis avant la bataille de Vouillé. Il est probable que c'étaient ces miracles qui avaient été peints de préférence dans l'église de Saint-Hilaire de Poitiers, un des sanctuaires les plus célèbres de la France; on pouvait voir, il y a quarante ans, quelques restes de ces fresques dans les absidioles. Un seul monument
rappelle aujourd'hui dans l'église la mémoire du grand docteur, un chapiteau qui représente sa mort. Aucune inscription n'accompagne la scène, mais, en un tel lieu, on ne peut guère douter que le saint qui meurt entouré de ses diacres et dont les anges emportent l'âme au ciel, ne soit saint Hilaire. Dans cette oeuvre, très gauche encore, l'émotion essaie de s'insinuer : Léonnius, le disciple favori du saint, se penche encore une fois sur le corps de son maître, et il exprime sa douleur en portant sa main à sa joue, comme saint Jean au pied de la croix. Mais il y a, à Poitiers, une autre église du XIIe siècle consacrée à saint Hilaire, Saint-Hilaire-de-la-Celle, qui s'élève, suivant la tradition, sur l'emplacement de sa maison. Vers la fin de sa vie, après la mort de sa femme et de sa fille, le saint en fit un oratoire, où il aimait à se retirer. C'est là qu'il
mourut en 368, et c'est de là qu'il fut porté à l'église Saint-Jean-et-Saint-Paul, construite au milieu de l'antique cimetière chrétien, et qui prit alors son nom. Jusqu'aux dévastations des protestants, on vit dans l'église Saint-Hilaire de la Celle un cénotaphe où la vie du saint était racontée. Il n'en subsiste plus qu'un fragment qui représente la mort de saint Hilaire. La scène est pleine de majesté : saint Hilaire étendu dans un
sarcophage ouvert est d'une taille colossale et semble d'une autre race que le reste des hommes. Derrière lui, les clercs de son église se tiennent debout; aux deux extrémités, deux diacres nimbés sont, à n'en pas douter, Léonnius et Justus, saint Lienne et saint Just, comme on les appelait, les plus chers disciples du maître. C'est à l'un d'eux que saint Hilaire demanda avant de mourir, si la nuit était silencieuse. Au milieu de l'assemblée deux anges apparaissent, les ailes ouvertes; ils sont descendus dans cette nuit religieuse pour recueillir l'âme du mort. Cette grande manière de composer
et de sentir nous indique une époque déjà avancée du XIIe siècle. Mais ne voit-on à Poitiers que la mort de saint Hilaire ? N'y trouve-t-on aucun trait de sa vie ? Un bas-relief, qui appartient aujourd'hui à la Société des antiquaires de l'Ouest, a longtemps décoré l'église détruite de Sainte-Triaise. Il représente saint Hilaire, la crosse à la main, consacrant à Dieu la vierge Troecia, sainte Triaise. Saint Hilaire avait pu admirer en Orient les commencements de la vie monastique, et Troecia, sa fille spirituelle, est une des plus anciennes religieuses de la Gaule. Elle vécut enfermée dans sa cellule, au milieu du cimetière chrétien de Poitiers, parmi les tombeaux, comme une recluse de la Thébaïde. La propre fille de saint Hilaire, sainte Abra, suivit l'exemple de Troceia. Son père encouragea sa vocation : dans une de ses lettres, il lui
promet une perle plus belle que celle que les vierges reçoivent de leurs fiancés. On montre encore dans l'église Saint-Hilaire le couvercle du sarcophage de sainte Abra.
Ce n'est pas en Poitou que l'on trouve aujourd'hui la plus curieuse représentation de la vie de saint Hilaire, mais en Bourgogne. Le sarcophage de sainte Abra (Saône-et-
Loire) qui lui est dédiée, raconte au linteau du portail le plus beau chapitre de son histoire. On voit le saint arrivant au concile de Séleucie pour lutter contres les évêques ariens. Mais ici le moyen âge a déjà fait son oeuvre et la légende a déformé la vérité. Dans la seconde partie du bas-relief, saint Hilaire est assis plus bas que les évêques : c'est que les ariens n'ont pas voulu lui faire de place parmi eux. Du haut du ciel un ange l'encense et le désigne comme le champion de Dieu. Le faux pape Léon quitte le concile en prononçant contre le saint des paroles menaçantes ; mais Léon meurt d'une
mort ignominieuse, et les démons s'emparent de son âme. Ce bas-relief, intéressant par son sujet, est une œuvre inexpressive, où. l'on ne trouve ni le mouvement, ni la vie de la grande sculpture bourguignonne. Saint Hilaire, que tant de pèlerins venaient vénérer dans son église, était le grand saint du Poitou; mais beaucoup d'autres saints, moins illustres, avaient inspiré les artistes de ces régions. Si les fresques des abbayes poitevines s'étaient aussi bien conservées que celles de l'abbaye de Saint-Savin-
sur-Gartempe (Vienne), nous aurions une véritable histoire ecclésiastique de la


FIGURE XLVII
(L'arche de Noé ; peinture - abbatiale de saint Savin-sur-Gartempe)

province. A Saint-Savin, en effet, de grandes figures peintes dans la tribune, non loin des scènes de la Passion, représentent les saints évêques de Poitiers. Des inscriptions, encore visibles, il y a quelques années, désignaient saint Gélasius et saint
Fortunat, le fameux évêque poète. Dans la crypte, le temps a respecté une partie des fresques consacrées à saint Savin, le patron de l'abbaye, et à son compagnon saint Cyprien. Ce sont deux martyrs. En vain furent-ils déchirés par des ongles de fer, attachés à la roue, exposés aux bêtes, chaque fois, par un miracle, ils échappèrent à la mort. Dans l'arène, les lions  que le peintre a fait aussi inoffensifs que des chiens  viennent leur lécher les pieds. Ce fut non loin de l'abbaye,  disait la tradition,  au bord de la Gartempe, que les deux saints furent mis à mort par leurs persécuteurs. Ainsi, les hautes antiquités du Poitou étaient sans cesse présentes aux visiteurs de l'abbaye. L'art ressuscitait le passé, le faisait vivre dans les imaginations. Soyons sûrs que dans toute l'étendue du Poitou,  une des régions de la France où la peinture monumentale a laissé le plus de traces , il y eut des sanctuaires où l'on pouvait, comme à Saint-Savin, apprendre l'histoire des saints de la province. Les moines
avaient éprouvé depuis longtemps la vertu éducatrice de la peinture; ils savaient sa puissance magique sur les foules illettrées. Mais à Charroux, à Saint-Jouin-de-Marnes, à Airvault, à Maillezais, dans toutes ces abbayes illustres du Poitou, il ne reste plus rien aujourd'hui.

IV

Le Berry, avec ses plaines indécises, fut souvent considéré comme un fief de saint Martial, car c'était lui, disait la tradition limousine, qui avait fondé l'église de Bourges. Mais à cette légende le Berry en opposait une autre, celle de son premier apôtre saint Ursin. Ursin était le Nathanael de l'Évangile; c'est lui qui le premier avait annoncé la foi nouvelle à Bourges, et il y avait apporté deux reliques sans prix : la courroie qui attachait le Christ à la colonne et quelques gouttes du sang de saint Étienne, car Nathanael avait assisté au supplice du saint diacre. Saint Ursin devenait donc presque
l'égal en dignité de saint Martial. Parmi les successeurs de saint Ursin, plusieurs évêques de Bourges s'étaient élevés à la sainteté par leurs vertus. Le Berry avait eu aussi ses saints ermites : parfois, dans ce pays de marécages et de grandes forêts, on rencontrait un homme de Dieu dans la solitude. Beaucoup de ces saints qui vivaient dans la mémoire du peuple avaient dû être célébrés par l'art du XIIe siècle. Les
vieilles églises du Berry ne sont pas très riches en œuvres de sculpture, mais beaucoup de ces églises étaient peintes. Plus d'une fresque se cache encore sous le badigeon, et l'on verra peut-être reparaître un jour ces saints jadis fameux : saint Sulpice, saint Patrocle, saint Venant, saint Léopardin, saint Laurian et la bergère sainte Solange, aussi célèbre dans le Berry que sainte Valérie l'était dans le Limousin.  Que nous reste-t-il donc aujourd'hui ? On voit à l'extérieur de l'église de Châtillon-sur-Indre (Indre) un bas-relief du XIIe siècle, qui décorait jadis le portail, et qui est encastré maintenant dans une fenêtre haute du transept. Il représente le Christ en majesté assis entre deux séraphins; au-dessous, saint Austregisille reçoit un flambeau de la main de saint Pierre. Saint Austregisille, que les bergers et les laboureurs appelaient saint Oustrille, était évêque de Bourges au commencement du VIIe siècle. Avant son entrée dans les ordres, on l'avait vu se rendre à Chalon pour y combattre en champ clos; évêque, il conserva l'énergie du soldat et il lutta sans cesse contre les rois mérovingiens et les agents de leur fisc. Sa sainteté s'était manifestée par de nombreux miracles : à Châtillon, un autre bas-relief dont il ne reste plus que l'inscription, le montrait guérissant une possédée. Il est fâcheux que l'architecte, qui restaura l'église vers 1880, ait si mal placé l'ancien tympan, car on ne peut plus distinguer aujourd'hui saint Austregisille recevant de saint Pierre, c'est-à-dire de Rome, le flambeau de la foi. L'église de Selles-sur-Cher (Loir-et-Cher) a heureusement  conservé à leur place les rudes bas-reliefs qui furent consacrés à la gloire d'Eusitius ou saint Eusice. Il y a plusieurs
beaux traits dans la vie de saint Eusice. Ses parents étaient si pauvres qu'ils furent obligés de vendre un de leurs enfants comme esclave, et ce fut saint Eusice qui se sacrifia pour ses frères. Esclave, il s'affranchit par la sainteté. Sa réputation était si grande, que Childebert, traversant le Berry pour aller combattre les Visigoths d'Espagne, voulut le voir et l'interroger sur l'avenir. Il lui offrit cinquante sous
d'or. « Donne cet argent aux pauvres, lui dit Eusitius, pour moi il me suffit de prier pour mes péchés »; puis, il annonça au roi qu'il reviendrait victorieux. Sa prédiction s'accomplit, c'est pourquoi, à son retour, Childebert s'arrêta pour revoir le saint. Après lui avoir donné le baiser de paix, il lui offrit la moitié du butin qu'il rapportait d'Espagne. Il y avait dans le cortège du roi des prisonniers de guerre « liés deux à deux, dit l'hagiographe, comme des couples de chiens ». Pour toute faveur, saint Eusice demanda au roi de les délivrer. Chose étrange, ces beaux épisodes ne figurent pas dans les bas-reliefs qui décorent l'abside de Selles-sur-Cher. Saint Eusice, qui fut grand par la charité, nous apparaît là comme un thaumaturge, presque comme un magicien. Il oblige les démons à se rendre utiles; sur son ordre, ils s'attellent à un char et transportent les pierres de l'église. Il se sert des
loups pour garder ses. troupeaux. Rien ne lui est impossible : un jour, qu'on lui a volé sa pelle de boulanger, il entre dans le four brûlant et y place tranquillement ses pains. Voilà ce que nous montre l'abside de Selles-sur-Cher. Ces miracles enchantaient le XIIe siècle; souvent c'était le peuple lui-même qui créait cette féerie; il faisait de la vie des saints une chanson de la veillée, un conte d'hiver. Guibert de Nogent nous rapporte, dans son De Pignoribus sanctorum, que les femmes, en tissant la toile, chantaient les louanges de beaucoup de saints dont la vie était toute fabuleuse; a et si l'on veut les
reprendre, ajoute-t-il, elles vous menacent de leurs navettes ». Les bas-reliefs de Selles-sur-Cher témoignent encore de cette passion du XIIe siècle pour le merveilleux.

V

Il est peu de saints plus poétiques que les saints de l'Auvergne. Ce charme leur vient peut-être de leur premier historien, Grégoire de Tours, artiste sans le savoir, qui ne nous montre pas ses héros, mais nous les laisse entrevoir dans un demi-jour plein de mystère. C'est Injuriosus et Scolastica, « les amants d'Auvergne », dont un rosier réunit les tombeaux; ce sont les solitaires de la caverne et de la forêt, saint Émilien, saint Marien, saint Lupicin, saint Calupan, qui renouvellent sous un ciel glacé les prodiges des anachorètes de l'Egypte; c'est la vierge sainte Georges, dont le convoi funèbre fut escorté par un vol de colombes. La sauvage nature qui les entoure répand aussi sur eux un peu de son charme;  ce charme que le désert de la Chaise-Dieu communique à saint Robert, le haut château de Mercœur et les laves de la vallée de la Couze à saint Odilon, l'immense forêt du pays de Combrailles, la Pontiacensis sylva, aux vieux abbés de Menât. Le voyageur qui parcourt l'Auvergne, la mémoire remplie de la longue histoire de ses saints, les cherche dans ses belles églises romanes; mais il n'en découvre qu'un bien petit nombre, car le temps et les hommes n'ont pas été plus cléments à l'Auvergne qu'à nos autres provinces. L'apôtre de l'Auvergne, saint Austremoine, reposa d'abord dans l'église d'Issoire. On avait perdu le souvenir de son
tombeau lorsque des hommes vêtus de blanc et portant des cierges, qui apparaissaient la nuit dans l'église, en firent retrouver la place. D'Issoire le corps de saint Austremoine fut porté à Volvic. Mais bientôt ses reliques firent un dernier voyage : elles allèrent reposer dans l'abbaye de Mozat, et Pépin le Bref, suivant la tradition, aurait porté lui-même la châsse du saint sur ses épaules. On sera déçu si on cherche
à Issoire et à Volvic la trace de saint Austremoine : on ne l'y trouvera pas. Mais, à Mozat, une oeuvre d'art rappelle son souvenir. Sur un des côtés de la châsse de saint Calmin, dont nous avons déjà parlé, un évêque, la crosse en main, est debout : c'est comme nous l'apprend l'inscription, Sanctus Austremonius, saint Austremoine. Mais il se pourrait que saint Austremoine fût représenté ailleurs encore. On voit, encastré dans un des murs de l'église de Mozat, le linteau d'un ancien portail. La Vierge, assise en majesté, est au milieu; elle porte l'Enfant sur ses genoux et elle ressemble, à s'y méprendre, aux vierges de bois des églises auvergnates; saint Pierre est à sa droite et saint Jean à sa gauche. Près de saint Pierre un évêque est debout. Quel peut être cet évêque ? sinon l'apôtre de l'Auvergne, saint Austremoine, le grand saint dont l'église de


FIGURE XLVIII
(châsse de saint Austremoine, l'église Saint-Austremoine, Issoire)

Mozat possédait les reliques. Il est, on n'en saurait douter, au nombre des bienheureux, car de la main il présente à la Vierge un abbé prosterné. Dans ce bas-relief cet abbé  un des constructeurs de l'église  est le seul vivant, seul il est encore sur la terre. Il n'est pas jusqu'à la place donnée à l'évêque aux côtés de saint Pierre qui ne soit significative, car la légende auvergnate, jalouse d'égaler saint Austremoine à saint Martial, faisait de lui un disciple du prince des apôtres. C'est à l'extrémité de l'ancienne Auvergne que nous retrouvons encore une fois saint Austremoine. Dans l'église d'Ébreuil, une fresque du XIIe siècle peinte dans la tribune nous le montre en face de sainte Valérie : la grande sainte du Poitou rencontre ici le grand saint de l'Auvergne.
On racontait que saint Austremoine étant venu de Rome en Gaule avec deux compagnons. Nectaire et Baudime, leur avait confié le soin d'évangéliser le sud de la Limagne et les régions voisines. Aussi, l'église de Saint-Nectaire nous montre-t-elle à la fois le buste de saint Baudime, dont nous avons parié, et un chapiteau consacré à l'histoire de son saint patron.  Ce chapiteau raconte quatre épisodes de l'histoire de saint Nectaire. L'artiste nous transporte d'abord à Rome : saint Pierre ordonne prêtre saint Nectaire, son filleul, et, aussitôt, commence la lutte du saint et du démon. Un jour qu'il voulait passer le Tibre pour aller prier dans un sanctuaire de l'autre rive, il reconnut que le rameur qui s'approchait avec sa barque était Satan lui-même. Sans peur il entra dans la barque, car un ange envoyé par Dieu planait dans le ciel, en sorte que Satan fut contraint de le déposer sain et sauf sur l'autre bord. Légende de demi-jour qui semble nous transporter non dans la Rome de saint Pierre, mais dans l'étrange Rome du moyen âge. Cependant, saint Pierre vient d'envoyer en Gaule Austremoine, Nectaire et Baudime. A peine arrivé à Sutri, Nectaire tombe malade et meurt. Baudime revient à Rome annoncer la nouvelle à saint Pierre qui accourt; il touche le cadavre avec la croix et aussitôt Nectaire se lève de son sarcophage. Saint Nectaire, qui a traversé la mort, est devenu tout puissant sur elle. Le voici maintenant en Auvergne. Un jour qu'il annonçait l'évangile, le cortège funèbre d'un Gallo-romain, nommé Bradulus, vint à passer près de l'endroit où il parlait : on le supplie de ressusciter Bradulus. Saint Nectaire prend le bras du mort et lui ordonne de se lever. Derrière le saint se dresse l'église de Saint-Nectaire telle que nous la voyons encore aujourd'hui au sommet de son rocher. Il a fallu à l'artiste beaucoup d'ingéniosité pour faire dire tant de choses à un chapiteau : si condensée que soit son œuvre elle reste claire. Ainsi, c'est moins sous l'aspect d'un apôtre que sous celui d'un puissant thaumaturge qu'apparaissait saint Nectaire aux pèlerins qui visitaient son église. Parmi les successeurs de saint Austremoine au siège de Clermont, le plus célèbre ne fut pas, comme on pourrait le
croire, le vaillant Sidoine Apollinaire, mais l'évêque Prsejectus. Dans la France centrale, Prsejectus s'appelle saint Priest, dans la France du nord, saint Prix. Il était déjà fameux
par ses vertus, ses aumônes, ses fondations charitables : sa mort fit de lui un saint. Il fut assassiné près de Volvic par les complices d'un homme dont il avait dénoncé les crimes à Childéric. Quelques-unes de ses reliques apportées à Flavigny, à Saint-Quentin, à Béthune répandirent au loin son culte. Contemporain de saint Léger, assassiné comme lui, il eut alors une renommée presque égale. Son corps resta
enseveli dans l'église de Volvic où il est vénéré depuis des siècles; on y conserve aussi l'épée de l'assassin. De l'église élevée à Volvic au XIIe siècle, il ne subsiste plus aujourd'hui que le choeur : la nef refaite est moderne. Un des chapiteaux du choeur est consacré, non pas à la mort de saint Priest, qui était sans doute représentée ailleurs, mais à la châsse de ses reliques; un donateur est debout auprès de la châsse, qui
est bien celle du saint évêque, comme une inscription nous l'apprend. Voilà quelques vestiges de l'antique histoire religieuse, de l'Auvergne; on souhaiterait d'en découvrir davantage. On regrette de ne plus rien voir dans l'église de Brioude qui rappelle le martyr saint Julien, jadis si fameux. Mais c'est à Menât surtout que l'on voudrait retrouver quelque souvenir des anciens moines de l'abbaye qui s'élevèrent à la sainteté, saint Brachio, le chasseur de sangliers, et saint Carilèphe, le compagnon de l'auroch dans la forêt. Malheureusement le choeur de l'église de Menât, où se trouvaient les chapiteaux
historiés, a été détruit. Un seul de ces chapiteaux subsiste, déposé dans un des bas-côtés. Il représente une scène énigmatique dont un moine de Menât est probablement le héros : on croirait voir saint Ménélé refusant la fiancée que son père
lui présente et songeant déjà à aller demander la robe monastique à l'abbé de Menât que l'on aperçoit plus loin assis sur son siège.

VI

II faut redescendre vers le Midi. C'est en Provence que nous rencontrons la plus merveilleuse de toutes nos légendes. On lit dans un manuscrit du XIe siècle, conservé à la Bibliothèque Nationale [t. B. N, latin 17627], qu'après la résurrection du Sauveur, Marie-Madeleine, sa soeur Marthe et son frère Lazare, fuyant la persécution des Juifs, s'embarquèrent et vinrent aborder à Marseille. Ce sont eux qui apportèrent la foi en Provence. Un récit un peu postérieur fait venir avec eux saint Maximin, apôtre d'Aix, et saint Trophime, apôtre d'Arles. Ainsi cette belle Provence, lumineuse comme l'Orient, devenait une autre Judée; Lazare était sorti du tombeau pour lui annoncer l'Évangile; Marthe et Marie étaient venues lui répéter les paroles qu'elles avaient recueillies de la bouche du Seigneur. Quelle église pouvait se glorifier d'une plus noble origine ? Cette légende a-t-elle laissé quelque trace dans l'art provençal du XIIe siècle ? A la façade de Saint-Trophime d'Arles, on voit représenté, au milieu des apôtres, saint Trophime lui-même; il tient la crosse, et deux anges posent la mitre sur sa tête, comme pour marquer le caractère divin de sa mission. Dans le cloître, on le retrouve encore adossé à un pilier : cette fois, il est tête nue, porte la tunique et le manteau, et, s'il n'avait les
pieds chaussés, on le prendrait pour un apôtre. Aucun chapiteau historié, aucun bas-relief n'accompagne ces deux images du saint et ne raconte son histoire. Vers 1180, les artistes d'Arles avaient déjà sans doute entendu raconter que saint
Trophime était venu en Provence avec Lazare, Marie-Madeleine et Marthe, mais ils n'ont fait aucune allusion à ce récit. On dirait même qu'ils en ont suivi un autre : en plaçant saint Trophime aux côtés de saint Pierre, ils semblent avoir voulu donner crédit à l'ancienne tradition de l'église d'Arles, suivant laquelle saint Trophime aurait été envoyé de Rome par le prince des apôtres. Il serait surprenant pourtant qu'il n'y eût pas dans l'art provençal du XIIe siècle la moindre trace de la fameuse légende. On l'y rencontre, en effet, au moins une fois. Il y a au portail latéral de l'église Sainte-Marthe à Tarascon une inscription fort bien conservée qui nous donne la date de la dédicace de l'église (1er juin 1197); deux petits bas-reliefs l'accompagnent. L'un représente la consécration de l'autel, l'autre un évêque et deux diacres groupés autour d'un corps
étendu sur la pierre. Quel est le sens de cette scène ? On la comprendra, si l'on se souvient que dix ans auparavant on crut avoir découvert à Tarascon le corps de sainte Marthe, et que c'est pour recevoir cette insigne relique que l'on rebâtit alors l'église. Nous avons donc sous les yeux, soit la translation des reliques de sainte Marthe dans son sanctuaire, soit ses funérailles. Cette dernière interprétation me paraît être la meilleure, car on voit deux anges emportant au ciel l'âme de la sainte; de plus, un des assistants est nimbé; or le récit apocryphe rapportait que saint Front avait été
miraculeusement transporté à Tarascon auprès du lit de mort de sainte Marthe. Ainsi, vers la fin du XIIe siècle la légende de l'apostolat de Lazare et de ses soeurs était bien établie. Le bas-relief de Tarascon est la plus ancienne oeuvre d'art qu'elle ait fait
naître en Provence  premier anneau de la chaîne qui aboutit au dernier chant de Mireille. La Provence avait été un peu lente à traduire le légende par l'art; une autre région l'avait devancée : la Bourgogne. C'est la Bourgogne, en effet, nous le savons aujourd'hui, qui a créé la légende. Mgr Duchesne en a fort bien expliqué l'origine. Les moines de Vézelay se vantaient, depuis le milieu du XIe siècle, de posséder les reliques de sainte Marie-Madeleine, mais ils étaient embarrassés pour expliquer aux pèlerins d'où leur venait ce précieux trésor. C'est pourquoi l'un d'eux fit paraître un récit tout nouveau de la vie de Marie-Madeleine. Il y était dit, pour la première fois, que la sainte avait abordé en Provence, qu'elle y avait vécu et qu'elle y était morte. L'auteur ajoutait qu'un moine de Vézelay, voyageant en Provence, avait reconnu, dans la crypte de Saint-Maximin, le sarcophage de marbre où la sainte était ensevelie : il n'avait
pas hésité à dérober ce corps sacré et à l'apporter en Bourgogne. Tel fut le récit que les pèlerins de Vézelay recueillirent désormais de la bouche des moines. Dès la fin du XIe siècle de nouveaux épisodes vinrent enrichir la légende : Marthe, Lazare et l'évêque Maximin furent associés à Marie-Madeleine. Ainsi cette sorte d'épopée, qu'on serait tenté de croire d'origine provençale, a été créée en Bourgogne. Elle fut célèbre en Bourgogne avant de l'être en Provence; bien mieux, la Bourgogne, qui venait de prendre possession des reliques de sainte Madeleine, s'attribua bientôt celles de Lazare. Dès le commencement du XIIe siècle, il fut admis qu'elles reposaient dans la cathédrale d'Autun. Il semble que le concours de pèlerins qu'elles attiraient détermina l'évêque à entreprendre vers 1120 la construction d'une nouvelle église : c'est la belle cathédrale que nous voyons aujourd'hui. L'art bourguignon du XIe siècle s'est-il inspiré de ces légendes ? Il est naturel de les chercher d'abord à Vézelay, le sanctuaire de Marie-Madeleine, mais on ne les y trouvera pas. Le portail de la façade est une oeuvre moderne, qui reproduit avec une prétentieuse gaucherie les sujets de l'ancien tympan
et de son linteau [Tympan et linteau existent encore aujourd'hui, mais les sujets martelés
se discernent à peine.]. On y voit la Résurrection de Lazare et les scènes de l'Évangile où Madeleine figure, mais rien n'y rappelle le fameux voyage de Provence. Les chapiteaux de la nef, si nombreux et si variés, ne nous parlent pas une seule fois de Marie-Madeleine. Le choeur, il est vrai, a été refait à l'époque gothique, et c'est là peut-être, autour du tombeau de la sainte, qu'était racontée son histoire apocryphe. Aujourd'hui, aucune oeuvre d'art ne commémore la légende dans l'église où elle naquit, où tant de milliers de pèlerins l'entendirent raconter. Serons-nous plus heureux à la cathédrale d'Autun, l'église de saint Lazare? L'étude des chapiteaux et des tympans pourrait nous faire croire que non. Là non plus, aucune oeuvre n'est consacrée au voyage de Provence, mais il n'en était pas ainsi autrefois. Jusqu'au XVIIIe siècle, on put voir au portail du Jugement dernier trois statues adossées au trumeau : elles montraient aux pèlerins Lazare entre Marthe et Marie-Madeleine. Ce groupement prendra tout son sens, quand on saura que Lazare était vêtu en évêque. Ainsi, on n'en saurait; douter, c'est Lazare, apôtre de la Provence, que l'artiste avait prétendu représenter; et près de Lazare il avait mis ses deux soeurs : parce qu'elles avaient été les compagnes de son apostolat. Il y avait en Bourgogne une autre église dédiée à saint Lazare, Saint-Lazare d'Avallon. Trois magnifiques portails du XIIe siècle y donnaient accès : il n'en subsiste plus que deux aujourd'hui privés de leurs statues et de leurs bas-reliefs. De médiocres dessins publiés par dom Plancher dans son Histoire de Bourgogne nous en laissent deviner l'aspect primitif. Au trumeau du portail central un évêque était adossé : c'était saint Lazare, le patron de l'église. Ainsi, à Avallon comme à Autun, les ornements épiscopaux désignaient saint Lazare comme le premier chef de l'église provençale. Il est regrettable que ces curieuses statues d'Autun et d'Avallon ne nous aient pas été conservées; elles nous eussent montré comment les premiers sculpteurs bourguignons se représentaient ce mystérieux Lazare qui avait franchi deux fois les portes de la mort.
Les statues d'Autun et de Vézelay avaient été visiblement inspirées par la légende : ce sont les seules dont nous ayons pu retrouver la trace: Un bas-relief en Provence, deux statues en Bourgogne, voilà tout ce que l'histoire apocryphe de Madeleine, de Marthe et de Lazare semble avoir donné à l'art du XIIe siècle. C'est peu, mais ce n'est qu'un commencement; il faut songer qu'au XIIe siècle le récit des moines de Vézelay avait à peine commencé à faire la conquête des imaginations. Ce n'est que dans les siècles suivants qu'il sera accepté de tous et deviendra une des sources vives de l'art chrétien. Mais c'est par la Provence et non par la Bourgogne que la gloire de Marie-Madeleine pénitente s'est répandue dans le monde. En 1279, en effet, les Provençaux annoncèrent à la chrétienté la découverte à Saint-Maximin du corps de sainte Madeleine, que les
 
 

 


FIGURE XLIX
(église du Vézelay)

moines de Vézelay, abusés par l'erreur d'un des leurs, avaient cru jusque-là posséder. La découverte fut tenue pour authentique et désormais le sanctuaire bourguignon fut déserté au profit des lieux saints de la Provence, le tombeau de Saint-Maximin et la caverne de la Sainte-Baume. Les pèlerins, qui aimèrent toujours à monter vers les cimes en chantant, abandonnèrent la montagne de Vézelay pour le haut rocher de la Sainte-Baume. C'est alors que les comtes de Provence, qui étaient en même temps rois de Naples, firent connaître la légende à l'Italie, et l'on vit Giotto peindre, au Bargello de Florence et dans une des chapelles d'Assise, Marie-Madeleine dans le désert
provençal recevant la communion de la main de saint Maximin. La Bourgogne, qui célébrait l'apôtre de la Provence, ce Lazare dont elle avait elle-même imaginé l'apostolat, n'oubliait pas son apôtre à elle, le martyr saint Bénigne. Peu de saints avaient en France une plus magnifique sépulture; son tombeau était à Dijon, et les moines de saint Bénigne en étaient les gardiens. Il était au centre d'une grande rotonde, dont la Révolution n'a laissé subsister que la crypte. Cette rotonde formait, au XIIe siècle, l'extrémité d'une église romane, refaite plus tard. Un beau portail orné de bas-reliefs et de statues y donnait accès; il a été détruit, mais un dessin de dom Plancher nous en a conservé l'aspect. Au trumeau s'adosse un évêque qui porte une crosse archaïque en forme de tau et une mitre qui ressemble à un bonnet : c'est saint
Bénigne. Ce costume le désigne comme le chef d'une des premières communautés chrétiennes de la Bourgogne. La tête mutilée de l'apôtre se conserve au Musée archéologique de Dijon. Ainsi, dans ce portail où l'on voyait des deux côtés les statues des prophètes et des apôtres, saint Bénigne occupait la place d'honneur, c'est à lui qu'allaient d'abord les regards. Les artistes bourguignons turent les premiers qui
attirèrent ainsi le respect du visiteur sur le patron d'une église : le Saint-Lazare d'Autun et le Saint-Jean-Baptiste de Vézelay sont les plus anciennes statues adossées à un trumeau qu'il y ait ou qu'il y ait eu en France. Les artistes du Midi, si novateurs, n'avaient rien imaginé de pareil. Cet hommage rendu à saint Bénigne, ne parut pas suffisant
aux moines de l'abbaye, car ils lui consacrèrent encore un tympan, jadis encastré dans le mur du vestibule. Il n'existe plus aujourd'hui, mais il a été reproduit avec beaucoup de
soin par dom Plancher. On y voyait le martyre du saint Bénigne, envoyé en Gaule, suivant la tradition, par le Grec Polycarpe, disciple de saint Jean l'Évangéliste, avait
refusé de sacrifier aux dieux. Le gouverneur du Castrum de Dijon, Aurelianus, assisté de son lieutenant Terentius, le fit comparaître devant lui et le condamna aux supplices
les plus raffinés. Ce sont ces supplices que nous montre le tympan : le saint est debout et deux bourreaux sont occupés à sceller ses pieds dans la pierre avec du plomb fondu. Les mains du martyr sont brisées : elles laissaient voir sans doute autrefois les alènes enfoncées sous chacun de ses ongles. Deux autres bourreaux viennent de recevoir l'ordre d'en finir avec l'invincible athlète : placés symétriquement à sa gauche et à sa droite, comme le centurion et le porte-éponge sur le Calvaire, ils lui enfoncent leur pique dans la poitrine. Le saint expire et, comme son maître, penche la tête sur son épaule.
A ce moment, dit la légende, les chrétiens virent une colombe blanche s'élever au-dessus de sa tête, — épisode que l'artiste n'a eu garde d'oublier; une main sortant du ciel manifeste la présence de Dieu. Le beau caractère de l'œuvre, sa noble symétrie lui assignent une date voisine de la fin du XIIe siècle. Dijon avait donc dignement célébré son apôtre. La Bourgogne fut, au moyen âge, le pays des grands ordres
monastiques et des saints abbés. Ce sont ces illustres abbés que nous voudrions voir et que nous ne voyons pas. Que saint Bernard, qui interdit l'art à ses moines comme un luxe inutile, ne soit représenté nulle part, il ne faut pas s'en étonner : il l'a voulu ainsi. Ce saint François d'Assise du XIIe siècle ne le cède à l'autre que parce qu'il lui a manqué le sentiment de la beauté. Un de ses biographes raconte qu'il marcha une journée entière au bord du lac de Genève, et que le soir il demanda où était le lac. Ce n'est pas lui qui eût composé, dans un transport d'enthousiasme, le Cantique des créatures. Mais ce qui surprend, c'est de ne rencontrer nulle part en Bourgogne, au cœur même de cet immense royaume clunisien, l'image des premiers abbés de Cluny, qui furent tous des.
saints. De Cluny, il est vrai, presque tout a disparu; mais rien ne les rappelle à Paray-le-Monial, au ils vinrent si souvent, rien à la Charité-sùr-Loire, un de leurs plus magnifiques prieurés. L'abbaye de Souvigny, cette fille chérie de Cluny, où saint Maïeul et saint Odilon furent ensevelis, n'a même pas su garder leur tombeau. Leur souvenir y serait entièrement aboli, si on ne voyait leur image peinte sur la porte d'une armoire reliquaire de la fin du moyen âge. Ces noms aperçus tout à coup, Maïolus et Odilo, remuent profondément la sensibilité : on voit en imagination cet éloquent Maïeul, plus grand que les souverains de son temps par l'intelligence et par l'âme, et ce doux Odilon, qui prêtait l'oreille aux voix de l'autre monde et qui créa la fête des morts. Mais si ces grands noms des abbés de Cluny, saint Odon, saint Maïeul, saint Odilon, saint Hugues s'effacent, si rien aujourd'hui ne ramine leur souvenir dans la mémoire du visiteur de leurs églises, la faute n'en est sans doute pas aux artistes bourguignons du XIIe siècle, ni aux moines clunisiens, si passionnés pour l'art, si profondément attachés à leurs
souvenirs, — mais à des générations sans respect et sans amour qui ont tout anéanti.
En Bourgogne, une seule église monastique conserve encore quelques peintures qui commémorent son passé, c'est celle d'Anzy-le-Duc (Saône-et-Loire). Anzy-le-Duc ne relevait pas de Cluny, mais de l'abbaye de Saint-Martin d'Autun, que Brunehaut avait fondée et où elle avait son tombeau. Des fresques peintes vers la fin du XIIe siècle dans l'abside de l'église d'Anzy racontent l'histoire du petit prieuré, fier de ses origines. Au-dessous de l'Ascension du Christ, on voit Lethbald et sa femme offrant à Dieu, vers 876, leur villa d'Anzy, qui va devenir un monastère. Un de leurs descendants fut ce Lethbald, ce pèlerin célèbre dont le moyen âge a plusieurs fois raconté l'histoire. Contemplant Jérusalem du haut du Mont des Oliviers, il eut un tel transport de joie
qu'il demanda à Dieu de le faire mourir le jour même : sa prière fut exaucée. Fondé par Lethbald, ou saint Liébaud, le prieuré d'Anzy-le-Duc fut gouverné par un saint, saint Hugues d'Autun. Hugues, ami de Bernon, fondateur de Cluny, était vénéré de toute la Bourgogne. On venait consulter comme un oracle ce vieillard « dont la tête était blanche comme le duvet du cygne ». On le consultait sur toute chose, sur les maladies et sur les semailles aussi bien que sur les cas de conscience. Les miracles qu'il faisait pendant sa vie, sa châsse continua à les faire après sa mort et elle attira longtemps les pèlerins à Anzy-le-Duc. Les fresques d'Anzy racontent quelques traits de son histoire. Toutes ces peintures recouvertes d'un badigeon ont été retrouvées par hasard, en 1856, et malheureusement fort restaurées : elles font revivre un passé perdu dans la nuit.
Voilà un exemple de ce que faisaient les moines bourguignons pour perpétuer leurs traditions et pour honorer leurs sainte. Si saint Liébaut et saint Hugues d'Anzy, inconnus aujourd'hui, ont été célébrés par l'art, on peut bien croire que les Odilon et les Maïeul n'avaient pas été oubliés.

VII

La Bourgogne nous achemine vers la région parisienne. Au XIIe siècle, le saint le plus illustre de l'Ile-de-Françe était saint Denis. Sa gloire avait grandi avec la monarchie
française. Il ne suffisait pas que saint Denis eût été le premier apôtre de Paris, il lui fallait une légende digne du protecteur des rois de France et du gardien de leur tombeau. On racontait donc que saint Denis de Paris était le même personnage
que saint Denis l'aréopagite converti par saint Paul. Il avait observé à Athènes l'éclipsé qui obscurcit le soleil à l'heure où Jésus expira sur le Calvaire, et, plus tard, il écrivit ce livre fameux de la Divine Hiérarchie, où le ciel est décrit, où Dieu apparaît dans sa gloire au milieu des cercles concentriques formés par les anges. C'est ce savant, ce profond penseur, qui avait été jugé digne d'évangéliser la ville de la science. Son souvenir était cher aux Parisiens qui vénéraient, derrière Notre-Dame de Paris, dans l'église Saint-Denis-du-Pas, le lieu où il avait commencé son martyre, à Saint-Denis-
de-la-Chartre, dans la Cité, la prison où il avait été enfermé et où ses chaînes étaient suspendues, à Montmartre la place qu'il avait rougie de son sang. L'abbaye de Saint-Denis était le terme du pèlerinage : c'est là que reposait le martyr auprès de ses deux compagnons, Rustique et Elcuthère. Comment l'art avait-il honoré saint Denis à Paris, nous l'ignorons; mais à l'abbaye de Saint-Denis nous l'entrevoyons encore. Le portail qui s'ouvre à droite du spectateur dans la façade de la basilique est décoré d'un bas-relief dont saint Denis est le héros : il emplit tout le tympan. Il est reçu que ce bas-relief est récent et les archéologues passent sans lever les yeux, mais ce dédain n'est qu'à moitié justifié. Assurément toutes les têtes sont modernes, les draperies ont été visiblement retouchées, et quelques personnages mêmes semblent entièrement refaits. L'oeuvre paraît être d'hier; pourtant le dessin général est ancien. La composition ne date pas de 1839, elle n'est pas du restaurateur Debret, elle est bien de 1135 environ et appartient aux artistes de Suger. Nous pouvons en croire le baron de Guilhermy, qui a suivi avec tant d'attention tout ce qui s'est fait à Saint-Denis dans la première partie du XIXe siècle. A son témoignage, une seule chose dans ce portail est entièrement moderne : la seconde voussure avec ses personnages. Le reste est une restauration d'un original ancien. La scène que Suger avait fait représenter dans le tympan était empruntée à la légende de saint Denis, mais ce n'était ni sa conversion par saint Paul, ni sa prédication, ni son martyre : on voyait Jésus, escorté d'un vol d'anges, descendant dans la prison où le saint attendait la mort et le faisant
communier de sa main. Nous ne savons quand cet épisode entra dans la légende de saint Denis; tout ce que nous pouvons dire, c'est que, dès le XIe siècle, une miniature d'un missel de l'abbaye de Saint-Denis le représente. C'est une de ces belles légendes où le moyen âge s'exprime tout entier, où il réalise son éternel désir d'union avec le ciel. Voilà l'image que contemplait le pèlerin en entrant dans la basilique, et elle lui donnait une plus haute idée de saint Denis que n'eût pu faire son martyre lui-même. Suger qui, en toute chose, est un novateur, est le premier qui ait consacré un portail à la gloire d'un saint : il n'y avait rien de pareil avant lui, et, après lui, on tardera assez longtemps à suivre son exemple. C'est, en effet, à une époque assez avancée du XIIe siècle
que nous rencontrons, dans une région voisine de l'Ile-de-Françe, un portail où a été racontée la légende d'un saint. Non loin de Provins s'élève le prieuré de Saint-Loup de Naud, dont; la belle église remonte au XIIe siècle. Saint Loup de Naud dépendait de l'abbaye Saint-Pierre-le-Vif de Sens; aussi était-ce un évêque de Sens qui était le patron de l'église. Saint Loup, que dans la région on appelait saint Leu, était un de ces évêques du VIIe siècle qui tinrent tête aux rois mérovingiens et supportèrent courageusement l'exil. Plein de bonté, charitable, assidu à visiter les anciens tombeaux, il avait de son vivant la réputation d'un saint. Mais son histoire ne tarda pas à se résoudre tout entière en miracles; ces vieux récits enchantèrent Jacques de Voragine qui les reproduisit plus tard dans sa Légende dorée. Au portail de Saint-Loup de Naud,


FIGURE L
(l'église de Saint-Loup-de-Naud - tympan)

les épisodes de la vie du saint évêque ne sont pas sculptés dans le tympan, comme à Saint-Denis, mais dans les voussures. C'est au portail du Mans, qu'on vit pour la première fois, les scènes des voussures former un récit suivi : la vie de Jésus-Christ y est racontée. L'exemple fut suivi à Saint-Loup de Naud, mais la légende du saint
y remplace l'histoire du Christ : déjà les portails du XIIIe siècle s'annoncent. Le saint évêque, adossé au trumeau, accueille les fidèles. Un chapiteau sculpté, placé au-dessus de sa tête, le faisait reconnaître à ceux qui étaient familiers avec sa légende : on y voit un ange laissant tomber une pierre précieuse dans le calice, pendant que saint Loup célèbre la messe. Cette pierre précieuse venue du ciel se conservait, disait-on, dans le trésor royal. La légende du saint se continue dans les voussures qui entourent le Christ en majesté du tympan. On y aperçoit la cloche de Saint-Étienne de Sens. Cette cloche avait un si beau son que le roi Clotaire la fit enlever de la
cathédrale et transporter à Paris; mais, par la volonté de saint Loup, elle devint muette soudain, de sorte qu'il fallut la renvoyer à Sens, où le saint lui rendit sa voix harmonieuse. D'autres merveilles se déchiffrent dans les voussures : des prisonniers sont miraculeusement délivrés de leurs liens; puis, par la toute-puissance de sa parole, le saint emprisonne le démon dans un grand vase. Ces contes de fée prennent autant d'importance qu'un autre épisode, tout humain celui-là, et plein de beauté : on voit le roi Clotaire, vaincu par la grandeur morale du saint qu'il avait envoyé en exil, s'agenouiller devant lui et lui demander pardon. Ce mélange de puérilité et de noblesse ne choquait alors personne. Pour les hommes de ce temps, rien n'est grand, rien n'est petit,
puisqu'en toute chose se révèle la présence de Dieu.

VIII

Dans la France du Nord et de l'Ouest, Picardie, Normandie et Bretagne, les églises romanes ne nous offrent plus rien aujourd'hui qui rappelle les saints de ces provinces. Au XIIe siècle, la sculpture monumentale fut un art à peu près étranger à ces régions; ce n'est que par la fresque et par le vitrail qu'elles purent célébrer leurs grands évêques et leurs saints abbés, mais fresques et vitraux ont disparu. Le Maine a cependant conservé un magnifique vitrail du XIIe siècle consacré à l'apôtre de la province, saint Julien. Au Mans, aucun saint ne fut plus profondément vénéré que saint Julien. En 1117, lorsque Foulques, comte d'Anjou et du Maine, assista, avec sa femme et son fils, à la consécration de la cathédrale du Mans, la cérémonie terminée, il prit entre ses bras son fils, encore enfant, et le déposa sur l'autel de saint Julien. Il voulait signifier par là qu'il le mettait sous la protection du grand saint du Mans, tout-puissant auprès de Dieu. On ne s'étonne donc pas de rencontrer dans la cathédrale du Mans un grand vitrail consacré tout entier à la vie de saint Julien. Saint Julien entre au Mans et y multiplie les miracles. Il y fait jaillir une source avec son bâton, prodige sans doute symbolique; il convertit et baptise le gouverneur de la cité romaine, puis il l'envoie évangéliser Angers. Chaque fois, l'apôtre est représenté avec la mitre et la crosse de l'évêque. Son œuvre achevée, saint Julien meurt paisiblement, et les anges emportent son âme au ciel. Ainsi, tandis que le Midi célébrait les saints par la sculpture et l'orfèvrerie, le Nord les célébrait par le vitrail. Nous n'avons encore rien dit de la Touraine et de son illustre saint Martin. C'est que saint Martin n'était pas le saint d'une province, mais de la France tout entière. Tours, il est vrai, était le centre de son culte, et c'est à Tours que les artistes avaient raconté pour la première fois sa vie. Un petit poème de saint Paulin de Périgueux prouve qu'au Ve siècle on avait peint ses miracles dans la fameuse basilique qui
contenait son tombeau. Au VIe siècle, une autre église de Tours, la cathédrale, fut décorée de fresques consacrées à son histoire : elles étaient expliquées par des vers de Fortunat, qui se sont conservés; déjà, l'on voyait saint Martin donnant au pauvre la moitié de son manteau. La cathédrale de Tours a été rebâtie; quant à la basilique de Saint-Martin, plusieurs fois reconstruite, elle a été détruite par la Révolution. Les peintures et les vitraux qu'on y voyait perpétuaient peut-être le souvenir des anciennes fresques. Aujourd'hui, Tours ne conserve aucune oeuvre consacrée à saint Martin
qui soit antérieure au XIIIe siècle. Mais ce que Tours ne nous montre pas, nous le trouvons ailleurs. Il y avait en France des centaines d'églises dédiées à saint Martin : aussi ne s'étonne-t-on pas de rencontrer son image dans toutes les régions. L'oeuvre la plus ancienne qui le représente a été découverte dans les Pyrénées, mais sur le versant espagnol : c'est un panneau peint qui se trouvait jadis dans l'église de Montgrony en Catalogne, et qui est aujourd'hui au Musée épiscopal de Vich. L'oeuvre est si
archaïque par le dessin et par le costume qu'elle peut remonter au XIe siècle. Aujourd'hui, aucun monument consacré à l'histoire de saint Martin n'est plus ancien. C'est là que nous voyons pour la première fois le saint coupant en deux son manteau pour en donner la moitié au pauvre; geste que l'art répétera de siècle en siècle, et que l'artiste catalan avait reçu du passé. Saint Martin porte le long bouclier et la lance
à gonfanon des barons de la Chanson, de Roland. Un autre compartiment nous montre le saint sur son lit de mort; il est étendu sur le dos, car il n'avait pas voulu se coucher
sur le côté pour calmer ses souffrances : « Laissez-moi, disait-il, contempler le ciel »; au-dessus les anges emportent son âme. Cette histoire de saint Martin s'inspirait sans aucun doute d'un original français; elle nous prouve que la gloire du saint avait pénétré jusqu'au fond des vallées les plus reculées. Il était naturel de rencontrer saint Martin dans les grandes abbayes, car c'est lui qui avait créé les premiers monastères de la Gaule, et c'était lui qui était le véritable ancêtre de tous les moines d'Occident. Aussi un chapiteau du cloître de Moissac lui est-il consacré. On y voit, près de la porte d'Amiens qui s'ouvre entre deux tours, le jeune cavalier couper son manteau et en donner la moitié au pauvre. Aussitôt le Christ apparaît entre deux anges : les bras ouverts, il étale largement le manteau et semble l'offrir à l'admiration du ciel. C'est alors que saint Martin entendit en rêve ces paroles prononcées par le Christ : « Voyez Martin, il n'est encore que catéchumène, et il m'a revêtu de son manteau. » Mais c'est dans les régions évangélisées par saint Martin, dans le Nivernais et la Bourgogne en particulier, que l'on doit s'attendre à rencontrer son image. Là, son souvenir est resté plus vivant qu'ailleurs; le Morvan est plein de sources miraculeuses qu'il a fait jaillir, et les paysans montrent encore les empreintes laissées par le pied de sa mule sur la pierre. C'est pourquoi plusieurs chapiteaux de l'église de Garchizy dans la Nièvre étaient consacrés à saint Martin. Ces chapiteaux sont aujourd'hui au Musée archéologique de Nevers : on y voit l'épisode du manteau que suit l'apparition du Christ. L'abbaye de Vézelay, qui s'élève aux confins du Morvan, avait gardé le souvenir du grand missionnaire des pays éduens. Un chapiteau de la nef raconte un épisode de sa légende qui avait déjà été peint au VIe siècle dans la cathédrale de Tours. Saint Martin veut faire couper un pin sacré auquel les païens rendaient un culte; les païens y consentent à la condition que le saint s'expose à la chute de l'arbre. Saint Martin n'hésite pas, mais, au moment où le pin va l'écraser, il lève la main et l'arbre tombe à l'opposé. Le pin de Vézelay, stylisé avec un art naïf, ressemble à une plante des tropiques. Telles sont, disséminées dans nos provinces, les quelques
œuvres consacrées aux saints qui ont échappé au temps. Ce n'est plus qu'un reflet, un dernier rayon du soir qui laisse une lueur à la façade de l'église, un éclair dans le vitrail.

L'Église de France eut donc le culte de son passé, et de bonne heure elle demanda à l'art de le célébrer. Elle était fière de ses saints qui formaient une suite ininterrompue,
une longue frise héroïque. Les siècles les plus stériles, ceux qui n'avaient eu ni écrivains, ni poètes, ni artistes, avaient eu leurs saints. Ces siècles n'étaient pauvres qu'en apparence, puisque, au sentiment des hommes d'alors, les saints étaient les chefs-d'oeuvre de l'humanité. Comme Pascal, l'Église du moyen âge mettait l'ordre de la charité bien au-dessus de l'ordre de l'intelligence; c'est pourquoi le moindre ermite,
qui dans la solitude avait réussi à se vaincre lui-même méritait a ses yeux d'être éternisé par l'art. L'athlète avait été l'idéal de la Grèce antique, l'ascète devint l'idéal des temps nouveaux. Au Moyen Age, les hommes de notre race, quand ils ont été grands, ont toujours été des ascètes; toujours ils ont méprisé le voluptueux Orient, ses harems, ses parfums, la courbe enchantée de ses arabesques. Cette longue lutte de l'Occident contre l'Orient, c'est la lutte éternelle de l'esprit contre les sens. La plus haute expression du moyen âge, c'est le soldat qui se sacrifie, le moine qui prie, le saint qui
foule aux pieds la nature. Le saint, voilà le vrai héros de cet âge; c'est lui qui par l'enthousiasme qu'il excitait soulevait l'humanité, l'arrachait à son limon. Encore aujourd'hui, le peuple qui sent instinctivement ce qu'il y a d'extraordinaire dans la sainteté, conserve la mémoire des saints. Les paysans du Bourbonnais, qui ont oublié les noms des rois de France, connaissent encore saint Patrocle et saint Marien, qui vivaient du temps de Grégoire de Tours. Et nous aussi, le nom d'un saint inconnu nous intéresse, le lieu où il a vécu nous émeut, l'ermitage, la cellule, le monastère habités par le saint conservent quelques chose de religieux, comme chez les anciens ces lieux sacres qu'avait touchés le feu du ciel.

EMILE MALE
¯

EXPLICATION TRÈS CURIEUSE
DES
ÉNIGMES ET FIGURES HIÉROGLYPHIQUES, PHYSIQUES,

QUI SONT AU GRAND PORTAIL
DE L'ÉGLISE CATHÉDRALE ET MÉTROPOLITAINE DE NOTRE-DAME DE PARIS
Par

LE SIEUR ESPRIT GOBINEAU DE MONTLUISANT

Le Mercredi 20 de May 1640, veille de la glorieuse Ascension de notre Sauveur Jésus-Christ, après avoir prié et sa très-sainte Mère Vierge en l'Eglise Cathédrale Métropolitaine de Paris, je sortis de cette belle et grande et considérant attentivement son riche et magnifique Portail, dont la structure est très exquise, depuis le fondement jusqu'à la sommité de ses deux hautes et admirables Tours, je fis les remarques que je vais expliquer.Je commence par observer que ce Portail est triple, pour former trois principales entrées dans ce superbe Temple, seul corps de bâtiment, et annoncer la Trinité de Personnes en un seul Dieu, sous lesquelles par l'opération de son Esprit Saint, son Verbe s'est incarné pour le salut du monde dans les flancs de la Vierge sainte ; Symbole des trois principes célestes en unité, qui sont les trois principales clefs ouvrantes les principes [c'est-à-dire le Mercure, le Soufre et le Sel], et toutes les portes, les avenues et les entrées de la nature sublunaire c'est-à-dire, de la sève universelle, et de tous les corps qu'elle forme, et produit, conserve ou régénère.

1° La figure posée au premier cercle du Portail, vis-à vis l'Hôtel-Dieu, représente au plus haut, Dieu le Père, Créateur de l'Univers, étendant ses bras, et tenant en chacune de ses mains une figure d'homme, en forme d'Ange. Cela représente que Dieu Tout-Puissant au moment de la création de toutes choses qu'il fit de rien, séparant la lumière des ténèbres, en fit ces nobles Créatures que les Sages appellent Ame Catholique, Esprit universel, ou Souffre vital incombustible, et Mercure de vie; c'est-à-dire, l'humide radical général, lesquels deux principes sont figurés par ces deux Anges [on a déjà eu l'occasion de montrer que cet humide radical, que Fulcanelli appelle métallique, ne peut être autre chose que des « chaux » métalliques qui sont, initialement incorporées au Mercure sous forme de sulfates].

Dieu le Père les tient en ses deux mains, pour faire la distinction du souffre vital, son huile de vie, qu'on appelle Ame, et du Mercure de vie ou humide premier né, qu'on nomme Esprit, quoique ce soit termes synonymes, [il est remarquable de voir comment Gobineau emploie des termes parfaitement justes pour parler du Soufre et du Mercure ; l'expression huile de vie caractérise l'état second du Mercure, dûment préparé et animé] mais seulement pour faire concevoir que cette Ame et cet Esprit tirent leur principe et leur origine du monde surcéleste, et archétypique, où est le Siège et le Trône plein de gloire du Très-Haut; d'où il émane surnaturellement et imperceptiblement pour se communiquer, comme la première racine, la première Ame mouvante et la source de vie de tous les Etres en général, et de toutes les Créatures sublunaires, dont l'homme est le chef de prédilection. Dans le cercle au-dessous du monde surcéleste, et Archétypique, est le Ciel firmamental , ou astral dans lequel paraissent deux Anges, la tête penchée, mais couverte et enveloppée.

L'inclination de ces deux Anges, la tête en bas

[St-Pierre, Fulcanelli le rappelle, fut crucifié la tête en bas ; l'hiéroglyphe céleste de Vénus peut, de même, se voir à l'endroit où il figure Aphrodite, ou à l'envers et il désigne alors ce globe crucifère que les bons auteurs ont toujours désigné comme la stibine ou mieux, l'albâtre des Sages],

nous donne à entendre, que l'Ame universelle, ou l'Esprit Catholique, ou pour mieux dire le souffle de la vertu de Dieu. c'est-à-dire, les influences spirituelles du Ciel archétypique, descendent de lui, au Ciel astral, qui est le second monde, également céleste, dit étipique, où habitent et règnent les planètes et les étoiles, qui ont leur cours, leurs forces et vertus, pour l'accomplissement de leur destination et de leurs devoirs, selon les décrets de la Providence qui les a ainsi ordonnés et subordonnés, afin d'opérer par leur ministère et leurs influences la naissance et génération de tous les Etres Spirituels et de toutes choses sublunaires, participants de l'Ame et de l'Esprit universel ; et par les deux Anges la tête en bas, et qui sont vêtus, nous est désigné, que la semence universelle et spirituelle Catholique ne monte point, mais descend toujours [la Rosée de mai est ici expressément désignée] ; et l'enveloppe dont elle est voilée dans les corps, nous enseigne, que cette semence céleste est couverte, qu'elle ne se montre point nue, mais qu'elle se cache avec soin aux yeux des ignorants et des Sophistes et n'est point connue du vulgaire.

3° Au-dessous du Firmament est le troisième Ciel, ou l'élément de l'air; dans lequel paraissent trois enfants environnés de nuages.Ces trois enfants signifient les trois premiers éléments de toutes choses, appelés par les sages principes principians, dont les trois principes inférieurs, sel, souffre, et mercure, tirent leur origine, et qu'on nomme principes principiés, pour les distinguer des premiers, quoique tous ensemble, ils descendent du Ciel archétypique, et partent des mains de Dieu, qui de sa fécondité, remplit toute la nature, mais toutes les influences spirituelles et célestes semblent être émanées des deux premiers Cieux, avant de s'unir à aucun corps sensible ; ce qui fait que toute émanation spirituelle du premier Ciel ou de l'Archétypique, est appelée Ame, et celle du second Ciel, ou Firmament est nommée Esprit.

 Ce sont donc cette Ame et cet Esprit, invisibles, et purement spirituels, qui remplissent de leurs vertus actives et vivantes le troisième Ciel, appelé Elémentaire, ou le Ciel typique, parce que c'est le séjour des Eléments, qui mus, ordonnés et subordonnés par les deux mondes supérieurs, agissent à leur tour, par commotion et mouvement, descendant, ascendant, progrédiant, et circulaire, sur tous les Etres inférieurs et sur toutes les Créatures sublunaires composes de leurs qualités mixtes, qu'on nomme les quatre tempéraments.

Or cette Ame émanée dans le monde Elémentaire, qu'elle remplit de sa lumière vivifiante est appelée souffre et l'esprit émané du monde, ou Ciel firmamental, qui est en principe l'humide radical de toutes choses auquel ce souffre ou la chaleur lumineuse est attaché et adhérant, comme à son premier et dernier aliment, est appelé Mercure, ou l'humide premier né, qui est l'humide radical de toutes choses et, par conséquent indivisible du souffre ou âme éthérée, laquelle étant un feu céleste lumineux et chaud, ne peut subsister sans son union intime et indissoluble avec cet esprit, son humide radical; mais cela est au-dessus de la portée des insensés [Gobineau parle ici de la nécesssité que le métal soit réincrudé, c'est-à-dire dissous au sein du Mercure].

 Cette Ame et cet Esprit unis, comme une seule et même essence, partant du même principe, et ne faisant pour ainsi dire qu'une même chose, puisqu'ils ne sont divisibles que par l'esprit, ne peuvent être vus ni touchés, mais seulement conçus et compris par les sages Investigateurs de la Science de Dieu et de la Nature ; cette Ame et cet Esprit ne nous deviennent sensibles, que par le lien indivisible qui les attache l'un à l'autre : or ce lien qu'on nomme sel [il faut bien ici différencier le lien entre les deux extrémités du vaisseau de nature, qu'il s'agit de conjoindre, du lien du Mercure dont nous parlons dans la section des blasons alchimiques], est l'effet de leur union et amour mutuel, et un corps spirituel qui nous les cache et les enveloppe dans son sein comme ne faisant qu'une seule et même chose de trois ; ce que les gens pétris de préjugés n'entendront et ne comprendront point.

 Ce Sel est celui de la Sapience, c'est-à-dire la copule et le ligament du feu et de l'eau, du chaud et de l'humide en parfaite Homogénéité, et qui est le troisième principe [Gobineau dévoile ici un secret de haut lignage : il s'agit de ce que nous avons appelé le sel harmoniac sophique]; il ne se rend point visible ni tangible dans l'air que nous respirons, où il est subtil et fluide, et il ne manifeste son corps visible que par son séjour et dépôt en résidu dans les mixtes, ou composés d'éléments qu'il fixe et encloue, en se mêlant intimement au Souffre, Mercure et Sel, qui sont des principes naturels à lui fort analogues, et Constituteurs des Créatures Sublunaires.

 Le Sel céleste est le principe principiant, qui procède de l'Ame et de l'Esprit, c'est-à-dire de leur action ou pour mieux dire, du souffre et du Mercure éthérés ; il est le moyen et le milieu, qui les unit dans leur action, pour se traduire en fluide dans le souffre, le Mercure, et le Sel de nature sous un corps visible et tangible, lors appelé par les Sages de toutes sortes de noms tantôt Sel Alkali, Sel Armoniac, Salpétre des Philosophes, et tantôt de mille surnoms symboliques, ou à son origine ou à sa descension, ou bien à son essence corporelle, pour prouver qu'étant l'Ame, I'Esprit et le Corps universel de la Nature, il est susceptible de toutes sortes de détermination, qu'il plaira à la Nature ou à I'Artiste de lui donner selon l'Art de la Sagesse [c'est, au fond, ni plus ni moins qu'un bi-silicate qui est ici désigné ; le secret réside dans le dosage exact des éléments accessoires, tels la chaux, la silice et l'agent minéralisateur proprement dit].

 Mais il ne faut point perdre de vue, que c'est du monde surcéleste, que la source de la vie de toutes choses tire son origine et que cette vie est appelée Ame ou Souffre [c'est l'oxyde qui assure la teinture de la pierre ; par conséquent, c'est lui qui l'oriente mais la nature de la terre vitrifiable ou cimolienne intervient aussi] ; que du monde céleste ou firmamental procède la lumière, qu'on appelle Esprit, autrement humide, ou Mercure ; et que cette Ame et cet Esprit remplissant de leur fécondité vivifique le troisième monde appelé Elémentaire, leur action énergique et élastique perpétuellement circulaire [cette idée de cercle, fondement de l'art si l'on se réfère au serpent Ourobouros, a trait au caractère permanent, constant, du feu secret], y porte et produit le Feu tout divin, analogique de chaleur et d'humide radicaux, mais qui est imperceptible et invisible, non vulgaire ni grossier; et par lequel, comme Feu de vie, par essence nourrissant, Réparateur Conservateur et non Destructeur, les choses deviennent palpables et de solidité corporelle [on a dit dans une autre section que l'action du dissolvant, loin de dissoudre, consiste au contraire à joindre les deux chaux en une accrétion ; c'est l'apparition de Délos]. D'où il faut conclure que ces trois substances, Souffre, Mercure et Sel universel, célestes, sont les vrais principes principians de la génération de toutes choses, et que ces trois substances naturelles et sublunaires dans lesquelles les trois premières se rendent infuses et corporifiées, sont les véritables principes principiés, constituteurs de la génération des Corps, par l'encloument et la fixation qu'ils font des qualités élémentaires, propres à la température des individus selon les Décrets de la Providence.

C'est ce qui a fait dire aux Sages que le Sel spirituel, qui sert d'enveloppe et de lien au Souffre et au Mercure célestes, était la seule et unique matière dont se fait la Pierre des Philosophes ; et que comme ces trois substances identifiées par leur union, n'en faisaient qu'une, la Pierre n'était point faite de plusieurs choses, mais d'une seule chose composée, trine en essence, unique de principe, et quadrangulaire de quatre qualités élémentées [cette forme n'est autre que le rhomboèdre tronqué, forme presque cubique offerte par la Pierre]; cependant cela se doit entendre à certains égards, qui puissent tomber sous l'intelligence de l'esprit et des sens en même temps ; c'est-à-dire, qu'il ne faut pas s'imaginer que la matière de la Pierre triangulaire et quadrangulaire des Sages, se doive ni puisse prendre en son état de fluide aérien invisible ; mais il faut entendre qu'il est nécessaire de chercher et trouver cette même matière de fluide aérien, infuse et corporifiée en une terre Vierge des enfants de la Nature, qui en sont les mieux partagés, les plus hautement et copieusement favorisés et en qui les premiers et les seconds Agents unis ont plus de dignité, d'excellence et de vertu. Car la racine du Souffre des Sages, de leur Mercure et de leur Sel, est un Esprit céleste, Spirituel et surnaturel, qui par le véhicule de l'air subtil se porte et se condense en air, ou vapeur épaissie et fait une matière universelle et l'unique de toute procréation.

4° Au-dessous de ces trois enfants placés dans l'élément de l'air est le Globe de l'Eau et de la Terre, sur laquelle paissent des animaux comme un mouton, un taureau, etc.
Le Globe de l' Eau et de la Terre nous désignent les Eléments inférieurs, tels que l'Eau et la Terre, dans lesquels le Feu céleste et l'humide radical très subtil, par le moyen de l'air, s'insinuent jusqu'au profond, et y circulent incessamment par leur propre vertu, sous la forme invisible d'un Esprit surcéleste et de vie, qui, selon David, Psaume18, v. 6, 7, 8, a son Tabernacle dans le Soleil ; d'où par sa vertu énergique, comme un Epoux, qui se lève de sa couche nuptiale, il s'élance pour parcourir la voie des Eléments ainsi qu'un superbe Géant [allusion aux Titans ètitanoV, qui désigne de la chaux] qui mesure son élan et ses forces dans la vaste étendue de l'air ; sa sortie est du plus profond des Cieux; de là il procède, pénètre partout, et ne laisse rien privé de la chaleur de sa présence vivifiante ; de l'expression même de Salomon en son Ecclésiastes, c. 1, v. 5, 6. C'est ce même Esprit divin qui éclaire l'immensité de l'Univers, qui se poussant et repoussant par vertu énergique et élastique en circuit du centre à l'excentre et en la capacité de tout, retourne sans cesse et perpétuellement dans les cercles qu'il décrit par son mouvement et son cours éternel et universel.

C'est ainsi que cet Esprit universel, par le feu et l'humide, nourrit les poissons dans l'eau, les animaux sur la terre, et les insectes en terre ; qu'il fait végéter les Plantes, et produit les Minéraux [cf. la section sur le Mercure et les blasons alchimiques] et Métaux au Centre et dans les entrailles de la Terre ; pourquoi son influence circulante, comme Feu vital uni à l'humide radical par le Sel de Sapience, est la semence universelle, qui se congèle, et dont la vapeur s'épaissit au centre de toutes choses : cette semence spirituelle opère dans les différentes matrices, selon leurs dispositions, leur nature, leur genre, leur espèce, et leur forme particulière, pour produire toutes les générations, en y mettant le mouvement et la vie.

Quant aux deux animaux paissant, qui sont le mouton et le taureau, c'est pour nous dire qu'au retour du Printemps, et dans les deux premiers mois, qui sont mars et avril, auxquels ces deux animaux dominent en qualité de signes du zodiaque, la matière universelle créative, et récréative, étant plus amoureuse de la Vertu céleste [allusion à la rosée de mai] qui y infuse ses propriétés vitales copieusement, est plus abondante, vertueuse et exaltée, par conséquent aussi plus qualifiée qu'en un autre temps [voir l'emblème de Limojon de St-Didier].

5° Au-dessous de ces deux animaux on voit un corps comme endormi et couché sur son dos, sur lequel descendent de l'air deux ampoules, le col en bas, l'une adressant vers le cerveau, et l'autre vers le cœur de cet homme endormi. Ce corps ainsi figuré n'est autre chose que le sel radical et séminal de toutes choses, lequel par sa vertu magnétique [c'est l'Aimant de Philalèthe ; il s'agit du dissolvant qui assure la « disparition » initiale des chaux métalliques : c'est l'une des putréfactions de Le Breto] attire à soi l'âme et l'esprit Catholiques, qui lui sont homogènes, et qui sans cesse s'insinuent et se corporifient dans le sel, ce qui est représenté par les deux ampoules ou fioles, contenants la chaleur et l'humidité naturelle et radicale ; et ce sel ayant ainsi attiré et corporifié ces deux substances en lui, leur union spirituelle lui ayant acquis de prodigieux degrés de force, il se pousse et pénètre dans le point central des individus; et d'universel que ce sel étoit, il se particularise, se corporifie, se détermine, et devient rose dans le rosier, or dans l'argent vif minéral, or dans l'or, plante dans le végétal, rosée dans la rosée, homme dans l'homme, dont le cerveau représente l'humide radical lunaire, et le cœur signifie la chaleur naturelle solaire, véhiculée dans le premier, comme sa matrice.

6° Au côté droit des mêmes trois enfants, un peu plus bas que l'air, est un escalier, par lequel monte à genoux un homme ayant les mains jointes, et élevées en l'air duquel élément il descend une ampoule, ou fiole ; et au haut de l'escalier, il y a une table couverte d'un tapis, avec une coupe dessus. L'escalier nous apprend qu'il faut s'élever à Dieu, le prier à genoux, de coeur, d'esprit et d'âme, pour avoir ce don, qui est le Magistère des Sages, et vraiment un très grand don de Dieu [assonance en grec entre le soufre et Dieu è la matière première est un sulfate], une grâce singulière de sa bonté ; et qu'il ne faut pas être en des lieux bas [c'est tout le contraire ; l'un des éléments nécessaire à la préparation du feu secret ne se trouve que dans les caves et les étables], pour prendre la première matière universelle qui contient la forme végétale et générale du monde ; l'ampoule qui descend de l'air signifie la liqueur, ou rosée céleste, qui découle premièrement de l'influence surcéleste, se mêle ensuite avec la propriété des astres, et d'icelles mêlées ensemble, il se forme comme un tiers entre terrestre et céleste ; voilà comme se forme la semence et le principe de toutes choses.

 Pour la coupe, qui est sur la table, elle représente le vase, avec lequel on doit recevoir la liqueur céleste [c'est le vase dit « de nature » è reportez-vous à Cybèle].

7° Au côté gauche de cette même Porte de ce grand portail, sont quatre grandes figures de grandeur humaine, qui chacune ont un symbole sous leurs pieds. La première, la plus proche de la porte, a sous ses pieds, un dragon volant, qui dévore sa queue [symbole classique è l'une des gravures du De lapide philosophorum de Lambsprinck exprime parfaitement l'allégorie]. La deuxième, a sous ses pieds un lion, dont la tête est contournée vers le Ciel, ce qui lui lait faire un effort de contorsion de col

[cette contorsion présente un intérêt hermétique majeur : le détour se dit en grec eligmoV dont l'une des acceptions est circonvolution, mouvement de rotation ; combien de fois n'avons-nous pas rencontré ce mouvement d'enroulement, ce resserrement. Nous donnons cet extrait de nos blasons alchimiques qui permettra au lecteur la facile identification de notre Sujet en sa première matière :

Proche du filet, la spirale se retrouve sur des pierres celtiques, et l'on peut citer, avec R. Viel, la « pierre omphaloïde de Turoe, comté de Galway », laquelle « date de l'époque de la Tène (300 ans av. J.-C.) ». Ces spirales représentent une réserve de forces au plan hermétique. La cabale alchimique permet d'y déceler des indices de corps astringent, qui  « resserrent ou étreignent », possèdent une odeur stiptyque et sont fréquemment associés à certains symboles : ici, c'est Bacchus qui est mentionné et le sujet des Sages est comparé au lierre (considéré comme la partie minérale) ; là, c'est un arbre scié et étreint qu'on peut observer, c'est-à-dire un arbre mutilé, qui est comparé au métal dans un des caissons du château de Dampierre-sur-Boutonne (DM, II). Le lierre (hedera) enguirlande le thyrse (javelot) de Bacchus ; il peut être comparé aux serpents enroulés en spirale autour du caducée de Mercure et marque le caractère astringent ou styptique d'une substance. Dans le même ordre d’idée, on peut rapprocher par analogie le lierre d'une plante souple qui sert à lier la vigne (ampelosdesmos) et notamment la couleuvrée (vitis alba).
Enserrer, lier, c'est bien cette action qu'exprime le personnage de la FIGURE XVI où l'on peut deviner un vautour expirant. Ce vautour ou aigle a la même valeur que le dragon expirant que l'on voit sur l'une des quatre Vertus, au tombeau des Carmes, que l'on peut visiter dans notre section des Gardes du corps de François II ; cette Vertu, c'est la Force. Ce corps astringent, nous l'avons nommé de nombreuses fois et il est habituellement associé au blé. On l'extrait de la terre de Samos ou de la terre de Chio et il représente la résine de l'or. Ce corps s'apparente au 1er Mercure ou sel des Sages].

La troisième, a sous ses pieds la figure d'un ridicule qui se rit et se moque des figures qu'il regarde, et qui semblent se présenter à lui [il s'agit du «  fou » de l'oeuvre : c'est le Mercure]. Et la quatrième foule aux pieds [la terre à foulon est d'un intérêt hermétique majeur è reporte-vous à la section sur la matière première] un chien et une chienne, qui tous s'entremordent vigoureusement et semblent vouloir se dévorer l'un et l'autre [il s'agit, bien sûr du chien de Corascène et de la chienne d'Arménie d'Artéphius : ce sont les deux natures métalliques de l'oeuvre].

Par le dragon volant qui dévore sa queue est représentée la Pierre des Philosophes, composée de deux substances, ou mercure d'une même racine, et extraite d'une même matière ; l'une desquelles substances est l'esprit éthéré, humide et volatil, et l'autre est le souffre, ou sel de nature corporel, sec et fixe, lequel par sa nature et siccité interne [alkali fixe ètartre vitriolé] dévore sa queue glissante de dragon, c'est-à dire dessèche l'humidité, et la convertit en Pierre aidé par le feu constant dans la concavité de l'esprit éthéré humide, siège de l'âme Catholique. Le lion courbé qui regarde vers le Ciel dénote le corps, ou sel animé, qui désire reprendre avec avidité son âme et son esprit.

La figure du ridicule représente les faux Philosophes et Sophistes ignorants, qui s'amusent à travailler sur des matières hétérogènes, et ne rencontrent rien de bon, se moquent de la Science hermétique, et disent qu'elle n'est pas vraie, mais purement illusoire, en quoi ils offensent la vérité Divine qui a mis ses plus riches trésors dans le sujet.  Le chien et la chienne, qui s'entre-dévorent que les Sages appellent chien d'Arménie, et chienne de Corascène, signifient que le combat des deux substances de la Pierre, est d'une seule racine; car l'humide agissant contre le sec se dissout, et ensuite le sec agissant contre l'humide, qui auparavant avait dévoré le sec est englouti par le même sec et réduit en eau sèche [il s'agit du Mercure philosophique], et cela s'appelle prendre dissolution de corps et congélation de l'esprit; ce qui est tout le travail de l'oeuvre hermétique.

8° Au dessous, de ces grandes figures, dans un pilier proche le Portail, est la figure d'un Evêque [c'est le conducteur ou « l'appariteur » de l'oeuvre : on peut l'assimiler au sel harmoniac sophique], chargé de sa mitre, et de sa crosse, en posture méditative. Cet Evèque représente, Guillemus Parisiensis ou bien celui qui a fait construire ce magnifique Portail, et qui y a fait mettre les Enigmes. [cet évêque a fait l'objet d'un commentaire détaillé de Fulcanelli dans son Mystère des Cathédrales ; cf. Cambriel]

9° Au pilier, qui est au milieu, et qui sépare les deux portes de ce Portail, est encore la figure d'un Evêque, lequel met sa Crosse dans la gueule d'un dragon, qui est sous ses pieds, et qui semble sortir d'un bain ondoyant, dans lesquelles ondes parait la tête d'un Roi, à triple Couronne qui semble se noyer dans les ondes, puis en sortir derechef [c'est l'allégorie semblable à celle de l'apparition de Délos qui consacre le début de l'accrétion du Soufre à la Terre] .

Cet évêque représente le sage Artiste Chimique, lequel fait par son art congeler  la substance volatile du dragon mercuriel qui veut s'élancer et sortir du vase qui le contient sous la forme d'eau ondoyante, c'est-à dire qu'il est excité à ce mouvement interne par une douce chaleur externe ; et ce Roi couronné est le souffre de nature, qui est fait par l'union physique et excentrique des trois substances homogènes mais séparées par l'Artiste de la première matière Catholique, lesquelles trois substances sont l'esprit éthéré mercuriel, le sel sulfureux, ou nitreux, et le sel alkali ou fixe, et qui conserve son nom de sel entre les trois principes principians et les trois principes principiés, qui tous trois étaient contenus dans le chaos humide, dans lequel ce Roi se noye, et semble demander du secours, qu'il n'obtient de l'Artiste alchimique qu'après s'être dissous dans le dissolvant de sa propre substance, qui lui est semblable, après quoi il aura mérité d'être satisfait en sa demande, c'est-à dire qu'après qu'il a été englouti, et fait eau par son eau [il s'agit d'une substance qui se dissout dans son eau de cristallisation], il se congèle par sa chaleur interne, excité par son sel, ou sa propre terre; par laquelle opération simple, naturelle, et sans mélange, se fait le Magistère des Sages, qui n'est autre chose que dissoudre le corps, et congeler l'esprit, après avoir mis dans l'oeuf cristallin le poids convenable de l'une et l'autre substance, qui sont triple et une ; car tout le travail de l'Œuvre est de monter et descendre successivement, qu'on appelle ascension et descension, jusqu'à ce que de quatre qualités élémentées contraires, homogénéisées, l'on fasse trois principes constitutifs et ordonnateurs; que des trois l'on fasse apparaître le feu et l'eau, le sec et l'humide, que de ces deux l'on fasse un seul parfait pétrifié en sel, qui contient tout; le Ciel et la terre, en épuration et cuisson des hétérogènes.

10° Au Portail à main droite, l'on voit les douze signes du Zodiaque, divisés en deux parties, en ordre, selon la science de Dieu et de la nature. En la première partie du côté droit, sont les signes du Verseur d'eau, et des Poissons qui sont hors d'oeuvre ; ce qu'il faut remarquer et noter. Puis en oeuvre sont le Bélier, le Taureau, et les Jumeaux au dessus l'un de l'autre. Et au dessus des Jumeaux est le signe du Lion, quoique ce ne soit pas son rang, car il appartient à L'Ecrevisse, mais il faut considérer cela comme mystérieux. Les signes du Verseau et des Poissons sont mis hors d'oeuvre ; c'est expressément pour faire connaître qu'aux deux mois de janvier et février, on ne peut avoir, ni recueillir la matière universelle [c'est purement allégorique ; les signes zodiacaux sont des hiéroglyphes célestes, voila tout]. Pour le Bélier et le Taureau, ainsi que les Jumeaux qui sont en oeuvre, L'un au-dessus de l'autre, et qui règnent au mois de mars, d'avril et de mai, ils apprennent que c'est dans ce temps là que le sage Alchimique doit aller au devant de la matière, et la prendre à l'instant qu'elle descend du Ciel et du fluide aérien, où elle ne fait que baiser les lèvres des mixtes, et passer par dessus le ventre des Bourgeons et des feuilles Végétables qui lui sont sujettes, pour entrer triomphante sous ses trois principes universels dans les corps, par leurs portes dorées, et y devenir la semence de la rose céleste ; ce qui s'entend par symbole. Alors son amour lui fait jeter des larmes qui ne sont rien plus que lumière, de laquelle le Soleil est le père, revêtu d'une humidité de laquelle la Lune est la mère, et que le vent de l'Orient apporte dans son ventre ; dans cet état vous l'avez universelle et non déterminée, d'autant que vous l'aurez prise auparavant qu'elle soit attirée par les aimants des individus spécifiques, et qu'elle soit spécifiée en iceux.

Au regard du signe du Lion, qui est posé au-dessus de Jumeaux, où devrait être placée l'Ecrevisse, c'est pour faire entendre qu'il y a quelque changement, et une altération des Saisons, contenue dans le travail manuel et physique de la Pierre, et qui n'est pas si propre pour recevoir et prendre la matière, qu'au temps où règnent le Bélier, le Taureau, et les Jumeaux ; car en été pendant les grandes chaleurs, par l'ardeur et la pompe du Soleil qui exhale beaucoup d'humide radical pour sa substance, son entretien et sa nourriture, il se fait une grande dissipation et déperdition des esprits, et la plus grande partie de la matière incrémentale et nourricière des corps est convertie dans la spiritualité aérienne, dont on ne peut la retirer, que par le moyen de l'aimant physique et phylosophique qui lui est homogène, c'est-à-dire par une température assaisonnée d'humide, qui est son aimant et son enveloppe.

 11° Au bas, un peu au-dessus du Verseau, et vis-à-vis des Poissons, l'on voit un Dragon volant qui semble regarder seulement et fixement, Aries, Taurus et Gemini, c'est-à-dire les trois figures du Printemps, qui sont le Bélier, le Taureau et les Jumeaux.Ce Dragon volant qui représente l'esprit universel et qui regarde fixement les trois figures, semble nous dire affirmativement que ces trois mois, sont les seuls dans le cours desquels l'on peut recueillir fructueusement cette matière céleste, que l'on appelle lumière de vie, laquelle se tire des rayons du Soleil et de la Lune, par la coopération de la nature, un moyen admirable, et un art industrieux, mais simple et naturel.

12° Proche et derrière ce Dragon volant, est figuré un Ridicule, et derrière ce Ridicule est un chien assis sur le dos, sur lequel chien est posé un oiseau. Ce Ridicule est un moqueur de la science hermétique en question, un rieur méprisant des opérations des vrais Sages et Philosophes ; et de tous leurs Partisans qu'il estime insensé, tout aveuglé qu'il est dans l'erreur vulgaire.La figure de ce Chien posé sur le dos sur lequel est un oiseau, nous fait entendre que ce chien est le corps, ou le sol de la matière universelle, fidèle à l'Artiste qui sçait la travailler, et l'oiseau représente l'esprit de la même matière lequel y est posé, cette matière est connue communément sous les noms de souffre et de mercure, le sel pour tiers et copule ou liaison y étant compris, comme indivisible des deux, qui sont le corps et l'esprit.

13° En la seconde partie de ce Portail, au côté gauche et tout en haut, est le signe de l'Ecrevisse, à la place dit Lion qui est de l'autre côté du même Portail.Sur la même ligne de l'Ecrevisse, sont la Vierge [symbole de la matière primitive, Virga paritura], la Balance et le Scorpion [symbole des deux natures métalliques, par son venin èioV], tous quatre en oeuvre. Et ensuite le Sagittaire [qui a des rapports avec Artémis] et le Capricorne [dont Saturne-Cronos est le maître] qui sont hors d'oeuvre. Par l'Ecrevisse ainsi placée en haut, est témoigné que la matière Lunaire a été bien abondante, mais que l'abondance n'en est plus si grande, à cause que les Pleïades qui sont des constellations humides, s'en retournent. La Vierge, la Balance et le Scorpion sont les derniers degrés de chaleur pour la coction de l'oeuvre Phylosophique ; car en ce temps Automnal, la maturité des fruits se parfait par le Sagittaire et le Scorpion, qui sont hors d'oeuvre ; ce qui démontre leur frigidité et siccité, et que ces qualités, conçues par l'esprit intelligent, sont néanmoins invisibles extérieurement en la matière de notre Magistère.

14° A droite et à gauche de ces douze Signes du Zodiaque, qui représente le cours de l'année, sont quatre figures représentant les quatre Saisons, qui sont l'Hiver, le Printemps, l'Eté, et l'Automne. Par ces quatre Saisons, il est donné à entendre que le Composé phylosophique doit être entretenu en l'athanor, ou fourneau de cuisson pendant un an et plus, ce qui fait dix mois hermétiques, par les degrés d'une chaleur, qui soit douce, et proportionnée au commencement, et puis un peu plus forte sur la fin, et cependant linéaire comme pour faire colorer et mûrir les fruits qui se recueillent pendant trois de ces Saisons, à savoir, le Printemps, l'Eté, l'Automne ; moyennant quoi l'Artiste acquiert la Médecine au blanc, Symbole de la Vierge mère et Pascale, qu'il peut arrêter et prendre au cercle citrin, comme Médecine lunaire universelle parfaite, ou bien continuer sans interruption de travail, et pousser jusqu'au rouge parfait qui en est produit comme Médecine solaire universelle et souveraine, accomplie au temps de sa naissance, marquée solennellement par les Sages.

15° Au-dessous de huit grandes Figures du même Portail, dont il y en a quatre de chaque côté, et tout en bas, sont démontrées les vraies opérations, pour faire et parfaire la Médecine universelle, que le Curieux apprenti de cette Oeuvre divine pourra expliquer, ou se les faire expliquer, mais jamais ne les expliquer par écrit.

16° L'on voit six Figures au Portail du milieu, au côté droit. La première est un Aigle [symbole complexe, l'un des plus difficiles à appréhender ; l'Aigle a rapport avec la sublimation], la seconde un Caducée entortillé de deux serpents [double Mercure], la troisième un Phénix qui se brille, la quatrième un Bélier, la cinquième un homme qui tient un Calice, dans lequel il reçoit quelque chose de l'air ; et la sixième, est une Croix au trait quarté, où il se voit d'un côté sur la ligne transversale une larme, et sur la même ligne de l'autre côté, un calice en cette forme...[...]
Ces six Figures ne sont pour ainsi dire, que la répétition de ce qui a déjà été dit tant de fois sous différentes figures et différents termes, qui sont inépuisables, par le peu de travail et la simplicité de la matière, qui ne se fait néanmoins connaître qu'aux vrais Philosophes, et non pas aux Sophistes ignorans, quelques recherches qu'ils en fassent, parce que leur intention est mauvaise et orgueilleuse et que ce Don divin n'est accordé qu'aux simples et humbles de coeur, méprisés du reste du monde insensé, et assez malheureux en son aveuglement, pour ne se repaître que de fables transitoires.

1° L'aigle, par exemple, ne signifie autre chose que l'Esprit universel du monde ; et c'est l'Oiseau d'Hermès, et le mouvement perpétuel des Sages.

2° Le Caducée entortillé de deux serpents, enseigne que la Pierre est composée de deux substances, quoique tirée du même corps, et extraite de la même racine ; ces deux substances néanmoins semblent être contraires eu apparence, l'une étant humide et l'autre seiche [sèche], l'une volatile et l'autre fixe ; mais elles sont semblables en essence et en effets, parce qu'elles sont deux de nature, venant d'un seul principe, quoiqu'elles ne soient réellement qu'une.

3° Le Phénix qui se brûle, et renaît de ses propres cendres, nous apprend que ces deux substances, après avoir été mises dans l'oeuf philosophique en l'Athanor, agissent longtemps et naturellement l'une contre l'autre, qu'elles se livrent de furieux combats avant de s'embrasser et de s'unir ; que la guerre est longue avant de recevoir le baiser de paix ; que les flots de la Mer philosophique sont longuement agités par le flux et reflux, avant que la bonace et le calme puissent succéder et régner; enfin que les travaux sont bien grands auparavant que ces deux substances se réduisent finalement en poudre ou souffre incombustible ; car cela ne se peut faire qu'après que l'humide Mercuriel a été consommé, ou plutôt desséché par la grande activité du chaud et sec interne de la substance corporelle du Sel de nature, et que tout le compost est fait semblable. C'est après ces brûlemens, ou calcinations philosophiques, que cette poudre, le vrai Phénix des Sages, car il n'y a point dans le monde d'autre Phénix que celui-là, étant dissout derechef dans son lait virginal, retourne à reprendre naissance par soi-même, et de ses propres cendres, et continue ainsi à renaître et mourir, tout autant de fois qu'il plaît à l'Artiste bien expérimenté.

4° Le Bélier signifie toujours le commencement de la Saison, en laquelle il faut prendre la matière, d'autant qu'en ce temps d'effervescence l'humide igné de l'Esprit universel commence à monter de la Terre au Ciel ; et à descendre du Ciel en terre, bien plus copieusement qu'en toute autre saison, et avec plus de vertu, surtout dans les minières, ou le Soleil a fait au moins trente révolutions, et non plus de trente-cinq, où la Nature minérale commence à rétrograder, pour tendre à sa dépravation et à son déclin.

5° L'homme qui tient un Calice, dans lequel il reçoit quelque chose de l'air, nous démontre qu'il faut sçavoir ce que c'est que l'Aymant fait par l'homme qui a la puissance d'attirer du Ciel, du Soleil et de la Lune par sa vertu magnétique, l'Esprit Catholique invisible, revêtu de la pure substance humide éthérée, influence quintessenciée, pour de ces deux en faire une troisième substance participant des deux autres individuellement, et qui chacune contienne en soi indivisiblement le Sel, le Souffre, et le Mercure universels, lesquels tous trois se congèlent et s'unissent au centre de toutes choses.

6° Quand à la Croix, ou sur les lignes transversales, par les côtés d'icelle sont posés une larme et un Calice, c'est pour nous faire entendre, que ce n'est que la Nature élémentaire, c'est-à-dire les quatre Elemens croisés [le thème de la Croix est omniprésent en alchimie ; elle figure le creuset et aussi l'inconnue X de Fulcanelli], figurés par les quatre lignes de la Croix : en effet, c'est par le moyen des quatre Elemens que les vertus et les énergies célestes descendent et s'insinuent incessamment sur tous les Corps visibles et sublunaires. Les deux lignes, haute et basse, représentent le Feu céleste, et les deux autres lignes traversantes signifient l'air et l'eau. La larme, qui signifie l'humide de l'air, pleine de feu vital, et posée sur la ligne de l'air et de l'eau, doit être reçue dans le Calice, qui signifie le récipient, et non pas dans les basses vallées, quoi qu'elle soit partout, mais sur des lieux qui s'avancent dans l'air, où elle ne sera pas prise en quantité par ceux qui n'ont pas la connaissance de l'aimant physique et philosophique.

7° Proche de la Porte à droite, il y a d'un côté cinq Vierges sages, qui tendent leur Calice, ou coupe vers le Ciel, et reçoivent ce qui leur est versé d'en haut par une main qui sort d'une nuée ; et au-dessous s'y voient et s'y remarquent les vraies opérations Alchimiques et Philosophiques. Ces cinq Vierges représentent les vrais Philosophes Hermétiques amis de la nature, et qui ayant connaissance de l'unique matière, dont elle se sert, pour travailler dans la magnésie des trois règnes, animal, minéral, végétal, reçoivent du Ciel cette même et unique matière dans des vases convenables ; et suivant les opérations de la même nature, ils travaillent physiquement, et après avoir fait le Mercure, ou dissolvant Catholique, ou le Sel de nature, qui contient son souffre, les unissent au poids requis, les cuisent en l'Athanor, et finalement en font l'Elixir Arabique.

8° De l'autre côté dudit Portail gauche, on voit cinq autres Vierges, mais folles, en ce qu'elles tiennent cette Coupe renversée contre terre, ainsi elles ne peuvent, ni ne veulent y recevoir la Lunaire que la nature leur présente, et qui est si copieuse, qu'après avoir largement satisfait à tout l'Univers, il y en a encore plus de reste que d'employée ; et cela se fait en tout, et se distribue en tous tems, et incessamment, parce qu'ainsi l'a ordonné, l'a voulu et le veut le Très-Haut, auquel gloire immortelle, ineffable, soit rendue sur la terre et aux Cieux. Par les Vierges folles, la Coupe renversée, sont représentées une infinité, et presque innombrables d'opérations fausses des Sophistes, des Chimistes, des ignorans et désespérés, ainsi que des impitoyables Souffleurs et Charlatans [il s'agit en fait de l'expression double du symbole de Vénus, Aphrodite ou Gaïa].Ces cinq Vierges folles signifient ces faux Philosophes, qui ne demandent que hercelets Sophistiques, comme rubifications, dealbations, cohobations, amalgamations, etc. qui méprisent la lecture des bons Auteurs, et qui par cette raison ne peuvent avoir connaissance de la vraie matière, quoiqu'il est vrai de dire qu'ils la portent toujours avec eux jusque dans leur sein, sur eux, alentour d'eux, sous leurs pieds, et qu'ils la respirent continuellement ; mais leur orgueil trop présomptueux leur fait en mépriser la méditation et la recherche, s'imaginant stupidement dans leurs grossières Sophistications et leurs faux préjugés, la trouver sans la connaissance de la belle et pure nature interprète des Mystères divins.

En effet, cette matière est si commune, et d'un si vil prix, que le pauvre en a autant que le riche, et elle est néanmoins si précieuse, que chacun en a besoin, et ne peut s'en Passer ; Car l'on ne peut être, vivre, et agir Sans elle.Tout ce que j'ai remarqué en ce triple Portail est à la vérité, beau et ravissant, mais ce sont lettres closes, Enigmes et Hieroglifs pleins de mystères pour les ignorans, et choses mystiques pour les sçavans pour lesquels j'ai donné cette Explication qu'ils doivent comme Curieux, considérer exactement, en levant les voiles qui leur cachent l'entrée aux secrets Cabinets de la chaste Diane Hermétique. Je n'ai point lu dans les Cartes antiques de Paris, ni de cette Cathédrale, pour savoir le nom de celui qui a été le Fondateur de ce Portail merveilleux ; mais je crois néanmoins, que celui qui a foumi ces Enigmes Hermétiques, ces symboles et ces Hieroglifs mystiques de notre Religion, a été ce grand Docte et pieux Personnage Guillaume Evéque de Paris, la profonde Science duquel a toujours été admirée avec raison des plus sçavans Philosophes Hermétiques de l'Antiquité, et particulièrement du bon Bernard Comte de Trevisan, sçavant adepte Philosophe Hermétique ; car il est certain, que cet Evêque a fait et parfait le magistère des Sages. Or, comme il a plu à la divine Providence de me faire la grâce de me donner quelque lumière et connaissance de la Philosophie, Physique et Hermétique, j'ai tellement travaillé qu'après un long temps, beaucoup de soins, de lecture des bons Livres, et avoir fait quantité de belles et bonnes opérations, j'ai, enfin trouvé la triple clef par son essence, pour ouvrir le sanctuaire des Sages, ou plutôt de la sage Nature de sorte que je peux fidèlement expliquer les Ecrits paraboliques et énigmatiques des Philosophes anciens et modernes, ainsi que j'ai expliqué assez clairement les Enigmes, Paraboles et Hieroglifs de ce triple Portail ; ce que je fais très volontiers, pour donner contentement aux sçavans amateurs de cet Art divin, et exciter la curiosité des nouveaux Candidats, qui aspirent à la connaissance de la Science naturelle et hermétique .

http://www.rosamystica.fr/enigmes-du-grand-portail-de-nd-de-paris/enigmes-du-grand-portail-de-nd-de-paris,r249110.html

30 avril 2015

L'expérience personnelle - Piège de l'orgueil spirituel

new age

Que recherche donc l'adepte du New-Age ?
Une expérience initiatique, et l'accès à la Connaissance qu'on lui a fait miroiter dès l'abord.
N'oublions donc pas que cette recherche est stigmatisée dès le récit de la Genèse, en Adam et Eve : "Tu peux manger de tous les arbres du jardin. Mais de l'arbre de la connaissance du bien et du mal tu ne mangeras pas, car le jour où tu en mangeras, tu deviendras passible de mort." (Gn 2, 16-17). "Vous serez comme des dieux" réplique le serpent (Gn 3, 5).
Saint Maxime écrivait : "L'homme a voulu s'emparer des choses de Dieu sans Dieu, avant Dieu, et non selon Dieu."

Pour l'adepte du New-Age, l'accès au "salut" se fait par la gnose, par un savoir supérieur réservé à une élite, et qui plus est, par un savoir… qui se paye (il faut bien acheter les livres, payer les stages, etc.) ! Curiosité, attrait de l'insolite, du merveilleux, voir des pouvoirs occultes, mais aussi attrait pour une certaine "facilité", dans la mouvance de "L'Alchimiste" de Paolo Cuelho : pour se réaliser pleinement en ce monde, il suffit de suivre sa "légende personnelle", répondre à ses propres désirs, à ses propres envies…

Sur le site internet "Emeraude" (http://www.chez.com/emeraude2/), site "dédié à notre Mère, la Terre", on lit par exemple les lignes suivantes (communication télépathique de "Lumière de l'Etre" reçue en 1997) : "J'aimerais vous rappeler, bien-aimés frères et sœurs de l'humanité, que la Réalisation Christique ne se fait pas seulement par la foi dans le Divin. Elle se fait également par l'intérêt et l'action de l'esprit vers la Connaissance. La Foi guide le pèlerin sur la route qui le conduit à la demeure du Père et la Connaissance révèle les indications de cette route. Pendant toute mon incarnation de Jésus, J'ai cultivé une détermination à vouloir m'ouvrir à des réalités qui m'étaient totalement étrangères. Cette attitude a grandement contribué à nouer mon esprit de la Connaissance et a amplifié ma Foi de la grandeur des affaires du Père." S'ouvrir à la Connaissance : nous retrouverons cet appel dans tous les mouvements se réclamant du Nouvel Age.

La déification de la volonté est également monnaie courante. Les livres de Paolo Coelho sont assez représentatifs dans ce domaine, lui qui fait dire par exemple à l'un de ses personnages dans "L'Alchimiste" : "Il y a une grande vérité en ce monde : qui que tu sois et quoi que tu fasses, lorsque tu veux vraiment quelque chose, c'est que ce désir est né dans l'Ame de l'Univers."

 

Détailler le processus et les étapes des différents niveaux initiatiques que doit, au sein du mouvement New-Age, parcourir l'homme pour atteindre le sommet de son accomplissement spirituel, n'offre que bien peu d'intérêt. Contentons-nous donc de jeter un œil sur cet aperçu donné sur le site internet de Shakti, une "revue encyclopédique de spiritualité" (http://perso.wanadoo.fr/revue.shakti/). On y apprend que les initiations sont au nombre de cinq pour le règne humain (pour le règne végétal, demandez à votre fleuriste), et qu'elles s'échelonnent sur une dizaine de vies (ce qui représente tout de même plusieurs siècles !), pour aboutir enfin à la dernière incarnation. Mais avant d'accéder à la première initiation, le prétendant aura du vivre des dizaines de milliers de vies, pendant lesquelles il aura progressé péniblement, surmontant les épreuves, et se libérant peu à peu de son karma... Et dire que nombreux sont ceux que cette théorie attire !

Voyons donc ce qu'il en est de ces initiations :
Première initiation : "maîtrise du corps physique" ; deuxième initiation : "maîtrise du corps astral" ; troisième initiation, "maîtrise du corps mental" ; quatrième initiation : "lorsque le lien avec l'âme est total"; cinquième initiation : "lorsque la personnalité est totalement imprégnée par l'âme et l'Etincelle divine. L'individu est alors un Maître de sagesse ou Maître ascensionné". Et voilà la perspective offerte à l'adepte : devenir peu à peu son propre maître, jusqu'au titre de "Maître de sagesse"… Voilà sans doute l'une des principales raisons du succès de ces théories, qui mettent tristement en valeur l'immensité de l'orgueil humain…

Vous vous demandez où vous en êtes personnellement de ce parcours ? Ne vous faites pas trop d'illusions : selon le "Maître" de Benjamin Creme (in "La mission de Maitreya"), sur 6 milliards d'êtres humains actuellement en "incarnation" : 6 millions (soit un pour mille) sont aux portes de la 1ère initiation – "c'est-à-dire ayant commencé à prendre contact avec leur âme", 850.000 ont atteint la 1ère initiation, 250.000 la 2ème, 3.000 ont la 3ème, et 450 seulement la 4ème … Et Benjamin Creme de préciser que le total des âmes s'élève à 60 milliards ! Nous avons donc toutes les chances de nous trouver dans la première catégorie ( Réjouissante perspective !

"Il y a eu de faux prophètes dans le peuple, comme il y aura aussi parmi vous de faux docteurs, qui introduiront des sectes pernicieuses et qui, reniant le Maître qui les a rachetés, attireront sur eux-mêmes une prompte perdition. Beaucoup suivront leurs débauches, et la voie de la vérité sera blasphémée, à cause d'eux. Par cupidité, au moyen de paroles trompeuses, ils trafiqueront de vous, eux dont le jugement depuis longtemps n'est pas inactif et dont la perdition ne sommeille pas." (2 P 2, 1-3)

Les précisions qui suivent prêteraient à sourire, si le sujet n'était pas aussi grave. Elles figurent dans un livre d'Alice Bailey (dont nous reparlerons) : "Les rayons et les initiations", et reprises on ne peut plus sérieusement sur le site de Shakti déjà cité.
On y apprend que parmi les "Grands Initiés" se trouvaient Abraham et Moïse (difficile de les passer sous silence…), et qu'auraient atteint la "troisième initiation" les personnalités suivantes (accrochez-vous…) :
Dans le domaine de la politique : Jeanne d'Arc, Francis Bacon, Abraham Lincoln, Winston Churchill, Mao Tsé Toung, Willy Brandt ; pour ce qui est de la littérature : Shakespeare ; pour la poésie : Milarepa (Tibet), qui était en fait un "Instructeur spirituel" (petit cachotier !) ; pour la peinture : Michel-Ange, Rembrandt, Raphaël, Titien, Véronèse, Gréco, Rubens (Léonard de Vinci avait quant à lui atteint la quatrième initiation !) ; et dans le domaine de la musique : Bach, Mozart et Beethoven. Mozart - qui est soit dit en passant déjà revenu (n'oubliez pas la "loi" de réincarnation) - aurait été dans sa vie suivante un luthier aimé de tous ceux qui le rencontraient, et aurait atteint également cette quatrième initiation !

On trouve également dans les 3 tomes de "La mission de Maitreya" de Benjamin Creme, de nombreuses précisions sur les fondateurs du mouvement New-Age, ainsi que sur quelques personnalités historiques, ou attachées au christianisme… précisions toujours reprises sur le site de Shakti. Par exemple :
Helena Petrovna Blavatsky (1831-1891), co-fondatrice de la Société théosophique : "Ame de 1er rayon, personnalité de 2ème rayon, corps mental de 1er rayon, corps astral de 6ème rayon". On ne peut être plus précis !
Selon le Maître de Benjamin Creme, elle a été Cagliostro (1743-1795) dans sa vie précédente. et s'est réincarnée depuis 1984 dans un corps masculin à Leningrad (et devrait devenir un Maître à la fin de sa vie présente)…
Helena Roerich (1879-1947), occultiste russe : "Ame de 1er rayon, personnalité de 2ème rayon"... Comme H.P. Blavatsky, c'était aussi une disciple directe du Maître Morya...
Jeanne d'Arc (1412-1431)... "Le Maître de Benjamin Creme a indiqué que les voix qu'elle entendait étaient les messages du Maître Hilarion, sur le même rayon d'âme qu'elle, c'est-à-dire le 5ème. De rayon de personnalité 1, elle était bien armée pour le commandement. Jeanne d'Arc est maintenant un Maître resté sur Terre."
Ste Thérese d'Avila (1515-1582)…
Auraient atteint la 2ème initiation : Ste Marie, mère de Jésus : "Ame 6, personnalité 6, corps mental 2, corps astral 2. Elle a eu ensuite des incarnations non médiatiques avant de devenir Maître (5ème degré). Elle est maintenant un Maître du 6ème degré, à l'origine des "apparitions" de la Vierge, et de miracles tels que des larmes ou du sang coulant de statues ou d'icônes."
Annie Besant (1847-1933) : "Ame 7, personnalité 1, avec sous-rayon 7, donc très attachée à l'aspect rituel" (oh la vilaine !)… mais aussi Marie Curie (1867-1934), Indira Gandhi (1917-1984), ou Maria Callas (1923-1977) !
Auraient "commencé la polarisation mentale (à mi-chemin entre la 1ère et la 2ème initiation)" : Elisabeth 1ère (1533-1603), Catherine la Grande (1729-1796), George Sand (1804-1876), Sarah Bernhardt (1844-1923), Marguerite Yourcenar (1903-1987), Françoise Dolto (1908-1988), Greta Garbo (1905-1990)... mais aussi Ste Thérèse de Lisieux (1873-1897) ou Marthe Robin (1902-1981) !
Ces précisions sur le cheminement spirituel des âmes est pour le moins édifiant. Ce qui suit ne l'est pas moins….

Je vous propose de rester sur le site de Shakti, décidément inépuisable en ce domaine, lui qui a puisé aux sources "inspirées" que sont Benjamin Creme et Alice Bailey, pour nous offrir l'organigramme de l'actuelle Hiérarchie Spirituelle, qui préside aux destinées de notre monde...
Au sommet, se trouve le Seigneur du Monde, Sanat Kumara. Son bras droit (son premier ministre en quelque sorte) est le Christ. Mais attention, il ne s'agit pas de Jésus. Ce Christ est Maitreya (son nom oriental), "Maître du 7ème degré, Maître des Maîtres de 6ème degré chargés des ashrams sur les sept rayons, lesquels sont les chefs d'autres Maîtres de 6ème et 5ème degrés." Vous suivez ? Bien, poursuivons donc la revue de détail.
Voici quelques noms de "Maîtres" restés sur terre (ils seraient une soixantaine à ce jour), pour notre plus grand bien, avec leur situation spirituelle (il est important de savoir à qui l'on parle) et leurs antécédents : "Maître Morya ou Maître M., du 6ème degré sur le 1er rayon, qui fut l'apôtre Pierre ; Maître Koot Houmi (Hoomi) ou Maître K.H., du 6ème degré, sur le 2ème rayon, qui fut Jean le bien aimé ; Maître Sérapis du 6ème degré sur le 4ème rayon ; Maître Hilarion du 6ème degré sur le 5ème rayon, qui fut Paul de Tarse ; Maître Jésus, 6ème degré, sur le 6ème rayon, qui fut Jésus de Nazareth puis Apollonius de Tyane ; Maître Rakoczi, ou Maître R., du 6ème degré sur le 7ème rayon, qui fut Francis Bacon puis le comte de Saint-Germain ; et enfin le Maître qui fut Marie, la mère de Jésus, du 6ème degré sur le 6ème rayon, qui est à l'origine des apparitions de la Vierge Marie."
Au-delà du ridicule d'une telle énumération, retenons la gravité d'une telle récupération des principaux piliers du christianisme… Songeons que tout cela est pris très au sérieux par de nombreux adeptes, prêts à gober tout ce qui leur est donné en pâture, pourvu qu'ils aient l'espérance d'une élévation spirituelle, et l'accès à la Connaissance… Et il y a là de quoi frémir…

"Auparavant doit venir l'apostasie et se révéler l'Homme impie, l'Etre perdu, l'Adversaire, celui qui s'élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu'à s'asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu..." (2 Th 2, 3-4)

"Sa venue à lui, l'Impie, aura été marquée, par l'influence de Satan, de toute espèce d'œuvres de puissance, de signes et de prodiges mensongers, comme de toutes les tromperies du mal, à l'adresse de ceux qui sont voués à la perdition pour n'avoir pas accueilli l'amour de la vérité qui leur aurait valu d'être sauvés..." (2 Th 2, 9-10)

 celle des humains particulièrement obtus et fermés aux révélations présentes), ce qui nous laisse encore quelques siècles devant nous pour progresser…
Le New-Age propose à l'adepte "d'élargir sa conscience". Il trouvera en même temps mieux-être personnel et accès à la Connaissance.
Quelques techniques de base lui sont proposées pour cela : méditation, relaxation, yoga, sophrologie…
Le danger de la contemplation narcissique y est évident. Est-il besoin de préciser que la sérénité naturelle induite par ces techniques (yoga, zen, etc.) - qui provoquent la dissolution de la conscience personnelle - n'a rien à voir avec la Paix surnaturelle de l'Esprit ? Celle-ci ne nécessite pas un recours à des "techniques" humaines pour être accueillie. Et il n'y a pas plus de yoga chrétien qu'il n'y a d'oraisonhindoue ou bouddhiste. Par ailleurs, les sensations du corps éprouvées lors de ces séances de "relaxation" sont volontairement ou non confondues par les pratiquants avec de soi-disant phénomènes spirituels…

Le New-Age ayant largement puisé dans les philosophies bouddhiste et hindouiste les éléments constitutifs de ces techniques de méditation, il semble important d'étudier succinctement mais précisément ce qu'il en est véritablement en Orient.


Le Bouddhisme tout d'abord.

Pour le bouddhiste, la vie en ce monde est douleur. La seule quête spirituelle possible consiste donc à s'en échapper.
Dans son premier sermon à Bénarès, Siddharta Gautama devenu Buddha (= éveillé) dira qu'il faut arracher les hommes à la souffrance, le seul moyen efficace pour parvenir à ce but étant l'extinction du désir : "L'extinction du désir, l'extinction de la haine, l'extinction de l'illusion (causes ou fruits du désir), cela, ô moines, est appelé l'absolu. [...] Ne te laisse pas abuser, Ananda, la vie est une longue agonie. [...] N'attendez rien des dieux impitoyables... Attendez tout de vous-mêmes, en n'oubliant pas que chaque homme crée sa prison, et que chacun peut acquérir un pouvoir supérieur à celui d'Indra lui-même." (Indra est le Roi des dieux dans le védisme-hindouisme). L'homme étant défini comme son propre maître, c'est donc par son effort personnel qu'il supprimera la souffrance, en passant par l'extinction du désir.

Ashvaghosa, l'un des maîtres actuels du bouddhisme tibétain en France, explicite ainsi l'idée de l'impermanence des choses, et de l'illusion de la vie : "Toute existence est comme une réflexion dans un miroir, sans substance, un simple fantôme de l'esprit. [...] Les idées cessant, le monde se termine aussi [...]. Tous les phénomènes ont leur origine dans l'esprit et n'ont réellement aucune forme extérieure : c'est une erreur de croire que quelque chose est là." Rien n'existerait donc en dehors de l'esprit.

Nagarjuna, autre maître du bouddhisme en France, va encore plus loin : "L'océan du sans formes est à la base de toutes les formes... Il n'y a ni naissance ni mort, ni unité ni pluralité. Tout est illusion, tout est Vide. Cette vacuité n'est ni l'être ni le non-être, ni le néant..." Il y a là identification du Vide et de l'esprit pur, dans l'unique Réalité.

On retrouve cette approche de la Réalité bouddhique dans le Livre des Morts tibétains (Bardo-Thödol) : "Tu vas connaître la Réalité, dans l'état de Bardo où toutes choses sont comme le ciel vide sans nuages (la Sagesse du Miroir), et où l'intelligence nue et sans tache est comme une vacuité transparente sans circonférence ni centre (la Sagesse du Vide)..."
Dans ce monde d'illusion, les dieux mêmes ne sont que création de l'esprit de l'homme : "Puisses-tu reconnaître que toute apparition (toute déité) est une réflexion de ta propre conscience. [...] Puisses-tu ne pas craindre les troupes des divinités paisibles et irritées qui sont tes propres formes-pensées."

Une dernière citation permettra de situer parfaitement la pensée bouddhique relative à la nature de l'esprit. Nous l'emprunterons au Lama Denis Teundroup, disciple européen de Kalou Rinpoche, et "père-abbé" du monastère de Karma-ling (cité in "Les Racines du Monde", de Jean Denis, 1993) :
"L'enseignement bouddhique propose la compréhension de ce qui est intérieur à nous-mêmes : l'esprit. Le bouddhisme est donc ce qu'on peut appeler une voie d'intériorité. [...] Cette pratique est fondée sur la méditation, c'est-à-dire l'expérience d'une relation juste à notre vécu intérieur et extérieur, à toutes nos expériences. [...] Nous portons en nous la racine de nos conditionnements et de nos souffrances, tout comme nous portons en nous l'éveil, la nature du Buddha, l'état fondamental de l'esprit au-delà du jeu des projections de l'ego. [...]
Dans la méditation bouddhique, il n'y a plus ni sujet ni objet, mais l'expérience immédiate d'une réalité non dualiste. Car ne n'est plus l'intellect qui perçoit, mais une qualité énergétique particulière, permettant l'unification de l'esprit par la libération des projections conditionnées de l'ego.
La connaissance transcendante est la découverte de l'expérience non dualiste en laquelle l'esprit est auto-connaissant, il est le sujet et l'objet de sa propre connaissance. [...] Cette connaissance est au-delà des concepts et au-delà de toutes les formulations.
Le pur esprit irradiant en lui-même est le corps de la divinité, une luminosité vide, l'absence de toute fixation, tout comme l'expérience de la lune dans l'eau. Son mode d'être essentiel est vacuité, liberté vis-à-vis de toutes les catégories du mental. [...] Sans origine, sans fin et sans localisation spatiale, elle est immortelle, c'est l'intelligence fondamentale, la merveille des merveilles."


Ne perdons jamais de vue la différence entre ces deux termes : fusion et union, celui-ci supposant deux objets à unir, principe de la dualité.
On voit donc ici affirmée le principe de la non dualité, associé à l'état de vacuité qui caractérise la pureté acquise de l'esprit.
Nous sommes bien aux antipodes du christianisme. Mais retenons ces formulations : elles seront reprises (et déformées) par tous les gourous new-age...


L'Hindouisme ensuite.

Nous retrouvons la notion de non-dualité, mais cette fois dans l'intime identification entre le Soi (le moi profond de l'être humain, l'âtman selon le terme hindou sanskrit) et l'Esprit immortel, le Principe Unique, l'Absolu : le Brahman. L'Upanishad, écrit du VIII° siècle avant Jésus-Christ, définissait ainsi cette double "qualité" du Brahman : "Il y a en vérité deux aspects du Brahman : le corporel et l'incorporel, le mortel et l'immortel, le fixe et le mobile, le sensible et le transcendant." (2, 3, 1).

Pour parvenir à saisir cette unicité au plus profond de lui-même, l'hindou est appelé à pratiquer le yoga, discipline qui lui ouvre le chemin de l'intériorité. Shankara écrit ainsi au VIII° siècle de notre ère : "Le Soi est Brahman [...] le Soi est tout cet univers. Rien d'autre n'existe que le Soi... Je suis Brahman !" ("Shankara et le Vedanta" de Paul Martin-Dubost, Paris, Le Seuil, 1973).
Et cette identification à l'Absolu atteint son sommet dans les lignes qui suivent, extraites d'un poème de Shankara : "Je ne connais ni la mort, ni le doute, ni les distinctions de castes. Point de père, point de mère. Je n'ai jamais pris naissance. Je n'ai aucun ami, aucun parent, point de maître, point de disciple. Je suis Intelligence et Félicité pures..." (op. cit.) Etre, Intelligence et Félicité (Sac-Cid-Ananda), triple qualité du Brahman, unifié ici au Soi de Shankara.

Un autre élément de la croyance hindoue est à prendre en compte : le samsara, principe de la réincarnation. Dans la Bhagavad-Gita, Vishnu - créateur et destructeur des cycles du monde - s'exprime ainsi :"Les mondes sont assujettis aux retours [..]. Quand on sait que la durée complète d'un "jour de Brahman" est de mille éons, et de mille éons sa nuit, on connaît vraiment ce qu'est un cycle cosmique. [...] Cette multitude des êtres, lorsqu'elle est venue encore et encore à l'existence, se résorbe malgré soi, quand vient "la nuit" ; elle surgit à nouveau quand revient "le jour"." (VIII, 16-19). Cycle des mondes, cycle de la vie des êtres. Toujours dans la Bhagavad-Gita, est explicité ce retour incessant à l'existence : "En vérité, jamais ne fut le temps où je n'étais point, et plus tard ne viendra pas celui où je ne serai pas. Comme l'âme passe physiquement à travers enfance et jeunesse et vieillesse, ainsi passe-t-elle à travers les changements de corps. Le sage ne s'y trompe pas. [...] Les corps ont une fin ; l'esprit qui s'y incarne est éternel, indestructible, incommensurable. [...] A la façon d'un homme qui a rejeté ses vêtements usagés et en prend d'autres, neufs, l'âme incarnée, rejetant son corps usé, voyage dans d'autres qui sont neufs. [...] En vérité, pour qui est né, la mort est certaine et certaine la renaissance pour qui est mort..." (II, 12-13, 18, 22, 27)


Notons au passage que pour ce qui concerne la connaissance de ces vies antérieures, très en vogue dans tous les mouvements New-Age, hindouistes et bouddhistes restent extrêmement réservés. Tel le LamaDenis Teundroup déjà cité, qui rappelle que "en ce qui concerne les souvenirs des vies antérieures que prétendent avoir les êtres ordinaires, le bouddhisme demeure très réservé. Il n'est pas possible de distinguer ce qui peut être authentique de la pure affabulation ou hallucination. Dans le doute, mieux vaut traiter ce genre de phénomènes comme des projections illusoires, ce qui évite de délirer." (cité in "Les Racines du Monde", de Jean Denis, 1993).
Les Maîtres du New-Age n'étant pas des "êtres ordinaires", il est bien évident qu'ils peuvent ne pas se sentir concernés par cette prudente mise en garde...

On l'aura compris, cette perspective de réincarnations infinies n'a rien de réjouissant. Les philosophies orientales ont donc axé la quête de l'être humain sur la Délivrance de cet enchaînement (au sens strict du terme) des réincarnations. Cette délivrance est appelée moksha.
Reprenons la Bhagavad-Gita : "Les sages adonnés à la vigilance, détachés du fruit des actes, sont libérés du lien des renaissances [...]. L'homme qui, abandonnant tout ses désirs, va et vient, libre d'attachement, ne dit plus : C'est à moi, ni Je ; celui-là accède à la paix [...], ne s'égare plus [...] ; à l'heure ultime il atteint le Brahman." (II, 51, 71-72) "Ceux pour qui la connaissance détruit l'inconnaissance, pour eux la connaissance tel un soleil, illumine la réalité suprême. Tendus vers elle d'un esprit vigilant, s'identifiant à elle, ayant en elle leur fin ultime, ils arrivent à l'état où il n'y a plus de retour [...]. Le Sage, tendu vers la Délivrance, sa fin ultime, est dépris du désir, de la crainte, de la colère ; il est libéré à jamais." (V, 16-17, 27-28).

La quête spirituelle de l'oriental consiste donc à échapper à la roue des réincarnations. Au bout du voyage : le Vide pour le bouddhisme, et la fusion avec le Brahman pour l'hindouisme.

Il peut évidemment sembler étrange qu'une telle perspective ait pu trouver écho en Occident, mais comme nous avons commencé à le voir, pour masquer la lourdeur de cette loi implacable, les porte-parole du mouvement New-Age n'ont pas manqué d'arguments... tous aussi fallacieux que trompeurs.

Revenons donc à leur écoute.


Méditations Nouvel Age

L'individualisme spirituel qui caractérise ces pratiques de méditation présentées par les groupements New-Age, est toujours masqué par un vocabulaire chatoyant, qui enveloppe d'un papier cadeau rutilant ces méditations "unifiantes", censées agir pour le mieux-être de la planète tout entière. Un succédané de charité, passive, édulcorée, et de surcroît pratiquée à distance !

En voici un exemple, avec la "Méditation du Pissenlit" proposée par Daniel Meurois sur son site internet (http://pro.wanadoo.fr/bdvrevue/Pissenlit.html). On y retrouve les incontournables références au passé lointain et inconnu (les "peuples du soleil"), les termes empruntés à l'Orient ("prâna", mot qui désigne dans le monde hindouiste l'ensemble des énergies qui circulent en l'homme), et les formulations habituelles du New-Age ("ouvrez votre âme", "l'écran de votre conscience", "visualisation", "harmonie", etc.) :
"Voici une vieille façon d'agir utilisée autrefois chez les peuples du Soleil. Ce n'est pas une technique mais un moyen d'ouvrir la nouvelle ère du Don. Nous la nommons la Méditation du pissenlit. Elle voyagera à nouveau de poitrine en poitrine.
Voici : asseyez-vous à même le sol et les pieds déchaussés. Lorsque vous serez calme et relaxé, ouvrez votre âme, écoutez le silence et sentez la lumière du prana tourner autour de vous.
Ensuite, commencez à projeter sur l'écran de votre conscience la sphère duveteuse d'un pissenlit prêt à essaimer. Visualisez bien les milles graines dans toute leur perfection et chargez chacune d'elles de toutes les qualité dont la Terre a soif.
Ainsi rayonneront la graine de l'harmonie, celle de la tolérance, de l'amour inconditionnel, de la Paix et de tous les trésors qu'un cœur peut contenir et générer.
Lorsque la sphère duveteuse sera ainsi chargée de ces messages, avec votre "souffle intérieur", éparpillez-les et voyez-les se disséminer à travers les cieux des cent contrées de la Terre et y déverser leur suc..."


Cette émission à distance de "bonnes vibrations", "d'ondes harmonieuses", "d'énergie positive"… remplace ainsi avantageusement pour l'adepte du New-Age l'épuisante charité du christianisme, qui a fait se dévouer depuis des siècles auprès des plus pauvres des St Vincent de Paul, Mère Teresa, curé d'Ars et tant d'autres encore…
"Moi d'abord" : si je vais bien, le monde ira mieux, donc je ne m'occupe que de moi. Voilà ce dont on a convaincu l'adepte, qui ne doit avoir pour seule préoccupation que son bien-être, son évolution spirituelle, son destin. Et plongé dans cet égocentrisme spirituel, le "new-ager" est bien persuadé d'aimer l'humanité entière…

Par ailleurs, notez qu'au cours de cette méditation, c'est le cœur qui génère de lui-même les trésors d'amour qu'il va diffuser autour de lui… L'homme est considéré comme un petit dieu, capable de toutes les merveilles, de toutes les réalisations, de tous les "possibles". Cette auto-déification est une constante nous l'avons dit de la philosophie New-Age. Elle rejoint ici la philosophie hindouiste, qui recherche la fusion du Moi et du Soi, refusant toute idée de dualité (d'altérité), et donc d'un rapport Créateur – créature. C'est la raison pour laquelle il n'est jamais question de Dieu dans les doctrines New-Age, mais tout au plus de la "Divinité", vaste concept indéfinissable, que les différents "gourous" se gardent d'ailleurs bien de préciser davantage…

Egalement empruntée à l'Orient, une affirmation telle que "Ce que vous vivez sur terre, n'est qu'illusion", trouvée sur le site de L'éveil à la conscience (http://net.addr.com/eveil/index.htm) (dont le logo est un magnifique arc-en-ciel…). Sur ce même site, on trouve d'autres citations telles que : "Au sujet de vos croyances : Vous croyez à certaines choses mais des quantités de gens croient complètement autre chose et même le contraire. Les croyances ne sont pas la réalité. Tous ceux qui deviennent conscients découvrent la réalité." Autrement dit, votre foi ne vaut rien, puisque d'autres personnes ont une foi différente de la vôtre…

"Jésus leur dit : « Je suis le pain de vie. Qui vient à moi n'aura jamais faim ; qui croit en moi n'aura jamais soif »." (Jean 6, 35)
"« En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle »." (Jean 6, 47)
"Jésus l'a dit, il l'a clamé : « Qui croit en moi, ce n'est pas en moi qu'il croit, mais en celui qui m'a envoyé. […] Moi, lumière, je suis venu dans le monde pour que quiconque croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres »." (Jean 12, 44-46)

On y lit aussi : "La connaissance est pratique, concrète et vécue. La connaissance est l'expérience d'une certaine réalité. La connaissance vécue par l'expérience directe procure la conscience." … Comment ne pas avoir pitié de cet auteur, qui ignore que "l'amour du Christ surpasse toute connaissance" (Ep 3, 18) !

Ce même site propose tout un panel de méditations ("méditation sur l'opulence", "méditation sur la lumière dorée", "méditation avec le symbole de la pyramide"), et de nombreuses méditations suggérées par les "Etres de Lumière"… Particulièrement remarquable est la "Méditation Merkabah", qui permet, après une longue séance de "toucher de doigt" et de respirations cadencées en 7 secondes, de pénétrer dans les "vibrations de la 5° dimension" (la quatrième dimension est complètement dépassée !). mais parvenu à ce degré, "L'Energie est multipliée par mille, mais attention aux pensées, elles sont très puissantes."… Ah, la puissance de la pensée, voilà décidemment un appât bien classique, sous couvert de charabia ésotérico-magique !

Sur le site Shakti (http://perso.wanadoo.fr/revue.shakti/pres.htm), "Revue encyclopédique de spiritualité, élaborée dans le respect de toutes les religions et à la lumière des enseignements ésotériques" (mais typiquement New-Age !), il nous est proposé cette citation de Saï Baba : "Si l'homme désire transformer sa vie intérieure comme extérieure en une vie de splendeur, la méditation est la meilleure discipline spirituelle qu'il puisse adopter." Notez bien : la méditation, pas la prière. Sur ce même site, l'on nous rappelle que méditer, c'est "simplement être, sans activité, sans pensée, sans émotion." (Osho Rajneesh, in "Techniques de méditation"). Et la citation suivante de Benjamin Creme (né en 1922, l'une des références incontournables aujourd'hui du Nouvel Age), précise ce qu'il en est (in "La Transmission, une méditation pour le Nouvel Age") : "La prière dans sa forme ordinaire est l'expression d'une supplication habituellement manifestée par l'intermédiaire du plexus solaire. Dans sa forme la plus élevée, la prière est aspiration ; plus l'aspiration est élevée, plus elle fait appel à l'activité du cœur. La méditation est une méthode visant à faire passer la personnalité sous le contrôle de l'âme. Par la méditation, un pont est édifié entre le cerveau physique et l'âme". La prière, acte d'amour. La méditation, oubli du cœur. Au-delà du jargon ésotérico-new-age de l'auteur, on ne pouvait mieux résumer l'antinomie de la pratique chrétienne et de celle du Nouvel Age !
On retrouve également sur cette page internet de nombreuses allusions au "Traité sur la Magie Blanche" d'Alice Bailey, qui fait également référence dans ce milieu.

Plus instructive sur ce site est la présentation des différentes formes de méditations : "méditation Zen", "Kriya Yoga", "méditation transcendantale", "méditation de transmission", "méditation sur la Lumière", etc..
Notons au passage que le Yoga semble avoir été introduit en France dès les années 1930 par un certain Félix Guyot (1880-1960), qui venait de publier à Londres sous le pseudonyme de C. Kerneiz un ouvrage intitulé "Yoga for the West" (Rieder, London). Il publie à Paris des articles dans la revue "Le Lotus bleu" (organe de liaison de la Société Théosophique), et tient la rubrique astrologique du "Journal de la Femme". C'est à la même époque que Jean Herbert (1897-1980) fait connaître en France les "Maîtres" de l'Hindouisme. Les cours dispensés par Kerneiz rencontrent un grand succès, cours destinés comme il le déclare lui-même dans la préface de son livre "à celui qui, en désaccord fondamental avec son milieu, douloureusement insatisfait de la vie tant dans ce qu’elle lui donne de bon que dans ce qu’elle lui donne de mauvais, a ressenti l’appel de l’Absolu"… L'expression "douloureusement insatisfait de la vie" sera reprise par les marchands de stages, ateliers, conférences et initiations de tout poils, nous le verrons au chapitre "maladie-guérison".

L'on apprend donc sur ce site internet cité plus haut que dans la "Méditation transcendantale", "l'énergie provient d'un Maître de la Hiérarchie, comme Guru Dev par exemple", qu'elle a été introduite en occident par Maharishi Mahesh Yogi, et qu'elle aurait 4 millions d'adeptes dans le monde entier, dont 50.000 en France… On devient pratiquant à la suite d'une cérémonie d'initiation, au cours de laquelle est attribuée "les yeux dans les yeux" un "mantra", qui sera aussi personnel que secret… "Initiation", "secret", voilà les mots choisis pour attirer l'adepte potentiel. Mais pour compléter l'attirail, l'accès aux pouvoirs surnaturels est indispensable : "La méditation peut, selon le niveau du méditant, engendrer des phénomènes "surnaturels" décrits par Patanjali (puissance, omniscience, invisibilité, lévitation...)."

"Vous serez comme des dieux…" (Gn 3,5) !

Dans la "Méditation de transmission" signalée plus haut – "méditation de service tournée vers l'humanité dans son ensemble""L'énergie est contrôlée par les Maîtres de la Hiérarchie. Elle est disponible dès la récitation de la Grande Invocation... L'essentiel du travail est accompli par les Maîtres." Nous expliciterons cette référence à la "Hiérarchie" un peu plus loin. Qu'est-ce que cette "Grande Invocation" ? Un ersatz de prière, divisé en strophes, où l'on lit des phrases telles que "Du point de Lumière dans la Pensée de Dieu, que la lumière afflue dans la pensée des hommes""Que le dessein guide le faible vouloir des hommes, le Dessein que les Maîtres connaissent et servent""Que Lumière, Amour et Puissance restaurent le Plan sur la Terre."… Et Benjamin Creme de conseiller, en récitant la Grande Invocation,"de visualiser le Bouddha pour la 1ère strophe, le Christ pour la seconde et une boule de lumière blanche pour la troisième"… On voit apparaître pour la première fois cette "Invocation" dans "L'état de disciple dans le Nouvel Age" d'Alice Bailey, livre qu'elle a rédigé comme tous les autres sous la dictée d'un "Guide spirituel invisible", Djawhal Kuhl, "grand esprit de la Fraternité Blanche Universelle". Cette invocation y est présentée comme étant appelée à remplacer le "Notre Père"… Le dernier ouvrage qu'Alice Bailey écrit sous la dictée de D.K. se termine par cet appel : "Puissent la lumière, l'amour et le pouvoir briller sur votre chemin, et puissiez-vous, en temps voulu et le plus tôt possible, vous tenir devant l'Initiateur…" "Initiation", "pouvoir" : nous sommes toujours dans ce même schéma d'une ascension forcée, où sous couvert d'amour universel, on amène l'adepte sur ce terrible chemin de l'orgueil spirituel…
Peut-être plus grave encore – mais il semble n'y avoir pas de limite dans ce domaine que nous avons abordé… - est la "Méditation sur la lumière", proposée par Saï Baba. Inutile de détailler le long déroulement de cette méditation. Signalons seulement que le méditant la conclut par cette affirmation, énoncée lentement : "Le Père et Moi sommes un, Je suis un avec Jésus et avec le Père, Je suis Divin, Je suis Celui qui Suis : SO-HAM SO-HAM SO-HAM, JE-SUS JE-SUS JE-SUS." Est-il nécessaire de rappeler que "Je suis celui qui suis" est la traduction (si tant est que cette traduction soit possible…) des quatre lettres hébraïques du Tétragramme sacré, du Nom imprononçable de Dieu, qu'entendit Moïse sur le Mont Sinaï ?
Nous reparlerons de Saï Baba un peu plus loin.

"Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la charité, je ne suis qu'airain qui sonne et cymbale qui retentit. Quand j'aurais le don de prophétie et que je connaîtrais tous les mystères et toute la science, quand j'aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien…" (1 Cor 13, 1-3) 

Signalons encore le "site de Jésus-Christ" (http://www.lechrist.net/siteFRF/sitechristFR.htm), site "purement divin", qui "vous propose de vivre un moment énergétique privilégié avec celui qui 2000 ans après fait encore parler de lui tellement son passage a marqué les humains". Sur ce site est proposée une méditation mensuelle, "face à l'est, séance vibratoire de 20 mn maximum. Ne manquez pas de rendre Grâces à la Divinité pour ce moment Divin". Le texte de la méditation est court, tel celui-ci : "Merci Christ de m'avoir libéré de toutes mes illusions", texte sous lequel est précisé que "L'année 2002 correspond à l'année chinoise, Cheval Eau, l'année la plus prospère de l'astrologie chinoise. Cette année Cheval Eau ne revient que chaque 59 ans." A noter que l'on retrouve ces même phrases sur le site internet (http://www.eileen-caddy.net/francais/) d'Eileen Caddy (voir plus loin), dont celui-ci dépend directement… Avec une adresse internet qui mentionne explicitement le Christ (lechrist.net), le piège est plus grand encore…

Quelques sites s'annonçant comme "catholiques" n'échappent pas à cette tentation du syncrétisme, et aux pièges tendus par la vague du Nouvel Age. Témoin ce site (http://perso.wanadoo.fr/famille.delaye/Textes/fenetre_ouverte.htm) où l'on trouve après des pages d'Evangile, des Psaumes et des citations de saint Jean de la Croix, d'autres textes bien loin du catholicisme, parmi lesquels "Bouddha vivant, Christ vivant" de Thich Nhat Hanh ("le bouddhisme n'est fait que d'éléments non-bouddhiques, dont les éléments chrétiens, et le christianisme est fait d'éléments non-chrétiens, dont des éléments bouddhistes" … "Quand nous sommes calmes, quand nous regardons profondément en touchant la source de notre vraie sagesse, nous touchons le Bouddha vivant et le Christ vivant en nous-mêmes et en chaque personne que nous rencontrons"…), quelques "logions" de l'Evangile apocryphe de Thomas, ou encore ce texte de Krishnamurti (1895-1986) dont nous reparlerons plus loin, concernant précisément la méditation : "Ecoutez le mouvement de vos pensées ; ne les contrôlez pas, ne les façonnez pas, ne dites pas : "Celle-ci est bonne, celle-là est mauvaise." Mais accompagnez-en le mouvement. C'est cela, la conscience dénuée de tout choix, de toute condamnation, comparaison ou interprétation, et qui n'est qu'observation. Voilà qui rend l'esprit hautement sensitif."Nous sommes là dans une autre constante du New-Age : si le Bien et le Mal sont reconnus dans l'Absolu, ils n'ont aucune existence sur le plan relatif. Voilà qui explicite un peu mieux encore le succès rencontré par cette philosophie du Nouvel Age… Mais à qui peut profiter cette suppression de la distinction entre le bien et le mal, sinon au maître du Mal lui-même…?
http://www.spiritualite-chretienne.com/Nouvel-Age/new-age2c.html

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